ASTROLOGIE ET PLANÈTES À BRUGES

Carrefour entre Mer du Nord, Baltique et Méditerranée, berceau des peintres primitifs flamands, Bruges a marqué l'économie et la culture de l'Europe. Son centre historique, inscrit au patrimoine de l’Unesco, est resté quasiment intact depuis le Moyen Âge et la Renaissance.  Avec ses ruelles pavées, ses canaux et ses ponts, son patrimoine architectural médiéval et gothique, ses palais et ses tours, Bruges est une ville unique, au charme romantique. Au fil des rues, des façades et des monuments, on y trouve de nombreuses références astrologiques, sculptées ou peintes, et surtout inscrites dans une longue histoire : le Soleil et les saisons, les planètes et les travaux de l'année, l'astrologie romaine et les signes du zodiaque.


À voir également Zodiaques en Flandre

Au 30 de la Steenstraat, au frontispice d'un bâtiment de briques rouges et pierre blanche construit en 1654, figurent des bas-reliefs qui illustrent les quatre saisons sous l'angle mythologique.
 
© De Sphæris – association Météores
 
On y voit en effet, à gauche, pour le printemps, Vénus accompagnée de Cupidon offrant un panier de fleurs, puis l'été figuré par Cérès, déesse romaine de l'agriculture, des moissons et de la fertilité, tenant une faucille et une gerbe de blé. À droite, pour l'automne, se trouve Bacchus au milieu de vignes célébrant les vendanges et le foulage du raisin, puis, pour l'hiver, un personnage âgé couvert d'un épais manteau, un panier de braises sur les genoux pour se réchauffer les mains.
 
© De Sphæris – association Météores
 
La Gruuthuse était au Moyen Âge un entrepôt d'épices et de plantes aromatiques servant à aromatiser la bière. Elle a été progressivement transformée en maison de luxe puis en mont de piété. 
C'est aujourd'hui un musée qui présente l'intérieur d'une maison de famille riche de la fin du Moyen Âge, avec des outils et ustensiles du quotidien, des meubles, de la dentelle aux fuseaux, des armes, des instruments de musique et des céramiques ainsi qu'une riche collection de tapisseries flamandes des XVIe et XVIIe siècle

Dans la cour qui mène de la Gruuthuse à l'église Notre-Dame, parmi des pierres tombales de la Renaissance, se trouvent quelques statues très particulières qui montrent des enfants aux traits et vêtements asiatiques découvrant les arts et les sciences. On en distingue deux au bas de la photographie ci-contre.

L'un deux observe une sphère céleste constellée sur laquelle est représentée une étoile filante traversant le ciel au dessus de la ceinture zodiacale.


© De Sphæris – association Météores
Le globe céleste et la bande zodiacale sur laquelle on distingue les signes des Gémeaux, du Cancer et du Lion

À l'angle de la Sint-Salvadorskerkhof et de la Steenstraat, une maison flamande de style baroque datant de 1673 abrite aujourd'hui un salon de thé. Elle se prolonge par une autre maison, plus récente.
Sur leurs façades, des bas reliefs, représentant des divinités conduisant un char, décorent les linteaux des fenêtres. Sur la façade de la Steenstraat, on en compte sept, les plus anciens, comme en témoigne leur état de conservation. Sur la place de la cathédrale Saint-Sauveur, on en voit huit, plus récents.

Certains prétendent que les sept décors de la Steenstraat représentent les jours de la semaine, ce qui est possible mais peu convaincant au regard de ordonnancement des figures qui, lues de haut en bas et de droite à gauche, indiquent la suite samedi / jeudi / mardi / dimanche / vendredi / mercredi / lundi. Par contre, il semble plus logique qu'elles soient organisées en fonction des planètes et astres qu'elles représentent, à savoir Saturne / Jupiter / Mars / Soleil / Vénus / Mercure / Lune, et de la durée de leur révolution. Cet ordonnancement représente également les sept âges planétaires que les astrologues utilisent dans leur pratique selon Ptolémée, du plus âgé (Saturne) au plus jeune (Lune). Les personnages tirant les chars, des animaux pour la plupart, orientent également vers les planètes, en tant qu'attributs traditionnels des divinités.

© De Sphæris – association Météores
Au plus haut de la façade, Saturne sur son char, muni de sa faux et dévorant des enfants.
Planète du Samedi mais aussi astre le plus éloigné du système solaire et planète de la vieillesse ultime

© De Sphæris – association Météores
Jupiter sur son char comme le suggère la foudre que le personnage tient à la main?
Les paons qui tirent le char évoquent plutôt Junon, son épouse. 
Planète du Jeudi mais aussi deuxième astre le plus éloigné et planète de la vieillesse.

© De Sphæris – association Météores
Mars au combat, mené par glaive et bouclier aux poings. Planète de la maturité et du mardi.

© De Sphæris – association Météores
Apollon conduisant son char solaire? Les chevaux et le disque solaire tenus par
le personnage semble l'indiquer. Astre de l'âge adulte et du Dimanche


© De Sphæris – association Météores
Vénus dénudée avec Cupidon, sur un char tiré par des colombes. Âge de l'adolescence et du vendredi.

vénus dénudée avec cupidon sur char tiré par colombes
Mercure muni du caducée et coiffé du pétase, sur char tiré par des coqs. Planète de l'enfance et du mercredi.

© De Sphæris – association Météores
Un personnage féminin dans un char en forme de barque tiré par deux femmes.
Il semble qu'il s'agisse de Séléné, par le croissant de Lune et la torche qu'elle tient.  La Lune, astre de l'enfance et du lundi.

La façade de la place de la cathédrale Saint-Sauveur présente huit linteaux décorés de figures allégoriques parcourant le ciel sur leur char. Ces bas-reliefs, plus récents que ceux de la Steenstraat au vu de leur style et de leur état de conservation, n'ont pas la même cohérence en termes de symbolisme et de références mythologiques.
Certes on y retrouve la figure de Neptune, muni d'un trident, sur un char tiré par deux dauphins, Apollon également, jouant de la lyre sur un char tiré par des chevaux, ou encore Cérès, portant une gerbe de blé mais sur un char tiré par des pigeons, qui ne sont pas ses attributs traditionnels.
On y voit aussi un autre figure apollinienne, plus âgée et jouant de la flute sur un char tiré par des félins, une Diane chasseresse munie d'un arc sur un char tiré par des boucs, deux figures, possiblement de Flore et Vertumne, jetant des fleurs et des fruits à partir de chars tirés par des colombes et des lièvres, et enfin une figure bacchique transportant des grappes de raisins sur un char tiré par des espèces d'oursons ailés. Non seulement ces divinités ne sont pas en accord avec leurs attributs traditionnels mais leur réunion sur la façade forme un ensemble confus de mythes juxtaposés.

© De Sphæris – association Météores
De gauche à droite, Neptune et son trident, Apollon et sa lyre, Cérès et sa gerbe de blé.


Le Stadhuis, l'hôtel de ville, de Bruges a été construit dans le style gothique tardif à la fin du XIVe siècle. L'architecture de la ville a été fortement influencée par sa façade, la travée avec des fenêtres superposées étant d'une innovation à cette époque.

À l’étage de ce bâtiment se trouve la somptueuse Gotische Saal, la salle Gothique. Celle-ci fut totalement rénovée entre 1895 et 1905 après qu'un incendie ait gravement endommagé la petite et la grande salle des échevins. Au plafond vouté figurent des références religieuses et aux murs des scènes de l'histoire. La sculpture, d'origine, y est variée et savoureuse, concrète et vivante, à la fois riche et sobre.
 
Pour soutenir l'ensemble, à la base de chaque arc et à chaque angle de la salle, des supports de pierre, des corbeaux, œuvres de Pierre Van Oost, font saillie sur les murs. Ils se distinguent par leur face intérieure moulurée et sculptée. Leur sujet ne se perçoit bien qu'à leur aplomb ; il s'agit de représentations des saisons et des mois, expressifs et rehaussés d'or, de personnages ou de scènes mythologiques illustrant des activités et des travaux temporels. Sous chaque représentation, une banderole donne, en vieux flamand, le nom de la saison ou du mois. Par leur représentation saisonnière, ces scènes sont en correspondance avec le symbolisme astrologique.

Stadhuis Brugge, par ArcheoNet Vlaanderen sur FlickR
 
Voici les douze figures qui s'ordonnent autour de la salle selon la séquence des mois de l'année. Les noms que portent ces mois ont été étudiés, en particulier, par le Baron de Reinsberg-Düringsfeld dans son ouvrage "Traditions et légendes de la Belgique" (1870). Ce qui suit reprend, pour chaque corbeau, en italique la description qu'avait réalisé Madame Andrée Louis dans l'article "La petite sculpture à l’Hôtel de Ville de Bruges" parue en 1943 dans la "Revue belge d'archéologie et d'histoire de l'art."
"Cette suite de sculptures forme un beau calendrier de pierre sur le pourtour de la salle échevinale. L'exemple en est venu de France où ces calendriers apparurent, taillés en relief sous les grandes statues de saints, aux porches des cathédrales des XIIe et XIIIe siècles, à Chartres d'abord, puis à Paris, Amiens et Reims."

Notons que le "Maend" qui termine chaque nom de mois signifie à la fois "mois" et "Lune", particularité que l'on retrouve également en allemand (Monat et Mond) et en anglais (Month et Moon). Ceci nous renvoie à la construction des calendriers, chaque mois étant, à la base, en relation avec un cycle Soleil-Lune dont la durée moyenne, d'une Nouvelle Lune à l'autre, est de 29,5 jours.
 
Force est de remarquer que l’ordonnancement des figures et des "Maend" soufre d'une grand manque de cohérence, tout en révélant, par moments, des éléments symboliques très typés et liés aux correspondances que les romains établissaient entre signes et divinités latines. Voir à ce sujet "Vestiges astrologiques au Louvre" sur De Sphæris. 
Le désouchage par exemple, se pratiquaient au Bélier alors qu'il figure à Bruges au corbeau "décembre".  L'amour galant, l'ensemble jardin/cheval/faucon, la tonte des moutons et la moisson sont anachroniques et semblent décalés de trois mois. Ils apparaissent respectivement en jancier, février, mars et juin dans la Gotische zaal alors qu'ils sont plutôt traditionnellement emblématiques des Gémeaux, du Taureau, du Cancer et du Lion. On se demande pourquoi la taille des arbres et la préparation des fagots apparaissent en septembre alors que le mois des semailles et celui de l'abattage du pord sont correctement positionnées à la Balance et au Scorpion.
Du point de vue symbolique,  le char tiré par des paons en avril évoque clairement Junon, bien que les plumes en arc-en-ciel soient celles du Verseau. Le char du mois de mai, avec ses lions et des constructions urbaines, nous parlent de Cybèle, la mère archaique qui devient, en héritière monothéiste, la Vierge Marie, dont mai est le mois ; elle peut-être considérée comme une figure du Taureau. Les figures des chars de juillet et août font plutôt penser respectivement à Vulcain (la tenaille) et à Neptune (les vagues et la tête de dauphin, les chevaux, le timon), l'un étant lié au Sagittaire et l'autre au Capricorne.
  

Sur le mur ouest de la gotische zaal, juste au dessus de la cheminée se trouve le corbeau de Hozemaend, le mois de décembre. "Un homme essarte un terrain pour faire sa provision de bois. La tunique retroussée aux manches, les pieds grossièrement chaussés, un capuchon rabattu sur son dos, la tête moulée dans une calotte, il a déposé à terre sa pioche et son courbet et s'arcboute au sol pour en arracher une énorme souche. Son chien est couché en rond près de lui. Scène bien traitée, pleine d'aisance, où la composition ne se laisse pas deviner tant est naturel le balancement des masses."
 
La présence du chien est peut-être à mettre en relation avec Diane,  divinité du Sagittaire, qui l'un des attributs est le chien.
 
© De Sphæris – association Météores

De part et d'autre du mois de décembre figurent dans les angles sud-ouest et nord-ouest les représentations de l'hiver et du printemps. Pour la première, un chat sur les genoux, une femme cuisine, à moins qu'elle n'entretienne le foyer. Cette représentation évoque celle attribuée généralement au Verseau (le repas) et aux Poissons (le repos devant l'âtre). Pour la seconde, un homme taille des branches, activité qui illustre souvent le signe du Bélier dans les calendriers traditionnels.

© De Sphæris – association Météores
"Lente", le printemps

© De Sphæris – association Météores
"Winter", l'hiver

Laumaend, le mois de janvier. "Au centre de la scène, un jeune page à parure élégante : pourpoint collant, manches bouffantes, longs cheveux ondoyants noués par une guirlande de fleurs. Il offre un bouquet à une jeune femme assise dans l'herbe, qui manipule elle-même des guirlandes de fleurs et semble attentive à ses galants propos. Au loin, vers la droite, paît un troupeau de moutons. Scène charmante, empreinte de l'esprit des cours d'amour, mais qui, appliquée au mois du gel et des neiges, est anachronique. Dans les autres calendriers, la tradition veut qu'on festoie en janvier. Parfois on se chauffe ou l'on coupe du bois. Pendant tout le Moyen-age, janvier est le mois du repos, des fêtes, des banquets."
 
© De Sphæris – association Météores

Sporkelrnaend, le mois de février. "Un jeune seigneur monté sur son cheval part pour la chasse accompagné de son valet. Le fond de la scène est occupé par un arbre aux branches sinueuses. Œuvre moins bien venue, peut-être d'un apprenti : cheval mal proportionné, au corps trop long, aux pattes trop courtes. Le cavalier est assis quasiment sur l'encolure de la bête. La figure du valet est mieux traitée avec le mouvement désinvolte des jambes et le visage levé. Les scènes cynégétiques sont fréquentes dans les autres calendriers, mais, à Chartres comme à Notre Dame de Paris, c'est au mois de mai que le baron enfourche sa monture pour la chasse au faucon."
 
© De Sphæris – association Météores
 
Lentemaend, le mois de Mars, très explicitement lié à la saison "Lente", le printemps. "Le mois de mars, qui fut pendant des siècles le premier mois de l'année, a conservé en flamand le nom de "Lentemaend", mois du printemps, que Charlemagne lui a donné en l'appelant "Lentzinmânoth."
 
"L'homme, un rustre à barbe et cheveux abondants, est assis à même le sol. Il maintient serré entre ses jambes un mouton aux pattes liées et le tond énergiquement avec de grands ciseaux en lui tenant fermement la tête. D'autres brebis attendent leur tour, l'une d'elles, à l'avant-plan, a déjà livré sa toison et broute l'herbe rare. L'homme est vêtu d'une longue blouse serrée à la taille et porte de gros chaussons laissant à nu l'extrémité des pieds. À terre, un baquet d'eau. Dans la France des cathédrales, c'est la taille de sa vigne qui occupe, en mars, le paysan. Dans les livres à miniatures des XVe et XVIe siècles, la tonte des moutons deviendra un motif fréquent, mais se placera à un autre moment de l'année : en juin pour les Heures de Notre Dame dites de Hennessy et pour le Manuscrit Mayer Van den Bergh, en juillet dans les Très belles Heures du Duc de Berry et dans le bréviaire Grimani."
 
© De Sphæris – association Météores
 
Wonnenmaend, le mois d'avril. "Drapée dans un ample manteau, le front ceint d'une couronne, la main portant une gerbe de blé, une femme imposante est assise sur un char tiré par des paons. Le fond est tapissé d'un feuillage stylisé. Le paon est l'oiseau d'Héra (Junon), mais la gerbe peut désigner Déméter (Cérès), généralement réputée déesse des moissons, ce qui n'a rien à voir avec le mois d'avril. Y a-t-il, ici encore, confusion? Nous sommes plutôt portée à interpréter comme suit le symbole : Déméter est en réalité la déesse personnifiant la terre et les forces productrices de la nature, laquelle revit en avril. Ses formes plantureuses, son brillant attelage, la touffe de blé vert, non mûr, - promesse des moissons futures - autant de détails qui conviennent au mois de renouveau où la nature redevient féconde, où la terre revêt sa parure, où les céréales, déjà poussent en épis. Ni cette sculpture, ni celles des mois de mai, juillet et août, ne sont de la même inspiration ni de la même main que les précédentes. Toutes ont un caractère plus abstrait et nettement symbolique. Que sont ces chars à quatre roues tirés par des attelages d'espèces diverses? Il faut y voir incontestablement un souvenir de l'antiquité qu'on vêtait et équipait alors à la mode du jour, sans souci d'archéologie. Ne nous étonnons pas des quatre roues, il s'agit ici d'un char d'apparat tel qu'on en voyait alors et tel qu'il en figure encore de nos jours dans les cortèges historiques ou religieux."
 
Les couleurs des plumes des paons de Junon évoquent celles de l'arc-en-ciel et le Verseau. Ce signe st opoosé à celui du Lion, là où le Soleil est maitre. QUand il se forme, un arc-en-ciel apparait toujours à l'opposé de là où se trouve le soleil.
 
 © De Sphæris – association Météores
 
Bloemaend, le mois de mai. "Figure féminine couronnée, assise sur un char attelé de deux lions, portant d'une main un sceptre, de l'autre une clef. Fond orné du même feuillage qu'à la scène précédente. Il semble qu'on ait, ici encore, un legs de l'antiquité : cette femme fait nettement songer à Cybèle, déesse de la terre et de l'agriculture, qu'on représentait de façon sensiblement pareille chez les Grecs."
 
"Bloiemand", le mois de la floraison. Une autre femme, couronnée elle-aussi, tenant une clé et un sceptre, conduit un char tiré par deux lions sur fond de terre. "Le mois de mai qui, dans presque tous les dialectes germaniques, a perdu son nom primitif pour prendre le nom latin, est connu en Flandre sous la dénomination de Bloeimaend."
 
© De Sphæris – association Météores
 
Wedemaend, le mois de juin. La seule figure dont le nom n'est pas inscrit. "On fauche le blé : à droite l'homme, vêtu d'un sarreau et chaussé de courtes poulaines, coupe les tiges à l'aide d'une faucille. La moisson, drue et bien mûre mais naïvement stylisée en gros bouquets, forme le fond du tableau. À gauche, une jeune paysanne aux formes rondes lie les gerbes dans une pose gracieuse et les dépose au fur et à mesure sur le sol. C'est le travail des champs conforme au rite millénaire. Ce groupe est un des plus jolis de la série, d'observation juste, plein de charme, jetant une note fraîche dans l'austère monument. Mais il y a un décalage d'un mois dans le moment assigné ici aux taches messicoles. La France, dès le XIIe siècle, à Fenioux, Cognac et St Denis, puis au siècle suivant, à Chartres, Paris et Amiens, fait la moisson en juillet, époque normale d'ailleurs pour les pays de l'Europe centrale. Même en Italie, à St Zénon de Vérone (XIIe siècle), Ie paysan ne coupe le blé qu'en juillet. Il n'y a guère qu'à Parme (au baptistère-reliefs du triforium, XIIe-XIIIe siècle ) qu'on moissonne en juin, et aussi à
Brescia (fragrnents de chapiteaux au Musée civique, XIIe siècle).
"
 
© De Sphæris – association Météores

De part et d'autre du mois de juin figurent dans les angles nord-est et sud-est les représentations de l'été et de l'automne. Pour la première, un homme fabrique des outils sur une enclume ou, c'est plus vraisemblable, il aiguise la faux qui lui sert à moissonner. Cette activité est généralement associée au signe du Lion. Pour la seconde, c'est le temps où l'on récolte le raisin et où on le foule. Ces activités sont souvent attribuées aux signes de la Balance ou du Scorpion.
 
© De Sphæris – association Météores
"Zomer", l'été

© De Sphæris – association Météores
"Herfst", l'automne
 
Hoimaend, le mois de juillet. "Un homme jeune aux cheveux longs, drapé dans un vêtement qui laisse découverte une épaule, est trainé dans un char à quatre roues par un attelage de chiens. Ici encore, figure symbolique dont on ne voit d'ailleurs pas le sens, ou reproduction d'un modèle établi.
 
La tenaille qu'il tient à la main fait penser à Vulcain.
 
© De Sphæris – association Météores

 
Deux autres figures, "Hoimaend" et "Ougstmaend", représentent des personnages conduisant des chars. Ceux-ci sont conduits par des hommes sans couronne. Le premier, tenant dans les mains une tenaille et un marteau, se tient sur un char à quatre roues tiré par deux chiens sur fond de flammes. Le second, plus âgé, chauve et barbu, conduit une barque tirée par deux chevaux sur fond de vagues. Le premier est juillet, le second août.
 
Ougstmaend, le mois d'août. "Un homme à barbe et cheveux longs, assis sur une sorte de conque, est entraîné dans une course à toute allure. Ses chevaux galopent, naseaux ouverts, crinière au vent, il les guide d'une main, de l'autre il tient un sceptre (ou un timon?). Serait-ce le char du soleil et ses chevaux fougueux dont le présomptueux Phaéton fit la triste expérience?"
 
Les chevaux, la mer, le timon, le dauphin qui apparait dans l'eau, font penser à une figure netunienne.

© De Sphæris – association Météores

Pietmaend, le mois de septembre. "Un bucheron au costume pittoresque, le tablier retroussé, les jambes robustes et courtes, la tête coiffée d'un capuchon, a déposé sa hache à terre. Il tate une branche d'arbre avant de la couper. À droite se trouvent déjà des fagots liés et prêts à être emportés: c'est la provision de bois pour l'hiver à venir. Nouvelle interversion, l'abatage ne se faisant que quand les arbres sont défeuillés, c'est-à-dire après septembre. À Amiens, on récolte les fruits en septembre, tandis qu'à Paris on les gaule et que, dans le manuscrit publié par Bouissounouse et dans celui de Grimani, on vendange."

© De Sphæris – association Météores

Arselmaend, le mois d'octobre. "La terre bien préparée reçoit la semence que lui jette, une manne sous le bras et le regard droit devant lui, un paysan imberbe coiffé d'un capuchon, car il marche sous le ciel moins clément et au vent déjà aigre d'octobre. C'est en ce mois également qu'à Paris, Chartres et Rampillon, le semeur accomplit son "geste auguste", tandis qu'à Amiens, c'est seulement en novembre. Au XVe siècle, dans le calendrier du duc de Berry, c'est au mois d'octobre aussi, qu'on laboure encore au pied du Louvre de Charles V, tandis qu'au premier plan l'homme "lance déjà la graine au loin".  
 
© De Sphæris – association Météores

Slagmaend, le mois de novembre. "Un couple de paysans sacrifie le porc pour les festins de fin d'année ou, plus vraisemblablement pour le saloir. La femme a retroussé ses manches, entouré sa taille d'un tablier et sa tête d'un bavolet. L'homme, les manches également retroussées et armé d'un coutelas, égorge la bête renversée à ses pieds, pendant que son épouse avance un bassin pour recueillir Ie sang. Scène prise sur le vif, pleine de mouvement et de naturel. Ailleurs, on flambe le cochon plutôt en décembre : c'est le cas dans le Bréviaire Grimani, dans le manuscrit Mayer Van den Bergh, dans celui publié par Bouissounouse et dans les Heures dites de Hennessy. II en est de même à Notre Dame de Paris. À Reims, en novembre, le paysan va faire sa provision de bois, à Paris et à Chartres, le porcher conduit son troupeau à la glandée."

© De Sphæris – association Météores
 
"Slagmaend", le mois de l'abattage. Le Baron de Reinsberg-Düringsfeld est équivoque quant à ce mois, il l'associe tantôt à novembre en évoquant "slachtmaend, le mois de tuerie" en lien avec les sacrifices, tantôt avec le mois qui précédait alors immédiatement le "louwmaend", c'est à dire janvier.