HISTOIRE DE MERCURE, OU THOT, par Antoine COURT DE GÉBELIN

"Le Monde primitif analysé et comparé..." de Court de Gébelin est une explication de la mythologie ancienne comme allégorie basée sur la vie quotidienne et des phénomènes astronomiques. Les figures personnifiées par l'allégorie sont ainsi autant de héros d'histoires merveilleuses, à l'image de Mercure qu'on appelait, selon les pays, Hermès, Thot ou encore Toutatis. Son histoire et ses caractères renvoient aux significations astrologiques de la planète, dont certaines sont aujourd'hui omises.

Allégorie sur l’invention de l’astronomie
Extrait de "Le Monde primitif analysé et comparé avec le monde moderne considéré dans son génie allégorique et dans les allégories auxquelles conduisit ce génie", 1773-1782, 9 volumes

Introduction

Si l'histoire de Saturne, dont nous venons de donner l'explication, offre une brillante allégorie, où l'on voit d'une manière à ne pas se méprendre l'invention de l'agriculture, les grandes idées que les Anciens se formaient de cet art ; si, par ce moyen, toutes les absurdités et tous les crimes que refermait ce récit, et qui noircissaient la mémoire de ce personnage, disparaissent ou se changent et autant de traits, qui complètent l'allégorie et la rendent plus piquante, plus vraie ; si cette manière de voir l’Antiquité répand sur elle plus de lumière et plus d'intérêt, il en sera de même de l'histoire de Mercure, secrétaire et conseiller de Saturne.
L'histoire du secrétaire était aussi embrouillée, aussi inexplicable en apparence que celle du maître. Pourquoi en effet eût-elle été plus claire ? Le but qu'on s'y proposait eût été manqué, mais dès le moment que l'une se débrouillait, l'autre devait n'avoir plus rien d'obscur : la lumière de celle-là devait rejaillir nécessairement sur celle-ci. Si Saturne était un personnage allégorique, son secrétaire devait en être un également : les traits allégoriques qui caractérisaient l'un, devaient être une extension, un complément de ceux qui caractérisaient l'autre.
C'est aussi ce que nous avons éprouvé, ce que le lecteur éprouvera sûrement avec nous, et qui démontrera combien est vraie notre manière d'expliquer l'Antiquité.
Agriculture était le mot de l'allégorie énigmatique que nous offrait Saturne et sa fable. Astronomie sera le mot de celle que nous offre Thot ou Mercure, armé du caducée, interprète des Dieux, conseiller de Saturne, suivi du Coq, du Chien et du Bélier, et composant 36 525 rouleaux.
Je ne parle pas de cette haute astronomie qui consiste dans la mesure des Cieux, dans les principes par lesquels on rend raison des mouvements des astres, dans les découvertes qui ont produit les sublimes théories des Modernes sur les mouvements de la Lune, des planètes et des comètes, dues à la perfection de nos instruments, et à cet esprit critique et créateur qui distingue les Modernes : quoiqu'à cet égard les Anciens aient eu des aperçus beaucoup plus considérables qu'on n'a cru, comme nous le ferons voir ailleurs, quelle qu'en ait été la cause.
Mais il s'agit ici de cette astronomie pratique, qui consiste dans la simple observation, et qui se borne à l'expérience, connaissance suffisante pour régler l'année, pour fixer le calendrier, pour le diviser conformément aux révolutions annuelles du Soleil et de la Lune ; et pour empêcher que les opérations de la campagne s'écartent trop du cours du Soleil, et ne restent ainsi sans effet.
Cette astronomie vulgaire naquit avec l'agriculture et pour l'agriculture : dès le moment qu'il y eut un agriculteur, il exista un calendrier et des astronomes ; et il ne fallut point d'efforts pour cela. Ce calendrier se trouvait dans la nature ; elle seule forma les premiers astronomes ; il ne fallait qu'ouvrir les yeux ; et qui les ouvre mieux à cet égard, qui est le plus à même de le faire avec succès, qui y est plus intéressé, que celui qui a des terres à cultiver et des récoltes à renfermer ; source de toutes les richesses, unique soutien de sa vie, et récompense de ses travaux ?
Les mois étaient déterminés par la nouvelle Lune ; l'année, par le levers des étoiles les plus remarquables ; les saisons, par le les jours où le Soleil était le plus voisin, le plus éloigné, etc. et ces moments étaient fixés par ceux où les monuments consacrés à l'astronomie, tels que les pyramides, vrais observatoires, et les obélisques, donnaient à l'heure de midi l'ombre la plus courte et la plus longue.
Dès qu'on eut mis en allégories l'invention de l'agriculture, il ne fut pas plus difficile de tourner en allégories celle du calendrier ; l'une fut une conséquence de l'autre. L'allégorie astronomique dut même plaire davantage, parce qu'elle prêtait infiniment plus par sa grande variété, et par la singularité des figures employées pour tracer le calendrier, et le peindre aux yeux de ceux qui ne savaient ou qui ne pouvaient lire. Car chaque jour, chaque mois, chaque dizaine de jours, chaque planète, chaque signe, chaque saison, etc. furent représentée sous des figures propres à chacun, et toujours relatives à l'usage dont étaient ces objets. Ces figures personnifiées par l'allégorie devenaient autant de héros d'histoires merveilleuses, source inépuisable d'où naquirent les richesses de la mythologie et de ses fables ; et dont l'allégorie de Mercure, unie à celle de Saturne, donne la clé la plus complète et la plus intéressante. 

Article premier

Des noms de Mercure et combien l'Antiquité en compta

Mercure s'appelait Hermès en grec, Thot, Thaut, Teut, Toyth en égyptien, Teutatès chez les Celtes.
On a été aussi embarrassé pour expliquer ces noms, que pour fixer l'idée qu'on devait s'en former, le nombre de Mercures que reconnaissait l'Antiquité.
Lactance en comptait quatre : "l'un fils d'Iou et de Maïa ; le second du Ciel et du Jour, le troisième de Bacchus et de Proserpine, le quatrième d'Iou et de Cyllène : celui-ci tua Argus et s'enfuit ensuite en Égypte, où il porta la connaissance des lettres."
Cicéron (l) en comptait cinq : l'un fils du Ciel et du Jour, un autre fils de Valens et de Phoronis ; celui-ci se tient sous terre et est le même que Trophonius ; le troisième est le fils d'Iou et de Maïa ; il eut Pan de Pénélope ; le quatrième est fils du Nil et les Égyptiens croient qu'il n'est pas permis de le nommer ; le cinquième, adoré par les Phénéates, est celui, ajoute-t-il, qui tua Argus, ce qui lui valut l'empire de l’Égypte ; et il donna aux Égyptiens les lois et les lettres.
L'abbé Banier reconnaissant qu'entre tous ces Mercures plusieurs étaient calqués sur le même moule, a cru éclaircir leurs histoires (2) en ne supposant que deux Mercures, l'un contemporain d'Osiris et législateur de l'Égypte : l'autre contemporain de Saturne et d'Iou, et qui régna après eux sur l'Italie, les Gaules et l'Espagne, de même que sur l'Afrique septentrionale après la mort de son grand-père Atlas. Il adopte ainsi le roman du P. Pezron sur le prétendu empire des Titans, qui a ébloui quelques savants, sans avoir rien de réel.
D'ailleurs, ce partage d'un seul être en plusieurs, n'éclaircit rien, comme nous avons déjà eu occasion de le dire ; et lorsqu'on élève ainsi un mur de séparation entre la Grèce et l’Égypte, on s'ôte tout moyen d'éclaircir les mythologies de l'une et de l'autre contrée.
M. Fourmont (3) avait très bien senti que tous ces Mercures n'étaient qu'un seul et même personnage : la preuve qu'il en allègue a son mérite ; c'est qu'ils avaient tous un même père, Iou : car le Ciel ou l'Éther est Iou ; Valens ne fut qu'une épithète d'Iou, sans doute le même que Bal des orientaux, avec la terminaison latine ; l'Égyptien passa pour fils d'Ammon, qui encore Iou, etc.
Cette observation intéressante, lorsque l'on a déjà établi l'identité de tous ces Mercures, était trop faible toute seule pour démontrer cette identité : il n'en donc pas surprenant que l'abbé Banier n'ait pas adopté à cet égard le sentiment de son confrère.
Quant à nous, fondés sur des preuves d'une toute autre force, nous partons de ce principe qu'il n'y a eu dans l'Antiquité qu'un seul Mercure ; que l’Égyptien, le Phénicien, le Grec, le Gaulois, l’Étrusque, le Romain, etc. ne sont qu'un même personnage allégorique ; qu'ils ne présentent tous qu'une seule et même allégorie relative aux mêmes objets, liée avec les mêmes faits et les mêmes personnages, née des mêmes besoins et des mêmes connaissances, consacrée aux mêmes événements.
Voyons, pour cet effet, de quelle manière les Anciens ont caractérisés Mercure.

Idées que les Anciens avaient de Mercure

Mercure joue le plus grand rôle dans l'allégorie phénicienne, transmise sous le nom de Sanchoniathon.

  1. Il y est appelé Trismégiste, le secrétaire, le conseiller de Saturne.
  2. Par son conseil, Saturne forge des armes et prend parti contre le Ciel. Lui-même tient un discours enchanteur aux amis de Saturne, et il les détermine à le seconder dans cette entreprise.
  3. Il décide Saturne à ensevelir Atlas tout vivant.
  4. Saturne l'établit roi sur l'Égypte entière.
  5. Imitant Uranus ou le Ciel, il invente les caractères sacrés, et il peint son maître avec quatre yeux et quatre ailes.
  6. Il étudia les dragons, ajoute Sanchoniathon. dans un autre fragment que nous a conservé Eusèbe à la suite du précédent ; et il leur attribua la nature divine. Il enseigna qu'ils abondaient plus en esprits que tous les autres reptiles ; qu'ils étaient d'une nature ignée ; qu'ils se mouvaient avec la plus grande vitesse, quoique privés des organes communs à tous les autres animaux : il fit voir quelles étaient les diverses formes que prenait leur corps, et tous les plis et replis avec lesquels ils s'élançaient ; que leur vie était très longue, rajeunissant plusieurs fois, et prenant toujours de plus grands accroissements jusqu'à ce qu'ils fussent parvenus à un certain nombre de révolutions, au bout desquelles ils cessaient d'être : il grava enfin toutes ces choses sur les tables sacrées. De là vint la coutume de faire entrer l'usage de ces animaux dans les cérémonies sacrées et dans les Mystères. "Nous en avons parlé plus au long, ajoute l'historien, dans les commentaires que nous avons intitulés Ethotia, et où nous avons fait voir qu'ils étaient immortels, et qu'ils se résolvaient en eux-mêmes... C'est celui que les Phéniciens appellent le bon-génie, et les Égyptiens Cneph et qu'ils peignent avec une tête d’épervier. Épéios, le chef de leurs interprètes sacrés, dont Arius d'Héracléopolis a traduit les ouvrages en grec, a dit les mêmes choses allégoriquement. Entre les serpents, dit-il, il en est un tout divin, à figure d'épervier et de l'aspect le plus agréable ; dès qu'il ouvre les yeux, tout brille de la plus vive lumière : dès qu'il les ferme, tout rentre dans les ténèbres.
    Phérécyde a traité fort au long de cette divinité phénicienne, qu'il appelle Ophion ; et des Ophionides.
    N'oublions pas, ajoute l'auteur, que les Égyptiens, pour peindre le Monde, représentaient dans la même vue un cercle rond de couleur bleue, environné de flammes qui s'en échappaient de toutes parts ; et dans le centre duquel était un serpent à tête d’épervier ; figure parfaitement semblable au Thêta
    Θ des Grecs : ainsi, tandis que le cercle représentait l'Univers, le serpent qu'il renfermait était le symbole du bon-génie.
    Ce long récit finit par ces traits remarquables : "Thaut, celui que les Égyptiens appellent Thot, illustre chez les Phéniciens par sa sagesse, donna le premier aux hommes les lois et les leçons sur la religion et sur le culte des dieux, éclairant ainsi le peuple qui jusqu'alors avait été plongé dans l'ignorance : il jeta, il est vrai, sur la théologie un voile allégorique qui la couvrait de son ombre : mais le dieu Surmurel et Thuro, appelé Chusarthis, l'éclaircirent, après une longue suite de générations."
Nous avons cru devoir insérer ici sans aucun retranchement, ce récit relatif aux instructions données aux hommes par Mercure et qui paraissent si peu propres à fixer l'idée qu'on doit se former de ce personnage, parce qu'il confirmera ce que nous avons à proposer ce sujet et qu'il en sera une démonstration, à laquelle on ne pourra se refuser. Elle fera voir combien on se trompait dans l'idée qu'on se formait ordinairement de Mercure ; et de quel secours on était privé, en négligeant ce récit faute de l'entendre. .

Idées qu'en eurent les Égyptiens

Diodore de Sicile nous a conservé l'histoire de Mercure, telle que la racontaient les Égyptiens ; morceau précieux que nous ne saurions omettre et qui appuiera tout ce que nous aurons vu, à l'occasion du Mercure phénicien.
"Osiris (4), dit-il, honora Hermès ou Mercure, parce qu'il reconnut en lui des talents extraordinaires pour tout ce qui peut contribuer au bien de la société humaine. En effet, Mercure changea le premier en une langue exacte et réglée les dialectes grossiers et informes auxquels on avait été réduit jusques alors : il donna des noms à une infinité de choses d'usage qui n'en avaient point : il inventa les premiers caractères, et régla jusqu'à l'harmonie des mots et des phrases. Il institua plusieurs pratiques touchant les sacrifices et les autres parties du culte des Dieux et il donna aux hommes les premiers principes de l'astronomie. Il leur proposa ensuite pour divertissements la lutte et la danse, et leur fit comprendre quelle force et même quelle grâce le corps humain peut tirer de ces exercices. Il inventa la lyre à trois cordes, à l'imitation des trois saisons de l'année (5) car ces trois cordes rendant trois sons, le grave, l'aigu, et le moyen, le grave répond à l'hiver, le moyen au printemps, et l'aigu à l’été. C'est lui qui enseigna l'interprétation ou l'élocution aux Grecs, qui l'ont appelé par cette raison Hermès ou interprète : il fut le confident d'Osiris, qui lui découvrait tous ses secrets et qui faisait le plus grand cas de ses conseils. C'est enfin lui qui, selon les Égyptiens, a planté l'olivier, que les Grecs croient devoir à Minerve...
Osiris avant son départ, laissa à Isis l'administration générale de son état déjà parfaitement réglé. Il lui donna pour conseiller et pour ministre Hermès, le plus sage et le plus fidèle de ses amis, et pour général de ses troupes, Hercule, etc. Et lorsque Osiris eût parlé de la Terre au Ciel, Isis et Mercure lui firent des sacrifices et instituèrent en son honneur des initiations avec des cérémonies secrètes et mystérieuses.
Diodore entre encore plus bas (6) dans un assez grand détail sur Mercure. Mercure, dit-il, dirige l'envoi des hérauts en temps de guerre, les propositions de paix et les traités. On lui donne pour symbole le caducée que portent ceux qui sont chargés de ces sortes de commissions, et qui fait leur sûreté au milieu même de leurs ennemis. C'est par-là que l'épithète de commun convient à Mercure, puisse que ceux qui s'entremettent de la paix travaillent à l'utilité commune des deux partis. On dit aussi que ce dieu a établi le premier les mesures, les balances et tout ce qui sert à régler le gain du commerce ; au point qu'on lui a attribué l'adresse de mettre tout l'avantage de son côté dans les échanges. Il a été regardé d'ailleurs comme l'ambassadeur des Dieux, et un excellent interprète de leurs volontés et de leurs ordres. Ainsi, ce dernier nom est-il devenu le sien propre, non qu'il ait inventé les mots les mots et les phrases, comme le disent quelques-uns, mais parce qu'il explore avec une clarté parfaite et avec une éloquence inimitable, le sens des commissions dont il en chargé. On attribue encore à Mercure l'institution de la lutte, et l'on prétend qu'il plaça sur une grande écaille de tortue la lyre d'Apollon ; ce qui forme un corps de guitare...
On trouve dans Plutarque quelques traits relatifs à Mercure et propres à répandre du jour sur qu'on doit s'en former.
Le Soleil, dit-il (7), s'étant aperçu que Rhéa était devenue enceinte de Saturne, la maudit, et fit cette imprécation contre elle, qu'elle ne put accoucher dans aucun mois, ni dans aucune année : mais Mercure qui était amoureux de Rhéa, et qui en était bien traité, joua aux dés avec la Lune, et lui gagna la soixante et douzième partie de chaque jour ; il mit ensuite toutes ces portions bout à bout et en forma cinq jours, qu'il ajouta aux 360 dont l'année était composée. Ce font ces jours que les Égyptiens appellent Épactes (ou Épagomènes), et qu'ils célèbrent comme l'anniversaire de la naissance des Dieux (Rhéa ayant accouché ces jours-là). Au premier jour naquit Osiris, la naissance duquel on entendit une voix qui criait que le Seigneur de tout le monde venait de naître. Aroueris ou Apollon, appelé aussi Orus l'aîné, naquit le second jour ; Typhon, le troisième jour ; Isis, le quatrième ; et enfin au dernier jour, Nephté, que l'on appelle aussi Teleuté, ou la fin, Vénus et victoire.
Il ajoute plus bas, qu'Orus ayant arraché à Isis son diadème, Mercure lui donna en place un casque en forme de tête de taureau.
Le même auteur dit dans ses Symposiaques (8), "que Mercure est le premier des dieux qui trouva en Égypte les caractères, et que c'est par cette raison que les Égyptiens mettent l'ibis à la tête des caractères : en quoi, ajoute-t-il, ils ont tort de donner la première place à une lettre muette et qui n'en pas une voyelle." Passage obscur s'il n'est rapproché d'un autre, où Plutarque nous apprend (9) que les Égyptiens disaient que cette lettre représentait la figure de l'Ibis, ou d'un triangle, lorsque cet oiseau cache son bec dans sa poitrine" ; et de celui où Martianus Capella (10) dit "que l'Ibis porte le nom d'un mois Égyptien."
C'est encore Mercure qui, ayant reçu l'ordre de délivrer Io d'Argus aux cent yeux qui la gardait à vue nuit et jour, l'endormit aux sons harmonieux de sa lyre, et lui coupa ensuite la tête : exploit qui lui valut le titre d'Argiphonte, meurtrier d'Argus.

Autres caractères de Mercure

Ajoutons quelques autres traits propres à le caractériser.

  1. Le premier mois et le premier jour de l'année égyptienne lui étaient consacrés, et portaient son nom de Thot.
  2. Suidas et Pline disent qu'on l'appelait Phannos,
  3. Platon, dans divers endroits de ses ouvrages (11), l'appelle ouvrier admirable, père des lettres. Il dit qu'Iou lui-même l'envoya sur la terre, pour donner aux hommes des lois qui les liassent par un amour mutuel ; qu'il fleurissait sous le règne de Tham, etc.
  4. On le représentait, tantôt le caducée en main, tantôt avec une tête de chien : symboles remarquables par leur singularité, et sur l'explication desquels il doit être impossible de se méprendre.
  5. On lui attribuait 36525 livres, ou rouleaux.
  6. Il était appelé chez tous les peuples, l'interprète de dieux.
  7. Le Coq et l'Ibis lui étaient consacrés ; aussi le voit-on souvent accompagné de ces animaux, ainsi que de la tortue et du Bélier.
  8. Ses fêtes se célébraient dans la Grèce au mois de mai ; et les Latins plaçaient sa naissance dans le même mois, et le faisaient fils de Maïa.
Lorsque les Égyptiens eurent ramené à une même formule les planètes, les jours de la semaine, les notes de la musique, les métaux, les couleurs armoriales, etc. Mercure tint son rang dans toutes ces féries ; il fut planète, jour de la semaine, note de musique, métal, couleur, etc.
Passant continuellement de cascade en cascade, son nom devint celui des bornes : celui des livres périodiques, et le nom honnête de gens qui ne font guère.
Par quel caprice donna-t-on un même nom à tant d'objets disparates ? Et comment ce nom s'est-il transmis jusqu'à nous, augmenté sans cesse de nouvelles significations ?
Il était difficile sans doute de trouver un fil, au moyen duquel on put sortir de ce labyrinthe, et qui liât des faits qui paraissent en être si peu susceptibles. Ne soyons donc pas étonnés si jusqu'ici on a été si fort partagé à cet égard, et si l'on n'a dit sur un objet aussi intéressant que des choses triviales, ou qui n'expliquaient rien, d'autant plus qu'on laissait de côté les caractères tranchants et distinctifs, sans lesquels on ne saurait se former une idée exacte de ce personnage et de l'allégorie qu'il offre : allégorie qu'on ne soupçonnait même pas.

Article deuxième

Sentiments des savants à l'égard de Mercure

Nous avons déjà vu que l'abbé Banier posait en fait qu'il y avait deux Mercures, l'un égyptien, l'autre Celte : c'était mettre deux difficultés à la place d'une, et ne rien expliquer.
L'auteur de l'histoire du Ciel, qui avait entrevu tant de vérités, n'a rien dit de satisfaisant sur ce personnage. Il le réduit à être un simple signe de la Canicule et du moment où par son lever elle annonçait l'arrivée de l'inondation : il ajoute que si on l'arma d'un bâton qui fût ensuite changé en caducée, c'est qu'on se servait de ce signal pour avertir le peuple de se retirer sur les hauteurs, afin d'éviter la crue des eaux.
Jean Nicolaï, dans son traité sur Mercure, et l’évêque d'Avranches M. Huet, crurent que Moïse avait été le modèle sur lequel les païens forgèrent ce dieu.
Cudworth, Mosheim et Beucker sont convaincus qu'il exista réellement : ce dernier va même jusqu'à dire, que le nier, ce serait renverser toute certitude historique.
Le P. Montfaucon (12), Vossius dans son ouvrage sur l'idolâtrie (13) et Schuckford dans son Histoire ancienne (14), n'ont fait que se perdre dans ce chaos et l'embrouiller de plus en plus.
Mais distinguons deux illustres Modernes qui ont discuté cet objet avec plus de soin, et qui firent imprimer dans la même année leurs recherches à ce sujet, Wachter (15) et Jablonsky (16).
Ce dernier lui a consacré un chapitre fort long ; et le premier, presque la moitié de son livre.
Ils ont embrassé un système exactement opposé l'un à l'autre : heureusement, c'est leur faute, et non celle du sujet qu'ils n'ont pas traité avec l'exactitude qu'on admire dans leurs écrits.
Wachter est persuadé que Thot exista réellement, qu'il fut contemporain de Moïse et d'Osiris ; qu'il présenta ses ouvrages à ce dernier prince ; que celui-ci est le Tham de Platon ; et que s'il inventa les lettres hiéroglyphiques, Ménès après sa mort, inventa les lettres alphabétiques, les mêmes que celles des Coptes et des Grecs.
Jablonsky au contraire, est persuadé que Thot ne désigne autre chose que l'époque dans laquelle les sciences furent inventées, et où l'on en grava les premières esquisses sur les colonnes ; et s'il y a eu un vrai Thot, c'est Siphoas, le XXXVe roi de Thèbes depuis Ménès, qui perfectionna l'astronomie, et porta l'année de 360 jours à 365.
Les preuves dont ils s’appuient, ne sont que des raisons de convenance, relatives à leurs systèmes sur l'origine des lettres hiéroglyphiques, qu'ils ont cru n'avoir rien de commun avec les alphabétiques et leur être antérieures ; et ces systèmes eux-mêmes étant dénués de tout principe sûr, et de points fixes et fortement caractérisés, ne peuvent servir ni à se décider pour aucun d'eux, ni à parvenir au vrai.
Laissons donc de côté leurs vues, et essayons de nous tracer une route qui nous conduise à la vérité aussi promptement que sûrement.

Article troisième

Mercure inventeur de l'astronomie

L'on doit regarder chaque fable comme un tout, dont les diverses parties, quelque disparates qu'elles paraissent, ne sont que des développement, et forment entre elles un ensemble parfaitement d'accord, qui offre cette unité, sans laquelle aucun ouvrage de l'esprit humain, tableau, drame, ou quel autre que ce soit, ne saurait subsister. L'on ne peut donc espérer de saisir l'esprit d'une fable, d'une allégorie, de même que d'un drame, qu'autant qu'on en considérera l'ensemble et le rapport de chacune de ses parties ; mais avec une précaution pareille, on en voit nécessairement l'objet, et aucune de ses beautés ne peut échapper. C'est pour avoir négligé ce principe, pour avoir supposé qu'il n'y avait point d'unité dans les fables mythologiques, qu'on n'a pu jusque ici s'en former une juste idée, et qu'on a manqué totalement l'objet désigné par le héros, ou l'acteur principal de chaque fable.
Nous ne nous écarterons jamais de ce principe : c'est le fil qui nous dirigera à travers les détours ténébreux de la fable ; et le lecteur qui apercevra sans peine l'harmonie qui en résulte et qui sera frappé aussitôt de la vérité du tableau, ne pourra refuser son approbation.
C'est d'après ce principe que nous avons vu que Saturne et son histoire était l'invention de l'agriculture présentée aux hommes sous le voile de l'allégorie.
Ce sera d'après ce même principe que nous allons voir dans Mercure et son histoire, l'invention de l'astronomie, présentée également d'une manière allégorique.
Nous verrons même plus : car non seulement chacune de ces allégories offrira unité dans son ensemble, mais leur réunion présentera également la même unité, en sorte que l'une de ces allégories ne sera qu'une suite et un complément de l'autre.
Ce n'est point l'inventeur des caractères alphabétiques ou de l'écriture que l'on a voulu peindre dans Mercure ; ni le patron des hérauts, ni le messager des Dieux, ni le conducteur des Âmes dans l'autre monde, ni le dieu des marchands, ni celui des voleurs, ni le protecteur des grands chemins, ni le flatteur de Jupiter, ni... rien en un mot de tout ce qu'on y a vu, en mettant sans cesse l'accessoire à la place du principal et en confondant les usages auxquels on a appliqué successivement l'idée de Mercure, avec le but de ceux qui les premiers en firent une fable. Ce qu'on désigna par Mercure, ce fut l'inventeur de l'astronomie et surtout du calendrier ou almanach à l'usage de l'agriculteur.
Tout le prouve :

  1. Ses titres : il est conseiller et secrétaire de Saturne et interprète des dieux.
  2. Son symbole : c'est le caducée. Ses autres attributs ; ils sont composés de la tortue ou de la lyre à trois cordes, du bélier, du coq et du chien.
  3. Ses actions : il donne un casque à Isis, il fait une partie de dés avec la Lune ; il contemple les dragons ; il est auteur de 36525 rouleaux.
  4. Son nom, porté par le premier jour et par le premier mois de l'année égyptienne ; tandis qu'il est protecteur chez les Romains du mois de juin.
  5. Les caractères dont les Anciens lui attribuent l'invention ; et la lettre qui lui était consacrée.
  6. Les noms par lesquels on le désigne chez les différents peuples.
  7. L'aveu uniforme de l'Antiquité entière.

Première classe de preuves : Titres de Mercure

Secrétaire et conseiller de Saturne

Dès la plus haute Antiquité, il fut désigné par le titre de secrétaire et de conseiller de Cronos ou de Saturne chez les orientaux ; et par celui de conseiller d'Isis et d'ami d'Osiris chez les Égyptiens.
Mais quel est le conseiller du laboureur ? De qui écoute-t-il les oracles, en qui a-t-il quelque confiance, si ce n'est dans son calendrier, ou dans l'almanach ? C'est lui qu'il consulte sans cesse ; c'est de lui qu'il prend conseil pour toutes ses opérations ; c'est par son almanach qu'il fait le temps où il faut préparer ses terres, labourer, semer, cueillir, travailler ou se reposer, être aux champs ou aux assemblées. Ne soyons donc pas étonnés que le nom d'almanach soit devenu synonyme de conseil, et que l'on dise "portez vos almanachs à d'autres", comme on dirait, néant de vos conseils, nous n'en voulons point.
Dès le moment que l'agriculture fut inventée, l'observation ou la connaissance des temps devint absolument nécessaire : l'astronomie naquit donc aussitôt que le labourage : car un art amène un autre art, et dès qu'une invention a donné l'éveil aux humains, la foule des chercheurs se jette de ce côté-là ; c'est à qui perfectionnera, inventera, mettra à profit les découvertes déjà faites, viendra à leur appui, etc.
Tel est le point dont il faut partir pour se former une juste idée de Mercure, et pour dissiper l'obscurité qui jusqu'à présent enveloppait ses actions : rien dans son histoire dont on ne rende très facilement raison par ce moyen, tandis que sans lui on est sans cesse dérouté.
L’almanach, le calendrier, le labourage, l'astronomie, les fêtes, les jours, les mois, etc. tout nous est ainsi venu de l'orient. Ne soyons donc pas étonnés que tous les mots qui y entrent, soient tous venus d'orient, tous nés dans la plus haute Antiquité ; tous existants dans les langues des nations, chez lesquelles naquirent ces arts.

Almanach   Semaines   Sabbath   Calendrier   Signes   Ciel   Calendes   Néoménies
Terre  Ides  Soleil   Été  Mois  Lune  Hiver  Jours  Astres  Heures  Constellations

Interprète des Dieux

N'est-ce pas encore par ce moyen que Mercure devient, au pied de la lettre, l'interprète des Dieux ? Les Dieux sont les Cieux et leur armée, le Soleil qui est leur roi, la Lune qui est leur reine, les planètes qui sont leurs gardes ou leurs ministres, les signes qui président aux mois, les constellations qui leur sont subordonnées. Ils ont un langage qui n'est entendu que de leur observateur : et cependant ce qu'ils disent est absolument nécessaire à l'homme agriculteur ; il lui faut donc un interprète qui placé entre les Dieux et lui, explique leur volonté et le mette à même de profiter de leurs avis. Cet interprète, c'est Mercure ou l'astronome. Interprète admirable qui lit dans les Cieux la destinée des humains, et qui règle et fixe leurs opérations et leurs mouvements sur ceux des globes célestes, immuables dans leur course toujours fixe et réglée.

Seconde classe de preuves : Symbole et attributs de Mercure

Mais quel est le symbole de ce héraut, avec quel sceptre se présente-t-il à nous ? Ses attributs ne peuvent être plus singuliers. Il s'avance avec précipitation : des ailes sont à ses pieds et à son chapeau : il tient en main un bâton, autour duquel s'entortillent deux serpents, qui y forment un nœud sur le milieu de sa longueur : un chien, un Bélier et un coq l'accompagnent : il porte une lyre à trois cordes.
Ces symboles et ces attributs, inexplicables lorsqu'on aperçoit pas l'ensemble, deviennent de la plus grande vérité dès qu'on sait que Mercure est l'inventeur est l'inventeur de l'astronomie ; qu'il est l'astronomie personnifiée.

Le caducée

Des deux dragons qui composaient le caducée, l'un était mâle et l'autre femelle, disent les Anciens ; et le point où ils se réunissaient s’appelait nœud d’Hercule.
Voici de quelle manière s'exprime à ce sujet Macrobe (17) : "In Mercurio Solem coli etiam ex Caduceo claret, quod Ægyptii in specie draconum maris et faeminae conjunctorum figuraverunt, Mercurio consecrandum. Hi dracones parte media voluminis sui invicem nodo quem vocant Herculis, obligantur : primæ que partes eorum reflexæ in circulum, pressis osculis, ambitum circuli jungunt ; et post nodum caudæ revocantur ad capulum Caducei : ornanturque alis ex eadem capuli parte nascentibus."
C’est-à-dire : "Le caducée démontre que Mercure est le Soleil. Les Égyptiens le consacrèrent à la première de ces divinités, sous la forme de deux dragons réunis mâle et femelle : le point auquel ils sont unis s'appelle nœud d'Hercule : leur avant-corps forme un cercle, qui se termine par l'union de leurs têtes ; leurs queues se réunissent également en cercle sur le manche du caducée, tandis que des ailes naissent de ce manche."
Ces circonstances, nécessaires pour déterminer le but et l'origine d'un ornement aussi singulier, ne furent point l'effet du hasard ou de quelque mauvaise peinture, comme on l'imagina si mal à propos : il vaudrait mieux dire, simplement qu'on ne sait pas quelle en avait été l'origine.
Ce n'est point par hasard que ce symbole fut inventé : moins encore par hasard qu'il devint le symbole de Mercure ; tout comme ce ne fut pas par hasard que Saturne fut armé de la faulx, Hercule de la massue, Astarté du croissant, etc. Tous ces symboles furent toujours représentatifs du personnage auquel on les attribuait : ils en furent toujours une description ou une définition courte et vive.
Il en est donc de même de Mercure, et l'on n'aura trouvé l'explication de ce qui regarde celui-ci, que lorsqu'on en verra naître celle de tous ses symboles et de ses attributs.
En faisant de Mercure l'inventeur de l'astronomie, le caducée devient son symbole distinctif et naturel ; et il est de la plus grande vérité.
Personne n'ignore que les serpents étaient chez les Anciens les symboles du Temps, de l'année et des moissons. Le caducée composé de deux serpents, était donc relatif au Temps, à sa règle, ou à l'astronomie.
De ces deux serpents, l'un en mâle et l'autre femelle.
L'on a donc voulu peindre ici deux objets différents, relatifs à l'année, dont l'un était mâle, l'autre femelle ; qui, tantôt étaient réunis en un point, et tantôt séparés, et dont la route serpentante imitait la figure des dragons du caducée.
Mais quels sont ces deux objets ? Si ce n'est le Soleil et la Lune qui, dans le cours d'une année, parcourent l’écliptique sur lequel ils sont tantôt séparés, tantôt unis ; et qui tracé sur une carte, ressemble exactement à la figure de chacun des dragons du caducée. C'est d'après cela que l'on fit ce conte rapporté par Athénagore : "Iou étant devenu amoureux de Rhéa, elle se changea en couleuvre, afin d’échapper à ses poursuites ; il prit aussitôt lui-même la figure d'un serpent ; et de là, les deux serpents du caducée, en mémoire de cet évènement." Cette fable, trop absurde pour être née sans raison, prouve que les Anciens étaient convaincus que la réunion des deux serpents du caducée était allégorique et destinée à peindre quelque grand évènement.
Armer Mercure du caducée, c'était donc lui mettre en main une carte céleste ; c'était dire de la manière la plus énergique, qu'il avait observé les mouvements du Soleil et de la Lune, leur passage sur l’équateur, cercle peint par le bâton du caducée, le moment où ils y étaient réunis, et le moment où ils en étaient les plus éloignés ; moments qui sont la base de l'année, qui la circonscrivent, qui la divisent en parties égales : c'était apprendre qu'il avait réglé tout ce qui a rapport à l'année en un mot, qu'il avait fait le calendrier.
Il était donc impossible de caractériser Mercure par un symbole plus frappant, plus relatif à l'idée qu'on devait s'en former, qui ne convînt qu'à lui.
Ce symbole en surtout parfaitement d'accord avec le langage des astronomes. Dans cette langue, Tête et Queue de dragon, sont les points de l'écliptique où se réunissent les mouvements du Soleil, de la Lune et des planètes ; et le mot nœud désigne leur rencontre.
Il est donc vrai ; le caducée peint l'année, ou le cours du Soleil et de la Lune, pour une année. Le bâton du caducée est l’équateur, ce cercle qui coupe le globe en deux portions égales, et sur lequel le Soleil passe deux fois l'année aux équinoxes.
Le dragon mâle peint l’écliptique ou le chemin en zigzag que le Soleil parcourt dans le cours de l'année, qui forme zigzag ou un S, relativement à l’équateur; et qui est peint précisément de même sur nos cartes.
Le nœud des deux dragons, formé à leur point de rencontre sur le bâton du caducée, est le moment où le Soleil et la Lune se rencontrent sur l’équateur, dans le point où il est coupé par l’écliptique.
Ce nœud s’appelle nœud d'Hercule, dit Macrobe ; circonstance qui vient à l'appui de tout ce que nous avons dit en prouvant toujours mieux le rapport de nos trois personnages allégoriques, Saturne, Mercure et Hercule.
Ces deux dragons, dont l'un en mâle et l'autre femelle, et qui sont l'emblème des deux principes de toutes choses, l'actif et le passif, deviennent la clé des deux ailes que Mercure mit à la tête de Saturne, et qu'il appela intelligence et sentiment. L'intelligence imprime l'action, et le sentiment la reçoit ; Saturne est l'intelligence, l'être actif qui sème. La terre est l'être passif qui est semé et qui reçoit.
Le caducée lui-même est quelque fois représenté avec des ailes ; rien de plus juste encore : ce sont les ailes du temps : à peine parait-il, qu'il déjà envolé : le présent disparaît à l'instant, et l'avenir arrive avec rapidité, tandis que le moment qui le précédait est déjà bien loin.
Nous verrons bientôt que le nom même du caducée ne fut pas choisi avec moins de justesse.
Décrivez un cercle autour du caducée, et vous aurez la sphère, emblème parlant de l'astronomie ; mais ce cercle est difficile à tracer, et cette figure est trop parlante : on supprima donc le cercle, et il resta le caducée ; vrai hiéroglyphe qui semblait inexplicable, et qu'on n'eût jamais pu déchiffrer que par l'ensemble, tout comme une énigme ne se développe que par sa masse.
Nous aurons l'occasion de de voir dans la suite d'autres caractères ou figures, dont la source était inconnue uniquement à cause de la suppression du cercle qui les circonscrivait, et qu'on ôta, parce qu'il devenait aussi embarrassant qu'inutile.


Le Coq, le Bélier et le Chien


C'est comme inventeur de l'astronomie que ces trois animaux sont à la suite de Mercure, et que le dernier est devenu un de ses symboles.
Le Coq, horloge vivante qui annonce les heures pendant la nuit, ne pouvait être mieux choisi pour accompagner l'astronome. Aussi est-il appelé dans un grand nombre de langues, même en indien, Morga, c'est-à-dire (l'oiseau du) matin ; ce que signifie également ce mot, dans les langues dérivées de l'ancien Theuton.
Le Bélier, signe par lequel s'ouvrait l'année pour tous les peuples chez qui elle commençait au mois de Mars, devenait un symbole très naturel de l'astronomie.
Le Chien, qui, sous le nom de Canicule, préside à la moitié du mois d'août, devenait encore le vrai symbole du Mercure des Égyptiens, leur année commençant au lever de cet astre.
Au milieu de ce mois expirait, en Égypte l'année ancienne ; alors arrivait la fin, ou Téleuté (18), et ce jour était la fête de la déesse Nephté, enlevée du milieu des hommes. Le lendemain était celle du Rosh ou du commencement (19) de l'an nouveau ; c'était la fête de Mercure et de son chien, ou celle de l'ouverture de l'année par la Canicule, et de l'almanach par l'astronome.

La lyre

Mais pourquoi la lyre à trois cordes ; et qu'a-t-on voulu peindre par cette harmonie de trois tons, le grave, le moyen et l'aigu qu'il invente et qui répondent à l’hiver, au printemps et à l'été ? Rien qui ne soit très simple et parfaitement relatif à l'année.
Cette harmonie à trois cordes, est l'harmonie des mouvements célestes et de l'année formée des trois saisons égyptiennes, l’hiver, le printemps, et l'été ; car ils n'en comptaient que trois, de quatre mois chacune, nous l'avons déjà vu, et nous aurons occasion de le prouver ailleurs. Nous verrons en même temps que les trois modes grecs appelés Phrygien, Dorien et Lydien dont ce peuple s'est attribué l'invention, que personne ne lui avait encore disputée, ne sont autre chose qu'une imitation des trois tons qui formèrent la lyre de Mercure, et qui dominaient alternativement dans les hymnes et dans les poèmes, suivant que leurs sujets étaient relatifs à une saison ou à une autre, comme nous aurons occasion de le voir dans la suite dans un plus grand détail.

Troisième classe de preuves : Actions de Mercure


Il donne un casque à Isis

Isis ayant perdu son diadème qui lui avait été par Osiris, reçoit de Mercure en dédommagement un casque qui représentait une tête de taureau. Mais une tête de taureau est également l’emblème de la dignité royale dont Astarté était revêtue. L'on sait d'ailleurs qu'Isis ou Io passait pour avoir été métamorphosée en vache ; Osiris était également peint avec une tête de bœuf : emblème qui lui était commun avec l'ancien Bacchus des Grecs, celui qu'invoquaient les femmes de l'Élide.
Tout ceci était relatif à l'année. Astarté est la même qu'Isis : Mercure lui donna donc un casque à tête de bœuf, parce qu'il peignit la Lune dans son calendrier sous la forme d'un croisant, ou d'une femme qui avait une tête de bœuf dont les cornes peignaient celles du croissant. Cette femme à croissant fut appelée Io, Pasiphaé, Isis, etc. et l'on inventa ensuite les fables fondées sur cette peinture, et que l'on donna pour autant de métamorphoses surprenantes.

Il joue aux dés avec la Lune


Nous avons vu plus haut qu'il joua une partie de dés avec la Lune, et qu'il lui gagna la soixante-douzième partie de ses jours, ou simplement la soixante—dixième, suivant ceux qui ne s'attachent qu'à des nombres ronds. De toutes ces fractions, il forma cinq jours qu'il plaça entre l'année finissante et l'année commençante de 360 jours ; en sorte que Rhéa pût accoucher dans un temps qui ne faisait partie ni d'aucun mois ni de l'année, et éluder
ainsi l'imprécation du Soleil contre elle.
Ce temps fut hors des mois, parce qu'on eut soin d'intercaler ces cinq jours entre le dernier jour de l'ancienne année et le nouvel an, sans les incorporer dans aucun mois.
Ce sont ces jours qui sont appelés Épactes ou Épagomènes par les Grecs et dans l'orient, et que nous avons retrouvés chez les Romains, quoiqu'aucun savant ne les eût encore remarqués chez ce peuple : il vrai que les Romains eux-mêmes avaient tellement perdu les traces de leur origine, que les plus savants d'entre eux n'ont jamais pu la découvrir.
Ces cinq jours sont ce qu'ils appelaient quinquatres ; ils en avaient de deux sortes, les petits et les grands ; les petits étaient les cinq jours qui précédent le solstice d'été ; ils finissaient l'année, lorsque l'ancienne année Romaine commençait en juin, mois consacré par cette même raison à Mercure.
Lorsqu'ils eurent transporté le commencement de l'année à l'équinoxe du printemps, les cinq jours Épagomènes ou intercalés furent les cinq jours qui précédaient l'équinoxe ; mais accoutumés d'en célébrer cinq en juin, ils continuèrent de célébrer ceux-ci : en sorte qu'ils eurent une double quinquatrie, la grande ou la moderne, et la petite ou l'ancienne. C'était pour eux le temps de la naissance et de la fête de Minerve ; alors les élèves faisaient un présent à leur maître, comme on en fait encore la veille du jour de an ; et c'est ce qu'ils appelaient le Minerval.
Ovide chante les grandes quinquatries dans son IIIe livre des Fastes :

"Una dies media est, et fiunt sacra Minervæ,
Nomina quae junctis quinque diebus habent.
Sanguine prima vacat, nec fas concurrere ferro :
Causa, quod est illa nata Minerva die. V. 806-812
Summa dies e quinque tubas lustrare canoras
Admonet et forti sacrificare deae". V. 849-850

"Un jour se passe, arrivent ensuite les fêtes de Minerve qui prennent leur nom de cinq jours réunis. Il n'est pas permis de répandre le sang au premier, ni de se battre à l'épée, parce que la déesse naquit ce jour-là... Le cinquième jour nous avertit de faire la purification des trompettes, et de sacrifier à la belliqueuse déesse."

Et il parle des petites quinquatries dans le VIe :

"et jam Quinquatrus jubeor narrare minores.
Nunc ades o, coeptis, flava Minerva, meis !" V. 651.

"Obligé de parler des petites quinquatries, blonde Minerve, venez vous-même à mon secours."

Il demande ensuite à la déesse pourquoi ce temps-là portait un pareil nom.

"Superest mihi discere", dixi
"cur sit Quinquatrus illa vocata dies"  V. 693.

"Je n'ai plus qu'une seule question à vous faire, dis-je à la déesse : pourquoi ce jour fut-il appelé quinquatre !"

Et la déesse lui répond par un conte qui n'y a aucun rapport.

Varron et Festus ne furent pas mieux en état de l'expliquer : Charles de Naples, commentateur si estimé des "Fastes" d'Ovide, y renonça absolument ; et leur traducteur, le bon abbé de Villeloin, ne put s'en tirer avec plus d'honneur.
Il n'était pas moins étonné de ce que le dernier jour des quinquatres était la fête des trompettes : mais ceci n'a plus rien de surprenant : ces trompettes annonçaient la fin de l'année et le commencement de l'autre. C'est comme nos cloches, la veille des grandes fêtes. Varron nous apprend que ce jour-là même, les trompettes célébraient la fête de Minerve dans son temple, parce que, comme nous l’apprend ici Ovide, Minerve passait pour avoir inventé la trompette.

Quatrième classe de preuves : Noms de Mercure donnés à des portions de l'année

Chez les Égyptiens

Si tous les faits que nous avons parcourus jusque ici s'accordent à faire de Mercure l'inventeur de l'Astronomie ou du calendrier, on peut le dire à plus forte raison de celui dont il s'agit dans cet article. Le premier jour de l'année égyptienne et le mois qu'il commençait, portaient son nom égyptien Thot : époque qui tomba sur la mi—août, lorsque l'année devint fixe. À ce jour répondait dans le calendrier Thot à tête de chien, ou un homme avec un caducée et un chien à côté de lui. Il devint Esculape chez les Grecs : il a fait place dans notre calendrier à Saint Roch et à son chien qui guérissent de la peste : c'est le même emblème, dépouillé des superstitions païennes.
Le mois qui précédait celui de Thot et par lequel se terminait l'année s'appelait Misor ou Merosi. Cumberland a cru que c'était parce que Misor étant le père de Mercure ou Thot, on avait donné le nom du père au mois qui précédait celui qui portait le nom du fils : cela peut être mais ne pourrait-il pas aussi être arrivé que Thot eût été regardé comme le fils de Misor, uniquement parce que le mois Thot succédait au mois Misor, et qu'il en était ainsi le fils dans le style allégorique ? Mais nous aurons occasion de revenir à cette question.
Ajoutons simplement ici que chez les Romains, Mercure ne fut regardé comme le fils de Maïa que parce qu'il présidait au mois suivait celui de Maïa ; c'est-à-dire, au mois de juin.

Chez les Romains

Mais cette même observation, que Mercure était protecteur du mois de juin, de celui où arrivait le solstice d'été, et où commençait l'ancienne année des Pélasges, prouve encore qu'il était regardé chez tous les peuples comme l'inventeur de l'astronomie.

Cinquième classe de preuves : Caractères dont les anciens lui attribuent l'invention

Les caractères dont l'Antiquité attribue l'invention à Mercure, fournissent une nouvelle preuve qu'il fut toujours regardé comme l'inventeur de l'astronomie.
C'est un principe reçu de tout le monde, que Mercure ou Thot inventa des caractères, et que ces caractères étaient sacrés. Mais en quoi consistaient-ils ? C'est ici où l'on a échoué totalement. On a cru qu'il s'agissait des caractères hiéroglyphiques, antérieurs aux alphabétiques, avec lesquels on les a mis par-là même en opposition : mais ceci ne disait rien, ou était une erreur.
Cette distinction de caractères hiéroglyphiques et de caractères alphabétiques, a été une source intarissable de préjugés et d'obscurité. Dans nos principes sur l'origine des langues et de l’écriture, nous tâcherons de fixer d'une manière satisfaisante et sure, les idées qu'on sait s'en former ; mais nous dirons en attendant, que les caractères alphabétiques sont eux-mêmes hiéroglyphiques et très hiéroglyphiques : qu'ils remontent à la plus haute Antiquité qu'ils sont par-là même très antérieurs au temps où l'on a cru qu'ils étaient nés, et dans lequel on abandonna les hiéroglyphes égyptiens : que ceux-ci existaient en même temps que les alphabétiques, parce que leur usage était différent ; et que ceux qu'inventa Mercure, furent relatifs à l'astronomie, ceux qui furent indispensables pour son almanach, et qui subsistent encore dans les nôtres : les preuves n'en seront pas difficiles à administrer.
Sanchoniathon nous a dit que Mercure, imitant le Ciel, avait fait les portraits des Dieux et avait inventé les caractères sacrés.
Mais imiter le ciel, et peindre les dieux, n'est autre chose que travailler les figures des constellations, des signes et des planètes : ce qui constitue exactement l'astronomie, ou la connaissance des temps, et ces figures furent autant de caractères sacrés parce qu'elles furent gravées sur les colonnes des temples, et qu'elles dirigeaient les peuples pour toutes les cérémonies sacrées, comme encore de nos jours.
Cette explication de ce qu'il faut entendre par la peinture des Dieux attribuée à Mercure l'astronome, est d'autant plus juste que personne n'ignore que l'unique idolâtrie fut le Sabéisme, c'est-à-dire l'adoration des astres : c'est de là même que les Grecs tiraient leur définition du mot Dieu ou Theos. "Les astres, disaient-ils, furent appelés Theos parce qu'ils se meuvent et qu'ils courent sans cesse". Ceci est encore une étymologie à la grecque ; mais si elle ne vaut rien comme étymologie, elle prouve du moins que les astres étaient les Dieux du paganisme, et que c'est eux que Mercure peignit en imitant les Dieux.
Les astres furent nommés avec raison Theos parce le mot signifiait dans son sens propre et primitif, un être lumineux et parfait. Ce nom et ces attributs leur étant communs avec la divinité suprême, ils furent cause qu'insensiblement on les confondit en quelque façon avec la divinité, et qu'on les crut animés par des dieux inférieurs.
Si les Grecs crurent ensuite que ce nom venait de The-ein, courir, c'est qu'ils oublièrent que le sens propre de ce mot pour conserver le figuré. Parce que ces dieux-astres couraient, leur nom signifia également coureur : de là cette fausse étymologie, par laquelle le sens primitif du mot dieu prenait la place d'un sens subordonné.

Caractère propre à Mercure ou à Thot


Ce que nous venons de dire se confirme en plein par le caractère dont parlent les Anciens, comme étant la lettre symbolique de Thot ou Mercure. Remettons-en le texte sous les yeux du lecteur.
Plutarque nous apprend que "les Égyptiens mirent l'Ibis à la tête des caractères parce qu'ils étaient de l'invention de Mercure : et que ce caractère avait la figure d'un triangle ; figure que forme cet oiseau quand il cache sa tête sous sa poitrine."
Ce qui fit croire à Kircher (20) que cette lettre était le A : mais Jablonsky ayant observé que, selon Martien Cappella, l'Ibis porte le nom d'un mois égyptien, il en inféra (21) que la lettre désignée par l'Ibis, oiseau de Mercure, était le Thêta des Grecs qui commence le nom de Thot ; premier mois égyptien, et par-là même à la tête des caractères sacrés.
Ce qui confirme cette idée, c'est que Plutarque dit expressément que la lettre de Mercure n'était pas du nombre des voyelles.
Ajoutons que Philon nous apprend pourquoi le Thêta devint la lettre de Mercure, et de quel objet il fut l’hiéroglyphe ou la peinture chez les Égyptiens. "Les Égyptiens, dit-il, comme nous l'avons vu plus haut, voulant peindre l'Univers, tracent un cercle de couleur bleue, environné de flammes qui s’échappent de toutes parts ; et dans le centre duquel on voit  (comme pour servir de diamètre) un serpent étendu à tête d'épervier : figure, ajoute-t-il, parfaitement semblable au Thêta des Grecs... et ce serpent est le symbole du bon génie", âme de l'univers.
Il vrai qu'ici le Thêta est représenté comme arrondi, tandis que Plutarque le peint triangulaire : il n'y a cependant point de contradiction entre eux : le Thêta grec a eu toutes sortes de formes ; il a été carré, rond, triangulaire : le Thêta des Hébreux, st surtout celui des médailles, était triangulaire et, rentrant en lui-même, parfaitement comme l'Ibis de Plutarque ; les Égyptiens en auront eu apparemment deux aussi, l'un rond, l'autre triangulaire, et tous deux également la lettre de Thot.
Le premier mois de l'année, ou le mois de Thot, est désigné sur la table d'Isis par l'Ibis (figure X) ; et il est suivi d'Isis assise sur son trône (figure Z) et qui indique la Canicule, ouverture de l'année égyptienne, au premier jour de Thot.
C'est parce que l'Ibis est consacré à Mercure que les Anciens disaient que, dans le combat contre les géants, où les dieux effrayés se métamorphoseront chacun en un animal différent, Mercure avait pris la forme de l'Ibis.
S'ils prirent l'Ibis pour le symbole de Mercure, c'est sans doute parce qu'il leur était de la plus grande utilité, en détruisant les insectes que les eaux du Nil laissent après leur retraite.
La lettre de Mercure était donc relative à l'Astronomie : preuve que Mercure et tout ce qui le regarde, a rapport à cet objet.
II serait illusoire d'objecter que les caractères inventés par Mercure s'appellent grammata en grec, comme si ce mot ne se prenait que dans le sens des lettres : mais il signifie aussi caractères en général : ce qui offre un sens bien plus étendu que celui de lettres. Toute lettre est un caractère sans doute ; mais tout caractère n'est pas lettre.
Clément d'Alexandrie (22) parle de quatre statues d'or que l'on portait dans les processions d'Isis, et qui représentaient deux chiens, un épervier et un ibis ; il leur donne le nom de grammata : or ce n’étaient pas des lettres.

Caractères astronomiques inventés par Thot


Si le caractère consacré à Thot ou Mercure indiquait en même temps le premier mois de l'année qui était sous sa protection, on doit lui attribuer également les caractères des autres mois et ceux des planètes.
Les signes astronomiques des planètes remontent à la plus haute antiquité, et ils sont comme nous le prouverons ailleurs, l'abrégé ou l'esquisse des figures sous lesquelles on représentait les planètes, ou leurs dieux protecteurs.
Les douze mois furent aussi sous la protection de douze divinités qu'on appela les grands dieux : il y en eut six femelles ou six Lunes ; et six mâles ou six Soleils. Chacune de ces Lunes, chacun de ces Soleils avait une forme différente, selon les travaux relatifs à ces mois : d'où résultaient douze tableaux différents ou douze grands dieux.
Tels furent les caractères inventés par ce personnage ; et qui s'accordent tous avec l'idée générale qu'en donnent les divers attributs.
 
Thot ou Mercure contemple les dragons

Les instructions que Mercure donne sur ces dragons qui se meuvent avec vitesse, qui rajeunissent sans cesse, qui voient une longue suite de révolutions, et le soin qu'il prend de graver ces instructions sur les colonnes sacrées, annoncent très certainement des choses très intéressantes, cachées sous des expressions et des figures allégoriques. Est-il difficile de les découvrir ? Les serpents sont les années : celles-ci rajeunissent continuellement ; et, répétées un certain nombre de fois, elles forment des cycles dont la durée faisait partie du calendrier de Mercure. Ce sont ces êtres immortels, qui se résolvaient en eux-mêmes : car ils ne finissent que pour recommencer, dit l'auteur des Ethotia, dans le fragment que nous avons rapporté plus haut.
Ce nom d'Ethotia convenait d'ailleurs très bien à ce sujet : il est certainement composé de deux mots, Ed le temps, et Thot nom oriental de Mercure : et nous verrons plus bas, quand nous serons aux noms de Mercure, le sens qu'offrait la réunion de ces deux mots.
 
Il compose 36 525 rouleaux
 
On lui attribue 36 525 ouvrages. Cette assertion est très certainement fabuleuse : mais sur quoi tombe l'erreur ? Serait-ce sur les nombres, ou sur la valeur que l'on attribue à ces nombres ? C'est ce qu'il serait difficile de décider, si l'on ne trouvait dans l'Antiquité les lumières nécessaires pour sortir de cet embarras. Nous venons de voir que Mercure avait inventé des cycles astronomiques. Or ce nombre de 36 525 est un cycle, formé de plusieurs autres, et le plus grand de ceux qu'inventa Mercure. Voici comment il était parvenu à celui-ci.
Il avait d'abord formé un cycle de 4 ans, celui qui servit aux Grecs pour les Olympiades et qui finit par l'intercalation d'un 366e jour. Ce nombre, multiplié par 365 ans, égal au nombre de jours de l'année, forme le cycle de 1460 ans, si célèbre chez les Égyptiens.
À ces 1460 ans, on ajoutait une année composée d'un jour intercalé de quatre en quatre ans ; et qui est dans 365 révolutions pareilles de 4 ans, forment un an ; en tout 1461 ans, pour ce grand cycle.
Multipliant ensuite 1461 par 25 années, qui forment un quart de siècle, on a exactement un cycle de 36525 ans, au bout desquels tous recommençait de nouveau avec l'entrée du Soleil au signe du Bélier, et les astres parcouraient comme du passé la même révolution.

365*4 = 1460 ;  (1460 + 1) * 25 = 7305 ; 7305 + 29220 = 36525

Tandis que ce même cycle de 1461 ans, étant multiplié par un siècle entier, produit le nombre astronomique de cent cinquante mille ans chaldéens, en nombres ronds, qu'on a prétendu si mal à propos être un vrai nombre historique (23).
Ces cycles étaient appelés Phénix, du mot primitif Phen, qui signifie lumière, apparition, et qui forma nombre de dérivés dans les langues anciennes, et même dans la nôtre. De-là viennent nos mots :

  • Fen-être, ouverture par laquelle la lumière entre dans nos maisons,
  • Phéno-mène, météore lumineux, tout ce qui frappe la vue.
  • Fin, tout ce qui est pur, délié et brillant comme la lumière.

Comme le temps est représenté avec des ailes, on n'eut pas de peine à faire du phénix un oiseau d'une espèce aussi belle que rare, d'un plumage or et cramoisi, unique et sans compagne, et qui après avoir vécu une longue suite d'années, 500 ans selon les uns, dit Tacite (24), et 1460 ans selon d'autres, venait de l'Arabie en Égypte pour expirer dans la ville du Soleil sur l'autel de cette divinité, et renaissait de ses cendres.
Ce phénix, sur lequel on a tant écrit, n'est donc qu'un être allégorique, comme tant d'autres ; et tous ses caractères sont vrais et pris dans la nature même des choses. Il est de couleur d'or et cramoisi, couleur de la lumière ; unique de son espèce, car il n'existe jamais qu'un cycle à la fois, il renaît de les cendres, parce qu'un cycle n'existe que par la cessation de celui qui le précède : il vient de l'Arabie pour nourrir et renaître, parce que ce mot signifie Couchant, Nuit, Ténèbres. Il renaît sur l'Autel du Soleil, parce que c'est le Soleil qui le forme ; dans la ville du Soleil (25), parce que les plus grands astronomes égyptiens faisaient leur séjour à Héliopolis, fameuse par l’école la plus célèbre des prêtres d’Égypte.
Les Égyptiens convenaient eux-mêmes que le phénix n'était qu'une allégorie de leur grand cycle, comme Orus-Apollo nous le dit expressément dans ses hiéroglyphes égyptiens (26). "Les Égyptiens, dit-il, peignent un phénix pour désigner le renouvellement qui arrive après une longue suite de siècles ; parce qu'au moment de sa naissance, commence une nouvelle révolution." Il est vrai qu'il paraît supposer l'existence du phénix ; mais il ne faut jamais perdre de vue que les explications d'Orus-Apollo sont presque toujours emblématiques elles-mêmes, comme nous l'avons fait observer dans notre plan général et raisonné.
C'est ce grand cycle de 36 525 ans dont les années changées par quel que maladroit en autant d'ouvrages, formaient une assertion monstrueuse et qu'on ne pouvait expliquer. Cette erreur était arrivée cependant d'une manière bien simple.
Les livres étaient appelés, chez les Anciens orientaux, rouleaux, par même raison qu'on les appela volumes dans l'Occident, c'est-à-dire parce qu'on tenait roulés : d'où vint l'expression si commune dans les livres hébreux, rouleau de la loi rouleau de vie, etc. en parlant des livres sacrés : aussi les traducteurs, voyant le mot rouleau attribué à Mercure qu'on regardait comme l'inventeur de l'écriture, ne manquèrent pas de le prendre dans le sens de livre : de là, le nombre fabuleux de livres qu'on lui attribue. Les savants modernes ne pouvant douter qu'un texte pareil ne fut fautif, et ne se persuader que l'erreur que l’erreur consistât dans le mot livre, regardèrent comme fabuleux le nombre 36525 qui l'accompagnait, et ils se privèrent par là du seul guide qui aurait pu les éclairer. Des erreurs de cette nature sont sans nombre relativement à l'antiquité. Demandera-t-on ce que signifiait ici le mot rouleau  ? C'était un terme à double sens qu'on employait exprès pour faire illusion à ceux qui s'y laisseraient prendre, comme cela en arrivé à tous les interprètes et à tous ceux qui ont cité ce passage d’après eux ; et comme cela est également arrivé dans une multitude d'autres rencontres, ainsi que nous le verrons dans la suite, sans en excepter même les plus fameux, qui n'ont jamais soupçonné qu’on leur eût tendu de pareils piégés.
Les 36 525 rouleaux de Thot sont donc les années, dont son grand cycle était composé, et qui roulent continuellement à la suite les unes des autres.

Sixième classe de preuves : Noms donnés à Mercure

Les divers noms donnés à ce personnage démontrent que son histoire n’est autre chose qu’une allégorie relative à l’invention de l’astronomie.

Thot

Il s’appelait Thot en égyptien, ou Taaut en Phénicien, Hermès en grec, Mercure en latin.
Le premier de ces noms est le mot oriental תו Tho, Thau, qui signifie un signe, et dont se forma le verbe תוה Thоb, tracer des signes, désigner, signer. Ézéchiel (27) a dit, ותתוית תו Ou-the-thoish Tho. "Vous mettez le Tho (signe) sur leur front."
Les Grecs, associant ce mot à l’adjectif Ma, qui signifie grand, admirable, en firent les mots :


Ce mot Thau s’est formé de la lettre Thau, écrite par tous les anciens peuples en forme de croix ; et qui signifia perfection et dix, comme nous le prouverons dans nos principes sur l’origine du langage et de l’écriture.
De là l’expression usitée dans les Gaules, pendant les premiers siècles de l’ère chrétienne, crucis thaumate notare, signer avec le signe de la croix.
Le mot Tho, signe, était très certainement égyptien. Il subsiste encore dans la langue des Coptes descendants des anciens Égyptiens, chez qui il a formé divers dérivés qui tiennent étroitement à cette première idée.

Tous ces mots sont le dictionnaire manuscrit de la langue copte, composé par le célèbre La Croze.
Ce mot existe en hébreu avec une signification pareille
תאות Thauth est employé par Moïse (28) dans le sens de hauteur, de montagne. "Ces bénédictions, dit-il, dureront à jamais, elles égaleront la hauteur des Collines éternelles". Les Coptes ont rendu par un pareil mot, par celui de Théout, prononcé Thau-out, le mot colonna employé par Moïse dans l’histoire de la femme de Loth (29).
Ce nom en resté au pic de Tenerife, montagne élevée et qui a exactement la figure d'une colonne ; les habitants de la contrée, restes des anciens Atlantes, l'appellent Teithe, le pic de Teithe. De-là encore l'équivoque des montagnes changées en colonnes d’Hercule.
Jablonsky tire le nom de Thot de ce mot Thôouth (30) signifiant colonne. Les principes des sciences se gravaient en effet sur des colonnes ; mais tous ces principes étaient attribués à une même divinité : elle en fut donc appelée le dieu des colonnes, ou Thoth. Tel est le raisonnement de ce savant, qui a répandu une grande lumière sur l'ancienne sagesse de l'Égypte : cependant je ne saurais être ici de son avis. Les colonnes ne furent appelées Thot que parce qu'elles servaient de signes : postérieures à ce nom, elles n'en furent donc pas le principe.
Tout ceci démontre que nous ne nous sommes pas trompés en avançant que les Ethotia, dont il est parlé un peu plus haut, étaient des ouvrages relatifs à Thot ou au Calendrier : ce nom signifie manifestement les signes des temps : Eid-Thothi-a.

Hermès

Hermès est le nom que les Grecs donnèrent à Mercure : il signifie interprète. Ils en firent le verbe Herméneuein, expliquer, interpréter. Jablonsky soupçonne que c’est le même nom qu'Armaïs des Égyptiens. Il était tenté de le dériver des deux mots Er et Meh, qui signifient compléter, parce que Mercure en ajoutant cinq jours à l'année, l'avait rendue complète, de défectueuse qu'elle était. Les Étrusques l'écrivirent Urms et quelquefois T Urms, avec l'article oriental. Il parait que Terminus, un Terme ou borne, doit venir de là.

Mercure

Mais que signifie le nom de Mercure donné par les Latins au même Dieu ? Est-il oriental, ou fut-il de la façon des premiers habitants du Latium  ? Suivant qu'il aurait l’une ou l'autre de ces origines, il se décomposerait de différentes manières : aussi est-il difficile de l'expliquer, d'autant que c’est très certainement un mot composé.
Après l'avoir examiné sous toutes sortes de sens, je crois n'être pas fort éloigné de la vérité, si même je ne l’ai pas rencontrée, en y voyant un composé des deux mots Merc et Ur, également Celtes et Latins, qui signifient signe et homme ; en sorte qu'il présenterait mot à mot ce sens, l’homme aux signes : nous dirions marqueur ; ce qui est exactement la traduction du nom Égyptien Thot.
Personne ne contestera l’existence des deux primitifs Marc ou Merc ; et ur, wr, eur, uir, dont les Latins firent vir ; tandis que l'on forma sur le premier les mots Mercari négocier, Merces négoce, marchandises, le mot oriental
מהר Mher qui signifie échange, parce qu'on ne mettait rien en vente qui ne portât la marque du vendeur : tout comme encore de nos jours toutes les marchandises ont une marque, tous les ballots de marchandises et tous les animaux qu'on vend aux marchés et dans les foires, etc. en un mot tout ce qui est considéré comme marchandises, et qui entre dans le commerce.
De-là vinrent encore les mots marché et marque.
Toute marque est un signe et le marché est le lieu des choses marquées, destinées aux échanges à faire dans la place qu'on prépara, qu'on marqua, qu'on assigna pour cet effet, et où était la figure de Mercure.
Le mot Merk qui est de toutes les anciennes langues d'Europe, subsiste encore dans celles du Nord avec les mêmes significations.
Merk y désigne tout ce qu'il peut signifier comme marque et signe, un étendard, une marque, des limites, une mesure, des caractères, les lettres, etc.

Anubis

C'est ici un autre nom de Thot, celui qu'il portait lorsqu'il était représenté avec une tête de chien. L'explication de ce nom a dérouté tous les mythologues. La plupart l'ont tirée du mot hébreu נוב Nébah, qui signifie aboyer. Jablonsky le dérive du copte Anoub qui signifie or, parce que, dit il, ses statues étaient d'or ; et parce que l'aurore et le crépuscule ou les deux portes célestes désignées par les deux chiens qu'on portait dans les processions d'Isis, ont une couleur d'or.
Mais il existe en hébreu, en arabe et même en éthiopien, un mot qui doit être la racine de celui-ci, le mot נוב Nub, dont le sens propre et primitif existant encore dans l'arabe, est révolution, période, succession, tout ce qui succède ; en sorte qu’il signifia de plus en arabe, un vicaire : en hébreu fleurir, germer, les productions d'une année qui succèdent toujours à celles d'une autre : en hébreu et en éthiopien, discours, élocution, éloquence, parce que les paroles succèdent les unes aux autres.
Il fut donc appelé avec raison Anubis, puisqu'il réglait les révolutions des années, et qu'il expliquait éloquemment la volonté des dieux ou des astres ; et il fut peint sous la figure d'un chien ou d'un personnage à tête de chien, dont le nom était déjà si ressemblant à celui d'Anubis, parce qu'on le regarda comme le gardien ou le portier des cieux, et qu'il faisait l’ouverture des temps ou des années. C’est par la même raison que la constellation par laquelle s’ouvrait l'année égyptienne était appelée Canicule, ou le Grand chien.

Cyllènius

On le surnommait aussi Cyllenius. "Hermès Cyllenius évoquait les armes" dit Homère (31). Cette épithète a embarrassé : c’était, disait-on parce qu'il était né sur le Mont-Cyllène en Arcadie, ou parce qu'il y avait un temple, ou parce qu'un ruisseau appelé Hermès, coulait au pied de cette montagne, ou parce qu'il était fils de la nymphe Cyllène.
Cette épithète n'est point grecque ; elle vient des Orientaux qui la donnèrent à Mercure, à cause de sa Lyre. Ce mot signifie exactement un joueur de lyre : il est composé de l'oriental כלי Celi, Culi, Cylli, etc. qui signifie tortue ou lyre ; et d'où vint le mot grec Χελης Khelis, lyre.

Sixième classe de preuves :  Il est le meurtrier d’Argus, et est appelé Argiphonte

Ceux qui ont la plus légère teinture de la fable savent que Junon étant jalouse d'Io, qu'aimait Iou, la métamorphosa en vache et la mit sous la garde d'un personnage appelé Argus, qui ayant cent yeux, en tenait toujours cinquante ouverts. Mais que, heureusement pour Io, Mercure, à qui l'on avait donné la commission de la délivrer, endormit Argus au son de sa douce harmonie, et lui coupa la tête ; et qu'en mémoire de cet événement et pour se consoler de la perte de son favori, Junon le changea en paon, oiseau couvert d'yeux et qui lui était consacré ; d'où vint le proverbe, c’est un Argus.
Mais ce qu'on ne sait pas, c’est quelle fut l'origine de cette fable ; ce que l’on doit entendre par Io, par Argus qui l’épie ; en quoi consiste son meurtre par Mercure.
Cependant, avant d'en donner l'explication, ajoutons ici un usage auquel on n'a rien compris jusqu'à présent ; mais qui est ici dans sa vraie place et dont l'explication ne sera pas plus difficile.
Nous voyons dans les Fables d’Ovide (32) que chaque année, le jour des Ides de Mai, ou le 15 de ce mois, une vestale jetait d'un pont du Tibre dans la rivière, des figures de jonc, d'osier, ou de paille, qui représentaient, dit-il, moins d'anciens personnages illustres, comme traduit l'Abbé de Marolles, que des personnages antiques, des vieillards décrépits. Ce poète n'en dit pas le nombre ; mais j'ai lu quelque part qu'elles étaient au nombre de trente.
En jetant les yeux sur le calendrier romain, on voit que ce même jour 15 mai, était célébré comme jour de la naissance de Mercure ; que c'était celui de la fête des marchands, et que la Lyre venait de se lever le matin de ce jour-là même.
Tous ces objet sont liés étroitement à Mercure comme inventeur de l’astronomie ; et ils seront une nouvelle preuve du point de vue sous lequel nous l'envisageons.
Dans le style allégorique, Tuer, en parlant des constellations, c’est en terminer l’apparition : c'est la remplacer par une autre. Nous disons de même qu'une année expire, tandis qu'une autre naît : ces expressions sont de toutes les langues ; mais elles sont communes surtout dans la langue mythologique. C'était une remarque nécessaire, relativement à une fable comme celle d'Argus, qui a pour objet l'astronomie.
Io c'est la Lune ; Argus rempli d'yeux, dont les uns veillent tandis que les autres dorment, est le Ciel étoilé dont on n'aperçoit jamais que la moitié. Il a toujours les yeux ouverts fur Io, métamorphosée en vache, puisqu'on la peint sous la figure d'un Croissant ou d'une tête de vache.
Mercure qui ouvre avec son caducée une nouvelle année, met donc cette révolution qui épiait Io ou la Lune ; il ne fait même que lui enlever la tête, car l'almanach d'une année ressemble à celui de l'année précédente, à la tête près, ou au titre qui a disparu pour faire place à un autre.
Aussi au jour de la fête de Mercure, ou du renouvellement, on jette dans la rivière la vieille année sous la figure d’un vieillard décrépit, et qui n'est plus.
C'est ainsi qu'à la fin du Carnaval, et lorsque Pâques amène le renouvellement de tout, on jette à l'eau dans plusieurs provinces Carmentran, ou pour mieux dire Carême-entrant, sous la figure également d'un homme de paille. Ce sont toujours les mêmes usages sous des noms divers.
Telle fut sûrement encore l’origine de ce grand nombre de figures colossales qu’on promène dans la Flandre un jour de l’année, et auxquelles on donne les noms d’anciens rois.
Macrobe avait entrevu l'explication que nous donnons ici du meurtre d'Argus ; comme nous, il faisait d’Argus, le Ciel (33) ; mais il voyait la terre dans lo, et le Soleil dans Mercure ; ainsi Argus était tué, en ce que tout son éclat et toutes ses étoiles disparaissent au lever du Soleil ; veluti enecat, dit-il, vi luminis sui, conspectum eorum auferendo mortalibus.
Ne soyons pas surpris que des trois caractères que renfermait cette énigme, Macrobe en ait manqué deux, et surtout celui de Mercure ; c’est qu’il partait d’un système dont le fond était vrai, que toutes les divinités païennes se réduisaient au Soleil et à la Lune.
N'omettons pas une nouvelle preuve de notre explication : c'est que peu de jours après la fête des Argées, on célébrait à Rome celle de Janus. C'est la nouvelle année qui succède à l'ancienne, et entre ces deux cérémonies s'écoulent cinq jours, en mémoire des cinq épagomènes. Les voilà donc trois fois dans le calendrier Romain de Jules César, parce que le commencement de l'année avait été attaché successivement à trois époques différentes, et que les anciennes fêtes, au lieu de changer de place avec le commencement de l'année, ne faisaient que se répéter, se doubler et se tripler, autant de fois que la tête de l'année changeait.

Sixième classe de preuves : Rapports de Mercure avec Janus

Afin de nous former une idée juste de Mercure, surtout de Mercure tel que le peignaient les Égyptiens, avant que les Occidentaux eussent ajouté de nouvelles idées à celles qu'en avaient les peuples d'Orient, comparons ce qu’on nous en dit avec le Janus des Latins. Car le Mercure de ceux-ci ne répond qu'en partie au Mercure Égyptien ; il faut le réunir à Janus, si l'on veut retrouver à Rome tout ce qui constitue le Mercure ou Thot Égyptien.
En effet, c'est Janus qui ouvre l'année à Rome comme Thot en Égypte. C'est Janus qui est contemporain de Saturne, qui le reçoit dans ses états, qui seconde ses desseins et son invention de l'agriculture pour le bonheur des hommes, tout comme le Thot des Égyptiens.
Le double visage que Mercure donne à Saturne se trouve dans Janus.
C’est à lui qu'on offre du miel tout comme à Thot. Plutarque (34) dit qu'on offrait à Thot le vingtième jour du mois qui portait son nom, jour de sa fête, du miel et des figues, en récitant cette formule
γλυκιά είναι η αλήθεια, gluku alêtheia, douce est la vérité.
Tels étaient les objets offerts en sacrifice à Janus au mois de janvier.

Quid vult palma sibi, rugosaque carica, dixi,     
Et data sub niveo candida mella cado ?

Que signifient, demande Ovide à Janus (35), ces dattes et ces figues ridées ? Pourquoi ce miel blanc renfermé dans un baril de la même couleur, qu'on vous offre le jour de votre fête ?
C’est Janus qui préside au commerce, et dont la statue est placée à la bourse publique.
C’est encore lui qui tient en main un serpent qui mord sa queue, et qui de ses doigts montrait le nombre 365, pour apprendre aux hommes qu’il régla le cours des années.
Janus est donc une répétition de Mercure ; les seules différences qui règnent entre eux, viennent de ce que l'un préside au solstice d’été et l'autre au solstice d’hiver : il fallait bien que la même figure relative à ces deux saisons eût des noms et des caractères différents pour chacun de ces rôles.
Si la figure qui désigne le solstice d’hiver ou le renouvellement de l’année romaine s’appelle Janus, c’est, dit-on, parce qu’il est le portier des Cieux et qu’ainsi il prend son nom de Janua, qui signifie porte : fort bien ; mais vient le mot Janua lui -même ? Et pourquoi forma-t-on le nom de Janus plutôt de Janua que de Porta, qui signifie la même chose ? Il faut donc chercher une autre cause de ces noms.
Les portes sont des jours, mais Ian signifiait primitivement jour : il désigna donc au figuré et par métonymie, une porte. De là, Ianus, mot à mot le dieu du jour, et puis le dieu des portes, et la porte de l'année, parce qu'il présidait surtout au premier jour.
Et de là, Jana ou Diana la Lune, par la même raison, puisqu’elle est le flambeau de la nuit.
Aussi Janus présidait à chaque premier jour du mois ; et c'est par cette raison qu'il avait douze autels à Rome, sur lesquels on sacrifiait successivement chaque premier du mois.
S’il présidait à la bourse, et si Mercure en porte également une, s’ils sont tous les deux protecteurs de la monnaie, du commerce ou des échanges, et des marchands, des trafiquants, vendeurs, acheteurs, changeurs, etc., c’est que la monnaie, de quelque espèce qu'elle fut, d'or, d’argent ou de cuivre, était sous la protection du Soleil ou de Janus ; soit parce qu'il était regardé comme le Dieu de l’or, le plus précieux des métaux ; soit parce que la monnaie éclairait les achats et les ventes et les rendait aisés et sûrs, comme le Soleil éclaire les opérations des hommes

Septième et dernière classe de preuves : L’Antiquité nous l’offre comme un astronome

On aura sans doute regardé comme un paradoxe le point de vue sous lequel nous avons offert jusque ici à nos lecteurs cette portion de la mythologie ; il n'est peut-être personne qui ne craignît encore de se faire illusion s'il se rendait à nos preuves, comme étant trop opposées aux idées qu'on s'est toujours formées de Mercure.
Il faut en effet convenir qu'aucun de nos Modernes ne s'était jamais avisé de considérer Mercure comme l'inventeur de l'astronomie ; et qu'au lieu d’approfondir le sens caché sous les emblèmes qu'offre son histoire, on n'en prenait que quelques traits particuliers les plus aisés à saisir, au moyen desquels Mercure était fort au-dessous des titres qu'on lui donnait ; et paraissait plus digne de mépris que d'estime.
Ainsi, lors même que nos idées sur son sujet ne seraient pas aussi démontrées qu'elles le sont, on devrait les adopter par le bel ensemble qu'elles offrent, par l'intérêt qu'elles répandent sur ce personnage, par la lumière qu'elles jettent sur toutes les énigmes dont son histoire est remplie, par le degré de connaissances et d'industrie qu'elles supposent chez les premières générations agricoles, et par la manière dont elles nous présentent le développement d'une science de premier besoin, et aussi intéressante que l'astronomie.
Mais quel prix n'acquerront pas ces considérations, lorsqu'en jetant les yeux sur ce que les Anciens disent de Mercure, on remarquera qu'ils s'accordent tous à lui attribuer l'invention de l'astronomie ; et qu'il a fallu que la préoccupation des Modernes fût aussi grande qu'elle était pour ne pas s'en apercevoir ?
"Il donna", dit Diodore, dans le passage que nous avons rapporté au commencement de cette allégorie ; "il donna aux hommes les premiers principes de l’astronomie."
Les Anciens ne se sont donc pas contentés de nous le dire d’une manière énigmatique : ils nous ont encore donné la clé de leurs énigmes relatives à Mercure.
Tout comme ils avaient dit que Saturne avait inventé l'agriculture, ils disent également que son conseiller a inventé l'astronomie.
Ils donc bien vu l’histoire de Mercure, puisqu'ils l'ont rapportée à l’astronomie ; et celle-ci en est réellement la clé, puisque les faits absurdes et inconcevables que renfermait cette histoire deviennent si lumineux et si intéressants dès qu'on part de ce principe.
Ce qui faisait illusion, c’est que l'on envisageait Mercure relativement à une invention attrayante et qui absorbait l'imagination des critiques ; l'invention de l'écriture, qu'on lui attribuait et qu'on regardait comme la principale de ses découvertes, comme celle qui le distinguait le plus.
L'un devait sentir cependant que le but de l'Antiquité n'avait pas été de nous offrir dans Mercure l'inventeur de l'écriture, plutôt que celui des caractères astronomiques et de l'Astronomie ; puisqu’avec cette méthode son histoire entière était un vrai chaos ; et que cette Antiquité gardait le plus profond silence sur ces prétendus caractères scripturaires qu'on suppose qu'elle lui attribuait : car si l'on demandait à ces critiques quelle était la nature de ces caractères, s'ils étaient alphabétiques ou hiéroglyphiques, et quels rapports ils avaient avec l'histoire entière de Mercure, ils seraient réduits à garder le silence ; et toutes les beautés que l'histoire de Mercure nous a offertes jusqu'ici seraient totalement perdues

Article quatrième

Divers rapports sous lesquels Mercure fut considéré dans la suite


Thot ou Mercure, Inventeur de l'astronomie, ne fut pas réduit chez les Anciens ce seul genre d'occupation ; il devint successivement le die des bornes, celui des Marchands et des Voyageurs, le conducteur des âmes après leur mort, le patron des hérauts, jour, planète, métal, etc. Peu de divinités anciennes ont eu un district plus étendu et plus varié : mais comment pensa-t-on à le regarder comme le centre d'un si grand nombre d'objets  ? C’est à en rendre compte que nous destinons cet article : on y démontrera que ce fut par un simple développement des premières idées que l'on s'en forma ; et par l'application successive de son nom aux objets qui y avaient quelque rapport.

Dieu des bornes

Thot était un mot primitif parfaitement synonyme de notre mot "signe" : nous l'avons vu, de même qu'en celte Mercure est composé du mot Marque qui emporte également avec lui toute idée de signe.
Mais les Bornes font des signes qui distinguent les terres les unes des autres et qui représentent les droits qu’ont sur elles ceux auxquels elles appartiennent. Toute borne fut donc un Thot, un Mercure et elles furent tout naturellement sous la protection de ce Dieu, lorsque le temps arriva où tout dû être consacré à une divinité particulière.
De-là, les noms de Marque, Marca, Comarca, Marche, donnés aux frontières ou aux divisions de pays, dans nos langues modernes d'Europe ; et d'où sont venus nos mots marquisats et marquis.
Il arriva même que ces bornes furent sculptées sous la figure de Mercure : elles étaient alors doublement des Hermès, ou Mercure. Souvent, elles furent surmontées d'une Tête de Minerve, compagne fidèle de Thot dans ses travaux ; alors on les appelait Herm-Athènes, des noms qu'avaient en grec Mercure et Minerve.
De ce même mot Ermès désignant les bornes, joint à l'article T, vint le mot latin T-Erm-inus, une borne ; de la même manière que le mot Terre n'est autre chose que ce même article T et le primitif Er ; et de terminus vint notre mot un Terme.

Dieu du commerce

Mercure dut devenir par toutes sortes de raisons, le dieu du commerce et des marchands.
  1. Parce qu'en réglant l'année, et en construisant le calendrier, il avait fixé les jours qui seraient consacrés plus particulièrement aux échanges, aux marchés, et aux foires.
  2. Parce que son nom, chez tous ces peuples, était celui des signes qui facilitent les échanges ; qu'il devint le nom même des échanges et des choses mises à part pour être échangées : de-là tous nos mots marque, marché, marchandises, marchand, commerce, commercer : et les mots marc et poids de marc, donnés aux signes comparatifs du poids des objets mis dans le commerce.
  3. Parce que les grands échanges de nation à nation se faisaient dans les places frontières, et près des bornes des deux peuples, sous l’œil et sous la sauvegarde de la divinité protectrice des bornes.

Dieu des voyageurs et des chemins

Dès que Mercure était devenu le dieu des bornes, et celui des commerçants, il se trouvait tout naturellement le dieu des chemins et des voyageurs : les chemins ne s'ouvrent que pour faciliter le commerce ; c'est par eux que les peuplades et les nations communiquent les unes avec les autres ; et dès qu'il y eut deux peuplades l'une à côté de l'autre, elles durent être unies par un chemin, au moyen duquel elles ne restaient pas isolées, et pouvaient vaquer entre elles à des échanges qui allaient doubler en quelque sorte leurs travaux, leurs jouissances et leurs biens, par la communication mutuelle de ce que chacune avait de propre : principe pris dans la nature, et qui étant poussé de proche en proche, tend à faire de la terre entière une seule société, divisée par les productions et réunie par leurs échanges.
Les Anciens étaient tellement convaincus de la nécessité des chemins pour la prospérité des sociétés, qu'ils représentaient comme une action vertueuse et agréable aux dieux de travailler à leur entretien ; de-là l'usage d'en amasser toutes les pierres et de les porter à des monceaux élevés d’espace en espace, et consacrés également à Mercure : usage dont on ignorait la raison, et qu'on croyait n'avoir été établis que pour honorer Mercure.
Salomon, dans ses Proverbes (36) fait allusion à cet usage, en disant que celui qui honore un insensé, est comme celui qui jette une pierre sur un de ces monceaux élevés dans les grands chemins". Vincent de Beauvais (37) attribue un pareil usage aux Arabes de son temps et à quelques nations indiennes.

Conducteur des âmes après la mort


Mercure est représenté déjà par Homère comme le conducteur des âmes dans les Enfers, et comme celui qui ayant pu les y conduire, était également en état de les en ramener. Ce privilège de Mercure, qui ne parait avoir aucun rapport à ses autres fonctions, a fort intrigué les mythologistes : on peut voir dans leurs ouvrages les raisons qu'ils en allèguent, trop peu satisfaisantes pour être seulement transcrites. Rien cependant n'était plus simple.
Dès que les chemins et les voyages avaient été mis sous la protection de Mercure, ne devenait-il pas le protecteur-né du grand voyage  ?
Ajoutons qu'il était encore très naturel de mettre les grands chemins et les voyages de toute espèce sous la protection de la divinité qui avait tracé en quelque sorte, par le calendrier, le chemin du Soleil, et qui, par les tropiques, avait fixé les points du départ et du retour, de la mort et de la vie.
C'est par une suite de cette idée que l'on considéra les deux tropiques comme les portes de la vie et de la mort, et le chemin des âmes : elles étaient donc sous la garde de Mercure et de son caducée, puisque ce symbole n'était autre chose que la peinture du chemin même que le Soleil parcourt d'un tropique à l'autre.

Patron des hérauts

Enfin, pourquoi les hérauts sont-ils armés du caducée ? Ce symbole, qui leur est commun avec Mercure, a d'autant plus embarrassé les critiques qu'ils ignoraient l'origine du caducée : on s'imagina donc que Mercure n'était armé du Caducée que parce qu'il était considéré comme le héraut des Dieux, comme leur interprète. C'était éluder la question, et non la résoudre ; car on était en droit de leur demander pourquoi les hérauts portaient le caducée, et ce qu'il signifiait dans leurs mains ; à quoi, nulle réponse satisfaisante.
Ce n’est pas Mercure qui doit son caducée aux hérauts ; ce sont ceux-ci qui empruntent de Mercure son symbole parce que, comme lui, ils sont les interprètes des volontés d’un autre : et s’il porte le caducée, c’est qu'il explique par-là, comme nous avons vu, la volonté des Dieux astronomiques.
Dès qu'il était considéré comme un interprète, comme un héraut, et qu'en cette qualité il portait le caducée, symbole parlant de la commission dont il était chargé, les hérauts durent le prendre pour leur patron et s'approprier son symbole, porter son ordre ; mais dès ce moment il n'eut plus la même valeur ; et de-là, l'impossibilité où l'on avait été jusqu'à présent de remonter à sa première origine.
C'est pour marquer que les hérauts avaient pris pour patron Mercure qu'on disait que Kêryx, le père de tous les kêryces ou hérauts, était fils de Mercure et d'une fille de Cécrops, roi d'Athènes, soit d'Aglaure, selon Pausanias (38) ; soit de Pandrose, selon Pollux (39) et selon le Scholiaste d'Homère (40).
Ils avaient d'autant plus lieu d'emprunter le caducée pour symbole qu'ils étaient chargés de diverses fonctions relatives au calendrier : ils annonçaient, par exemple, la Néoménie ou la nouvelle Lune, le commencement des mois (41) et les jours qu'il fallait fêter. Ils faisaient donc par conséquent encore l'ouverture de l'année.
N'omettons pas l'origine du nom du caducée : le mot grec Kêryx (un héraut), le même que Kerux, se prononçait en dorien Karux : de-là Karukeion, nom du symbole que portaient les hérauts. Les Latins changeant ici R en D, par un changement très commun, en formèrent le mot caducée, qui nous est resté.
Et s'il est le symbole de la paix, c'est parce qu'il est déjà celui de l'harmonie céleste qui règne entre les astres ; et qu'il est destiné à faire régner la même harmonie entre les opérations champêtres et les mouvements des cieux.

Autres acceptions de Mercure

Lorsque l’on voulut donner des noms aux jours du mois, et que l’on eut divisé ceux-ci en quatre portions ou semaines relatives quartiers de la Lune ou des mois Lunaires, on les mit sous la protection dès sept planètes. On eut dès lors une double série de sept jours, et de sept planètes portant les mêmes noms. Il en fut de même lorsqu'on voulu donner des noms aux sept métaux : ceux ci formèrent une troisième série, désignée toujours par les mêmes noms que les deux précédentes : le nom de Mercure en fit partie ; de-là il résulta que Mercure fut

  • une des sept planètes,
  • un des sept jours,
  • un des sept métaux.

Nous allons le considérer sous ces trois acceptions.

Mercure, une des planètes

Les planètes, au nombre de sept, furent regardées, dès la plus haute antiquité, comme les directrices des temps : on par leur imposer des noms relatifs aux idées que l'on s'en formait. Il bien juste que celui qui avait inventé le calendrier donnât son nom à l'une des planètes : aussi une des deux qui sont placées entre la Lune et le Soleil, en Égypte, dans la Grèce et en Italie, le nom de Mercure. On peut même dire qu'elle le porte chez tous les peuples éclairés de l'Europe et de l’Asie, parce que les noms qu'on a substitués à celui-ci chez les autres peuples, désignent toujours le même personnage.

Mercure, un des jours de la semaine

Les noms des jours de la semaine furent arrangés avec un tel ordre que le Soleil présidait au premier, la Lune au second, tandis que Mercure donnait son nom au jour qui était exactement au milieu de la semaine. Cet arrangement ne s'était certainement pas fait au hasard : on crut que l'inventeur de l'astronomie devait occuper une place distinguée entre les jours ; et comme la première était prise par le Soleil, et celle du jour du repos par Saturne, on donna à Mercure celle du milieu, ou du cœur ; mots synonymes dans ces temps-là.
Ceci est arrivé tellement de dessein prémédité, qu'afin que Mercure pût occuper cette place, on ne le compte pas dans le rang astronomique que la nature lui a assigné. En effet, les noms des jours n'étant pas empruntés des planètes suivant l'ordre physique ou naturel des planètes, mais en prenant celles ci de quatre en quatre, puisque Saturne et le Soleil qui donnent leurs noms au Samedi et au dimanche qui se suivent, ont deux planètes entre elles deux, Jupiter et Mars, et qu'il en est de même du Soleil et de la Lune, etc. il faudrait qu'il y eût également deux planètes entre Mars et Mercure, dès qu'ils donnent leur nom aux deux jours qui suivent ceux-là ; ce qui n'est pas, puisqu'il n'y a entre ces deux planètes que le Soleil. Aussi les Égyptiens et les Perses (et sûrement les anciens peuples agricoles) ne nomment Mercure dans l'ordre des planètes qu'après Vénus, de cette manière

Saturne, Jupiter, Mars, le Soleil, Vénus, Mercure, la Lune

à moins qu'on ne supposât que ces deux planètes changèrent réellement de nom dans la suite ; et que celle que nous appelons aujourd'hui Vénus, s’appelait dans l'origine Mercure, afin que le nom de cette dernière se trouvât au milieu de la semaine.
Ce serait donc par cette raison que la planète de Mercure s’appelait Stilbos, c'est-à-dire, l'étincelante, la lumineuse : ce qui n'est vrai que de Vénus.

Mercure, un des métaux

Lorsque les Égyptiens, s'étant appliqués à l'histoire naturelle et à la chimie, eurent reconnu qu'il existait sept métaux, ils leur donnèrent encore le nom des sept planètes ; et dans le choix qu'ils en firent, ils cherchèrent à se régler d'après le rapport qu'il pouvait y avoir entre eux.
Ainsi les deux métaux les plus précieux pour les échanges, l'or et l'argent, furent consacrés au Soleil et à la Lune : l'un s'appela Or, parce qu'il était blond comme le Soleil ; et l'autre Argent, parce qu'il était blanc comme la Lune. Mais pourquoi celui que nous appelons Mercure échut-il à l'inventeur de l'astronomie, ou à la planète qui donnait son nom au jour qui occupe le milieu de la semaine?
Peut-être ne restait-il que celle-ci à pourvoir, lorsqu'on trouva le Mercure : peut-être reconnut-on dans l'argent vif quelque rapport avec les idées qu'on se formait de Mercure, considéré comme un astronome : il avait assigné à chaque planète ses fonctions : il avait démêlé leurs divers mouvements et leurs séparations réciproques : de même le métal appelé de ce nom, sert à séparer les métaux les uns des autres, et à reconnaître ainsi leurs conjonctions, leurs séparations, leurs rapports, etc. Tous deux sont en quelque sorte des interprètes dont on ne saurait se passer.
Cette connaissance des métaux chez les Égyptiens, et le nom de Mercure porté par l'un d'entre eux qui est d'une grande ressource dans la chimie, a persuadé à quelques explicateurs des fables que la mythologie entière avait pour objet la chimie et la découverte du grand œuvre, de la pierre philosophale, de la transmutation des métaux en or. On a même composé de gros livres dans cet esprit.
La Mythologie renferme sans doute diverses allusions à ces noms des métaux, pris des divinités païennes : mais on ne saurait conclure de quelques faits que la fable entière n'est qu'une allusion à la chimie, ou que des préceptes relatifs au grand œuvre.
Les preuves sur lesquelles on s'appuie sont dénuées des conditions essentielles une saine explication des allégories anciennes, telles que l'aveu de l'Antiquité, leur rapport aux besoins essentiels des hommes, et des motifs plus forts que ceux qu'on tire du travestissement des mots par des étymologies qui se bornent à les décomposer à volonté, et de la manière la plus arbitraires.

Des colonnes sacrées de Thot

Nous ne saurions omettre un passage de Manéthon, cité par tous ceux qui ont voulu expliquer l'histoire de Thot ou du Mercure égyptien, et sur lequel ils se fondent tous pour faire de Mercure l’inventeur de l'écriture, inconnue jusqu'à lui.
"Manéthon, nous dit Eusèbe (42), racontait dans un de ses ouvrages intitulé Sothis ou la Canicule, diverses choses sur l'empire des Égyptiens, tirées des colonnes qui sont dans la Terre Sériadique, et gravées dans le dialecte sacré et en lettres hiéroglyphiques, par Thot le premier Mercure, et après le Déluge transcrites dans des livres en lettres hiéroglyphiques par Mercure, fils d’Agathodémon, père de Thot, et placées dans les sanctuaires des temples égyptiens."
Passage obscur, que chacun explique à sa guise, et que Jablonsky traduit ainsi (43) :
"Les choses que Thot, le premier Mercure, avait gravées dans le dialecte sacré et en caractères sacerdotaux sur les colonnes placées dans la Terre Sériadique, furent traduites dans la langue des Grecs par Agathodémon, fils du second Mercure, et père de Thot."
Il convient cependant que le nom des Grecs s’est glissé ici mal à propos, et il ajoute qu'on ne peut s'empêcher de reconnaître dans ce passage un parallèle de ce que Josèphe rapporte (44) sur les colonnes de Seth, chargées d’inscriptions Astronomiques, et qui subsistaient encore dans la terre syriade.
Ainsi, selon les Juifs, comme selon les Égyptiens et selon les auteurs orientaux, il y aurait déjà eu des observations astronomiques gravées avant le Déluge ; le second Mercure n'aurait fit que les renouveler dans la suite.
Quant à cette terre syriade, Jablonsky y voit les syringes ou souterrains qui servaient d'archives sacrées aux prêtres égyptiens, et où les Anciens conviennent qu'étaient renfermées les colonnes de Mercure. Il cite pour cet effet, ce passage remarquable d'Ammien Marcellin (45). "Les syringes sont des souterrains remplis de détours que creusèrent, à ce qu'on assure, ceux qui présidaient aux cérémonies religieuses, lorsque, ayant appris qu'il devait arriver un déluge, ils voulurent empêcher que la mémoire de ces cérémonies se perdît ; et sur les parois de ces souterrains, ils tracèrent diverses figures d'animaux et d'oiseaux, qu'ils appelèrent lettres hiéroglyphiques, et qui sont inconnues aux Latins."
Il appuie ceci d’un autre passage de Manéthon (46) qui assure que "Thot avait trouvé ou inventé des colonnes, sur lesquelles il avait ordonné que l’on gravât les décrets des astres."
Mais quel que soit le sens de ces passages réunis, et quelque parti que l’on prenne relativement à leur authenticité, il en résulte très clairement et évidemment :

  • Que Thot était regardé comme l'inventeur de l'astronomie ;
  • Que ses colonnes étaient relatives à cette science ;
  • Qu'elles étaient renfermées dans les sanctuaires égyptiens et confiées aux prêtres, conformément à l'usage constant de tous les siècles et de tous les peuples agricoles ;
  • Qu'elles avaient pour objet l'utilité publique ; et que c'était par ce motif qu'on prenait de si grandes précautions pour en perpétuer la connaissance.

Ainsi ces passages, loin de venir à l’appui de ceux qui ne voient dans Mercure que l’inventeur de l’écriture, confirment de la manière la plus expresse tout ce que nous avons dit pour démontrer qu’on l’envisagea toujours comme l’inventeur de l’astronomie ; et que ses instructions gravées sur des colonnes contenaient ses observations astronomiques, ses cycles, son calendrier, et nullement l’histoire d’Égypte, comme on le pensait.

Article cinquième

Si Thot ou Mercure fut un être réel ou allégorique

Après avoir vu que l’histoire de Mercure est une allégorie relative à l’invention de l’astronomie et du calendrier, il resterait à examiner s'il exista en effet un personnage appelé Thot par les Égyptiens, Hermès par les Grecs, Mercure par les Latins ; par tous, l'homme aux signes ; et qui inventa ce qu'on lui attribue ici ; on s'il n'est lui-même qu'un être allégorique.
Cette question est plus difficile à résoudre peut-être, que l'allégorie même qu'offrait l'histoire de Thot. Jablonsky, si célèbre par ses profondes recherches sur la mythologie égyptienne, a consacré à son examen une portion très considérable du chapitre où il traite de Thot (47) ; et tout ce qui résulte de cette longue discussion, c'est :

  1. que Thot fut un nom allégorique donné à Vulcain ou Phta, dieu des arts et des sciences en Égypte ; et aux colonnes sur lesquelles étaient inscrites les instructions publiques, et qu'on mettait ainsi sous la protection de Vulcain ;
  2. que les Égyptiens comptaient trois Mercures et au moins deux, comme on le voit par le passage de Manéthon que nous avons rapporté, et où il est fait mention de deux personnages appelés Mercures, et d'un troisième appelé That, qui est très certainement le même non que Thot ;
  3. que de ces différents Mercures, l'un devait être considéré comme l’inventeur des Lettres, et l'autre comme leur restaurateur ;
  4. que le premier de ces Mercures représente le temps où les sciences commencèrent à être cultivées sous le règne de Ménès, premier roi d’Égypte, ou au temps de son successeur Athotès ;
  5. et que le second Mercure en l'époque de la perfection du calendrier sous le règne du XXXVe roi de Thèbes, appelé mal à propos Siphoas, dont le vrai nom fut Saphta, c'est-à-dire, fils de Vulcain ; et que Manéthon dit être Fils d’Agathodémon, le même que Vulcain ; ce qui fait que ce prince surnommé par Érastosthène (48) Ermès, de deux mots Égyptiens qui signifient celui qui conduit une chose à sa perfection ;
  6. Que ce Prince est appelé Arminon par Censorin (49) dans son Traité sur le jour de la naissance ; et qu'il lui attribue l’addition des cinq jours, faite à l'ancienne année, pour la rapprocher du vrai mouvement du Soleil.
Cependant cette question n’est point éclaircie, malgré tout ce détail : l’on n'y aperçoit rien de décidé, et l'on ne saurait accorder l'arrangement des deux Mercures, avec le passage de Manéthon sur lequel Jablonsky s'appuie cependant ; car celui-ci ne donne que comme restaurateur des sciences après le Déluge, le Mercure que Jablonsky nous présente comme en ayant été l'inventeur. D'ailleurs ce savant a trop négligé quelques passages de l’Antiquité, au moyen desquels il aurait répandu un plus grand jour sur cet objet intéressant.
Essayons de faire mieux.
Les Égyptiens nous présentent les sciences comme n'ayant été que renouvelées après le Déluge . Manéthon le dit expressément dans le passage cité ci-dessus : les prêtres Égyptiens l'avaient déjà dit à Platon, qui en parle dans son Île Atlantide. On a donc trop dédaigné ce passage.
Qu'il y ait eu plusieurs renouvellements des connaissances humaines, c'est ce dont on ne peut douter : il est donc plus que probable que celui, ou ceux qui inventèrent le Calendrier après le Déluge, ne firent que suivre les traces de ceux qui en avaient établi un, avant cette révolution ; et qu'avant cette époque, avaient déjà existé des colonnes chargées d’observations astronomiques et vrais almanachs.
Mais quel est le personnage qui, lors du renouvellement des sciences, institua le calendrier et que les Égyptiens désignent sous le nom de Thot ou de Mercure ? Fut- il allégorique ou non  ? C'est le vrai état de la question, et ce qu'il s'agit de résoudre.
Pour cet effet, rassemblons tout ce qu'on nous en a dit ; et ce qui regarde les personnages avec lesquels on le fait vivre, seule manière de répandre quelque clarté sur cet objet.
  1. Nous le voyons étroitement lié avec l'histoire d’Osiris et Isis, comme on petit s'en assurer par le passage de Diodore, que nous avons mis à la tête de cet ouvrage.
  2. Il n'est pas lié moins étroitement avec l'histoire phénicienne de Saturne.
  3. Il était contemporain du roi Tham, nous dit Platon (50), qui l'appelle en même temps un dieu ou un homme divin, et l'inventeur des sciences.
  4. Sanchoniathon, la fin du premier fragment, dit qu'il fut fils de Misor qui, avec Sydyk ou le Juste, forment la dernière des dix générations dont ce fragment nous donne l'histoire, et auxquels il attribue l'invention du sel.
  5. Il régna en Égypte, ajoute-t-il.
Ces circonstances réunies semblent indiquer un personnage historique réellement existant ; et doivent même donner d'une manière sûre le temps où il vécut.
Ce fut très certainement dans le temps où les nations du midi de l’Asie, les Chaldéens, les Cananéens, les Égyptiens, devinrent agricoles sous la conduite des chefs de leurs premières colonies, sous celle de Chna dont parle Sanchoniathon pour les Cananéens, et de Ménès pour les Égyptiens ; c’est-à-dire ors du renouvellement après le Déluge, qui avait ravagé ces contrées.
Misor est le même que Misraïm de Moïse, tige des Égyptiens, et celui-ci paraît être le même que Ménès, premier roi de Thèbes ou d’Égypte.
Son successeur est appelé Athotès. Ce nom ressemble fort à Thot ; mais signifie seulement, selon Ératosthène, fils de Thot ; et selon Jablonsky, contemporain de Thot, ou de l'invention des sciences.
Thot serait donc père d'Athotès et contemporain de Ménès, ou Ménès lui-même, puisqu'il est appelé roi d'Égypte.
Manéthon dit qu'il présenta ses ouvrages au roi Tham, nom qui signifie le Juste : c'est un synonyme de Sydyk.
Mais celui-ci est placé dans la Xe génération du monde : Sydyk ou Tham serait donc le même personnage que celui que Moïse appelle Sadik-Tham-im, ou le Juste des Justes, qu'il place également dans la Xe génération du monde, et qui est de la même famille que Misraïm et que Chna, chef des peuples.
Sadyk-Thamim étant le chef de ces familles, il était très naturel que Thot lui offrît ou lui dédiât les ouvrages qui contenaient ses inventions astronomiques ; surtout dès que ce même chef des peuples est représenté par Moïse lui-même, comme le mari d'Adama, de Ghé ou de la Terre ; c'est-à-dire, comme l'inventeur de l'agriculture.
Motif de plus pour que Thot lui offrit ses ouvrages sur l'astronomie, puisqu’ils étaient destinés à la perfection de l'agriculture.
Jablonsky, comme nous avons vu, était tenté de confondre Thot avec Vulcain, les Arts n'ayant pu être inventés que par le feu du Génie ; or Vulcain s'appelle en Égyptien Phta : ceci nous donnerait une nouvelle preuve que Thot en le même que Misraïm ou Ménès.
Moïse faisant l'énumération des enfants de Cham, du nombre desquels est Misraïm, semble en compter quatre, Chus, Canaan, Phut et Misraïm.
Cependant, il ne parle plus que de trois lorsqu’il s'agit d'indiquer les enfants de ceux-ci, et les lieux de leurs établissements ; Phut est totalement passé sous silence. D'un autre côté, ces noms sont écrits dans le texte samaritain de manière que celui de Phut n’est point séparé du nom de Misraïm. On pourrait donc supposer que ces deux noms n'indiquent qu'un seul et même personnage, et l’on reconnaîtrait dans le nom de Phut un dérivé de celui de Phtha, donné à ce personnage avec d’autant plus de raison qu'il aurait établi dans sa colonie les connaissances astronomiques déjà inventées.
Le nom de Ménès ne lui conviendrait pas moins. Ce nom est le même que celui de Men, qui dans toutes les anciennes langues désigna le Soleil et la Lune, flambeaux et guides de l'Univers. Il était donc donné avec raison aux chefs des colonies, tels que Ménès le guide des peuples. Il ne convenait pas moins à Thot, soit qu'il ait été le même que Misraïm ou Ménès, soit qu'il ait été un de ses contemporains, pour avoir inventé ou perfectionné le calendrier, guide indispensable et lumineux de toute société agricole.
Thot serait donc un être réel quant à l'invention de l'astronomie, et à l'époque où elle naquit ; il serait un être allégorique quant à l’extension que l'on fit de son nom pour le donner à la divinité qui présidait au calendrier ; aux fables inventées relativement à l’astronomie, et à tous les ouvrages que l'on composa dans la suite sur cette matière, ou auxquels on donna la forme de journal, comme ceux qui existent en Europe sous le nom de Mercure.
Mais, quoi qu'il en soit de cette discussion chronologique, il restera démontré que Mercure ou Thot fut toujours regardé comme l'inventeur de l'astronomie et de ses caractères ; que tous les symboles dont il est accompagné furent absolument relatifs à cet Art ; et qu'à cet égard, il fut au pied de la lettre le secrétaire et le conseiller de Saturne : ce que nous nous étions proposés d'établir.

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Notes

  1. De Nat. Deor. 1, 2.
  2. Tom. IV. 112-135
  3. Mém. de l'acad. des inscrp. et belles lettres, T. VII, pag. 10.
  4. Diod. de Sic. L. I.
  5. Les Égyptiens ne comptaient en effet que trois saisons, chacune de quatre mois.
  6. Ib. Liv. V. T. II. pag. 37.
  7. Traité d'Isis et Osiris.
  8. Liv. IX. Quest. 3.
  9. Ib. Liv. IV. Quest. 5.
  10. Liv. II.
  11. Surtout dans le Protagoras et dans le Philèbe.
  12. Ant. Expl. T. I.
  13. De orig. et progr. Idol. Tom. I. Lib. II. C. XXXII.
  14. Liv. VIII. p. 172 et suiv. Tom. II.
  15. Dans son ouvrage intitulé, Accord de la nature et de l'écriture.
  16. Panthéon égyptien, Tom. II.
  17. Saturn. Lib. I. C. XIX.
  18. Teleuté est un mot grec qui signifie fin, mort, expiration, et Nephté signifie la même chose en égyptien, de l'aveu de tous les savants en cette langue, et nommément de Jablonsky. Il désigne aussi la victoire, qui est la fin de tout combat, de toute guerre.
  19. Rosh est le mot oriental ראש qui signifie l'opposé de Nephté, commencement, entrée.
  20. Œdip . Égypt. T. I.
  21. Panth. Égypt. Tom. II. Liv. V. p. 162, etc.
  22. Strom. Liv. V.
  23. Mais d'après quels éléments a été calculée la multiplication de 1461 ans par 25 ans ? L'auteur d'une dissertation sur la grande année patriarcale de 600 ans, qui a paru dans le Journal des savants du mois de janvier 1761, a avancé comme un fait démontré que ces 25 ans étaient un cycle luni-solaire de 9125 jours, inventé par Mercure. Si cela était, le grand cycle de 36525 serait une combinaison de trois cycles ; du cycle de 4 ans, du cycle de 1461 ans et du cycle de 25 ans.
    Ce même auteur ajoute que Ptolémée combina ce cycle de 25 ans avec le cycle caniculaire de 1461, en ajoutant 14 ans à celui-ci pour le rendre divisible par 25. En effet, 25 est 57 fois dans 1475, et il cite Syncelle. Mais ce n'est pas précisément ce que dit ce chronologiste.
    Celui-ci, parlant (p. 52.) de la grande révolution de 36525 ans, dit qu'étant divisée par 25, elle se résout en 1461 ans ; que ces calculs sont contenus dans les livres de Mercure appelés Géniques (mot qu'on peut rendre par ceux d'éléments, ou d'origines) έγ γσις Γονιδιαεις γα Ερμα, dans les livres κυραννίδες Cyranides, mot qui ne signifie rien, et qui est peut être une altération de quelque déviré du mot κοιράννος Coirannos, qui signifie souverain : en sorte que ces livres auraient roulé sur la chronologie des souverains de l'Égypte : livres qui, malheureusement, ne subsistent pas (ce passage, auquel personne n'a fait attention, est très intéressant en ce qu'il prouve qu'il existait encore dans les premiers fidèles de l'Église d'anciens livres égyptiens, du nombre de ceux qu'on pensait appeler leurs livres classiques).
    Il ajoute, que c'est ce cycle, qui, selon toutes les apparences, donna à Ptolémée l'idée d'ajouter 14. ans au cycle de 1461 ans, pour le rendre divisible par 25. et qu'aux 1475. ans qui en résultèrent, il ajouta ensuite une année, afin de faire accorder son calcul avec les révolutions lunaires.
    On m’a fait observer à ce sujet que dans l’Astrée, l’espace de 25 ans est appelée un siècle.
  24. Annal. Liv. VI.
  25. Héliopolis.
  26. Liv. II. Symbol. LVII.
  27. Chap. IX. 4.
  28. Gen. XLIX. 26.
  29. Gen. XIX. 26.
  30. Panthéon Égypt. Liv. V. p. 180.
  31. Liv. V. vers. 621-622.
  32. Liv. V. 621. 622.
  33. Saturn. Liv. I. Ch. XIX.
  34. Dans son traité d'Isis et Osiris.
  35. Fast. Lib. I. V. 185. 186.
  36. Chap. XXVI, Vers. 8.
  37. Miroir historial, Liv. IV.
  38. Attiq. Chap. 38.
  39. Onomast. Liv. VIII, C. XI. § 22.
  40. Sur l’Illiade. Liv. I.
  41. Athénée. Liv. XI.
  42. Prép. Évang. Liv. I. Ch. IX.
  43. Panth. Égypt. Liv. V. p. 175.
  44. Ant. Jud. Liv. I. C. II. §. 3.
  45. Liv. XXII.
  46. Tiré des Apotelesm. Liv. V. v. 2, 3.
  47. Panth. Égypt. T. II. pp. 166-190.
  48. Catal. des rois de Thèbes.
  49. De die natali, Cap. XIX.
  50. Dans son Phèdre.

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