L'ASTROLOGIE NATURELLE DU COMTE DE PAGAN

Comme les étoiles ou les planètes sont des substances, elles ont aussi leurs prédicaments suivant la philosophie d’Aristote. Elles ont la quantité, qui est le principe de l’astronomie, et la qualité, qui est le fondement de l’astrologie. D’où vient que la première de ces deux sciences a pour objet la grandeur et le mouvement, et la seconde la nature et les qualités des astres. Or, comme nous avons, dans nos précédents volumes, développé l’astronomie de l’obscurité de tant de cercles et d’épicycles, il nous faut à présent dépouiller l’astrologie de la confusion de tant de préceptes et d’aphorismes, afin qu’elle ait encore de nous cet avantage d’être aussi pure et naturelle que l’autre est maintenant simple et géométrique.


Le comte de Pagan (1604-1665) est un militaire français qui servit les rois Louis XIII puis Louis XIV.
Ingénieur de formation, passionné de géométrie, de mathématiques, d’astronomie et de voyages, il publia de nombreux traités, notamment sur l’architecture militaire et les fortifications (qui inspirèrent Vauban) ou sur l’histoire et la géographie de l’Amazone.
Il a également élaboré une théorie des planètes avec ses "Théorèmes des planètes" (1657), ses "Tables astronomiques" (1658) et "L'Astrologie naturelle" (1659) dont il est question ici.
Il finit sa vie embastillé, huit ans après une condamnation pour s'être vanté de pouvoir faire mourir le roi par magie.


Préface

Notre dessein était au commencement de suivre les quatre livres de Ptolémée, d’en examiner les chapitres comme ils sont ordonnés, d’amplifier les uns, de reformer les autres et d’en retrancher une partie de ceux qui sembleraient contraires au sentiment que nous avons de la science. Mais, n’ayant pu nous assujettir à cette contrainte, n’ayant pu nous soumettre à l’imitation d’un ouvrage étranger, ni enfin nous accommoder à de si communes pensées pour l’astrologie, nous avons élevé notre style et tracé de nouvelles routes pour arriver plus dignement à la fin de notre entreprise. Nous avons en deux mois seulement composé les trois livres de cette première partie, elle contient les principes ou les fondements de la science naturelle des astres, et comme elle suffit à faire connaître les changements ou l’ordre que nous lui donnons, il faut attendre d’en savoir le succès pour nous obliger à poursuivre le reste.

Ce ne sera pas toutefois pour demeurer dans un repos inutile, nos anciennes blessures et les fatigues de la guerre nous ont, à la vérité, privé de la lumière des yeux mais la providence, qui nous a conservé les lumières de l’esprit pour nous soulager en cette infortune, nous veut maintenir en réputation par nos ouvrages.

Nous avions dès notre jeunesse et dans les heures de notre loisir, embrassé volontairement les belles connaissances. Ni les occupations de la cour, ni les voyages des armées, ni les divertissements de Paris, où nous étions engagés comme les autres, n’ont jamais pu nous en détourner parce que nous avons toujours essayé d’avoir en nous tout ce que nous voyions louer dans les autres personnes. Soit dans les armes ou dans les sciences, nous avons aspiré d’égaler ou de surmonter l’estime des plus renommés, et lorsque la fortune a manqué de nous seconder en ce louable dessein, nous avons été réduits au seul partage des bonnes Lettres. Nous avons employé nos travaux et nos veilles en faveur de l’utilité publique. Nous avons commencé par les volumes de nos fortifications, d’un singulier avantage pour la défense des places. Nous avons continué par les dix livres de nos « Théorèmes géométriques », assez considérables pour toutes les plus belles parties des Sciences mathématiques, et sans alléguer la curieuse relation de la grande rivière des Amazones, que nous avons donnée en faveur de la Géographie, nous avons poursuivi par ma « Théorie des Planètes » et nos « Tables astronomiques », afin de donner la dernière perfection à l’astronomie; à laquelle nous avons été comme obligés d’ajouter ce volume, pour l’astrologie, sa compagne.
Or, comme des princes, des rois et des grands seigneurs l’ont en divers temps cultivée, et n’ont point eux-mêmes négligé d’en écrire, il ne faut pas que les envieux de cette belle science se proposent de nous accuser de faiblesse en cette rencontre, s’ils ne veulent premièrement condamner la mémoire de tant de personnes considérables. Nous savons que la plupart des hommes savants et de condition ne portent point avec patience cette application de notre esprit dans les ouvrages des sciences mathématiques. Nous savons qu’ils souhaitent depuis longtemps de voir employer notre raisonnement dans les sujets de l’histoire de la Politique et de la Guerre, et nous savons aussi l’honneur qu’ils nous rendent partout en publiant de tous côtés la bonne opinion qu’ils ont de notre capacité en des matières si relevées. Peut être qu’ils seraient déjà satisfaits, ou du moins en partie, si leur curiosité n’était pour le siècle présent puisque Tacite et Suétone ne voulurent point écrire l’histoire de leur temps, quoi qu’ils vécurent sous les meilleurs empereurs qui aient jamais commandé sur la terre. Et, toutefois, nous n’avons point refusé de puiser de notre esprit et de composer nous même en langage italien la plus grande partie des histoires qui courent partout sous le nom du Comte Galéace Goalde, comme il se voit en quelque façon dans l’une de ses préfaces où cet auteur, personnage de condition et de mérite, n’a pas voulu par discrétion en déclarer davantage.

La politique est sans doute la science la plus digne des hommes et plus les hommes sont élevés, ou par la naissance, ou par le mérite, ou par la fortune, plus ils doivent s’appliquer à cette noble connaissance. Elle comprend l’histoire, la morale, la géographie et les sciences militaires, et si nous en croyons le grand Aristote, elle contient en soi tous les arts et toutes les sciences, comme il le montre au premier livre de sa « Morale ». L’astrologie est encore de sa dépendance : Xénophon nous marque en l’éducation de Cyrus roi de Perse, qu’un prince doit posséder les sciences divinatrices, quand ce ne serait que pour s’empêcher d’être un jour trompé en des affaires de conséquence par les artifices ou l’ignorance de ceux qui les professent, comme il est arrivé de nos jours à des rois, de grands princes et des cardinaux de notre connaissance. Tibère veut aussi que nous soyons intelligents dans la médecine, pour n’être point si souvent abusé par la malice ou l’incapacité des médecins. Et c’est un malheur plutôt pour les hommes que pour cette belle science que tout le monde professe ouvertement de la mépriser, mais secrètement de la croire comme très véritable. Il sera donc avantageux aux princes et aux personnes de condition de s’adonner parfois à la connaissance de l’astrologie. Ils en trouveront les enseignements plus naturels et très faciles dans la suite de ce volume. Et comme il contient en divers endroits son ancienneté, sa noblesse et sa défense, il n’est pas nécessaire d’en traiter expressément en cette préface comme sont tous les auteurs qui l’honorent de leurs ouvrages.

Livre premier

Chapitre I - Des principes, ou premières qualités, de la Nature

Pour donner un raisonnable commencement à cet ouvrage, nous dirons que les quatre principales sciences dans lesquelles toutes les connaissances qui nous arrivent se trouvent apparemment dispersées sont les humaines, les divines, les mathématiques et les Naturelles. Les sciences Humaines, qui sont les plus nécessaires et les plus communes parmi les hommes, sont l’histoire, la morale, la politique et la géographie. Les sciences divines, dont les principes sont assurés et les vérités immuables sont la métaphysique, la théologie, les écritures et les conciles. Les sciences mathématiques, qui ont leurs règles certaines et leurs démonstrations infaillibles, sont l’arithmétique, la géométrie, l’astronomie et la musique. Et les sciences naturelles, qui ont pour fondement la conjecture et l’expérience, sont la physique, la médecine, la chimie et l’astrologie, de laquelle nous avons résolu de parler en ce volume, non comme tous les auteurs qui nous ont précédés, mais d’une manière plus raisonnée et dans une pureté plus convenable.

Or, comme l’astrologie, dont le nom signifie en grec le raisonnement des astres, est enclose dans les Sciences Physiques ou Naturelles et que le premier fondement de toutes ces connaissances consiste aux quatre qualités du Chaud, du Froid, du Sec et de l’Humide, nous devons auparavant expliquer la nature ou l’essence de toutes ces qualités, suivant l’opinion des meilleurs philosophes, dont les sentiments ne sont pas toujours semblables. D’autant qu’Empédocle, Ocellus, Hippocrate, Aristote, Galien, Simplicius, Alexandre d’Aphrodise, Avicenne, Themistius, Averroès, Paracelse et Cardan, sans alléguer les autres, tiennent que toutes ces qualités ne sont que des accidents en la nature; que les quatre éléments du feu, de l’air, de l’eau et de la terre sont des substances et que ces éléments sont composés de la combinaison des quatre premières qualités, donnant au feu la chaleur et la sécheresse, à l’air la chaleur et l’humidité, à l’eau l’humidité et la froideur, et à la terre la froideur et la sécheresse. En telle sorte que l’air se communique au feu par la chaleur et à l’eau par l’humidité et que la terre se communique à l’eau par la froideur et au feu par la sècheresse.

Au contraire, Pythagore, Démocrite, Platon, Leucippe, Épicure, Lucrèce, Descartes et Gassendi assurent que les Nombres, les Figures ou les Atomes, avec le mouvement, sont les vrais principes de la nature de tous les corps, sans admettre les éléments ni les qualités des autres. Mais les anciens mages des Perses et les Chaldéens des Assyriens, selon Hérodote, les prêtres des Égyptiens, suivant Diodore, Parménide, Flavius Josèphe, Ptolémée Alexandrin, Proclus de Lycie et Moïse, le plus ancien et le plus véritable de tous, ne reçoivent que les quatre premières qualités du Chaud, du Froid, du Sec et de l’Humide pour les substances de tous les principes de la Nature, en prenant toujours la terre pour le Sec ou le Sec pour la terre, et toujours l’Humide pour l’eau ou l’eau pour l’Humide. Or, de ces trois opinions si variables et différentes procèdent toutes les diversités et les confusions qui se trouvent dans les professeurs des sciences Naturelles. Ce qui nous oblige à donner enfin notre sentiment de la sorte et, conformément à ceux que nous venons de nommer les derniers, pour qui nous avons plus d’estime et de révérence que pour les autres, tant à raison de leur ancienneté que pour être les plus exercés dans la connaissance des astres.

Nous dirons donc, sans autre retardement, que la chaleur et la froideur, la sécheresse et l’humidité sont les principes et les éléments de notre physique, que, de ces quatre qualités, les deux premières sont actives et contraires, et les deux autres passives et diverses, que la substance de la chaleur est le corps lumineux du soleil, que la substance de la sécheresse est la terre opaque et ténébreuse, que la substance de l’humidité est la mer ou les eaux diaphanes, et que la substance de la froideur nous est inconnue, ne pouvant encore nous assurer si c’est la privation de la chaleur, comme les ténèbres sont privation de la lumière, la nuit privation du jour et l’hiver privation de l’été, suivant le huitième chapitre de la Genèse. Or, ce qui nous porte à ne recevoir pas si légèrement la froideur pour une qualité substantielle mais apparemment pour un effet naturel et propre à toutes les parties du globe terrestre éloignées de la chaleur du soleil ou des Étoiles, c’est que nous ne reconnaissons que trois couleurs essentielles en la nature, le jaune qui est la couleur du soleil ou de la chaleur, selon Aristote aux livres de la « Physique », la blancheur qui est la couleur de l’eau ou de l’humidité, suivant les philosophes, et la noirceur qui est la couleur de la terre ou de la sécheresse, selon les mêmes. Car du mélange de ces trois couleurs, du jaune, du blanc et du noir, procèdent toutes les autres couleurs qui se forment en la génération des corps et en tous les phénomènes, comme il se voit en la « doctrine des Météores ».

Ces fondements seront sans doute les plus convenables pour arriver à la parfaite connaissance des qualités naturelles des sept planètes, Saturne, Jupiter, Mars, le soleil, Vénus, Mercure et la lune. Car, de la couleur peu jaune et beaucoup noire de Saturne, nous dirons qu’il a peu de chaleur et beaucoup de sécheresse, de la couleur beaucoup jaune et peu blanche de Jupiter, qu’il a beaucoup de chaleur et peu d’humide, de la couleur beaucoup jaune et beaucoup noire de Mars, qu’il a beaucoup de chaleur et beaucoup de sécheresse, de la couleur jaune du soleil, qu’il a beaucoup de chaleur, de la couleur peu jaune et beaucoup blanche de Vénus, qu’elle a peu de chaleur et beaucoup d’humide, de la couleur peu jaune et peu noire de Mercure, qu’il a peu de chaleur et peu de sécheresse, et de la couleur fort blanche de la lune et fort peu jaune, qu’elle est fort humide, avec fort peu de chaleur.

Mais parce que les philosophes et les médecins nous enseignent que le tempérament le plus parfait pour la bonne constitution des corps et la longue durée de la vie consiste dans le mélange de la chaleur et de l’humidité, nous pouvons ajouter que Jupiter et Vénus sont les planètes les plus bénignes et les plus favorables, comme Saturne et Mars les plus contraires et les plus pernicieuses à la vie. Car, pour le soleil, à raison de sa grande chaleur, il a toujours été cru le père de la Nature comme la lune, à cause de son humidité, la nourrice. Et, quant aux étoiles fixes, on peut reconnaitre aussi leurs bonnes ou mauvaises qualités, par le mélange de la couleur de même qu’aux sept planètes, ou étoiles errantes. Ainsi, par la connaissance de la couleur du soleil ou de la chaleur, de la couleur de la terre ou de la sécheresse, et de la couleur de l’eau ou de l’humide, nous pouvons arriver à la connaissance des qualités de tous les corps célestes. Car, quoiqu’en la nature les causes soient devant les effets, en la connaissance des hommes les effets sont devant les causes.

Chapitre II - Du nombre et de la nature des Planètes

Nous avons déjà dit comme l’astrologie, la médecine, et les autres sciences Physiques n’étaient fondées que sur la conjecture et sur l’expérience. Mais combien la conjecture est difficile et l’expérience dangereuse, Hippocrate le déclare au premier des « Aphorismes ». Toutefois, ces difficultés n’ont jamais été capables d’arrêter les esprits de ces grands personnages, parce que le désir d’une louable réputation a toujours surmonté en eux la crainte des empêchements qui nous traversent dans le chemin de la gloire. Ils furent longtemps à considérer les étoiles du firmament et, sans leur reconnaitre autre mouvement que celui du premier mobile, ils trouvèrent seulement au soleil et en la lune du changement au regard de l’apposition des étoiles fixes. Néanmoins, peu de siècles passèrent dans cette ignorance, la grande lumière de Jupiter et de Vénus découvrit bientôt leurs mouvements et, en après, celui de Mars, puis de Saturne et enfin de Mercure se firent de même apercevoir, toujours dans le zodiaque, selon la succession des signes d’occident en orient, avec étonnement de tous les peuples.

D’autant qu’ils regardaient ces nouvelles étoiles errantes tantôt accélérer leurs mouvements pour s’approcher de certaines étoiles fixes, tantôt cheminer lentement et s’arrêter auprès d’autres non moins belles que les premières, et parfois reculer en arrière comme par crainte et pour fuir la rencontre des étoiles de couleur infortunée. Ce fut premièrement dans la Perse et en Égypte que ces nouveautés furent découvertes et Clèomède nous apprend, dans la préface de Kepler sur les « Tables Rudolphines » que les grecs n’en eurent la connaissance qu’après avoir acquis par les armes la grande et fameuse cité de Babylone. Il ajoute que ces nations épouvantées se persuadaient que la variable démarche de ces nouvelles planètes ne pouvait procéder que d’un mouvement libre et volontaire qu’il appelle pro ereticon et que la crainte, qui accompagne toujours l’admiration, leur fit penser que c’était des corps animés et des natures célestes. Ainsi furent trouvées les cinq planètes qui, avec le soleil et la lune, arrivèrent au nombre de sept. Ainsi, poursuit Clèomède, vint la première opinion qu’il y avait des dieux et qu’en cette sorte l’ancienne religion de l’idolâtrie fut semée par tout le monde.

Or, la même expérience qui leur avait fait trouver le nombre et les divers mouvements des sept planètes, jointe aux raisons physiques ou naturelles de la diversité des couleurs et des lumières de ces corps supérieurs, leur firent donner le nom de Saturne au plus élevé de tous à cause de la faiblesse de sa lumière, de sa couleur pâle et défaite et de la paresse de son mouvement en son orbe, le nom de Jupiter à celui qui est au-dessous de Saturne à raison de sa grande et puissante lumière, de sa couleur belle et resplendissante, et de son mouvement grave, le nom de Mars à la planète qui est au-dessous de Jupiter, à cause de sa brulante lumière, de sa couleur de feu et de son mouvement plus vite que celui des deux autres, le nom de soleil au quatrième, en descendant toujours de Saturne à la terre, à raison de sa grande et abondante lumière, de sa couleur admirable et du merveilleux effet de ses rayons dans le monde, le nom de Vénus à la planète qui est au-dessous du soleil, à cause de sa grande et blanche lumière, de sa belle et brillante couleur et de son mouvement variable, le nom de Mercure à celle qui est en suite de Vénus à raison de sa claire et petite lumière, de sa couleur pâle et délicate, et de son mouvement inconstant et léger dans son orbe, et finalement le nom de la lune à la planète la plus inférieure de toutes et la plus proche de la terre, à cause de la blancheur et de l’inconstance de sa lumière, des divers changements de sa face et de la vitesse de son mouvement à l’entour de la terre.
Ils formèrent de plus ces conjectures, tirées des arguments de la couleur, de la lumière et du mouvement de chacun de ces astres, que Saturne était cruel, envieux et opiniâtre, que Jupiter était libéral, joyeux et bénin, que Mars était vaillant, homicide et colère, que le soleil était grave, illustre et magnanime, que Vénus était belle, charmante et délicieuse, que Mercure était ingénieux, éloquent et variable, et que la lune était enfin puissante, vagabonde et salutaire. Mais ces premiers et anciens fondements jetés de la sorte touchant la nature des sept planètes ne se terminèrent pas à cette première expérience : les Égyptiens, et les Babyloniens leurs colonies, par les observations de plus de quatre cent mille ans d’une part, ou de plus de vingt quatre mille d’une autre, si vous en croyez Diodore, les ont illustrés de tant de belles circonstances que l'astrologie leur en sera perpétuellement redevable.

Toutefois, la théogonie des anciens mages fut bientôt augmentée de toutes ces belles découvertes. Ils remplirent toute la Perse de nouvelles superstitions et, ayant aperçu que, comme Jupiter et Vénus étaient des bonnes planètes, Saturne et Mars étaient de mauvaises planètes. De la conjonction des deux premières, ils formèrent un dieu de bonté sous le nom d'Oromaze, et de la conjonction des deux autres, un dieu de méchanceté sous le nom d'Arimanès. Ils ajoutèrent ensuite qu'Oromaze fit, dès le commencement, vingt quatre œufs, c’est-à-dire douze de Jupiter et douze de Vénus, qu'Arimanès en fit un pareil nombre, douze de Saturne et douze de Mars, et que Mithra, ou le soleil, comme un troisième dieu entre les deux premiers de bonté et de méchanceté, prit tous les œufs d'Oromaze et d’Arimanès ensemble, les rompit confusément dans un bassin et, les versant ainsi mêlés parmi les hommes, remplit toute la terre du mélange de biens et de maux, comme il se voit de tous côtés par expérience.

Or, cette vieille opinion fondée secrètement sur les vérités de l’astrologie, et ouvertement sur les apparences de la morale, fut reçue avec tant d’applaudissement dans le monde que, Manès la transférant de Perse en occident, la religion chrétienne en fut toute contaminée. Saint Augustin confesse lui-même la peine qu’il eut à la renoncer : il trouvait assez raisonnables les deux principes de bonté et de méchanceté établis par les Perses. Mais, reconnaissant enfin que le mal n’était que la privation du bien, et le péché la privation de la grâce, il se rendit finalement au seul et unique principe de la vérité catholique.

Chapitre III - Des fables dont l’astrologie fut anciennement enveloppée

Non seulement les Perses et les Babyloniens, mais encore plus avantageusement les Égyptiens, couvrirent cette belle science de fables. Ces anciens personnages ne jugèrent pas convenable de communiquer ces premières vérités de l’astrologie. Ils les enveloppèrent de diverses fictions pour les dérober à la connaissance des hommes et, comme jaloux de tant de secrets merveilleux, ils s'en réservèrent les curiosités et les avantages. Ils publièrent que Saturne, la plus élevée de toutes les planètes, était le plus ancien de tous les dieux et que, pour la pesanteur de son mouvement et la profonde étendue de son orbe, Jupiter l'avait enchainé par les pieds et l’avait précipité dans le Tartare. Ils inventèrent encore, comme le plus proche du firmament, que sous le nom d'Atlas il soutenait le pesant faix de la sphère étoilée et lorsque Mars se venait joindre à lui par son propre mouvement, que c’était Hercule qui venait pour le soulager à supporter une si grande machine, d’autant que la conjonction de ces deux planètes infortunes donne la force, les travaux et la souffrance. Ils ajoutèrent aussi qu’il se plaisait à dévorer ses enfants parce que cette planète, par ses mauvaises qualités, est toujours contraire à la nourriture et au nombre des enfants en la naissance des hommes d’où vint, suivant Quinte-Curce en son « Alexandre », que les Tyriens et les Carthaginois sacrifiaient des jeunes enfants à Saturne.

De plus, ils enveloppèrent sous le nom de Pluton et de Rhadamanthe, la conjonction de cette planète avec Mercure parce qu’elle dénote dans les figures célestes les personnes sombres et mélancoliques, qui cherchent l’obscurité de la nuit, qui roulent parmi les sépulcres et qui s’appliquent aux enterrements et aux cérémonies des funérailles. Mais comment sauvèrent-ils l'honneur de l’astrologie dans la nourriture et l’éducation de Jupiter, fils de Saturne? Ne controuvèrent-ils pas les fables des Corybantes, dont la fête se renouvelait tous les ans sur le mont Ida de Candie selon Tertullien et Minucius en son « Octave » ? Jupiter est sans doute la plus bénéfique et la plus favorable de toutes les planètes, et sur ce fondement ils feignirent qu’il avait heureusement régné sur l’Égypte et qu’il avait eu nombre d’enfants à cause qu’il dénote la fécondité en toutes choses. Ils lui donnèrent Junon sa sœur pour sa femme parce que la loi des Égyptiens, comme il se voit dans le quatrième livre de Ptolémée, permettait le mariage du frère avec la sœur, comme entre les Perses, du fils avec la mère, d’où vient que le poète Homère appelle Junon sœur et femme de Jupiter, peut-être à l’imitation de Moïse, qui nomme Sarah sœur et femme d’Abraham, fils de Tharé, à cause de la renommée de ce grand patriarche, lequel, suivant Josèphe l'historien et Philon le Juif, porta la science et la connaissance des astres de l’orient en Égypte, d’où elle se répandit après en Grèce.
Or, comme ils ont dit que Saturne était père de Jupiter, à cause de la situation de son orbe plus élevé; ils ont aussi publié par la même raison que le soleil, la lune, Mars, Vénus et Mercure étaient les enfants de Jupiter, que les Égyptiens adoraient sous les noms d'Osiris, d'Isis, de Typhon, de Nephtis et d’Andjéty et en célébraient tous les ans les fêtes solennelles dans les cinq jours entiers qu’ils ajoutaient aux trois cent soixante de leurs années pour les rendre solaires et complètes. Outre ces dieux, dont la nature et les qualités étaient semblables à celles de nos planètes du précédent chapitre, ces anciens philosophes en formèrent encore d’autres du mélange de tous ces astres. Ils célébraient la conjonction de Jupiter et de Mars sous le nom de Minerve la déesse, en joignant la sapience et la fortune de l’un au courage et à la victoire de l’autre, pour en faire un prince parfait et bon capitaine, comme Alexandre le Grand, que Plutarque appelle aussi bien philosophe que roi, ou comme Épaminondas, duquel on doutait, selon Justin, s’il était plus grand capitaine que philosophe.

Ils ajoutèrent avec Homère, en faveur de cette belle influence, que Minerve allant au combat prenait l’égide frangée de Jupiter, voulant signifier la prudence des conseils par cet écu bordé de frange, comme la grandeur de courage par les armes propres de Minerve : qualités du tout convenables et nécessaires à un général d'armée tel que cette conjonction le démontre, pour être, comme Hamilcar, père d'Hannibal de Carthage, sage dans le conseil et vaillant au combat, au rapport même de Polybe. Nous pouvons encore nous persuader que la ville d’Athènes, colonie des Égyptiens suivant Diodore, fut bâtie au temps de la conjonction de Jupiter et de Mars parce que le temple qui lui servait d'hospice et de forteresse était consacré à la polémique et politique Minerve, c’est-à-dire à la guerrière et savante Minerve, comme il se voit dans Plutarque en la vie de Phocion, et aussi parce que la noblesse et les habitants de cette ville éternellement renommée ont été les plus vaillants et les plus savants hommes de la terre.

Mais sous quelle autre fable les anciens prêtres d’Égypte ont-ils voulu cacher à la postérité les beaux effets de la conjonction de Jupiter et de Vénus, dont le premier dénote la paix et l’abondance et l’autre l’amour et la joie ? Ils l’ont adroitement couverte du nom de Dionysos, c’est-à-dire de Jupiter Nysien pour avoir pris la naissance dans la ville de Nyse en Arabie, parce qu’il allait par le monde suivi d’un grand nombre de personnes joyeuses et de femmes non moins agréables, qu’il portait partout la paix, l’abondance, l’amour et les délices, qu’il chassait de tous côtés les bruits et les soins de la guerre, qu’il enseignait à tous les peuples la culture des fruits et de la vigne, qu’il prêchait à toutes les nations la bonne chère et l’amour, et qu’il persuadait par son exemple à toutes les provinces qu’il visitait le repos, les festins et la danse.

Quant à Mercure, planète indifférente et de double nature, c’est-à-dire masculine avec les planètes masculines et féminine avec les planètes féminines, nous trouverons que le poète Homère s’en sert sous le nom tantôt de Mercure messager des dieux et tantôt d'Iris messagère des mêmes, dénotant en son Iliade, lorsque Jupiter envoya Iris à Neptune pour le faire retirer du combat, que Mercure était alors féminin dans le ciel, et, quand le même Jupiter dépêcha Mercure pour accompagner Priam de nuit en la tente d’Achille, que cette planète était masculine, c’est-à-dire orientale au respect du soleil ou avec des planètes de semblable nature. Ils ont encore enveloppé sous le nom de Vulcain la brûlante conjonction de Mars et du soleil parce qu’il fut le premier en Égypte à trouver l’usage du feu, selon Diodore, et qu’il était réputé pour le dieu de tous ceux qui travaillent aux forges, conformément à cette influence. Comme semblablement sous le nom de Vesta, gardienne du feu sacré de l’empire romain, la conjonction de Vénus avec le même soleil, qui rend les femmes chastes, fidèles et retirées.

Davantage, ils ont détesté dans leurs poésies, par le manifeste adultère de Mars et de Vénus, les débauches et les adultères que la conjonction de ces deux planètes cause tous les jours dans le monde. Enfin la force, le courage, les travaux, les persécutions et la mort misérable d'Hercule : ne sont-ce pas les malheureux effets de la funeste conjonction de Saturne et de Mars, couverte sous le nom de ce prince, d’autant que par le mélange de ces deux planètes infortunées, le premier dénotant la force et la patience dans les travaux, le second la chaleur et le courage dans les actions difficiles, et tous les deux ensemble les persécutions et les souffrances jusqu’à la mort, auquel des anciens héros pouvaient-ils mieux l’appliquer qu’à Hercule?

Chapitre IV - De la suite des fables anciennes en faveur de la lune

En suivant toujours le même ordre, nous trouverons enfin dans les secrets de l’astrologie les mystères de tous les noms que les anciens donnèrent à la lune. Ils arrivèrent jusqu’au nombre de sept, Diane, Junon, Cérès, Proserpine, Latone, Hécate et Lucine. Varron, le plus savant des romains, nous rend témoignage des noms de Proserpine et de Lucine, attribués à la lune, Hérodote et Diodore de ceux de Junon et de Cérès, Ovide, de ceux d'Hécate et de Latone, et tous les poètes de celui de Diane, qui est le plus familier à ce luminaire. Mais nous aurions grand sujet de nous étonner de ce que tant de beaux esprits et de curieux auteurs se sont joués de tant de noms sans en pénétrer l’origine, si les anciens prêtres d’Égypte ne leur en avaient dérobé la connaissance par la confusion de tant de fables.

Ces grands personnages trouvèrent par des longues expériences que la lune, en sa révolution périodique, changeait et variait souvent de nature, que la rencontre des bonnes et des mauvaises planètes la rendait tantôt bonne et tantôt mauvaise, et voulant envelopper ces divers changements sous des noms empruntés ou des histoires feintes, ils publièrent, étant conjointe avec Saturne, que c’était Proserpine, avec Jupiter, que c’était Junon, avec Mars, que c’était Latone, avec le soleil, que c’était Hécate, avec Vénus, que c’était Lucine, avec Mercure, que c’était Cérès, et toute seule, que c’était Diane la déesse. Ils dressèrent des temples et ordonnèrent des sacrifices sous tous ces divers noms à la lune, afin d’apaiser son courroux et son ire, lorsqu’elle était affligée dans les conjonctions de Saturne, de Mars et du soleil; ou pour implorer son assistance quand elle était puissante et favorable par les conjonctions de Jupiter, de Vénus et de Mercure.

Mais d’autant que les peuples étaient épouvantés de la crainte des maux et des calamités que la lune causait étant avec Saturne, non seulement aux hommes, aux femmes et aux enfants, mais encore aux animaux et à tous les fruits de la terre, il advint que la religion et les sacrifices de Proserpine furent des plus célèbres parmi le monde; et qu’Érictée, prince égyptien passant en Grèce dans la province d’Attique, en établit les cérémonies dans la ville d'Éleusis. Elles consistaient à représenter la pitoyable histoire du ravissement de Proserpine dans les enfers, avec toutes les circonstances que les poètes en récitent; prenant les enfers pour le Tartare, ou la profonde étendue de l’orbe de Saturne comme au précédent chapitre.

Quant à la favorable conjonction de la lune avec Jupiter, qui dénote tant de biens, de grandeurs et de richesses entre les hommes comme entre les femmes, ces anciens philosophes ne la pouvaient mieux expliquer que par Junon, reine du Ciel et de la terre, selon ces idolâtres.

Mais par Latone affligée et persécutée, courant de tous cotés pour fuir ces malheurs et aller à Délos pour accoucher et mourir, comme elle fit avec assez de travail et de peine, ne donnèrent-ils pas à comprendre la cruelle violence de la conjonction de la lune avec Mars, tant sur les hommes que sur les femmes enceintes qui avaient coutume d’implorer cette Latone pour échapper d’une mauvaise couche ?

Que pouvons-nous alléguer d'Hécate, dirons-nous que les sorcières et les enchanteresses avaient coutume de l'invoquer pendant la conjonction du soleil et de la lune, au récit de tous les poètes ? Ces femmes échevelées la conjuraient de cacher sa lumière afin que leurs maudites imprécations autorisées des sombres ténèbres de la nuit eussent plus d’efficace. Ou s’il ne serait pas meilleur, pour l’appliquer à l’astrologie, d’ajouter que le décours de la lune dénoté par Hécate est toujours malencontreux et dommageable en toutes choses.

Tout au contraire de Lucine, heureuse pour sa fécondité et favorable aux accouchements des femmes, qui avaient coutume de lui sacrifier pendant qu’elles étaient enceintes, d’autant que ces grands personnages ne recommandèrent pas moins la dévotion envers cette déesse, que la conjonction de la lune et de Vénus était heureuse et favorable à tout le monde, notamment aux femmes, aux filles et aux accouchées.

Ils enveloppèrent aussi la conjonction de la lune et de Mercure, qui dénote la prudence et la dextérité dans la conduite du ménage, comme la bonne fortune en l'économie, du nom de Cérès et de Triptolème qui enseignèrent aux Athéniens à recueillir le froment de la terre comme ils avaient fait auparavant aux Égyptiens, qui honoraient Cérès autant que toute autre déesse, selon Diodore et Plutarque, disant que Cérès et Isis n’étaient que la même, parce qu’aux processions qui se faisaient aux fêtes d'Isis les prêtres portaient des épis de froment en cette souvenance.

Enfin que pouvaient-ils entendre de Diane, déesse des boccages, solitaire, chasseresse et fuyant la compagnie des hommes : que la lune croissant en lumière, vite en son mouvement, seule et sans compagnie des autres planètes, puisqu’en cette disposition elle produit les mêmes effets parmi les hommes que nous venons d’attribuer à Diane la déesse ?

Davantage, ils cachèrent la conjonction de la lune, de Mars et de Saturne sous le nom de Neptune dieu de la mer, lui donnant pour marque un Trident à cause de ces trois planètes dont la funeste et violente conjonction faisait des tempêtes horribles dans la mer et des naufrages épouvantables. Les grecs lui sacrifièrent deux princes parents de Xerxès roi de Perse, incontinent après qu’ils furent faits prisonniers par la prise d’une galère au commencement de la bataille de Salamine, dans la croyance qu’ils avaient reçue des Égyptiens que Neptune se plaisait à ces cruautés, peut-être à cause de la cruelle et violente conjonction de ces trois planètes.

Quant aux sacrifices de Bacchus et aux furieux emportements des Bacchantes, que le poète Orphée transféra en Grèce sous le nom des Orgies, ce n’était que des représentations annuelles, des effets de la conjonction de la lune, de Vénus et de Mars, rendant les personnes qui en reçoivent les influences, soit hommes ou femmes, comblés de toutes sortes de débauches, de meurtres et d'ivrogneries, ce qui porta les anciens idolâtres d’Égypte de plaquer par de semblables superstitions les dieux ou les planètes de cette conjonction infortunée.

Mais ils ordonnèrent au contraire d'honorer sous le nom des trois Grâces la conjonction de la lune, de Vénus et de Mercure féminin qui donne aux personnes de l’un et de l’autre sexe toutes les beautés, tous les charmes et toute la gentillesse dont la nature prodigue peut combler les créatures : Aglaé est resplendissante, ils l’attribuèrent à la blancheur éclatante que la lune donne au visage, Thalie est verdoyante, ils la comparèrent aux charmes de la beauté florissante que Vénus concède à ses favorites, et Euphrosyne est divertissante, ils l’appliquèrent à l’agréable vivacité qui provient de Mercure efféminé. Étéocle, prince de Grèce, fut le premier à sacrifier aux trois Grâces après les Égyptiens, et Platon conseilla l’un de ses amis de leur sacrifier pour réparer les défauts dont il se plaignait et qui déplaisaient à tout le monde.

Mais oublierons-nous les trois Parques qui furent encore imaginées par ces renommés philosophes : Atropos est le continuel mouvement des planètes au zodiaque d’occident en orient, Clotho est la conversion du premier mobile par un mouvement contraire d’orient en occident, Lachésis, de la contemplation de ces deux mouvements qui marquent les lieux des planètes dans les signes et les maisons du ciel, conclut le sort, le destin, et la fortune de tous les hommes.

Chapitre V - Des anciens observateurs de l’astronomie

Comme l’astrologie est au rang des sciences physiques ou naturelles parce qu’elle n’a pour objet que les qualités et les actions des astres, nous dirons que l’astronomie est au rang des sciences mathématiques parce qu’elle s’occupe à considérer les mouvements et les distances des planètes ou des étoiles. La première est fondée sur les conjectures, la seconde sur les démonstrations, et toutes les deux sur l’expérience maitresse de toutes nos connaissances. Ceux qui sont exercés dans les vérités de la géométrie ont de la peine à se ranger à l’astrologie et embrasent plus volontairement l’astronomie. Mais ceux qui sont accoutumés aux douteux raisonnements de la physique ont des attachements pour l’astrologie qu’ils ne peuvent avoir pour l'astronomie, si par une égale puissance d’esprit, ils ne se trouvent disposés à recevoir également l’une et l’autre.

Anciennement, elles étaient comprises sous le nom général d'astrologie : ces deux sciences étaient inséparables l’une de l’autre et, jusqu’au temps d’Alphonse X, roi de castille et roi des Romains, elles furent toujours indivisibles. Mais comme les tables astronomiques et les éphémérides du mouvement des planètes commencèrent à se multiplier en Europe, les astrologues commencèrent à négliger l’étude de l’astronomie, et les astronomes à mépriser les professeurs de l’astrologie. Les uns n’estimaient que les avantages qui leur arrivaient de la prédiction et les autres au contraire ne se glorifiaient que de la noblesse de la Théorie. Ainsi, l'astronomie fut séparée de l’astrologie et dans ce partage elle entraina de son côté toute la gloire. Néanmoins, Kepler, en la préface des « Tables Rudolphines » confesse à diverses fois que l’astrologie est la mère de l’astronomie, que les influences des astres ont causé la science de leurs mouvements et que la passion de savoir l’avenir par la bonne ou mauvaise disposition des planètes avait comme obligé les anciens de travailler à leur théorie.

Justin rapporte en son « Histoire » que Zoroastre, roi des Bactriens, tué par Ninus roi d'Assyrie, fut le premier à nous donner l’astronomie et Josèphe raconte que ce fut Abraham qui la transféra d’Orient en Égypte, où les philosophes de Memphis, et à leur exemple les poètes grecs, l’enveloppèrent toute de fables. Phaéton observa le cours du soleil et ne pouvant, prévenu par la mort, en décrire le mouvement, ils l’ont fait précipiter du ciel en conduisant le char solaire. Titan fut le premier à remarquer les saisons de l’année: ils ont dit qu’il était frère du soleil. Endymion passait des nuits entières à l’observation du mouvement de la lune : ils ont feint que la lune était amoureuse d'Endymion. Atlas, roi de Mauritanie, fut le premier à nombrer les étoiles du firmament : ils ont dit qu’il soutenait la sphère céleste sur ses épaules, assisté des forces d'Hercule, qui s’adonnait à |a même contemplation. Phryxe nota les étoiles du signe du Bélier mais Ammon, roi de Cyrène, les ayant toutes remarquées, ils ont feint qu’Ammon était Jupiter adoré sous cette figure, et tenu depuis pour le père d’Alexandre.

La fille d’Agénor, roi de Phénicie, en donnant son nom à l’Europe, donna la connaissance du signe du Taureau à son mari, roi de Crète : ils ont dit que Jupiter la ravit sous la forme d’un Taureau, sur les rivages de l’Asie. Les enfants de Tyndare, roi de Sparte, observèrent le signe des Gémeaux : ils ont feint que c’était Castor et Pollux ces jeunes princes. Chiron, disciple d’Esculape, remarqua les étoiles du Sagittaire : ils ont controuvé qu’il était centaure. Ganymède, fils de Laomédon, jeune prince d’excellent esprit, observa le signe du Verseau et la constellation de l’aigle si reluisante : ils ont dit que Jupiter l’avait enlevé sur un aigle dans le ciel, pour lui verser de l’ambroisie. Aristée remarqua le premier entre les Grecs la canicule et la nomma le chien syrien, à cause que son lever était du côté de la Syrie et que la brûlante chaleur de sa grande lumière, fomentée par celle du soleil, donnait souvent à ces animaux la rage : ils ont inventé que son fils Actéon fut dévoré par les chiens, étant à la chasse.

Tirésias, excellent en divination, ayant découvert les diverses natures de la planète Mercure, ils ont feint sa transmutation de l’un à l’autre sexe. Dédale fut le premier à décrire les orbes célestes et à cause de la confusion de tant de circonférences entrelacées, ils ont dit qu’il était l’inventeur du labyrinthe de Crète, aussi bien que de celui d’Égypte. Mais Icare, son fils, enflé de plus haute espérance, voulant encore ajouter de nouveaux cercles aux théories de son père pour les rendre plus intelligibles, ils ont feint qu’il tomba dans la mer d’ignorance, s'étant troublé dans cette entreprise. L’Égypte recevait de grands avantages des fécondes inondations du Nil, mais les Égyptiens soufraient des grandes pertes par l’ignorance des jours auxquels ce fleuve commençait de s’enfler : Anubis, grand personnage, leur enseigna de connaitre ces jours par le lever de la canicule : ils ont dit que c’était un dieu qui avait la tête de chien et l’ont adoré longtemps depuis sous cette figure.

Il nous serait trop long et trop difficile de rapporter tous les autres Mystères fabuleux des poètes qui ont couvert anciennement les vérités de l’astronomie, et nous aurons des connaissances plus certaines de son progrès descendant en des siècles plus bas et plus éclairés des géomètres qui, depuis les conquêtes du grand Alexandre, puisèrent librement en Égypte les principes cachés des sciences mathématiques. Nous trouverons que Timocharès fut le premier entre les Grecs à trouver le mouvement des étoiles fixes, auparavant inconnu dans le monde, comme Aratos, excellent mathématicien, d’en dresser le premier un catalogue, réduit ensuite par ses successeurs dans une plus considérable justesse.

Mais Hipparque eut la gloire 140 ans avant la naissance de notre sauveur, de l’invention de la Théorie des planètes : et pour la facilité des supputations astronomiques, d’avoir été le premier à composer les tables des mouvements du soleil et de la lune. Méton eut aussi l'honneur de dresser des éphémérides en Grèce et nous trouvons dans les poètes latins, Lucrèce, Horace et Juvénal, qu’elles étaient dès lors en usage, mais imparfaitement, et seulement pour les deux luminaires. Pline nous assure en son « Histoire naturelle », que Crinas, excellent et puissant médecin de Marseille, avait été le premier d’en composer, ajoutant à la réputation de son bel esprit la gloire d’avoir bâti à ses dépens des nouvelles murailles à sa ville.

Toutefois, comme tous les commencements sont toujours rudes et grossiers, l’astronomie eut le bonheur de trouver le grand Ptolémée 120 ans après l’auteur de notre salut, qui par un merveilleux effort de son esprit, rendit la Théorie des planètes et les tables astronomiques plus ajustées que celles de ses prédécesseurs. Son Almageste l’a rendu si considérable qu’il est tenu de tous pour le prince de l’astronomie comme de l’astrologie, à cause des quatre livres des jugements des astres, reconnu par tout le monde sous le nom du « Quadripartite » de Ptolémée. Mais pourquoi nous arrêtons-nous si longtemps à l’histoire de tous les grands personnages qui ont travaillé à la restitution de cette belle science? C’est peut-être, comme nous avons dit ailleurs, à cause qu’elle est fille de celle que nous traitons en ce volume, ou peut-être à cause que la justesse de ses mouvements nous est entièrement nécessaire.

Après le grand Ptolémée, les mathématiques et l’astronomie demeurèrent confinées en Égypte parce que, l’Empire romain devenu tout chrétien, toutes les sciences furent réduites à l’étude de la Sainte Écriture, témoin Saint Augustin, qui commande à ses disciples en Afrique de rechercher plutôt comme l’on va que comme va le ciel : et toutefois, il ne peut assez admirer en ses « Confessions » l’artifice des fables et la merveilleuse justesse de la supputation des éclipses. Environ l’an 800 de notre salut, les Arabes mahométans, qui avaient occupé l’Asie, l’Espagne et l'Afrique, ne s’attachèrent pas moins heureusement à posséder toutes les belles sciences. Ils exercèrent leurs beaux esprits aux continuelles observations des astres, et Albaténius, natif d’Assyrie, dressa des tables astronomiques où les erreurs des tables de Ptolémée, déjà trop anciennes, étaient assez bien réparées.

Finalement, Alphonse X, Roi de Castille, assisté de proface juif, des Arabes les plus savants, de son esprit merveilleux et d’une dépense de plus de quatre cent mille écus, cultiva si avantageusement l’astronomie environ l’année 1230, que les Tables Alphonsines en furent dressées beaucoup plus justes que les précédentes. Mais ce ferait trop souvent répéter la même chose : nous avons déclaré dans les préfaces de ma « Théorie des planètes » et de mes « Tables astronomiques » la suite comme le progrès de cette science dans les provinces de l’Europe, dont les principaux et les plus célèbres astronomes qui l’ont embellie ont été pour l’Italie Francesco Maurolico, Antonio Magini et Argol, professeur à Padoue, pour l’Allemagne, Copernic, Reinhold, Mont-Royal et Kepler, auteur des « Tables Rudolphines », pour le Danemark, Tycho Brahé et Longomontanus, pour la Hollande, Philippe van Lansberge, et pour la France Bulliaud, Morin et Gassendi, tous les ouvrages desquels sont plus ou moins estimés, suivant le choix ou les inclinations des personnes. Nous devons seulement ajouter en faveur de l'astrologie, qui demande toujours les tables des plus justes, que nous avons dressé les nôtres sur les fondements des Tables Rudolphines, les plus généralement approuvées, et géométriquement sur la Théorie des ellipses de chaque planète, qui les rendent encore plus exactes, comme elles sont aussi plus faciles que les autres.

Chapitre VI - Des succès divers de l'astrologie

La connaissance de l’avenir a toujours flatté les esprits dans tous les siècles: c’est une curiosité raisonnable, quand elle est dans les termes de la modération, et lorsque les moyens de la satisfaire sont naturels, elle est apparemment excusable. L’astrologie a toujours maintenu sa pureté dans les profanes divinations de l’idolâtrie et toujours conservé son innocence parmi les Oracles et l’Aruspicine; d’autant que la même raison qui avait obligé les anciens prêtres d’Égypte de l’envelopper de tant de fables, les avait aussi portés d’en cacher les jugements sous la feinte des oracles prononcés par leurs divinités imaginées. Cette province, qui a donné l’origine à toutes les sciences par le consentement de tous les auteurs, a été la première, suivant Hérodote, à trouver l’invention des Oracles : les principaux desquels étaient celui de Jupiter à Memphis et celui de Diane à Bubaste, et suivant Nicéphore, dans un siècle plus bas celui de Sérapis à Alexandrie. Mais l’Égypte ne fut pas la seule contaminée de cette profanation, les Phéniciens qui ont eu la gloire de naviguer les premiers sur la mer, comme il se voit dans l’histoire de Pline, prirent deux filles égyptiennes instruites aux cérémonies de l’oracle de Jupiter de Memphis et les vendirent comme esclaves, l’une aux Grecs et l’autre aux Libyens, dont la première institua en Grèce l’oracle de Jupiter de Dodone; et la seconde l’oracle de Jupiter Ammon de Cyrène. Hérodote, au livre d’Euterpe, assure cette vérité et déclare que de ces commencements sont venus tous les Oracles du monde. Toutefois, Corelle, pasteur de troupeaux, découvrit l’antre de Phœbus dans un vallon, au milieu des crouppes d’Hélicon, de Cyrrhe et de Parnasse, montagnes de la Phocide qui fut, depuis, le fameux Oracle de Delphes.

Plutarque déplore au « Traité de la superstition » la faiblesse des hommes : il se plaint qu’ils penchent toujours dans les extrémités, ou du défaut à ne rien croire, ou de l’excès à trop croire. Et certes avec raison parce que, non contents de la réponse de tant d’oracles parsemés dans le monde, ils s’adonnèrent encore avec plus d’avidité pour savoir l’avenir à la visitation des entrailles des bêtes immolées ou à la considération du vol des oiseaux de toute espèce. Témoin Alexandre le Grand avec son devin Aristandre; témoins les empereurs romains et tant de grands capitaines, dont les curieux emportements furent si cruels, qu’Hadrien fit immoler à ce sujet Antinoüs l’un de ses favoris, et Julian, une femme, dans les Temples de Daphné d’Antioche, dans la confiance de trouver plus de vérité dans la visitation des entrailles humaines que dans les autres.

Il ne faut donc pas s’étonner si l’astrologie parait si longtemps abolie dans les histoires, par le grand nombre de tant de folles divinations, sans alléguer les prophètes des Juifs qui étaient jusqu’au nombre de quatre cents à la suite d’Achab, roi d’Israël, quand il mourut en la bataille de Ramot contre les Assyriens, et sans faire mention des interprètes des songes, comme il se voit de Joseph, fils de Jacob, et de Flavius Josèphe en son histoire, comme de Sylla en ses commentaires et de Lucullus en Plutarque.

Toutefois, l’histoire n’a pas toujours négligé de nous tracer des marques de la vraie astrologie. Justin nous vante, au premier livre, Zoroastre, roi des Bastrians, pour l’un des inventeurs de cette belle science. Josèphe rapporte qu’Abraham, prince des Juifs, la transféra en Égypte. Nous voyons des ouvrages de Mercure Trismégiste en sa faveur. Diodore récite comment Arbacès fut encouragé par les prédictions de Bélésus, satrape de Babylone, à la ruine de Sardanapale et à se faire monarque de l’Asie, comme il fit, conformément aux belles promesses de sa naissance. Homère ne chante-t-il pas avec quelle confiance et avec quelle douleur Cassandre, fille de Priam, prédit la prompte désolation de sa patrie? Et ne fait-il pas graver à Vulcain, sur le fameux écu du vaillant Achille, la disposition des planètes et des orbes célestes? Davantage, Hérodote raconte que Thalès ne put persuader aux Milésiens d’éviter le dommage qui leur advint de la ruine du royaume de Lydie, laquelle il connut devoir arriver par l’influence des astres plus favorable à Cyrus qui le conquit qu’à Crésus qui fut défait avec son armée. Et nous pouvons encore ajouter qu’Épiménide ne put jamais dissuader les Lacédémoniens de la guerre contre les Tégéates, où ils furent tous défaits suivant la prédiction de ce personnage. Mais la mort prochaine du grand Alexandre ne fut-elle pas si fort assurée par les astrologues de Babylone que les arguments du philosophe Anaxarque pour les dépriser, ne servirent qu’à les rendre plus véritables? Et pour revenir aux auteurs qui ont encore honoré l’astrologie, ne dirons-nous pas que Nicepsos, de même que Pétosiris, sont allégués dans les poésies de Lucrèce et de Juvénal, et qu’Horace ne l’a pas oubliée dans les siennes? Plutarque rapporte en la vie de Romulus que Varron, le plus savant des romains, avait en sa maison Tarrutius, excellent astrologue qui trouva par les plus notables accidents et par les plus illustres actions de ce grand prince, l’année, le mois, le jour, et l’heure de sa naissance; comme pareillement le temps de la fondation de sa florissante ville de Rome. Ne voit-on pas encore aujourd’hui les ouvrages de Manilius sur cette science, et le Quadripartite du grand Ptolémée tenu pour le prince de l’astrologie, composé 120 ans après que l’auteur de notre salut eut pris sa naissance?

Saint Augustin déclare en ses « Confessions » que le grand nombre des grands hommes qui s’étaient adonnés à cette science, et le grand nombre des prédictions véritables qui en avaient été faites à divers temps, l’attachaient un peu trop à la croire. Il savait comme tous les autres, que Nigidius et Théagène avaient prédit l'empire de tout le monde au jeune Octave, depuis Empereur et Auguste, et la grande fortune de Marcus Agrippa, qui accompagnait la jeunesse de l’autre, aux études d’Apollonie. Que Trasyllus avait pronostiqué l’empire des romains à Tibère, pendant qu’il était en exil à Rhodes. Que le même Tibère Empereur, capable de la même science, l’avait aussi prédit à Galba en sa vieillesse. Que les Chaldéens avaient assuré la mère de Néron qu’il serait un jour Empereur mais qu’il ferait mourir celle qui l’avait mis au monde. Que les astrologues avaient condamné Vitellius à la mort dans le même jour auquel ce prince leur avait ordonné par édit public de vider la ville de Rome. Et que Domitien fut tué par les siens, conformément à la prédiction d’Asclétarion, sans que cet empereur n’en pût jamais éviter les effets par sa conduite.
Ce prince, diffamé par ses cruautés, fit mourir Pomposianus, jeune seigneur de grand mérite, parce que l’on publiait ouvertement qu’il avait une fort belle naissance ; et, se proposant de tyranniser les astres comme les hommes, il commanda de mettre à mort Asclétarion et de brûler son corps, pour empêcher que les chiens ne le dévorassent, ce grand astrologue lui ayant auparavant déclaré que telle devait être la fin de sa vie. Domitien s’était persuadé de rendre vaine sa prédiction par cette violence et que celle que ce personnage avait faite de lui ne serait pas moins ridicule. Mais l’orage et la pluie survenant dans le temps que les flammes commençaient à brûler le corps de ce misérable, tout le monde se mit à chercher le couvert et les chiens, attirés de l'odeur, le mangèrent. Tacite ne confesse-t-il pas lui-même, par ce beau trait de son éloquence, que l’astrologie serait toujours bannie de Rome mais qu’elle n’en ferait jamais chassée et que si les empereurs, par envie ou par jalousie, la faisaient sortir par une porte, qu’elle rentrerait toujours par une autre? Enfin que dirons-nous de l’exemple de l’empereur Caracalla? Il était dans le milieu de l’Asie avec toute son armée, toujours en crainte, comme les princes mauvais, d’un successeur qui le chassait de l'empire. Il écrit à son confident Maternianus, gouverneur de la ville de Rome, de s’informer de tous ceux qui pouvaient lui donner de l'ombrage par leurs belles naissances. La réponse lui fut aussitôt envoyée : elle était en faveur de Macrinus, son lieutenant général. Elle tomba entre ses mains devant que d’arriver à celle du prince et, sa bonne fortune le portant à l'ouvrir, son remède fut de le tuer et de se faire empereur par les suffrages de l'armée. Mais c’est assez nous entretenir des divers succès qu’eut cette belle science, jusqu’au temps de l'empereur Constantin, et il nous suffira d’alléguer encore les fameux auteurs qui l’ont autorisé, depuis Claude Ptolémée jusqu’au règne de ce grand prince, comme de Porphyre Tyrien, de Proclus de Lycie et de Maternus Sicilien, dont les ouvrages se voient encore à présent en Europe.

Chapitre VII - Suite des succès de l'astrologie

Comme les royaumes et les empires ont leurs changements, les sciences et les vertus ont aussi leurs révolutions dans le monde. Nous avons déjà commencé à le faire connaitre, touchant les divers succès de l’astrologie, dont la florissante origine ne parait que trop avantageusement dans les histoires d’Égypte. Témoin ce grand et merveilleux cercle tout d’or que Symandius fit poser en son mausolée, représentant le zodiaque avec les noms, les figures, les qualités et les significations des planètes, des signes et des étoiles. Diodore rapporte qu’il était de 360 coudées en sa rondeur et que lorsque Cambyse ajouta l'Égypte au grand royaume de Cyrus son père, il fut détruit et enlevé par l’avarice des Perses. Tous les conquérants ne sont pas des césars ou des alexandres, ni les soldats de toutes les armées ne sont pas des romains ou des grecs, qui ne faisaient pas moins de cas des sciences que des richesses. Les désastres qui sont arrivés à l’astrologie par les inondations des barbares lui ont été communs avec toutes les autres belles connaissances. Mais les dommages qu’elle a soufferts après l’empire de Constantin ne procédèrent que de la religion chrétienne qui, dehors, s’était emparée de tout le monde. Nos ancêtres devenus chrétiens la combattirent parce qu’ils combattaient l'Idolâtrie. Ils se portèrent comme ennemis de l’astrologie parce qu’ils étaient ennemis de la pluralité des dieux, et pour arracher de l’âme de tant de peuples convertis la croyance de tant de fausses déités, ils repoussèrent au loin cette science parce que les noms des planètes pouvaient renouveler en eux la mémoire de ces divinités mensongères. C’était peut-être par la même raison que Moïse n’a fait aucune mention dans les anciens livres sacrés ni des signes ni des planètes. Et ce fut aussi pour la même occasion que nos pères défendirent en l'Église naissante les beaux ouvrages d'Homère, si merveilleux et si familiers parmi les hommes. Saint Augustin ne peut s’empêcher en ses « Confessions » de s’en plaindre, et dit que les plus beaux enseignements de la morale sont enveloppés sous les mystères de tant de dieux et de tant de fables. L’astrologie, qui a ses Principes dans la nature, ne peut jamais être contraire au souverain maitre de la nature. La religion défend beaucoup de choses, non pour être de foi mauvaise, mais parce que les conséquences en peuvent être mauvaises. Les lois sont toutes pleines de semblables ordonnances car c’est le devoir d’un bon législateur de prévenir les désordres qui peuvent naitre des choses, même qui sont bonnes. Il n'y a point de mauvais exemple, dit César en Salluste, dont les commencements n'aient été bons et raisonnables. Le concile de Trente a permis l’usage de l’astrologie pour la médecine, la navigation et l’agriculture, et n’a point inféré dans le catalogue des livres prohibés, celui de Galien, où il parle ouvertement de cette science. Mais où est ce que cet emportement nous entraine? Reprenons la suite de notre sujet réservant en une autre occasion la poursuite d’un si vaste dessein, disons comme la science des astres fut pour quelque temps ensevelie, disons comme elle se retira parmi les Arabes qui avaient assujetti l’Espagne, l’Afrique et l'Asie, et que venant comme à ressusciter par la curiosité de cette nation méridionale, elle parut plus que jamais resplendissante.

Ces grands philosophes, quoi que mahométans, ne se rendirent pas moins favorables à toutes les autres belles connaissances. La physique, la médecine, la géométrie et l’astronomie ne furent pas moins cultivées par ces hommes savants que l’astrologie. Toutes ces belles sciences étaient comme bannies de l’Europe, par l’ignorance des nations qui en avaient occupé les royaumes. Et par le mélange des Arabes et des Espagnols qui habitaient confusément les régions qui sont au-delà des monts Pyrénées, elles furent heureusement restituées dans nos provinces.

Mais quels ont été les auteurs qui ont traité de cette science? Albubater, Albumasar, Ali Abenrudian, Ali Abenragel, Albohali, tous Arabes, Omar de Tibériade en Syrie, et Abraham Aben Ezra, juif, dont les uns ont composé des aphorismes, les autres commenté le « Quadripartite » de Ptolémée, et aucuns donné les principes de l’astrologie.

Mais que dirons-nous d'Alphonse X, roi de Castille, que les Espagnols appellent encore aujourd’hui Dom Alphonse le Sage, à cause de sa grande science? Les historiens même les plus graves ne lui refusent pas le surnom d’astrologue. Mariane et Turquet disent de lui qu’il rétablit en Europe cette belle science, qu’il fit traduire en latin la plupart des auteurs Arabes que nous venons de réciter; et qu’il prédit par sa naissance qu’il serait chassé de son royaume par ses enfants, comme son rétablissement à la Couronne après quelques années. Ce fut environ l’an 1250 que l’astrologie revint de la sorte en Europe; elle remplit incontinent l’Espagne et l’Italie de ses admirateurs, elle passa bientôt en France et en Allemagne, et comme un torrent impétueux, elle courut heureusement par toutes les provinces.

L’empereur Frédéric II, renommé pour son grand esprit aussi bien que pour son grand courage, se rendit aussitôt son protecteur. Et Rudolphe Ier fut assuré d’arriver à l’empire par un de ces nouveaux astrologues pendant qu’il n’était encore que Landgrave d'Alsace. Henry VII, comte de Luxembourg et depuis empereur d’Allemagne, avait une fort belle naissance, si nous en croyons Jean Villany, historien de son temps. Et Charles, duc de Calabre, fils de Robert, roi de Naples, suivant le même historien, ne souffrait aucun changement en ses affaires, et en sa conduite du gouvernement de Toscane, qu’un certain Augustin d’Ascoli, excellent astrologue, ne lui en eût prédit toutes les circonstances.

Que dirons-nous de Guido Bonatus, auteur d’un si grand volume en faveur de cette science? Le comte de Montefeltre était assiégé dans la ville de Forli, sa patrie ; il choisit un jour favorable pour lui donner la victoire sur ses ennemis et lui prédit qu’il serait en cette action blessé d’un coup de trait à la cuisse. Le comte ne manque pas de sortir avec toutes ses forces à l’heure assignée par cet astrologue, défait à plate-couture l’armée qui l’assiégeait, et reçoit la blessure pronostiquée, que Guido Bonatus voulut panser lui-même, présent à cette sortie.

La gloire est toujours accompagnée de l’envie et, entre les auteurs qui combattaient alors l’astrologie, Jean Pic comte de la Mirande, en Lombardie, le plus savant personnage de son temps, en était comme le plus âpre. Il triomphait audacieusement dans la cour de Rome de la défaite de cette science qui manquait, non pas de raisons, mais de professeurs pour la défendre. Bellance, siennois, se présente publiquement, propose l’expérience, lui montre en sa naissance la direction de l’ascendant à Mars, et sa mort assurée dans la trente-troisième année de son âge, comme il advint, au grand honneur de l’astrologie. Et Paris de Cerezars ne fut pas moins heureux dans ses prédictions puisqu’il donna par écrit à Paul III, n’étant encore que cardinal Farnèse, les années de son pontificat et de sa mort dans une insigne justesse. Quant aux célèbres auteurs qui ont honoré cette science de leurs ouvrages, les plus fameux, après les Arabes, sont pour l’Italie le docte Cardan, milanais, Pontanus, napolitain, François Junctin, Jean Antoine Magin, Thomas Campanelle et Argolus, entre autres. Pour l’Allemagne, Schöner, Garcée, Stœffler, Camerarius, Origan et Rantzau, d’illustre naissance. Et pour la France, Antoine Villon, le marquis de Villenes et Jean-Baptiste Morin, dont les ouvrages sont encore sous la presse, sans oublier l’autorité de Saint Thomas, qui fait honorable mention de l’astrologie en divers lieux de ses grands volumes.

Chapitre VIII - De l’astrologie naturelle

Il nous semble que l’ordre nous oblige maintenant à déclarer quelle est cette « astrologie naturelle », ou cette science qui doit prédire l’avenir par des raisonnements puisés dans les principes de la Nature. Mais, afin de la développer de tant de connaissances confuses, qui l’ont comme déshonorée par l’ignorance ou l’avarice des professeurs qui en tirent de l’avantage, nous dirons que ce n’est point la physionomie naturelle qui, par la forme ou la couleur du corps de l’homme, tant en général qu’en particulier, suivant Aristote, Polémon et Adamance, connait et juge l’inclination et les qualités de la personne, et, à la ressemblance des animaux, en remarque les vertus et les vices, comme il se voit dans Saint Basile qui appelle chèvre l’empereur Julian l’apostat, à cause de la figure de son visage et de la malice de son esprit. Et dans Homère, qu’Achille, en colère du ravissement de sa maitresse, appelle chien Agamemnon, parce que son visage tenait un peu de cette bête. Peut-être que Dieu, par la même raison, voulut changer le roi Nabuchodonosor en bœuf à cause qu’il ressemblait à cet animal stupide.

Que ce n’est point la physionomie divinatrice qui, par la seule considération des traits les plus délicats du visage, découvre les mœurs et les inclinations de la personne, et prévoit les dangers, la mort, les prisons ou la bonne fortune, comme il se voit en Xénophon, de Socrate le philosophe, et en divers autres lieux de l’histoire.

Que ce n’est point la métoposcopie, qui assigne aux lignes du front de chaque personne les noms de Saturne, de Jupiter, de Mars et des autres planètes, et qui prédit la bonne ou mauvaise fortune de l'homme, selon que ces rayes sont obliques ou droites, fortes ou effacées, et finalement ou rouges ou déteintes.

Que ce n’est point la chiromancie qui pénètre dans les secrets de l’avenir par la seule considération de la main de chaque personne, qui donne des noms propres et significatifs à chacune de ses lignes et qui place les sept planètes du ciel sur les divers monts qui paraissent dans l'intérieure partie de cette main regardée.

Que ce n’est point la pédomancie qui, par une insolente curiosité, porte les personnes à faire voir sans honte leurs pieds tout nus pour apprendre de l’imposteur qui en remarque les traits le bien ou le mal de leurs destinées.

Que ce n’est point la géomancie qui, par des points tracés à l'aventure sur la terre ou sur le papier, figure des maisons célestes, à l'imitation de l’astrologie, et qui emprunte encore les noms et les qualités des planètes pour achever toutes les règles afin de répondre pertinemment et sur-le-champ à tout ce que la vaine curiosité lui demande.

Que ce n’est point l’hydromancie qui, par la considération des tournoiements et diverses figures que font les eaux d’une rivière courante, se mêle aussi de prévoir les choses futures, comme il se voit dans les commentaires de César aux guerres des Gaules, où ce grand capitaine rapporte que les femmes défendirent aux Allemands d’Arioviste d’aller à la bataille contre les Romains devant la nouvelle lune, s’ils ne voulaient être défaits, comme ils surent, ayant connu leur prochain désastre par les eaux du Rhin et des autres fleuves.

Que ce n’est point l’aéromancie qui, par les divers phénomènes et les apparitions diverses de l’air, nous enseigne à discerner les bons ou les mauvais évènements qui doivent accompagner les actions présentes de l’homme, comme il se voit dans toute l’antiquité, soit de l’histoire grecque ou de la romaine.

Que ce n’est point la pyromancie qui, par les divers effets et les sons variables des foudres et des éclairs, se mêlait anciennement de prédire aux plus grands capitaines, les bons ou les mauvais succès des entreprises les plus grandes et les plus magnifiques, témoins les manubies du grand Jupiter céraunien et tout ce que nous en voyons dans les fables, comme dans les histoires.

Que ce n’est point l’onomancie, qui attribue les qualités des sept planètes aux lettres du nom de la personne et qui donne encore aux même lettres des nombres proportionnés et convenables, afin d’en tirer des jugements superstitieux pour abuser la curiosité des hommes ou des femmes, qui recherchent, comme ignorants, de savoir leurs bonnes ou mauvaises fortunes.

Que ce n’est point la nécromancie de l’occulte philosophie d’Agrippa qui, sous le manteau de l’astrologie, et par la vertu des plantes ou des minéraux, aspire vainement à nous faire communiquer avec les esprits qui sont répandus dans les quatre éléments selon leurs sciences; qui enchante les faibles par les apparences de conférer avec ces natures simples et innocentes et qui leur promet des réponses véritables à toutes leurs demandes, par ces corps imaginaires et fantastiques.

Que ce n’est point la démonomonie qui, par des indignes fumigations ou des génuflexions autant odieuses, offre des sacrifices par l’effusion du sang de certains oiseaux, répondant à la nature de chaque planète, pour invoquer ou forcer les démons à comparaitre, comme ils disent, afin de rendre à la personne curieuse et présente les oracles qu’elle recherche.

Que ce n’est point enfin l’astrologie des Arabes, suivie des faibles ignorants ou des crédules superstitieux de notre siècle, qui augmente et multiplie les causes célestes pour prédire toutes les circonstances des événements qui doivent arriver à la personne et qui fait tomber souvent les professeurs, aussi bien que la science, dans la confusion, le mépris et le mensonge.

Mais que c’est la connaissance des astres, fondée sur la conjecture, appuyée sur l’expérience et puisée dans la nature, dépouillée de toutes les impuretés et réduite dans la simplicité des causes secondes, naturelles et supérieures, qui agissent sur nos corps, par l’altération qu’elles apportent aux éléments, sur nos esprits, par l’affinité de la matière, et sur nos fortunes, par une secrète et convenable influence.

Cette belle science ne consiste que dans le parfait mélange des quatre principaux fondements qui la composent. Le premier est la nature et les qualités des planètes ou des étoiles, et leurs mouvements sous le zodiaque d’occident en orient qui leur est propre. Le second, la nature, les qualités et les figures des douze signes du zodiaque du premier mobile, continuellement portés d’orient en occident. Le troisième, la nature et les propriétés des douze maisons célestes, toujours variables suivant la position de la sphère, et le quatrième, la nature et les qualités des aspects des planètes entre elles et des rayons qu’elles envoient aux principales parties de la figure.

Or, comme la nécessité est la mère des inventions, l’expérience a toujours été la maitresse de toutes les sciences. Nous avons déjà dit ailleurs qu’en la nature les causes sont devant les effets, et dans la connaissance des hommes que les effets sont devant les causes. Si l’étendue ou la puissance de la nature est indéfinie, la puissance du raisonnement humain est limitée par notre apparente faiblesse. Les bonnes et réitérées expériences des hommes peuvent être certaines, mais il n’est pas toujours possible à notre entendement de trouver les causes véritables de tous les effets naturels qui ont formé nos expériences.

Les changements du flux et reflux de la mer, les inondations annuelles du Nil, l’amour réciproque du fer et de l’aimant, et tant d’autres effets signalés de la nature, sont des expériences certaines et trop assurées. Et, toutefois, les raisons du cardinal Contarin, de Pontus, évêque de Chalon, et de Galilée au quatrième de ses « Dialogues » touchant les altérations de la mer, les raisonnements d'Hérodote, de Diodore, de Sénèque, de Lucain, de Campanelle et de la Chambre, médecin français, sur les débordements du Nil et les démonstrations de Gilbert, anglais de nation, et de René Descartes touchant l’inclination de l’aimant, ne sont pas capables de nous en donner les véritables causes. Nous sommes toujours dans cette ignorance et il ne faut pas nous étonner si l’astrologie ne peut en tout et par tout nous donner des causes certaines.

Il nous faut avoir la même justice pour elle que nous avons pour la médecine et les autres sciences conjecturelles. Il nous faut encore avoir cette conduite en sa faveur, d’autoriser les expériences par la force des raisonnements et de suppléer au défaut des raisonnements par l’autorité des expériences. Si nous entrons dans le doute des pyrrhoniens, nous détruirons toutes les sciences physiques. L’athéisme, qui sort de l’enfer, n’a pour fondement que la négative. Nous devons opposer à notre présomptueuse confiance la considération de notre humaine faiblesse et recevoir les expériences de plus de trois mille ans, quoi qu’elles manquent de raisons apparentes. L’ange répondit à la vaine curiosité d’Esdras « si vous ne pouvez peser le feu, ni mesurer le vent, comment pourrez-vous pénétrer dans le secret des causes plus éloignées? » Enfin, l'astrologie, comme la physique et la médecine, n’est qu’une science fondée sur la conjecture et l’expérience, elle a toutefois cet avantage, comme les autres, d’avoir moins d’autorité que de raisons naturelles en ces principes.

Chapitre IX - Des cieux et des orbes célestes

Sans nous arrêter aux divers sentiments des astronomes touchant le système du monde que nous avons déclarés en ma « Théorie des planètes », et sans nous engager à tant de raisons géométriques qui appartiennent plutôt à l'astronomie qu’à cette science, nous passerons sans autre retardement à décrire la situation et la nature des corps qui remplissent cet univers. Nous commencerons par le globe de la terre, posé comme au centre du Ciel et composé du sec et de l’humide, c’est-à-dire de la terre et de l’eau, qui sont les deux qualités passives et les premières substances de toutes les générations physiques, conformément à l’opinion du grand Moïse et des anciens philosophes que nous avons suivis en mon premier chapitre. Ce globe est ténébreux, opaque et privé de propre lumière, et la providence l’a placé au milieu des orbes célestes pour en recevoir continuellement les rayons et les influences. Son diamètre est de 2 291 lieues géométriques et la plus grande circonférence de sa rondeur est de 7 200 des mêmes lieues, comme il se voit en nos « Théorèmes géométriques ». Toutefois, la convexité de cette sphérique rondeur n’est pas également parfaite, elle est diversement inégale, afin de donner occasion à tant de sources qui naissent dans les montagnes, et la chute à tant de pesantes rivières, pour arroser la terre de toutes parts en faveur des générations qui s'y forment.

Or, dans le commencement des choses, la mer ou les eaux étaient en repos et sans mouvement, la terre était également sèche et sans productions, et tout était immobile ou glacé comme les terres et les mers qui sont à présent sous les pôles. Mais lorsque la lumière et la chaleur du soleil commencèrent à frapper la surface du globe terrestre, la mer devint aussitôt humide et mobile, et les plus subtiles parties de ces eaux incontinent élevées ou dilatées, couvrirent tout le rond de la terre et formèrent aussitôt la sphère de l’air à l’entour de son globe, ainsi les eaux furent séparées des eaux, comme dit la Sainte Écriture, où le ciel est souvent pris pour l’air par ces termes les oiseaux du ciel, la pluie du ciel et autres semblables. Ainsi la froideur qui tenait tout glacé comme privation de la chaleur se joignit avec les ténèbres, qui sont privation de la lumière, et occupèrent ensemble, comme inséparables, les lieux les plus reculés du soleil ou des rayons qu’il nous darde. À quoi nous ajouterons seulement que la terre formée de la sorte avec toutes ses parties est enclose et contenue dans le ciel, ou l'éther, qui remplit de son corps simple, diaphane et liquide, la grande et vaste étendue de l’univers, et que dans cette partie éthérée du monde, qui n’est ni chaude, ni froide que par la présence ou l’absence du soleil, roulent aussi les planètes et les étoiles.

Après cet établissement de la terre au centre de l’univers, nous commencerons à compter les cieux qui l’environnent, ou plutôt les orbes célestes qui ne sont autre chose que les routes des planètes ou des étoiles dans le ciel, ou l’éther du monde. Ils sont au nombre de neuf, d’autant que le ciel empyrée, qui est le dixième, appartient plutôt aux raisonnements de la théologie, que non pas de la physique. Le premier est celui de la Lune, le second celui de Mercure, le troisième celui de Vénus, le quatrième celui du Soleil, le cinquième celui de Mars, le sixième celui de Jupiter, le septième celui de Saturne, le huitième celui des étoiles fixes et le neuvième celui du premier mobile, où sont les douze signes du zodiaque, sans lumière et sans étoile, Mais les distances de tous ces orbes sont fort différents car la lune est à 65 mille lieues de la terre, le soleil a 20 millions, Saturne à 20 millions et les étoiles fixes à 200 millions, toujours des lieues géométriques, comme il se voit en ma « Théorie »,

Leurs mouvements sont aussi fort dissemblables, d’autant que la lune parfait la révolution de son orbe en vingt sept jours et un peu moins de huit heures, le soleil, Vénus et Mercure achèvent la leur en une année, Mars fait la sienne en deux ans, Jupiter en douze et Saturne en trente. Mais les étoiles fixes, comme attachées au firmament, parfont ensemble la révolution de leur grand orbe en 25 000 ans, les unes et les autres d’occident en orient par leurs mouvements propres au contraire du premier mobile, qui achève sa révolution en 24 heures d’orient en occident, par un mouvement appelé violent et rapide, parce qu’il entraine avec lui comme par force, toutes les étoiles et les planètes qui sont dans les orbes inférieurs jusqu’à la concavité du ciel de la lune.

Nous pouvons connaitre par tout ce que nous venons de représenter, que la lune est fort proche de la terre, à comparaison du soleil et des autres planètes; que Saturne en est fort éloigné et que les étoiles fixes en sont dans une si grande distance que leur influence ne peut aller qu’à peine jusqu’à elle. Davantage, que plus les planètes sont proches de la terre, plus vite elles font leurs mouvements, comme il se voit de la lune et de Saturne, sans parler des autres, d’autant que celui-ci demeure 30 ans à faire son cercle, et l’autre seulement un mois et moins encore.

À quoi nous pouvons ajouter que le mouvement du soleil et le mouvement de la lune sont toujours directs ou droits sous le zodiaque, avec la seule différence d’être tantôt plus et tantôt moins vite, mais que les cinq autres planètes, Saturne, Jupiter, Mars, Vénus et Mercure sont tantôt directs ou droits, tantôt rétrogrades ou reculant en arrière, tantôt stationnaires ou ne bougeant d’une place, et tantôt vite ou tardifs en leur démarche. Toutes ces altérations du mouvement des planètes sont comme réelles en astrologie parce qu’elles sont apparentes en la terre, c’est-à-dire à ceux qui les regardent du globe terrestre, car, en effet, et dans l’astronomie, elles se prennent d’une autre sorte, comme il se voit en ma « Théorie ».

Quant aux autres propriétés des planètes ou des étoiles, nous dirons que le globe du soleil est lumineux, de même que les globes des étoiles fixes de la huitième sphère, c’est-à-dire doués et revêtus de propre lumière, mais que les globes de Saturne, de Jupiter, de Mars, de Vénus, de Mercure et de la lune sont opaques et ténébreux c’est-à-dire privés, ou dénués de lumière propre.

Or, ce qui nous doit persuader comme infaillible que la lumière des planètes est empruntée de la lumière du soleil, c’est l’accroissement et le décroissement de la lune par le continuel changement de ses faces, lesquels changements étant encore en Vénus suivant les nouvelles observations des modernes, faites par le bénéfice des lunettes de nouvelle composition, il s’ensuit le semblable des autres planètes. C’est: l’opinion de tous les auteurs qui ont traité des sciences célestes, c’est le sentiment de tous les philosophes, et la croyance de tous les poètes.

Mais ce qui nous oblige à recevoir pour indubitable que les globes des étoiles fixes sont naturellement lumineux, ne procède que de la distance excessive ou immense qui est entre elles et le soleil, duquel seulement ces étoiles pourraient emprunter leur clarté, si elle ne leur était pas naturelle. Car, puisque Saturne, qui n’est qu’à 20 millions de lieues géométriques du soleil, nous renvoie si faiblement la lumière qu’il en emprunte, comment les étoiles fixes qui en sont éloignées de deux cents millions, pourraient-elles nous la renvoyer avec tant de force et nous paraitre si brillantes?

Toutefois, comme Kepler en son « Astronomie copernicienne » établit le soleil pour le centre du monde, pour le seul globe de la chaleur et de la lumière, et la concavité du firmament pour la borne solide de l’univers, il prétend de nous persuader que les rayons du soleil, arrêtés et repoussés par le concave solide de la huitième sphère, donne la lumière aux étoiles fixes qui en sont naturellement dépourvues. Mais pourquoi nous arrêter aux opinions de tant de nouveaux philosophes et astronomes ? Nous ne parlons point dans cet ouvrage ni de la Philosophie, ni de l’astronomie, et notre dessein étant de nous contenir seulement dans les bornes de l’astrologie, nous ne sommes point obligés à disputer sur tant de variables et diverses sentences.

Chapitre X - Des cercles du premier mobile

Puisque de la variété de tant de mouvements procède la diversité de tant d’influences, nous sommes encore obligés à donner la connaissance de la nature et des cercles du premier mobile. C’est une sphère concave de tous côtés, enveloppée du ciel empyrée et toute remplie de l'éther dans son intérieure partie. Nous avons déjà dit que le globe terrestre était au centre de sa rondeur et comme les étoiles ou les planètes étaient disposés dans les espaces qu’elle environne. Aristote ne veut point aller au-delà de ce premier mobile, il s'arrête au premier étonnement de sa merveilleuse grandeur, et encore plus enchanté de son admirable et continuel mouvement de 24 heures; il ose assurer que c’est l’âme du monde, et le premier de tous les êtres. Il poursuit que sa révolution parfaitement égale est la mesure de l’éternité du temps et de la duration; et il se persuade avec la même confiance, ne pouvant assigner un principe ni trouver un contraire à ce mouvement, que le monde sera sans fin, et autres choses semblables. Toutefois, Pythagore et Copernic ne s’opposent que trop ouvertement à cette sentence, ils proposent que ce mouvement de 24 heures appartient au globe de la terre. Mais comme ce n’est point ici le lieu d’en disputer nous passerons à notre matière.

Nous dirons que cette sphère concave, ce neuvième ciel, ou ce premier mobile, a deux pôles directement opposés l’un à l’autre, et que l’axe du monde, qui passe par le centre de la terre, est une ligne droite qui a ses deux extrémités à ces deux pôles, l’un arctique, l’autre antarctique. Nous dirons :

que l’équateur est un grand cercle également éloigné des deux pôles du monde,
qu’il partage en deux également tout le premier mobile,
qu’il contient 360 degrés en la circonférence de toute sa rondeur,
que chaque degré contient 60 minutes et chaque minute 60 secondes,
que cette sphère concave se meut également et continuellement sur les deux pôles, et l’axe du monde, faisant sa parfaite révolution toujours d’orient par le midi en occident, en l’espace d’un jour entier ou de 24 heures,
que ce mouvement est appelé le mouvement diurne du premier mobile,
qu’il est encore appelé rapide, à cause de sa vélocité, et violent, parce qu’il entraine avec lui comme par force tous les orbes des étoiles et des planètes,  que c’est l’unique mesure du temps, des jours et des heures,
que chaque heure vaut 15 degrés de l’équateur, et chaque minute d’heure 15 minutes du même,
que sur le globe terrestre cet équateur est la ligne équinoxiale sur laquelle se mesurent les degrés de la longitude,
et qu’il divise la terre en deux parties égales, la septentrionale du côté du pôle arctique et la méridionale du côté du pôle antarctique.
Et voila, quant au cercle de l’équateur, le premier ou le principal de toute la sphère céleste.

Le second, et le plus considérable après l’équateur, est le grand cercle de l’écliptique. Il a son centre comme l’autre, avec le centre du globe de la terre. Ils se coupent réciproquement en deux égales parties et les deux points de leurs mutuelles sections sont les deux points des équinoxes; l’un du Bélier, l’autre des Balances, l’un du printemps et l’autre de l’automne, parce que le soleil, passant en ces deux points, fait le jour égal à la nuit par tout le rond de la terre. Il contient douze parties égales en toute sa rondeur et chacune de 30 degrés, que nous appelons les douze signes. L’une des moitiés de ce grand cercle décline du côté du septentrion ou du pôle arctique, l’autre du côté du midi ou du pôle antarctique et les deux tropiques, de l’Écrevisse et du Capricorne, sont les deux points de l’écliptique où cette déclinaison est la plus grande, à savoir de 23 degrés 30 minutes. Ces deux points, qui sont également distants, et de tous côtés à trois signes des équinoxes, sont appelés tropiques par les Grecs parce que, le soleil étant venu de celui du Capricorne à celui de l’Écrevisse, il retourne de l’Écrevisse au Capricorne. Ce grand cercle a cela de singulier d’être la seule voie que le soleil tient dans le ciel par son propre mouvement d’occident en orient selon la succession des signes. Les Grecs l’ont appelé l’écliptique parce qu’en lui se font toutes les éclipses.

Mais que dirons-nous du zodiaque fendu par le grand cercle de l’écliptique? Sa largeur est partout de 16 degrés, 8 pour sa moitié septentrionale et 8 pour la moitié méridionale. Il contient les douze signes du premier mobile, sans lumière et sans étoile, et comme sa longueur mesure la longitude des planètes par les degrés de l’écliptique, les degrés de sa largeur mesurent la latitude des mêmes, soit australe, soit boréale. Les Grecs et les Arabes l’ont appelé « donneur de vie » parce que, par une admirable providence, jamais les sept planètes ne roulent que dans cet espace.

Passons au troisième cercle de notre premier mobile. Il a toujours son centre comme les autres, avec le centre de la terre. Il passe par les deux pôles du monde et, coupant en deux également toute la sphère, il la divise en deux plages, l’une orientale, l’autre occidentale, et comme la première est toujours ascendante par le mouvement diurne du ciel, la seconde est toujours descendante. Les latins l’ont appelé méridien parce qu’il divise le jour artificiel en deux égales parties et que, le soleil étant en ce cercle, il marque le midi de la journée. Les astrologues commencent toujours les 24 heures du jour naturel par ce méridien, le soleil étant sur la terre. Comme tous les chrétiens, le soleil étant au-dessous et au même méridien; c’est-à-dire les uns à midi et les autres à minuit, à l’ancienne façon romaine. Or, ce grand cercle est toujours variable, soit en la sphère, soit au globe terrestre. Il doit toujours passer au Zénith ou sur la tête de celui qui le regarde, et il faut autant de méridiens dans le ciel qu’il y a de villes ou de lieux sur la terre.

Achevons par l’horizon, qui est le quatrième grand cercle. Son centre est avec celui de la terre et le méridien le coupe en deux égales parties, dont l’une des moitiés est du côté d’orient et l’autre du côté d’occident, marquant le lever et le coucher des étoiles. Il partage la sphère céleste en deux également et en fait deux hémisphères, l’un supérieur, qui est au-dessus de la terre, et l’autre inférieur, qui est au-dessous de la même. Il est toujours variable, comme le méridien, parce que le Zénith et le Nadir lui sont comme des pôles. Ce grand cercle est des plus considérables en astrologie, il coupe toujours en l’écliptique le point ascendant d’une naissance, que les Grecs appellent horoscope, et il se faut imaginer autant d’horizons dans le ciel qu’il y a de points sur le globe terrestre.

Enfin, que dirons-nous des colures, qui ne servent de rien à cette science? Ces deux cercles sont aussi grands que les autres, ils ont leurs communes sections sur les pôles du zodiaque, ils coupent l’écliptique et l’équateur en quatre parties égales et chacune de 90 degrés en l’un et de trois signes en l’autre, ils passent par les équinoxes, comme sur les tropiques, et marquent les quatre saisons de l’année. Quant aux cercles mineurs, qui sont au nombre de quatre, les deux tropiques et les deux polaires, c’est assez de les remarquer en la terre : ils sont parallèles à l’équateur ou ligne équinoxiale. Les deux premiers terminent l’obliquité de l’écliptique, tant du côté de l’Écrevisse que du côté du Capricorne; et les deux autres nous marquent les endroits du globe terrestre où les jours et les nuits sont de 24 heures entières. La zone torride, selon les anciens, est entre les deux cercles tropiques, les deux zones tempérées sont entre les tropiques et les cercles polaires; et les deux zones froides sont dans les deux cercles arctique et antarctique.

Chapitre XI - Des apogées des planètes

Le grand Aristote avait raison de dire que la nature était principe de mouvement mais il n’a point connu tous les mouvements qui sont en la nature. Il n’a fait mention que du circulaire seulement, toujours d’orient par le midi en occident car la pesanteur de la terre et de l’eau, comme la légèreté de l’air et de la chaleur, sont plutôt des inclinations au repos que des mouvements en ces quatre corps simples. Les philosophes ne reconnaissent que trois dimensions en la nature, longueur, largeur, et profondeur, et il nous faut trouver dans la même nature les trois mouvements qui répondent à ces trois dimensions afin de nous conduire insensiblement dans le véritable secret des influences. Nous avons déjà dit le mouvement des planètes en longueur, qui est la longitude dans l’écliptique ou le zodiaque. Nous avons dit le mouvement des mêmes planètes en largeur, qui est la déclinaison de l’un des Tropiques à l’autre. Et nous dirons maintenant le mouvement en profondeur, qui est l’abaissement des planètes de l’apogée au périgée.

Or, comme dans les trois mouvements qu’Aristote donne seulement à la nature, le circulaire est imparfait parce qu’il n’a point de contraire et que les deux autres en droite ligne sont défectueux parce qu’ils ne sont point continuels dans les éléments. Nous ajouterons que les trois nôtres sont accompagnés de toutes les conditions nécessaires car si vous les prenez du côté de la duration, ils sont perpétuels en tous les orbes célestes. Et si vous les considérez au regard des contraires, vous trouverez que le mouvement en longueur est double, d’occident en Orient par les longitudes de l’écliptique, et d’Orient en occident par la révolution du premier mobile. Que le mouvement en largeur est encore double par les déclinaisons du midi au septentrion, et du septentrion au midi entre les tropiques et que le mouvement en profondeur est encore divers par la descente des planètes de l’apogée au périgée, et par le retour en montant du périgée à l’apogée. Ainsi, dans la doctrine des orbes célestes, plutôt que dans celle d’Aristote, nous trouverons la cause de tous les divers mouvements qui sont dans les corps élémentaires, d’autant que des principaux que nous venons de remarquer, qui sont en nombre de six, d’orient en occident, et d’occident en orient, du septentrion au midi et du midi au septentrion, comme de la circonférence au centre et du centre à la circonférence, tous les mouvements composés en dérivent.

Mais retournons à notre sujet. Disons que le mouvement des planètes en abaissement ou en élévation se doit considérer en deux manières, du centre du soleil, et du centre de la terre. Nous parlons seulement des cinq planètes, Saturne, Jupiter, Mars, Vénus et Mercure, qui roulent à l’entour du soleil, et avec le soleil encore autour de la terre, comme il se voit en ma Théorie, d’autant que les aphélies de leurs ellipses sont leurs points les plus éloignés du soleil et que les apogées de leurs orbites sont leurs points les plus éloignés de la terre. Or, comme les orbes de la lune et du soleil ne sont disposés qu’autour du globe terrestre, on ne remarque dans les ellipses de ces deux luminaires que l’apogée et le périgée pour les deux points de leur plus grande élévation ou abaissement au regard de la terre.

Mais nous serait-il loisible de rapporter encore une fois ce que nous avons exposé dans le cinquième livre de nos « Théorèmes géométriques » de la seconde impression et dans le troisième livre de la première? Pourrons-nous, sans éviter le blâme d’une importune répétition, redonner maintenant en faveur de l’astrologie ce que nous avons auparavant donné pour l’astronomie? Ou comment serait-il possible de nous exempter d’une si belle curiosité, et si considérable en la science des astres? La providence, qui voulait remplir ce bas univers de tant de variétés dissemblables, ne pouvait les mieux ordonner que sous des causes si variables, puisque les apogées mêmes des planètes ont aussi leur mouvement comme le reste, afin que rien ne fût permanent dans le monde.
Or, comme tous ces mouvements se trouvent en nos tables astronomiques, plus justes et plus curieuses que toutes les précédentes, il nous suffit d’enseigner en cet endroit les élévations ou abaissements de chaque planète, c’est-à-dire leur mouvement de la circonférence au centre, et du centre à la circonférence, ainsi que parlent les philosophes.

Lorsque Saturne est en l’aphélie de son ellipse, le soleil en apogée de la sienne et ces deux planètes conjointes, Saturne est en sa plus grande distance à la terre, à savoir de 22 138 870 lieues géométriques. Et quand il est au périhélie de son ellipse, le soleil en l’apogée de la sienne et tous deux en opposition, cette planète est en sa plus petite distance à la terre, de 15 901 130 des mêmes lieues, de sorte que le plus grand mouvement de Saturne en profondeur de l’apogée au périgée est de 6 237 740 lieues géométriques.

Lorsque Jupiter est en l’aphélie de son ellipse, le soleil en l’apogée de la sienne et ces deux planètes conjointes, Jupiter est en sa plus grande distance à la terre, à savoir de 12 937 480 lieues géométriques. Et quand il est au périhélie de son ellipse, le soleil en l’apogée de la sienne et tous deux en opposition, cette planète est en sa plus petite distance à la terre, de 7 862 520 des mêmes lieues, de sorte que le plus grand mouvement de Jupiter en profondeur de l’apogée au périgée est de 5 074 960 lieues géométriques.

Lorsque Mars est en l’aphélie de son ellipse, le soleil en l’apogée de la sienne et ces deux planètes conjointes, Mars est en sa plus grande distance à la terre, à savoir de 5 365 310 lieues géométriques. Et quand il est au périhélie de son ellipse, le soleil en l’apogée de la sienne et tous deux en opposition, cette planète est en sa plus petite distance à la terre, de 2 600 620 des mêmes lieues, de sorte que le plus grand mouvement de Mars en profondeur, de l’apogée au périgée, est de 2 764 690 lieues géométriques.

Lorsque le soleil est en l’apogée de son ellipse, il est en sa plus grande distance à la terre, à savoir de 2 036 000 lieues géométriques. Et quand il est en son périgée, il est en sa plus petite distance à la même terre, de 1 964 000 des mêmes lieues, de sorte que le plus grand mouvement du soleil en profondeur de l’apogée au périgée est de 72 000 lieues géométriques

Lorsque Vénus est en l’aphélie de son ellipse, le soleil en l’apogée de la sienne et ces deux planètes conjointes, Vénus est en sa plus grande distance à la terre, à savoir de 3 494 300 lieues géométriques. Et quand elle est en l’aphélie de son ellipse, le soleil au périgée de la sienne et tous deux en conjonction, cette planète est en sa plus petite distance à la terre, de 505 700 des mêmes lieues, de sorte que le plus grand mouvement de Vénus en profondeur de l’apogée au périgée est de 2 988 600 lieues géométriques.

Lorsque Mercure est en l’aphélie de son ellipse, le soleil en apogée de la sienne et ces deux planètes conjointes, Mercure est en sa plus grande distance à la terre, à savoir de 2 975 120 lieues géométriques. Et quand il est en l’aphélie de son ellipse, le soleil au périgée de la sienne et tous deux en conjonction, cette planète est en sa plus petite distance à la terre, de 1 024 880 des mêmes lieues, de sorte que le plus grand mouvement de Mercure en profondeur de l’apogée au périgée est de 1 950 240 lieues géométriques.

Lorsque la lune est en l’apogée de son ellipse et aux quadratures du soleil, elle est en sa plus grande distance à la terre, à savoir de 69 263 lieues géométriques. Et quand elle est au périgée de son ellipse et aux quadratures du soleil; elle est en sa plus petite distance à la même terre, de 60 737 des mêmes lieues, de sorte que le plus grand mouvement de la lune en profondeur de l’apogée au périgée est de 8 526 lieues géométriques.

Que si, dans tous ces articles, nous ne parlons point de l’opposition de Vénus et de Mercure au soleil, c’est parce que Vénus ne s’en éloigne jamais au plus que de 47 degrés 56 minutes 44 secondes de l’écliptique, et Mercure de 28 degrés 33 minutes 58 secondes, suivant ma « Théorie des planètes ».

Chapitre XII - Des étoiles fixes

C’était environ le temps du grand Alexandre que les Grecs achevèrent de placer les étoiles fixes en des images feintes dans la huitième sphère, pour les connaitre plus facilement et les discerner les unes d’avec les autres, à l’exemple du globe terrestre, où l’on place le grand nombre des villes en différentes provinces, pour les apercevoir à la première vue. Ils ne manquèrent pas d’employer en cette céleste distribution les figures des douze signes du zodiaque du premier mobile et parce qu’ils ne s’étaient point encore aperçus du mouvement propre des étoiles fixes d’occident en orient, ils furent assez longtemps à demeurer dans l’opinion qu’elles étaient véritablement fixes ou sans mouvement propre. Timocharès fut le premier qui trouva du changement en leurs longitudes, Aratos et Hipparque en dressèrent un catalogue assez imparfaitement, que Ptolémée reforma deux cents ans après dans son « Almageste ». Et ce fut ainsi que la huitième sphère fut séparée du premier mobile, que le firmament chargé de toutes ces étoiles fut découvert se mouvoir d’occident en orient, que les images représentées en faveur des étoiles fixes commencèrent à marcher avec les mêmes étoiles et que les douze signes, que nous appelons étoilés, furent séparés de ceux du premier mobile.

Toutefois, Ptolémée, en son livre des « Jugements des astres », ne fait aucune considération de ce changement et il confond ensemble les deux zodiaques, à cause peut-être que le commencement de l’un n’était encore éloigné que de six degrés du commencement de l’autre. Mais pourquoi s’arrêter à tant de paroles? Ne voit-on pas que les signes du zodiaque de la huitième sphère sont maintenant si avancés que le Bélier de celui ci est presque tout entier dans le Taureau de l’autre? D’où s’ensuit que les astrologues ont assez de raison d’établir deux zodiaques dans le ciel, le premier, fiable et permanent dans le premier mobile, et le second se mouvant avec les étoiles fixes, le premier, véritable, ayant les propriétés des images des signes et le second, imaginaire, pour distinguer seulement les Étoiles. Enfin le premier pour le zodiaque de l’astrologie et le second pour le zodiaque du globe céleste, dont les images sont en grand nombre, mais plus encore les étoiles qui les occupent.

Les plus apparentes, ou celles qui ont été découvertes par la vue ou les instruments des astronomes, arrivent au nombre de 1 022, comme il se voit dans le catalogue de Tycho fait pour l’année 1600 et qui sert de modèle ou de fondement à tous ceux qui l’imitent ou le copient. Elles sont toutes attribuées, comme nous avons déjà dit, en des constellations ou des images, et les étoiles qui en sont dehors, ne pouvant être dans les figures, sont appelées informes. Elles sont encore distinguées en nature et en grandeur : celles qui tiennent de la lumière et de la couleur du soleil sont dites de nature solaire, celles qui tiennent de la couleur et de la lumière de Saturne sont dites de nature saturnienne, et ainsi des autres, que si elles tiennent du mélange de la lumière et de la couleur de deux planètes, elles sont dites de la nature de ces deux planètes. Mais la grandeur des étoiles fixes se divise en six classes, la première, la seconde, la troisième, la quatrième, la cinquième et la sixième. Les étoiles de la première grandeur sont en nombre de 15 et sont appelées royales par excellence, et les étoiles de la seconde grandeur sont en nombre de 60 et sont les plus illustres après les autres. Quant aux images représentées sur les globes célestes, elles sont distinguées en trois ordres : le premier de celles qui sont au zodiaque, le second de celles qui sont extérieures du côté du septentrion et le troisième de celles qui sont du côté du midi, ou du pôle antarctique. Les images du zodiaque sont au nombre de 12 : le Bélier, le Taureau, les Gémeaux, l’Écrevisse, le Lion, la Vierge, les Balances, le Scorpion, le Sagittaire, le Capricorne, le Verseau et les Poissons. Les images du côté du pôle arctique sont en nombre de 21 selon les anciens et de 23 selon les modernes. La Cynosure, ou petite Ourse, Hélice, ou la Grande ourse, le Dragon, Céphée, Bootes, la Couronne boréale, Hercule à genoux, la Lyre ou le Vautour tombant, le Cygne, Cassiopée, Persée, le Charretier, Ophiuchus, le Serpent d’Ophiuchus, la Flèche d’Hercule, l’Aigle ou le Vautour volant, Antinoüs, le Dauphin, la Section de cheval, le cheval Pégase, Andromède, le Triangle et la Perruque de Bérénice.

Mais les images du coté du pôle austral sont en nombre de 15 selon les anciens et de 29 selon les modernes qui en ont ajouté quatorze depuis la navigation des Indes, la Baleine, Orion, l’Éridan, le Lièvre, le Grand chien, le Petit chien, la Nef de Jason, l’Hydre, le Gobelet, le Corbeau, le Centaure, le Loup, l’Encensoir, la Couronne australe, le Poisson austral, et les nouvelles, le Triangle, la Poule d’Inde, le Caméléon, la Mouche d’Inde, la Croix, le Poisson volant, le Poisson dorade, l’Hydre, le Toucan Oiseau, le Phœnix, la Grue, la Colombe, l’Indien et le Paon. Outre les étoiles de toutes ces images, les astrologues en remarquent encore 9 d’obscures et 5 de nébuleuses, comme il le voit dans les globes célestes ou dans le catalogue des étoiles fixes de Tycho et de Kepler qui l’a suivi en ses « Tables rudolphines » dans lesquelles vous trouverez la longitude de chaque étoile au respect de l’écliptique et leur latitude septentrionale, ou méridionale, dans une parfaite justesse en observant toutefois, les parties proportionnelles de leurs mouvements que vous aurez dans les mêmes tables, ainsi que dans les nôtres, pour 60 des principales étoiles fixes.

Or, comme le firmament, ou la huitième sphère, se meut continuellement sur les pôles de l’écliptique d’occident en orient, comme les planètes, il s’ensuit nécessairement que toutes les étoiles fixes se meuvent également en longitude selon la succession des signes, à les compter dans le premier mobile, où est le vrai zodiaque des astrologues et la vraie mesure des longitudes. Quant aux latitudes septentrionale ou méridionale de toutes ces étoiles, elles sont toujours égales et sans varier; d’où vient que ces étoiles gardent toujours la même situation, la même forme, et la même figure entre elles, d’où vient qu’à cette considération elles s’appellent encore étoiles fixes; et d’où vient enfin qu’elles changent leurs déclinaisons septentrionale ou méridionale, tantôt approchant de l’équateur, tantôt du pôle arctique, et tantôt du pôle antarctique du premier mobile. Mais il ne faut pas s’étonner si les astronomes ont été si longtemps à s’apercevoir du mouvement propre de ces étoiles en longitude; puisque ce mouvement n’est que de 51 secondes de l’écliptique pour chaque année et d’un degré seulement pour 70 ans et demi, n’achevant leur entière révolution de tout l’écliptique qu’en l’espace de 25 410 années, suivant la réduction des modernes, qui les ont beaucoup mieux observées que les anciens, d’autant que Ptolémée et Alphonse, roi de Castille, donnaient un degré pour 100 ans et 36 000 ans pour la parfaite révolution de toutes ces étoiles fixes. Lesquelles finalement, comme nous avons déjà dit, sont douées de propre lumière et si fort éclatante en aucunes que certains astronomes ou philosophes ont osé dire que la canicule était un autre soleil pour éclairer un autre monde. Ils ont encore pensé que toutes les étoiles fixes n’étaient point situées comme dans une même superficie mais qu’elles étaient confusément séparées dans l’immense étendue du ciel, les unes plus proches, les autres plus éloignées de la terre. Et Galilée a voulu proposer en ses « Dialogues » que le mouvement tardif de la huitième sphère n’était qu’un faible retardement en la révolution diurne du globe terrestre, comme il se voit en ma « Théorie des planètes ».

Second livre

Chapitre I - Des causes, des effets et des signes

Tout ce qui est dans l’univers, ou sujet à nos sens corporels, sont des causes ou des effets de la nature. Les causes sont toujours devant les effets parce que les effets sont produits par les causes, mais la connaissance des effets est toujours première en nous, que la connaissance des causes, parce que rien ne peut entrer en notre entendement qu’il ne soit premièrement passé par nos sens, qui en sont les portes naturelles. C’est une sentence commune parmi les philosophes et la théologie même nous permet d’arriver à la connaissance de Dieu par la connaissance des effets et des causes subordonnées à sa toute puissance. Le sentiment que nous avons de la chaleur nous fait connaitre que le soleil a de la chaleur: le sentiment que nous avons de la lumière nous fait connaitre que le soleil a de la lumière, et le changement des ombres du soleil nous fait connaitre que le soleil a du mouvement convenable à cette ombre. Après toutes ces expériences assez souvent réitérées, nous avons trouvé que le soleil produisait la chaleur, la lumière et le mouvement qui sont dans les générations; et nous avons assuré, par une conjecture certaine, que le soleil était cause de la chaleur, de la lumière et de la vie ou mouvement entre les mixtes.

Le même raisonnement nous peut conduire à la connaissance de toutes les autres causes célestes. Les effets du jour et de la nuit nous font connaitre le mouvement du premier mobile, qu’Aristote établit pour la cause de tous les mouvements qui sont en la nature. Il nous enseigne à juger des corps simples et composés par l’expérience de leur mouvement propre car si ce mouvement est simple, dit-il, le corps sera simple, et s’il est composé, il sera composé, comme il le voit en sa « Physique ». Nous avons déjà dit comme il ne reconnait que trois mouvements dans le monde : du centre à la circonférence, qui est celui du feu et de l’air, de la circonférence au centre, qui est celui de l’eau et de la terre, et à l’entour du centre, qui est celui de la circonférence du premier mobile. Il poursuit que, de ces trois mouvements, sont composés tous les mouvements qui se trouvent dans les corps mixtes, c’est-à-dire dans les hommes, les animaux et les plantes, d’où il est apparent que ce grand philosophe attribue au mouvement du premier mobile la cause en partie du mouvement propre des hommes et des autres générations de la nature.

Mais nous avons deux sortes de causes, la première et les secondes, la première, toute puissante et toute libre, qui est Dieu, le souverain créateur et moteur de toutes choses, et les secondes, naturelles et nécessaires, qui sont les orbes célestes et les corps planétaires. Nous les disons naturelles parce qu’elles font parties du monde, ou de la nature, et nous les disons nécessaires parce que leurs actions, comme leur mouvement, sont toujours continuelles. Nous les disons encore supérieures, au regard de nous et de la terre, qui en recevons les effets et nous avons coutume d’appeler toujours le ciel, les planètes et les étoiles, les causes secondes, naturelles et supérieures, par toutes les raisons que nous venons de dire.

Nous avons d’autres causes plus prochaines et moins éloignées, comme la terre et l’eau, qui sont les causes matérielles de toutes les générations, la chaleur du soleil ou des planètes, qui en est la cause formelle; et la froideur, qui en est la cause moyenne car lorsque la chaleur introduite dans la terre sèche et humide par la présence du soleil commence d’agir dans le mélange de ces deux qualités passives, la froideur de la nuit survenant, la retient et l’empêche de se retirer, afin que la longueur de son opération puisse donner la forme à cette production commencée. Nous pouvons dire le semblable de la grande chaleur introduite dans la terre sèche et humide par la longueur de l’été et retenue en fuite dans les entrailles, par la longue froideur de l’hiver, de la glace ou de la neige, qui en ferment et bouchent les pores : parce qu’agissant alors avec plus de temps et plus d’efficace, la génération de toute semence en arrive. Nous ajouterons aussi que l’air est un des plus notables effets de la nature : la mer, ou l’humide, en est la cause matérielle, la chaleur des rayons du soleil, la cause formelle, et la froideur, toujours la cause moyenne; parce que la lumière du soleil, venant à frapper la surface de la mer ou de l’humide, en dilate soudain les parties les plus subtiles qui, ne pouvant s’écarter au long ni au large par le mutuel empêchement des unes et des autres, sont contraintes de s’élever pour s’étendre dans un plus grand espace où, trouvant la froideur répandue dans l’éther prochain, ces parties de l’eau, ainsi dilatées, s’arrêtent et forment comme une sphère, autour du globe terrestre.

Or, comme la terre est moins dure par le mélange de l’eau qui semble l’amollir, nous sentons aussi que l’air est encore plus doux que l’eau par le mélange des parties éthérées qui la mollissent. Mais il nous faut prendre garde à ce que nous avons déjà dit dans le premier livre de cet ouvrage, que le sec et l’humide sont les deux qualités passives qui n’agissent jamais, et que le chaud et le froid sont les deux qualités actives qui agissent continuellement et sans cesse. Les deux premières reçoivent les actions et obéissent suivant qu’elles sont disposées et les deux autres travaillent diversement sur les deux premières, la chaleur pour dilater et donner le mouvement, et la froideur pour condenser et donner le repos à toutes choses, car les apparences en la chaleur d’attirer et de repousser ne sont que des effets de la raréfaction ou dilatation des parties qui, forcées par les endroits où elles se meuvent, tantôt se lancent en haut et tantôt se jettent en bas, suivant ce que nous avons dit en l’exemple de l’air qui nous environne.

Mais revenons à notre sujet et remettons à un autre loisir la dispute d’une matière si belle. Disons en faveur de l’astrologie que les planètes sont des causes naturelles et non point des signes du ciel, au regard de leurs actions sur la terre. Le mouvement du premier mobile est la véritable cause des jours et le soleil en est le signe. Le retour du soleil en l’équinoxe est le signe des années mais le nombre des révolutions passées du premier mobile en est la mesure certaine. La conjonction de la lune au soleil est le signe des mois mais le nombre des révolutions du premier mobile de l’une de ces conjonctions à l’autre en est la mesure assurée. D’où il est évident que les signes ne sont point des causes mais des effets des mêmes causes dont ils sont apparemment les signes car le retour du soleil au méridien est un effet du mouvement du premier mobile, qui est la cause véritable des jours, le même étant du reste.

En toutes les opérations de la nature, nous avons les causes, les signes et les effets. La cause du printemps est le retour du soleil dans le signe du Bélier, les effets sont la chaleur du soleil que nous commençons à sentir et le signe, le retour des arondelles. Or, comme la nouvelle chaleur du soleil et le retour des arondelles sont des effets du retour du printemps, ou du soleil dans le signe du Bélier, il s’ensuit que les signes sont aussi des effets, avec toutefois cette différence qu’entre les effets produits d’une seule cause, les signes en sont les premiers ou les plus apparents à notre vue. Les vents sont la cause des tempêtes de la mer, les principaux effets sont la tempête même, et la faible agitation des flots qui la précédent, le signe de la prochaine tempête.

Davantage, le danger est cause de la crainte et de la pâleur de la personne, la crainte en est comme l’effet et la pâleur comme le signe, l'un et l’autre produits d’une même cause. Le semblable en est de la colère et de la rougeur de la face, le premier comme effet et l’autre comme signe, engendrés de l’opinion d’une injure reçue car les esprits et le sang émus dans les veines pour secourir le cœur, montent soudainement au visage, comme en la poitrine. Peut-être que tous ces raisonnements seraient trop éloignés de l’astrologie si des scrupuleux favorables à la science ne pensaient l’adoucir par cette opinion, que les astres sont des signes et non point des causes naturelles. Saint Augustin ne déclare-t-il pas en ses « Confessions » que la nature est le premier livre de dieu et le second la Sainte Bible ? Et Saint Grégoire n’assure-t-il pas que les suprêmes et divines volontés se lisent dans les éléments de la nature comme en des affiches publiques?

Chapitre II - De la providence, ou cause finale

Que les philosophes ne s’étonnent point si nous avons laissé de parler de la cause finale, la première et la plus noble de toutes les causes. Nous l’avons à dessein réservée pour en discourir plus amplement et, comme elle a pour objet la fin de toutes les autres, nous avons attendu l’occasion d’en traiter à part en faveur de l’astrologie. Nous la prenons immédiatement de la providence et, sans nous arrêter au faible, plutôt qu’audacieux, raisonnement d’Épicure et de Lucrèce qui donnent tout au rencontre fortuit des atomes entremêlés, nous dirons avec Moïse que dieu a tout fait en poids, en nombre et en mesure, et avec Socrate, en « Xénophon », parlant à l’impie Aristodème : comment serait-il possible que l’auteur de la nature soit sans prudence, l’homme en étant doué avec tant davantage.

Les planètes, qui sont les causes secondes et des corps simples, agissent nécessairement, et chacune suivant leur propre et simple nature. Le soleil donne la vie à toutes les générations, la lune donne la nourriture pour l'accroissement de toutes choses, Jupiter la santé, pour la longue durée de la vie, Saturne la force, pour soutenir avec patience les adversités, Vénus la beauté, pour se plaire davantage à soi-même, Mars la vigueur, pour aller au devant des obstacles qui s’opposent à la vie, et Mercure l’industrie, pour prévoir et remédier aux nécessités ordinaires. Mais la cause finale qui est en dieu, fait avec toutes ces choses, un homme, un animal, ou une plante selon la disposition de la matière, ou de la semence de chaque espèce. Celui qui travaille aux murailles d’un édifice ne songe qu’à bien faire les murailles, celui qui travaille aux planchers ne pense qu’à bien appuyer les solives, celui qui travaille à faire les toits ne songe qu’à bien couvrir la maison, celui qui travaille aux portes et aux fenêtres ne pense qu’a les bien fermer et celui qui travaille à tous les ferrements nécessaires ne songe qu’à faire de bonnes clefs et de bonnes serrures. Mais la cause finale, qui est en l’âme du prince, fait avec tous ces ouvriers un palais magnifique pour sa demeure.

La providence, ou plutôt la cause finale de l’univers, pour le mieux entendre, a construit la terre ronde pour recevoir plus commodément, et de tous côtés, la lumière, la chaleur et l’influence des corps célestes. Elle a formé sa consistance du sec et de l’humide. Pour être capable de toutes les générations, elle a fait mouvoir le premier mobile, avec le soleil et toutes les planètes, à l’entour du globe terrestre, pour faire continuellement succéder, et en l’espace de 24 heures, le jour à la nuit, la chaleur à la froideur, et la lumière aux ténèbres. Afin de faciliter les productions de la nature, elle a fait la route du soleil oblique, en donnant à l’écliptique de la déclinaison, pour faire illuminer en l’espace d’un an toute la terre et, par la présence ou l’éloignement du soleil, donner les quatre saisons de l’année. Elle a formé les planètes à l’entour de la terre pour lui envoyer la lumière du soleil par la réflexion de leurs corps solides et les a privés de propre lumière afin que la chaleur qu’elle en recevrait, ne fût point trop excessive. Elle a planté les étoiles fixes fort éloignées du globe terrestre pour empêcher que des astres, si grands et si lumineux, ne lui donnent trop de chaleur et trop de lumière. Elle a constitué la matière du sec et de l’humide sans se mouvoir et donné le mouvement à la chaleur et aux orbes célestes afin que les hommes et les animaux eussent du repos et du mouvement sur la terre. Finalement, elle a fait que les astres eussent de la chaleur pour donner la vie aux générations élémentaires. Elle a fait qu’ils eussent de la lumière pour leur donner la couleur. Elle a voulu qu’ils se meuvent, pour leur donner le mouvement, et qu’ils eussent des qualités, pour leur donner aussi des qualités convenables, à chaque planète. Comme du soleil, le désir de la gloire, de Jupiter, la prudence ou la sagesse; de Mars, l’audace dans les combats, de Vénus, l’amour ou les délices; de Saturne, la force dans les travaux; de Mercure, l’esprit ou la raison, et de la lune, l’activité ou la vigilance.

Que dirons-nous davantage en faveur du même sujet ? Pourquoi tant de lumière dans le monde? C’est afin d’éclairer les animaux qui cherchent leur vie sur la terre. Pourquoi tant de sons dans les corps élémentaires? C’est afin de leur faire éviter de nuit les dangers qui sembleraient les menacer. Pourquoi les odeurs dans les fruits et les plantes? C’est afin de sentir de loin les choses bonnes ou mauvaises à leur vie. Pourquoi les saveurs dans les aliments? C’est afin de manger ou de rejeter ceux qui leur sont utiles ou contraires. Enfin, pourquoi la dureté et la mollesse dans les corps matériels? C’est afin de leur enseigner les choses commodes ou incommodes. Les plantes et les arbres de toute espèce, qui ont bien avant leurs racines dans la terre pour en recevoir continuellement la nourriture qui leur est convenable, sont sans yeux, sans oreilles et privés de tous sentiments parce que ces plantes et ces arbres ne cheminent point pour chercher leur vie sur la terre, comme les autres animaux à qui la providence a donné la vue et l’ouïe pour se conduire.

Mais à quelle fin et pourquoi la nature a-t-elle donné à tous ces animaux le désir de vivre et la crainte de mourir? C’est pour les rendre plus soigneux à se conserver et plus vigilants à fuir les dangers qui les menacent. Pourquoi leur a-t-elle donné le courage et la force? C’est pour vaincre et surmonter les difficultés qui s’opposent de toutes parts à la quête de la vie. Pourquoi leur a-t-elle donné la patience dans les travaux et les souffrances? C’est pour soutenir et conserver la vie, dans les misères dont ils sont apparemment accablés. Pourquoi leur a-t-elle donné la prudence ou la finesse? C’est pour acquérir par artifice, au défaut du courage et de la force, ce qui leur est nécessaire. Pourquoi leur a-t-elle donné tant d’appétit et de plaisir au manger? C’est pour la conversation des individus de chaque espèce. Et pourquoi leur a-t-elle donné l’amour, avec tant de charme et d’ardeur? C’est afin de perpétuer en chacun son espèce, toujours suivant notre cause finale.

Enfin pourquoi la providence fait-elle engendrer la foudre dans l’épaisseur d’une profonde nuée? C’est afin de donner à l’homme le feu matériel, si utile et si nécessaire à la vie. La cause matérielle en est l’exhalaison sèche et visqueuse, enveloppée dans le creux de la grosse vapeur humide, la cause formelle en sont les rayons d’un soleil très ardent, la cause moyenne, la froideur de l’éther et de l’air, qui environne les nuées, et la cause finale, la génération du feu matériel qui tombe après sur la terre. Le bruit épouvantable qui le précède est pour avertir les hommes d’un présent si avantageux; et l’éclat frémissant qu’il fait en sortant du nuage est pour nous marquer l’endroit de la terre où il tombe. C’est encore un effet de la providence divine de nous l’envoyer souvent sur la terre et c’est un effet de l’humaine prudence de le conserver éternellement par adresse; comme les mages faisaient anciennement dans la Perse et les Vierges sacrées dans le Temple de Vesta, si fameux en la ville de Rome. Diodore sicilien rapporte que Vulcain fut le premier en Égypte à trouver l’invention d’entretenir ce feu matériel, que la foudre avait allumé dans une forêt prochaine.

Mais comment pourrons-nous trouver dans les astres la cause des actions libres de l’homme ? Aurons-nous assez de confiance de nous promettre de la découvrir dans ces orbes célestes? Ou s’il ne serait pas meilleur, pour obéir à l’éternelle vérité, de croire qu’elles sont indépendantes de toute matière? La volonté que nous avons de faire le bien ou le mal réside en la puissance de notre âme spirituelle, elle est dans une pleine liberté de suivre les lois du souverain créateur qui la formée et comme la fin de son infusion dans nos corps est pour nous conduire ou mériter la gloire du ciel empyrée, il ne faut jamais se persuader qu’elle puisse être sujette aux influences des autres. Ne vous étonnez pas si Galien a dit que les mœurs de l’âme suivent le tempérament du corps. Il entend les passions de la partie inférieure de l’âme, privée de raison parce que la langue latine a cet avantage d’exprimer par le nom de l’âme féminin sa partie supérieure où est la raison, et par le même nom masculin, comme en cet auteur, l’inférieure partie qui en est dépourvue. Mais les Français, les Grecs et les Juifs ne peuvent avoir de termes en leur langue pour discerner ces deux parties, ou plutôt ces deux opérations de notre âme d’où vient qu’Aristote, même dans sa « Morale », ne pouvant employer autre nom que celui de psyché, comme les hébreux de nèphès, pour l’âme de l’homme, il a été contraint de la diviser en deux parties, l’une supérieure douée de raison, l’autre inférieure privée de cette raison, comme il se voit en ses ouvrages, attribuant à la première la puissance d’agir librement et donnant à la seconde les troubles de toutes les passions qui nous agitent.

À quoi nous devons ajouter, en faveur de la liberté que nous avons d’agir, les plus communes sentences des anciens pères ou docteurs de la Sainte Église Romaine, pour faire voir aux envieux de l’astrologie que la volonté de notre âme se peut maintenir contre les influences du ciel, aussi bien que contre les inclinations de notre propre nature, car les bonnes ou les mauvaises dispositions des astres, comme les bonnes ou les mauvaises qualités qui entrent dans le mélange de nos tempéraments, ne font que nous incliner à des affections diverses, sans nous forcer toutefois à les suivre. Voyons le suivant chapitre.

Chapitre III - Des actions libres de l’homme

Nous avons déjà l’apporté que le concile de Trente permettait l’astrologie, pour la médecine, la navigation, et l’agriculture, et nous ajouterons maintenant que le même concile la défend, en cas qu’elle se mêle de prédire absolument, et avec nécessité, les actions libres et qui dépendent de la volonté de l’homme ce que jamais les bons astrologues n’ont entrepris de vouloir faire, d’où nous pouvions conjecturer que la bulle de Sixte V, qui défend tout à fait cette science, quoi qu’elle ne se mêlait point de prédire avec assurance les actions libres, n’a été faite qu’à raison de l'abus, et non point qu’elle fût en cela mauvaise, car autrement le saint concile ne l’aurait pu permettre, et toutefois, cette défense pourrait être fondée, puisque pour la même occasion l’on ne permet pas la lecture de la sainte bible à toute sorte de personnes. Mais, sans nous arrêter à des raisonnements que nous avons déjà souvent touchés, nous ferons voir tout de suite et par ordre, les autorités des saints pères en faveur de l’astrologie, d’autant qu’ils n’ont jamais déclamé que contre ceux qui ont cru que les astres apportaient de la nécessité à nos actions, et que notre volonté était sujette aux influences des astres.

Le cardinal de Tolède nous fera voir la vérité de ce que j’avance, lorsqu’il dit au quatrième de ses « Institutions sacerdotales », chapitre 5, que ce n’est point péché de rechercher par l’astrologie les effets de la nature, comme les éclipses, les pluies, et les complexions, tempéraments ou inclinations naturelles des hommes, c’est pourquoi, poursuit-il, la spéculation de cette science est permise. Ajoutant de plus que si quelqu’un tâchait de connaitre par l’astrologie des effets contingents qui fussent même dépendants de notre liberté, il ne pécherait pas mortellement. Et Delrio en la seconde question du troisième chapitre du sixième livre, ne dit-il pas que l’astrologie n’est point défendue ni superstitieuse, si elle ne professe qu’une opinion ou soupçon, avec crainte du contraire? Comme par exemple, si elle dit seulement que les astres nous menacent d’une cherté de bled, qu’il y a du soupçon ou de l’apparence, que cet enfant soit tel, ou enclin à telles et telles choses, que sa naissance lui promet cela, ou autres tels événements; car il nous est permis, dit-il de soupçonner ou de craindre semblables choses ajoutant qu’il n’y a point de péché en telle recherche, qui appartient à la prudence, et qui de foi est plutôt bonne que mauvaise.

Mais que dirons-nous, avec le père Campanelle en la préface de son « astrologie », de la liberté de l’homme? Ni les tourments, ni la mort, s’il ne veut, ne le peuvent vaincre, comment les influences du ciel pourraient-elles le forcer, ou le contraindre? Le feu qui brûle et consume le corps, ne saurait atteindre son âme. Salomon ne dit-il pas, que c’est une égale folie de croire que Dieu force la liberté par le destin, ou de juger que toutes choses soient assurées? Saint Jérôme, en les « Prologues », ne conterait pas l’astrologie et l’astronomie entre les sciences utiles si elles étaient contraires à la liberté de l’homme.

St Thomas, Albert le grand, Campanelle et autres théologiens disent que l’arbitre de l’homme n’est point directement sujet aux astres, mais par accident, et en tant que le corps reçoit leurs influences, comme les esprits animaux, et les humeurs. Et Saint Ambroise ne déclare-t-il pas que le trouble des passions peut aller jusqu’à l’âme, infuse et non point confuse dans l’homme? Et qu’elle est en puissance de les suivre, ou de les repousser, à son arbitre ? D’où procède que Saint Thomas, contre les Gentils, assure que les astrologues prédisent souvent des choses véritables, touchant même les actions libres des hommes parce que, dit-il, ils sont accoutumés de suivre les appâts de la sensualité plutôt que les conseils de l’âme raisonnable.

Ce grand saint dit encore que le ciel influe des dispositions à l’âme indirectement, et qu’il agit sur les humeurs de la personne, comme sur les éléments de l’eau, de l’air et de la terre, que les anges et les démons agissent sur cette âme par la persuasion; et Dieu, en la changeant ou la mouvant, comme il plait à sa « Toute puissance». Le même Docteurangélique dans le « Livre du destin », et sur le problème de Saint Augustin touchant la bénédiction de Jacob et d’Ésaü, comme dans son opuscule des « Jugements astrologiques », ne dit-il pas, après avoir considéré la grande différence de ces deux frères jumeaux, nés sous même constellation céleste, qu’il fallait que le cœur de Jacob fût tourné du côté d’orient et d’un astre favorable et non point celui d’Ésaü, pour donner au premier des meilleures inclinations à la vertu, que non pas à l’autre. Et Campanelle, en la préface de son « Astrologie », n’assure-t-il pas non plus que l’homme a la puissance de suivre les lois de dieu plutôt que celles des éléments? Nous voyons, dit-il, que les débauchés s’abstiennent de la débauche par la crainte de Dieu, ce n’est pas qu’ils ne soient tentés, mais ils ne sont point vaincus par le vice. Il ajoute que dieu peut employer les qualités des étoiles, et des éléments, pour disposer les esprits et les organes de l’âme, pour faire un bon religieux et de sainte vie.

Le grand Saint Thomas d’Aquin, dans le troisième contre les Gentils, rapporte qu’il y a des personnes si bien nées, et d’autres si mal nées, au regard des influences du ciel, que les unes sont portées naturellement à la vertu et les autres continuellement sollicitées par leurs propres inclinations, de s’adonner ou s’attacher aux choses mêmes qui leur sont contraires. Il poursuit, qu’encore que la configuration de la lune promette le mariage à une personne, que cette personne est en liberté de le refuser, d’autant que ce n’est qu’une disposition, et non point une nécessité du côté des astres. Et au troisième contre les Gentils, chapitre 85, il confesse avec le subtil Scot, au second des « Sentences », distinction 14, que les étoiles opèrent en nous par nature et qu’elles inclinent notre âme, non pour la forcer, mais afin que par le combat de la résistance, elle se rende plus droite et plus digne des biens éternels; à l’imitation de la palme héroïque qui, plus abattue par le vent, plus haut elle se relève, ce que confirme de point en point Saint Damascène, au septième chapitre du second livre.

Mais le docte Cajetan, sur la seconde de la seconde, au Traité de la religion et de la superstition, ne considère-t-il pas avec étonnement, et ne pense-t-il pas que les astrologues peuvent juger et prédire les actions libres des hommes, quoi qu’ils ne les assurent pas infaillibles? Parce que, dit-il, comme le ciel agit sur les éléments de l’eau et de l’air, il agit sur les humeurs et les esprits animaux qui sont unis à l’âme. Davantage, que lisons-nous dans le Miroir d’Albert le grand? Il déclare que notre âme décline souvent des choses qui nous sont bonnes et convenables, comme aussi de celles qui dépendent de la volonté, non pour être sujette aux influences des astres, mais en tant que le corps où elle est infuse est sujet à ces astres. Et dans le subtil Scot, au second des « Sentences », ne voit-on pas que les étoiles agissent sur les éléments et sur les mixtes animés ou inanimés? Comme dans tous les saints pères de l’Église, qui confessent la même chose, sans conclure toutefois que notre âme soit sujette à telles actions des Astres, et que notre volonté, qui est en la main de Dieu, en puisse être forcée. Ou comme le docte Panormitain qui assure que ce n’est point impiété, ni contre la religion, de croire que les astres inclinent les hommes à la vertu et au vice.

Retournons au célèbre docteur angélique. Il confirme, dans le troisième « Contre les Gentils », la trente-huitième sentence du « Centiloque » de Ptolémée, que Mercure, dans les maisons de Saturne, donne la secrète et profonde intelligence des choses, rendant ainsi l’âme plus disposée à la connaissance des vérités éternelles, d’autant que les astres, poursuit-il, peuvent être cause de notre volonté droite ou perverse puisqu’il est évident, si nos sens sont bien disposés, que notre volonté le portera plus facilement à élire le bien et, s’ils sont mal disposés, qu’elle penchera plutôt dans les actions mauvaises. Dans le même livre, et conformément à Saint Augustin, nous voyons, dit-il, changer les saisons, les accroissements ou décroissements de la lune, et augmenter ou diminuer les générations de la nature, mais la volonté de l’âme n’être point sujette à la position des étoiles, mais seulement inclinée. Et dans le second de « La génération », il dit, touchant la signification des douze maisons de la figure céleste, que celui qui pourrait savoir la nature et la disposition du ciel et des astres, au temps de la naissance d’une personne; pourrait, autant qu’il convient aux célestes influences, juger toute la vie de cette personne, sans imposer toutefois de la nécessité à sa prédiction qui peut, en quelque façon, être changée par d’autres accidents, comme enseigne même l’astrologie.

Finalement, Origène ne rend-il pas encore ce témoignage en faveur de cette belle science, sans toutefois admettre de la nécessité en ses influences, que le ciel est comme un livre ouvert, contenant toutes les choses futures, marquées par la situation des étoiles? À quoi nous ajouterons cette sentence du « Centiloque » de Ptolémée, prince de l’astrologie, où il dit en ces termes les préceptes que je vous donne tiennent le milieu entre le possible et le nécessaire; c’est-à-dire que les actions des astres sont plus que possibles, mais non pas toujours nécessaires.

Chapitre IV - De la variété des effets

Il nous faut encore expédier une autre difficulté touchant les causes secondes et supérieures. Nous avons dit qu’elles étaient nécessaires parce qu’elles étaient naturelles et nous avons ajouté que leurs actions étaient simples parce que c’était des corps simples car le soleil, par exemple, se meut continuellement et toujours d’un même ordre, il porte toujours la lumière avec soi et toujours la chaleur l’accompagne de sorte que nous pouvons soutenir avec tous les philosophes qu’il échauffe, qu’il éclaire et qu’il si meut toujours par sa propre nature, laquelle est toujours semblable, ne pouvant être changée que du côté de la Toute puissance, comme il se vit en l’éclipse ou totale obscuration de la lumière, contre l’ordre de son mouvement, au temps de la passion de notre sauveur, et au temps de la grande bataille de Gabaon pendant laquelle Josué fit arrêter cet astre lumineux pour achever sa victoire.

La même nécessité naturelle est encore dans les actions et les mouvements des autres planètes et par la même raison que nous venons d’alléguer, parce qu’elles obéissent continuellement aux principes de leur propre nature. Les Chaldéens persuadaient le grand Alexandre de n’entrer point dans Babylone pour éviter la funeste menace des astres mais le philosophe Anaxarque, méprisant leurs divinations, employa cet argument pour les détruire : s’ils pénètrent dans l’avenir par des causes naturelles, elles sont inévitables comme nécessaires; et s’ils le connaissent par le destin, ils sont, et leurs prédictions, ridicules parce qu’il est impénétrable. Anaxarque pouvait être bon philosophe mais il était mauvais astrologue. Si les causes célestes sont nécessaires, c’est seulement du côté de leurs principes et si les actions des astres sont simples, c’est seulement du côté de leur nature.

Mais il n’est pas de même dans la considération des effets qui arrivent dans les éléments et sur la terre : il faut avoir premièrement égard au mélange, ou la composition, de tant de causes célestes, et en second lieu, comme dit Ptolémée au premier du « Quadripartite », à la disposition variable des corps élémentaires, à la diverse position des climats sur le globe terrestre, à la condition naturelle de chaque personne et à la générale constitution des choses qui concourent; sans négliger la nature des parents, l’éducation de l’enfant et autres choses semblables : d’où vient la diversité des effets qui se voient tous les jours dans la nature, soit dans les générations ordinaires ou dans les accidents de la vie des hommes. C’est en ce point que consiste le plus grand secret de l’astrologie, c’est en cet endroit que l’excellent esprit de l’astrologue doit suppléer aux difficultés de la science, et c’est dans le mélange de tant de variétés que l’on doit puiser les jugements des choses futures, à l’exemple de la médecine et de toutes les sciences physiques fondées, comme l’astrologie sur la conjecture et l’expérience.

Mais revenons au particulier de toutes ces causes. Le soleil humecte à son lever, échauffe en son midi, dessèche en se couchant et il n’a, toutefois, qu’un mouvement et qu’une chaleur toujours égale. Ces trois effets sont différents et produits en trois différentes heures, mais voyons comment ils se font dans un seul moment. Le soleil humecte en même temps la nouvelle Espagne, échauffe le royaume de Maroc et dessèche les Indes orientales parce que, quand il est en l'ascendant du Mexique, il est au milieu du ciel du Maroc et en l’occident de Cambay. Ce changement ne procède donc pas de la cause, il se trouve seulement dans les effets, à raison de la variable disposition de la matière.

Que dirons-nous des saisons de l’année, à cause de l'obliquité de l’écliptique? Quand le soleil est en l’équinoxe du printemps, il échauffe la zone torride et en même temps il humecte la zone tempérée du côte du pôle arctique et dessèche la zone tempérée du codé du pôle antarctique, faisant tout le contraire lorsqu’il est en l’équinoxe d’automne.

Davantage, le soleil et la canicule ont toujours la même chaleur et sont toujours de même nature, et toutefois, quand ces deux astres se lèvent ensemble, ils ne font pas des jours caniculaires pour tout le monde. Les provinces boréales en ressentent l’ardeur parce que ce lever arrive lorsque le soleil commence d’entrer au signe du Lion, le contraire étant des provinces australes qui en reçoivent au même temps de la douceur dans le plus fort de l’hiver qui les travaille.

Enfin les divers effets du soleil sont apparents par tout le monde. C’est toutefois, le même globe, c’est toujours la même chaleur et la même lumière, et néanmoins il nous donne l’été entrant dans le signe de l'Écrevisse et en même temps l’hiver aux régions qui sont du côté du Capricorne.

Mais ne serait-il pas meilleur d’ajouter les raisons naturelles aux expériences sensibles? Comment se pourrait-il concevoir que la lumière, inséparable de la chaleur, pût causer de loi de l’humidité sur la terre ? Et pourrions-nous sans autres raisonnements le persuader ou le faire entendre?

Disons donc que la terre, chargée d’humidité par la longueur de la nuit, venant à recevoir la première chaleur avec la naissante lumière du soleil; que les parties les plus subtiles de cette humidité se dilatent incontinent et s’élèvent en forme de vapeur humide qui couvre toute la surface de cet endroit de la terre : parce que la chaleur du soleil n’ayant point encore assez de force pour dissiper entièrement cette vapeur, elle est quelque temps suspendue pour humecter, comme elle fait, toutes les campagnes, les unes plus, les autres moins, suivant qu’elles sont, ou plus sèches, ou plus humides. Ainsi nous pouvons dire que le soleil à son lever humecte la terre, non qu’il soit humide de sa nature mais parce que sa chaleur agite l’humide qu’elle rencontre, soit dans les plaines abreuvées de la pluie, soit dans la mer, les étangs et les rivières.

Or, le soleil étant au milieu du ciel, nous avons des termes pour lui tout contraires : nous disons qu’il échauffe la terre de sa propre nature parce qu’ayant dissipé toutes les vapeurs qui s’étaient élevées depuis son lever, il fait sentir sa chaleur naturelle dans les campagnes, mais avec plus ou avec moins d’ardeur suivant que les rayons de sa lumière sont plus droits ou plus obliques. Et lorsqu’il descend à l’horizon pour se coucher, nous disons qu’il dessèche la terre, non de foi, mais par accident, parce qu’ayant tiré depuis son midi toute l’humeur qui restait dans la même terre, les plaines nous semblent avoir été desséchées par la chaleur du même soleil d’où vient que nous disons qu’en son coucher il dessèche.

C’est par les mêmes raisons que les astrologues appellent la lune tantôt humide, tantôt chaude, tantôt sèche et tantôt froide; comme il se voit dans le grand Ptolémée qui ne reçoit point, comme nous avons déjà dit, la combination des qualités qui entrent dans les éléments d’Aristote. Et parce qu’ils attribuent souvent la froideur à Saturne, comme quelquefois à la lune, il ne faut pas que les philosophes s’étonnent de cette manière de raisonner; d’autant que leur opinion n’est point que les planètes puissent avoir de la froideur, ou du moins que la lumière qu’ils nous envoient puisse avoir la qualité froide. Nous avons déjà déclaré que la froideur n’entre point dans les substances qui forment les générations, que ce n’est qu’une privation de la chaleur, comme les ténèbres sont privation de la lumière et qu’il agit seulement comme cause moyenne dans la nature. Si l’astrologie, comme la médecine, usurpe ce terme de froideur, ce n’est que par comparaison d’une moindre chaleur avec une plus grande : Ptolémée et tous les auteurs de cette science le rapportent de la sorte. Ils disent que la chaleur de Saturne et la chaleur de la lune, quand elles sont faibles, ne font qu’élever de légères vapeurs de la surface de la terre, sans les pouvoir résoudre, à cause de leur faible lumière : d’où il advient les effets de froideur, par l’attouchement de cette vapeur humide non assez échauffée.

Mais pourquoi nous arrêter si longtemps à faire connaître que la variété des effets dans les générations de la nature procède des variables dispositions de la matière plutôt que de la simple nature des astres? Serons-nous encore obligés d’alléguer cet axiome commun de la philosophie : que le soleil avec l’homme engendre l’homme et que le soleil avec la cerise, engendre la cerise pour donner encore cette connaissance que le soleil n’a point en soi les formes spécifiques et qu’il n’apporte dans les sujets qui reçoivent son influence que l’action, la chaleur et la vie. Peut-être que ce n’est pas assez : d’où vient que les semences de chaque espèce prennent la forme qui leur est convenable? C’est parce qu’étant agitées par la vertu du soleil, elles se disposent naturellement et se rangent comme elles étaient accoutumées de se disposer et de se ranger dans les générations précédentes. Ne voyons-nous pas que la chair des animaux est toute rangée comme par filament, les uns sur les autres, parce que les herbes des prés, de forme longue et déliée, l’ont engendrée? Dirons-nous que la chaleur du soleil, ou de l’animal, qui a recuit ou digéré ces herbes, leur ait rendu la même forme après les avoir converties à sa nourriture? Ou s’il ne serait pas meilleur de dire que la substance matérielle de toutes ces herbes a repris d’elle-même cette figure, par la même accoutumance que nous voyons, tant en général qu’en particulier, dans les ouvrages de la nature? Mais c’est assez pour l’astrologie, mon dessein n’étant pas de m’étendre dans la philosophie.

Chapitre V - Des rayons du globe solaire

Ce n’était pas sans fondement que les anciens poètes et philosophes donnèrent un arc et des flèches au soleil, sous le nom d’Apollon, avec une rayonnante couronne. Ils ne pouvaient honorer le simulacre de ce dieu fabuleux par des enseignes plus magnifiques. Et la sainte écriture même, voulant en célébrer les merveilles, ne dit-elle pas en divers endroits que dieu habite dans le soleil? Que dieu a posé dans le soleil son tabernacle? Homère, enchanté, comme les autres, des admirables effets de sa lumière, ose le glorifier en ses vers du titre qui tout voit et tout oit. Et les Perses, comme les Égyptiens, ne l'ont-ils pas adoré sous les noms de Mitrah et d’Osiris? Les Arabes anciennement le vénéraient sous le nom de Ram, comme font encore à présent les Bramanes de l'Inde orientale. Les Américains de la grande rivière des amazones l'adorent aussi sous le nom d'Yuma, qu’ils attribuent à dieu et à l'or de leur contrée. Et les Germains avaient accoutumé de lui consacrer un cheval blanc, à cause de la générosité de cet animal et de la couleur blanche semblable à la lumière

Mais les anciens Grecs, auteurs de tant de fables, l’ont tantôt qualifiés du nom de pythien, tantôt du nom de delphien, et tantôt de celui d ‘Écathée parce qu’il avait tué le serpent Python, qu’il était frère de la lune et qu’il était bon archer par excellence. Ils lui ont aussi consacré le laurier parce que sa feuille toujours verdoyante imitait sa lumière toujours brillante. Mais quels noms et quels attributs lui ont donné les philosophes? Roi du ciel, père du jour, principe de mouvement, fontaine de chaleur, source de lumière et nous ajouterons origine des rayons et prince des influences. Peut-être qu’il ne sera point inutile en cette science d’examiner si la lumière est corporelle ou incorporelle, les rayons du soleil sont matériels ou immatériels, et si les opinions diverses de tant de philosophes se pourraient accorder en cette dispute. Si la lumière était incorporelle, ou sans matière, elle pénétrerait avec une égale vélocité les corps opaques et les corps diaphanes, elle ne ferait point de réflexion sur les premiers, ni de réfraction dedans les autres et comme les substances de nature spirituelle, elle ne trouverait aucun obstacle dans la matière.

Mais si la lumière ou les rayons du soleil sont corporels, comment pourrons-nous concevoir que son globe se conserve toujours en sa grandeur? Qu’il ne souffre aucune diminution en sa quantité? Et qu’en se vidant en si grande abondance, il puisse être rempli avec la même diligence? Il nous faut en ce point confesser notre faiblesse et puisque la puissance de notre esprit ne peut atteindre à la connaissance des choses moins difficiles et plus prochaines, il vaut mieux recevoir une bonne opinion pour véritable que de la rejeter par faute de raisons apparentes. Descartes n’a point conservé dans sa philosophie cette louable modestie, il nous a voulu faire comprendre la naturelle circulation des atomes qui sortent et qui rentrent incessamment dans le soleil, et dans cette pensée, il a plus donné dans la vanité que dans la vérité de la chose. C’est toutefois le premier des philosophes qui ait tenté cette carrière et, comme un autre Phaéton, il a moins mérité de blâme que d’excuse, s’il ne l’a pas assez dignement franchie.

Dans quel sentiment sommes-nous donc en cet ouvrage, touchant les rayons du globe solaire? Nous dirons, sans appréhender la censure des philosophes de contraire opinion, que tous ces rayons sont corporels et matériels. Nous ajouterons qu’ils pénètrent facilement tous les corps diaphanes mais avec plus de vélocité l’éther que l’air, et avec plus de vitesse l’air que l’eau, ou les autres corps humides. Et nous poursuivrons qu’ils entrent enfin, mais obliquement et par détours, dans les ouvertures ou les pores des corps opaques, comme la terre. Or, comme nous avons déclaré dans le premier livre de cet ouvrage que la lumière des planètes procédait de la lumière du soleil et que le soleil était le seul globe lumineux qui fût dans les orbes célestes, il ne fera pas difficile à nous persuader que tous les rayons des globes des planètes ne procèdent seulement que des rayons du globe solaire et, partant, comme nous avons déjà dit, que le soleil est l'unique principe des rayons et la source des influences. Pythagore, Platon et Copernic ont tenu qu’il était au milieu de l’univers, comme le cœur est au milieu du corps de l’homme, que les Grecs ont appelé microcosme, afin de donner l'action, la vie et le mouvement à toutes les parties du monde. Kepler ose l’assurer dans son « Épitomé de l'astronomie » et Galilée le veut persuader en les « Dialogues », sans alléguer tant d’autres célèbres auteurs qui s’efforcent à nous confirmer le semblable.

Mais revenons au sujet de l’astrologie. Déclarons maintenant les espèces de tant de rayons qui nous arrivent sur la terre et faisons voir comment ils sont distingués entre eux par des notables différences. Les premiers et les plus puissants sont ceux qui viennent immédiatement du globe lumineux du soleil et qui s’élancent directement sur la terre, comme les rayons du soleil, étant de jour sur notre hémisphère. Les seconds en ordre et en puissance sont les rayons de la première réflexion, lesquels, venant à frapper les corps opaques des planètes, sont repoussés directement contre le globe terrestre; comme les rayons du soleil qui frappent les globes de Jupiter, de Vénus et de la lune entre autres, et qui nous sont immédiatement renvoyés par chacune de ces planètes. Les troisièmes, et toujours moindres en vigueur comme en force, sont les rayons du soleil de la seconde réflexion, qui, repoussés premièrement du globe solide de l’une des planètes à l’autre, sont repoussés en second lieu jusqu’à la terre comme les rayons du soleil, qui vont premièrement à Jupiter, ensuite de Jupiter à la lune et enfin de la lune à la terre, ou comme les rayons du soleil, qui vont premièrement à Mars, ensuite de Mars à Vénus, et finalement de Vénus au globe terrestre. Et les quatrièmes, peu dissemblables, sont les rayons solaires qui, repoussés du corps opaque de la terre contre la surface du globe solide de la lune, retournent contre le globe terrestre, comme il se voit aux éclipses de la lune où son globe parait à nos yeux par les rayons qu’elle reçoit des autres planètes et des parties illuminées de la terre. C’est ainsi que nous recevons tant de sortes de lumières, c’est ainsi que nous recevons tant de différentes chaleurs et c’est ainsi que tant de sortes d’influences nous sont portées.

Ce n’était pas assez dans la nature, des premiers rayons du globe solaire, à cause du continuel mouvement de cet astre lumineux, qui ne pouvait échauffer les parties du globe terrestre que successivement les unes après les autres. La providence a formé les globes opaques de la lune et des planètes pour recevoir, comme en des miroirs, l'image du soleil et nous envoyer les féconds rayons de sa lumière par la réflexion de leurs corps solides afin de suppléer à la longue froideur, soit de la nuit, ou de l’hiver en chaque contrée. Or, entre toutes les planètes, la lune a été posée la plus proche de la terre afin que sa lumière fût plus forte et plus abondante que celle des autres. Et son mouvement a été rendu beaucoup plus vite, afin que les diverses parties du globe terrestre en fussent plus souvent secourues. Le soleil fait dans un an ses quatre saisons et la lune seulement dans un mois fait les siennes. Pendant que le soleil donne le jour et la chaleur à l’un des hémisphères, la lune donne sa chaleur et sa lumière à l’autre et lorsque le soleil en hiver se montre si peu sur la terre, la lune souvent y demeure davantage afin de réparer par sa lumière et sa chaleur le défaut de la lumière et de la chaleur de l’autre.

Dieu a dit en la création du monde « faisons deux grands luminaires; le soleil, pour présider le jour, la lune, pour présider la nuit » et il a parlé dans une égale considération de ces deux astres. Il a raisonné comme les philosophes et non point comme les géomètres parce que ces deux luminaires sont seulement égaux en grandeur à ceux qui les contemplent du globe terrestre. Il s’est accommodé à l’opinion des astrologues, en les comparant ensemble, parce que la puissance de la lune sur les générations de la terre n’est point inférieure à la puissance du soleil sur les mêmes. Finalement, dans les termes communs de l’astrologie, comme dans la sainte écriture, le soleil et la lune sont appelés préférablement les deux luminaires. Parmenides a dit que le soleil était le père, que la terre était la mère et que la lune était la nourrice en toutes les générations élémentaires. Je n’allègue point les autres philosophes qui s’accordent à la même sentence et c’est assez, pour conclure, de faire voir que les rayons de la lune sur la terre ont une singulière efficace en toutes choses.

Chapitre VI - De l’influence des astres

Tous les plus grands philosophes qui ont orné les siècles passés, comme les nôtres, de leurs admirables ouvrages, concourent dans le sentiment que les astres ont des influences. Ils nous ont doctement enseigné que les cieux avaient une puissance, tant universelle que particulière, sur les générations et les corruptions des corps inférieurs comme il se voit dans la physique d’Aristote où ce grand personnage nous veut assurer que la vie de toutes choses était dans le premier mobile et que, dans les mouvements supérieurs, étaient les changements qui sont en nos régions inférieures. Il ajoute que le mouvement des planètes dans le zodiaque était la première origine des productions élémentaires. Et Ptolémée, sans contredit le prince des astronomes, rapporte au premier du « Quadripartite », qu’il est plus qu’évident qu’une certaine force, ou vertu céleste, se répand universellement en la terre et que tous les corps qui sont au-dessous de la lune se ressentent du mouvement des astres, comme les animaux ainsi que les semences de l’air, de l’eau et de la terre. Aristote poursuit, en son livre « Des éléments », que lorsque toutes les planètes seront dans le signe des Poissons, le monde doit périr par le cataclysme ou déluge universel, ou que se trouvant ensemble dans le signe des Gémeaux, qu’il doit finir par un général embrasement, ou ecpyrose.

Or, non seulement les philosophes confessent que les astres, par leurs influences, agitent les humeurs qui sont dans les animaux et les plantes. Les auteurs de l’agriculture sont encore de cette opinion, témoins Columelle et Palladius, comme pareillement Pline et Virgile. Davantage, Sénèque le philosophe dit que les astres agissent sur nous par l’entremise de l’air qui nous environne, dans lequel la secrète vertu de leur influence se mêle et se répand autour de la terre. Galien et Fracastor sont de cette opinion : ils disent que les qualités de l’air, altérées par les diverses constitutions des planètes, ont accoutumé d’engendrer diverses maladies entre les hommes. Et Avicenne n’a-t-il pas avancé que, des cadavres humains demeurés sur la terre après un grand déluge, les astres pourraient engendrer des nouveaux hommes? Voulant réfuter cela au huitième de sa « Physique », Averroès dit que cette nouvelle génération serait plutôt des créatures d’une autre espèce, comme il se voit par expérience des rats, des taupes ou des grenouilles.

Ne voyons-nous pas les humeurs augmenter dans les animaux avec l’accroissement de la lune et diminuer au contraire par le décroissement de la même? Les lois défendaient aux Lacédémoniens de ne commercer point une guerre qu’au temps de la pleine lune, pendant laquelle ils tenaient que les cerveaux étaient plus remplis de substance et les conseils par conséquent plus accompagnés de prudence. Enfin Diodore rapporte, dans le premier livre de son « Histoire » que les philosophes d’Égypte assuraient que la première génération des hommes avait été faite dans leur contrée, après la retraite des eaux d’un grand déluge qui couvrait toute la terre. Ils soutenaient que ces premiers hommes avaient été créés du limon, cuit et recuit à diverses fois par les rayons du soleil, et autant de fois réduit en forme de petites ampoules par la froideur de la nuit, qui les condensait de la sorte. Or, ne voit-on pas aussi dans Ptolémée, comme dans tous les philosophes et les géographes, que la diverse forme et couleur de tant de différentes nations ne procèdent que des influences du ciel et de la position des climats où elles habitent? D’où vient que saint Thomas a dit que l’homme était sujet aux astres quant au corps, aux anges quant à l'esprit, et à dieu quant à la volonté, et tout de suite, que l’on disait que l’homme était bien né par les astres, bien gardé par les anges et bien gouverné de dieu; ajoûtant le même saint Thomas, que la beauté du corps, et non la beaute de l’âme, procedait aussi des astres.

Mais pourquoi nous arrêter de la sorte à des autorités si communes dans les auteurs de l’astrologie, pourquoi nous amuser à tant d’expériences et des raisons si générales sans pénétrer plus avant dans les influences? Et pourquoi demeurons-nous si longtemps à reprendre la suite de notre sujet en puisant dans les natures célestes l'intelligence de cette matière? Nous venons seulement d’exposer comment les rayons du soleil étaient les uniques rayons qui nous apportaient la chaleur et la lumière des astres et il nous faut dire maintenant comment-ils nous donnent les impressions de leur mouvement et de leur nature. Ce sont les quatre éléments de l’influence, portés par les rayons du soleil : la chaleur, pour donner la vie, la lumière, pour donner la couleur; le mouvement, pour donner le mouvement, et la nature, pour donner les qualités à toutes les générations élémentaires. Les corps des planètes sont des substances et comme toutes ces substances ont leurs quantités, elles doivent encore avoir leurs qualités, suivant les catégories d’Aristote.

Le mouvement tardif de Saturne, sa chaleur faible et sa couleur pâle nous font connaitre la qualité froide et mélancolique de cette planète et nous persuadent que la matière solide de son globe ténébreux est de couleur noire, de nature pesante et de consistance dure. Ne voyons-nous pas en la surface du globe terrestre diverses terres, de différentes qualités, couleurs et consistances? Et de cette expérience, ou plutôt ressemblance, ne pouvons-nous pas en former des conjectures certaines? Mais comment Saturne nous peut-il envoyer, ou imprimer, dans les éléments qui nous environnent des qualités conformes à sa nature? Pourrait-il répandre vers nous des parties de sa substance, sans diminution de son globe? Ou s’il ne serait pas meilleur de dire, conformément à notre pensée, que les premiers rayons du soleil venant à frapper son corps opaque en agitent l'humeur, comme ils font à peu prés sur la terre? Et que prenant de la sorte les qualités naturelles de ce globe saturnien, ces mêmes rayons du soleil nous les apportent par réflexion au globe terrestre? Or, c’est ainsi que les rayons du soleil du second ordre nous impriment dans l’air, dans l’eau et dans la terre, les quatre éléments de l’influence de Saturne; la chaleur, la lumière, la nature et le mouvement, selon toutes les apparences.

Peut-être qu’en cette opération physique les premiers rayons du soleil perdent leurs propres qualités pour prendre les qualités de Saturne. Ce n’est pas ainsi qu’il le faut entendre parce que, comme ils ne font en ce changement qu’altérer, et non point changer, la lumière et la chaleur du soleil; il est évident qu’ils ne font qu’altérer, et non point changer, les autres deux éléments de l'influence, d’autant que nous avons déjà dit que le corps lumineux du soleil en était l'origine et le principe. Car c’est toujours sa chaleur qui nous donne la vie, c’est toujours sa lumière qui nous donne la couleur, c’est toujours son mouvement qui nous donne le mouvement et c’est toujours sa nature qui nous donne les qualités, mais le tout plus parfaitement, ou moins imparfaitement, suivant le mélange des autres planètes.

Que dirons-nous du globe de la lune, si proche de la terre ? Les premiers rayons du soleil venant à le frapper, n’agitent-ils pas l’humeur de sa superficie, comme nous avons recité de Saturne? Et après avoir reçu de la sorte les impressions de la nature corporelle et du mouvement de cette planète, ces mêmes rayons du soleil ne les apportent-ils pas par réflexion dans les éléments cjui nous environnent? Que pourrons-nous alléguer davantage pour nous faire concevoir les raisons de la convenance, ou plutôt de la grande puissance que cette planète a sur les humeurs ou les générations de la terre? C’est sans doute à cause de son grand voisinage et de la grandeur du globe terrestre parce que les premiers rayons du soleil portés contre la terre, et après par réflexion contre la lune, retournent continuellement de la lune à la même terre, avec les premiers rayons du soleil repoussés à nous par le globe lunaire. De sorte que, par ce continuel mélange des rayons du soleil poussés et repoussés de la terre à la lune, et de la lune à la terre, comme par un mutuel commerce, il nous est facile de former les conjectures de toutes nos influences lunaires. Mais comme en toutes les autres planètes, nous connaitrons la nature de son globe par sa lumière, et comme cette lumière est claire, nous dirons que la consistance du globe lunaire est de couleur blanche, de nature humide et de matière douce.

Il nous semble que ce raisonnement suffit à nous faire connaître l’essence et la nature des influences à quoi, toutefois, nous pouvons ajouter que la substance du globe solaire est de couleur jaune, de nature grave et de confidence molle plutôt que dure, que la grande chaleur donne la vie forte, que la grande lumière rend les personnes illustres et que son mouvement médiocre et toujours direct fait une grave démarche, conformément à ce que dit Aristote du Magnanime, au troisième de la « Morale », qu’il marche toujours d’un même pas, car qu’y a-t-il qui le puisse obliger à presser sa démarche?

Que dirons-nous de la substance de Mars, en observant la même conduite? Qu’elle est de couleur rouge, de nature variable et de consistance plus sèche que dure, que sa couleur, semblable à celle du feu, donne la vie encore plus forte que le soleil mais de moindre durée, par l’excès d’une chaleur trop dominante, que sa consistance plus sèche que dure rend les personnes altérées et déréglées dans l’usage de la vie et que son mouvement tantôt vite, tantôt rétrograde, tantôt bas et tantôt élevé imprime dans les corps inférieurs la disposition aux exercices violents et la précipitation inégale en la démarche. Mais ce n’est que trop de tant d’exemples.

Chapitre VII - De la nature et qualité des planètes

Pour mieux arriver à la connaissance de la nature et des qualités des sept planètes, nous suivrons plutôt les raisonnements que nous avons tenus en cet ouvrage que ceux de Ptolémée et des auteurs les plus estimés de l’astrologie. Nous dirons encore une fois, comme Aristote, que le jaune est la couleur de la chaleur, ou du soleil, que le blanc est la couleur de l’eau, ou de l’humide, que le noir est la couleur du feu, ou de la terre, et que du mélange de ces trois couleurs se forment toutes les autres couleurs de la nature. Nous ajouterons que les couleurs sont propres dans les substances qui en sont revêtues, sans toutefois, condamner les accidents qui sont reçus dans la commune philosophie. Or, comme le savant Aristote et Adamance nous enseignent à connaitre la nature et la qualité des corps par la couleur, ou simple, ou mélangée, nous pouvons, en suivant les mêmes raisonnements, arriver à la connaissance de la nature et des qualités des astres.

Nous commencerons par les deux luminaires, le soleil et la lune, le premier estimé le père de tourtes les générations, et le second, la mère ou la nourrice, le premier de nature chaude, à raison de sa couleur jaune et lumineuse; et  le second de nature humide, à cause de sa couleur blanche et resplendissante. Nous dirons ensuite que Jupiter et Vénus sont de nature chaude et humide, à raison du mélange de la couleur du soleil et de la couleur de la lune dont ils sont chacun revêtus, mais que Jupiter a plus de chaleur que d'humidité parce qu’il est plus de la couleur du soleil et que Vénus a plus d’humidité que de chaleur à cause qu’elle a plus de la couleur de la lune. Nous ajouterons que Saturne et Mars sont de nature chaude et sèche parce qu’ils tiennent de la couleur du soleil et de la terre mais que Saturne a plus de sècheresse que de chaleur et Mars plus de chaleur que de sècheresse, à cause que le premier est de couleur pâle et le second de couleur enflammée. Enfin nous dirons que Mercure est tantôt de nature chaude et sèche, et tantôt de nature chaude et humide, mais que la sècheresse ou l’humidité surmonte toujours la chaleur en cette planète.

Or, comme la souveraine chaleur du soleil est accompagnée d’humidité à cause de l’humeur qui se trouve dans tous les corps qui sont engendrés, la souveraine humidité de la lune est accompagnée de chaleur à cause de sa lumière empruntée. Les bonnes qualités de ces deux luminaires sont les principes de la vie et de la santé des animaux, comme des plantes Mais séparément, ils sont la cause des corruptions et des maladies, le soleil par l'excès de la chaleur continuée et la lune par l'excès ou la continuation de l'humide. Ils sont toutefois estimés par les philosophes plutôt favorables que contraires à la vie et aux générations, le soleil par sa nature vivifiante et la lune par sa nature féconde. Mais les bonnes qualités de Jupiter et de Vénus, composées du chaud se de l’humide, les ont fait nommer les deux fortunes, comme les deux bénéfiques, à raison de leur favorable influence; Jupiter, fortune majeure et Vénus fortune mineure, parce que le premier tient plus de la nature du soleil que de la nature de la lune et l’autre plus de la nature de la lune que de la nature du soleil, comme il se voit à leur lumière.

Au contraire de Saturne et de Mars, que les astrologues appellent les deux infortunes, ou les deux maléfiques, à cause de la grande sécheresse de l'un et de l’extrême chaleur de l’autre, parce que comme la première étouffe la chaleur vitale, la seconde consume l’humide radical en toutes les générations de la nature. Toutefois, Mercure est appelée planète indifférente, et de qualité diverse : elle est bonne avec Jupiter et Vénus parce que sa nature en est plus chaude et plus humide, mauvaise avec Saturne et Mars parce que sa qualité en est ou plus ardente, ou plus sèche, elle est plutôt mauvaise avec le soleil à cause que la nature en est moins humide, et plutôt bonne avec la lune parce que sa qualité sèche en est humectée. Enfin, Ptolémée, considérant les changements de la lune, dit qu’elle est humide depuis la conjonction jusqu’au premier quartier, qu’elle est chaude depuis le premier quartier jusqu’à son opposition, qu’elle est sèche depuis son opposition jusqu’au second quartier, et qu’elle est froide depuis le dernier quartier jusqu’à sa conjonction, qui est le décours de la lune.

Mais depuis que l’astrologie est tombée entre les mains des Arabes et des médecins, les uns suivant la philosophie d’Aristote, et les autres la doctrine d’Hippocrate, les quatre quartes de la lune ont été considérées d’une autre sorte. Ils ont dit qu’en la première la lune était chaude et humide; en la seconde chaude et sèche; en la troisième froide et sèche; et en la dernière froide et humide. Les Arabes, qui avaient quitté les principes de Ptolémée, de Trismégiste et de Proclus pour suivre la philosophie d’Aristote qu'Aphrodise avait semée en Afrique; commencèrent à remplir l’astrologie de la combination des quatre qualités naturelles, imités en cette erreur par les médecins qui attribuèrent dès lors les quatre humeurs, du sang chaud et humide, de la colère chaude et sèche, de la mélancolie froide et sèche et de la pituite froide et humide, aux quatre changements de la lune, de même qu’aux quatre saisons de l’année contre la sentence de Ptolémée. Ils ont encore dit que Saturne était froid et sec, et toutefois, ils déclarent de n’entendre par cette froideur que la faible lumière ou chaleur de cette planète.

Or, comme la providence à tout fait en poids, en nombre et en mesure, nous serait-il loisible en cette occasion de mesurer, ou de comparer en degrés, les variables qualités des sept planètes ? Nous poserons physiquement, ou à peu près, que le soleil n’a douze, neuf degrés de chaleur et trois degrés d’humide, que Jupiter en a dix, six degrés de chaleur et quatre degrés d’humide, que Vénus en a huit, trois degrés de chaleur et cinq degrés d’humide, que Saturne en a neuf, trois degrés de chaleur et six degrés de sécheresse, que Mars en a sept, cinq degrés de chaleur et deux degrés de sècheresse, et que Mercure en a quatre, deux degrés de chaleur et deux degrés ou d'humidité ou de sècheresse selon qu’il convient avec les autres. Quant à la lune, nous donnerons pour ses quatre quartes, huit en la première, deux degrés de chaleur et six degrés d’humide, douze en la seconde, quatre degrés de chaleur et huit degrés d’humide, dix en la troisième, trois degrés de chaleur et sept degrés d’humide, et six en la dernière, un degré de chaleur et cinq degrés d'humide. Dans toutes lesquelles distributions nous n’avons point employé la froideur parce que nous avons toujours dit que le froid n’entrait point dans la composition des corps mixtes.

Or, non seulement les qualités de la lune, mais aussi les qualités des cinq planètes, Saturne, Jupiter, Mars, Vénus et Mercure, sont en quelque façon altérées au regard de leur position avec le soleil. Car les trois planètes supérieures sont plus humides orientales au respect du soleil, et ont plus de sècheresse étant occidentales du même, mais depuis leur première station jusqu’à la seconde, elles ont plus de chaleur qu’à l’ordinaire. Le contraire en est des planètes inférieures, Vénus et Mercure, parce qu’elles sont plus humides occidentales et ont plus de sècheresse étant orientales du soleil. D’où vient que Saturne, Jupiter et Mars sont encore estimés plus heureuses et favorables orientales et plus malheureuses au contraire étant occidentales, mais tout à l'opposite de Vénus et de Mercure parce qu’elles sont réputées meilleures et mieux disposées étant occidentales que non pas orientales. Or, les planètes sont dites orientales quand elles sont ou qu’ils se lèvent devant le soleil et occidentales lorsqu’elles sont ou qu’elles se couchent après le même.

Mais comme du double mélange des planètes entre elles et de leur qualité diverse se forment les variables dispositions, ou les divers tempéraments, des hommes, des animaux ou des plantes, le sage médecin, ou le prudent astrologue, pourront en user avec adresse. Ils sauront que les qualités de Jupiter sont bonnes pour l'humeur sanguine des hommes parce que la chaleur surmonte l’humide en cette planète, que les qualités de Vénus sont bonnes pour l'humeur sanguine des femmes parce que l’humidité en modère la chaleur pour en former le lait et les autres choses propres à ce sexe, que les qualités de Saturne sont bonnes pour séparer la mélancolie du sang parce que la sècheresse surmonte la chaleur en cette planète, que les qualités de Mars sont bonnes pour séparer la bile du même sang à cause que la chaleur prédomine à la sècheresse, et que les qualités de la lune sont bonnes pour séparer la pituite du sang parce que l’humidité surmonte de beaucoup la chaleur en cette planète car, comme la mélancolie, la bile et la pituite sont des excréments et non point des humeurs, elles ne se trouvent point dans le mélange des corps qu’après avoir été séparées ou extraites de l’humeur sanguine, composée du chaud et de l’humide, unique fondement des générations naturelles.

Peut-être que ces raisonnements nous emportent trop loin de l’astrologie. Revenons aux sept planètes. disons que Saturne, Jupiter et Mars sont appelés les trois supérieures; Vénus et Mercure les deux inférieures et le soleil, comme la lune, les deux luminaires. Ajoutons, conformément à tous les astrologues et les philosophes, que le soleil, en raison de sa grande chaleur, est estimé du sexe masculin, et que la lune, à cause de sa grande humidité, est réputée de tous pour féminine. Que Saturne, Jupiter et Mars sont estimés planètes masculines parce qu’elles tiennent plus de la nature du soleil et Vénus féminine, d’autant qu’elle approche plus de celle de la lune. Quant à Mercure, il est tantôt masculin et tantôt féminin selon qu’il s’accommode avec les unes ou les autres de ces planètes. Mais ne serait-il point nécessaire de noter en cet endroit les figures que les anciens ont voulu donner à chaque planète? Enfin elles sont de la sorte : fi. Saturne ip. Jupiter ». Mars: O. le soleil: . Vénus: 5. Mercure y. la lune. Et nous ajouterons q la tête du dragon :?3 la queue du dragon et e la part de fortune parce que les nœuds de la lune sont estimés comme des planètes, la tête du dragon de la nature de Jupiter et de Vénus, la queue du dragon de la nature de Saturne et de Mars, selon les meilleurs astrologues,

Chapitre VIII - Du nom des planètes et des signes

Il ne faut pas se persuader que les noms employés dans l’astrologie aient été donnés avec moins de considération qu’en toutes les autres sciences. Nous voyons dans les histoires des Juifs, des Grecs et des Arabes que les personnes mêmes sont appelées par des termes d’une singulière expression et nous apprenons dans les auteurs les plus anciens que les planètes et les signes ont été nommés après de longues expériences. La mémoire des hommes et des femmes illustres a toujours été en vénération dans les siècles et jamais le vice, quoi que grand, comme dit Sénèque, n’a pu étouffer l’éclat de la vertu ou des bonnes qualités des grands personnages.

Saturne, roi d’Italie, qui fut aussi de lui nommée Saturnie, fut un prince fort ancien, de grande autorité et de grande puissance. Il fut le premier à ranger les hommes dans les travaux de l’agriculture, dans la conduite des troupeaux et dans les soins d’amasser des richesses. Il trouva l’invention de marquer la monnaie et de fouiller dans la terre profonde pour en arracher la matière. Il fut estimé rigoureux, vengeur des offenses et des outrages, et comme juge sévère, il fut réputé cruel persécuteur des criminels et des coupables. Il ne traita pas ses enfants avec plus de douceur que les autres et, se montrant en tout et partout inexorable, il ne laissa pas moins de crainte que d’admiration de sa vertu dans les siècles. De sorte que par la convenance de toutes ces qualités, le nom de Saturne fut donné par les anciens à la plus élevée de toutes les planètes.

Jupiter, roi de Crète ou de Candie, fut un prince recommandable dans l’antiquité par sa grandeur et par ses richesses. Il fut estimé de son temps le plus affable et le plus libéral de tous les monarques. Il fut auteur des bonnes lois, qui le rendirent après si célèbre, et toujours favorable à son peuple, il conserva son royaume dans l’abondance. Il fut toujours plus humain que cruel, en l’administration de la justice, et joignant la prudence à la bonté naturelle, il fut estimé le meilleur de tous les rois de la terre. Il était ennemi de la guerre, amateur de la paix et bienfaisant à tout le monde. II était grand observateur de la religion et des cérémonies. Tellement que par la conformité de tant de dons avantageux, le nom de Jupiter fut donné par les anciens à la seconde des planètes.

Mars, roi de Thrace, fut un prince de grand courage et de grande force. Il se plaisait dans les dangers, dans les combats, dans les embrasements et les incendies. Il était impatient dans la colère, cruel dans les vengeances, âpre dans les rapines et prodigue en ses largesses. Il était inconstant et léger, sans justice et sans mesure en ses débauches. Il était violent en ses actions, précipité en ses conseils et toujours infatigable à la guerre. Mais sa valeur, qui n’aspirait qu’à la gloire des batailles, le rendit si célèbre dans les siècles que les anciens donnèrent le nom de Mars à la troisième des planètes, à cause de leur naturelle convenance.

Osiris, roi d’Égypte, fut un prince de grande vertu et de grande magnificence. Il était ardemment désireux de la gloire et de la renommée. Il préférait toujours l'éclat d’une belle réputation à la soif d’acquérir des richesses. Il était grave en ses actions, héroïque en ses faits et magnanime en toutes choses. ll courait victorieux par le monde. Il était curieux d’avoir en sa cour grand nombre de princes, de seigneurs et de noblesse, et par la splendeur de tant de belles qualités, il mérita que son nom fût donné au soleil par les anciens prêtres d’Égypte.

Vénus, reine de Chypre, fut une princesse de tant de grâce et de beauté qu’elle en mérita le nom de déesse. Elle naquit en la ville de Paphos et habita la province d’Amathuse, la plus agréable de son île. Elle se plaisait dans les ornements des perles, des diamants et de la pourpre. Elle aimait les riches parures de l'or, de l’argent et de l’azur. Elle était ennemie de la guerre, désireuse de la paix et entretenait ses sujets dans la réjouissance. Les amours, les festins, la musique et les danses étaient ses continuels exercices. Elle était merveilleusement curieuse de sa personne et des parfums aromatiques. Elle était aussi douce que belle, comme dit Homère en son Iliade. Elle avait un grand nombre de filles et de noblesse en sa cour, formées à son exemple. Elle aimait également les délices et la bonne chère, et, par la convenance de toutes ces qualités, le nom de Vénus fut donné par les anciens à la cinquième des planètes.

Mercure était un prince de grand esprit et de grande industrie, selon Diodore. Il était du conseil d'Isis, reine d’Égypte et veuve d'Osiris. Il trouva l'invention de mesurer les terres, après la retraite du Nil. Il fut le premier inventeur de l’arithmétique et de la géométrie. Il allait et venait sans cesse de la cour dans les provinces, et des provinces auprès de la reine. Il fut le premier à dresser des registres de la recette et de la dépense du royaume, et trouvât les moyens d'accroitre les revenus de l'État sans charger autrement le peuple. Il eut aussi cet avantage que son nom de Mercure fut donné à la sixième des planètes, à cause de leur mutuelle ressemblance.

Finalement, Isis, veuve et reine d’Égypte, autant illustre par sa beauté que par sa prudence, fut une princesse de grande fortune et de grande renommée. Elle se plaisait à faire des voyages, à naviguer et à visiter ses provinces. Elle aimait la pompe, la grandeur et la magnificence. Elle avait des vertus qui la faisaient comme adorer de tous les peuples. Elle procurait l’avantage de tout le monde et, par sa grande libéralité, elle obligeait toute sa cour à la révérer comme déesse de sorte que, par la convenance de tant de belles qualités, le nom d’Isis fut donné par les Égyptiens à la lune, sans alléguer ceux que nous avons déjà mentionnés au premier livre.

Nous avons déjà dit que l’astrologie, comme la médecine, étaient au rang des sciences physiques, fondées sur la conjecture et l’expérience. Nous avons encore ajouté qu’en la nature, les causes sont devant les effets; et dans la connaissance des hommes, que les effets sont devant les causes, et nous avons pareillement déclaré que dans les sciences naturelles, la force des raisons et l'autorité des expériences se doivent une réciproque assistance. Mais pourquoi répéter si souvent ce qui doit être gravé dans l'esprit de celui qui manie ce livre? N’avons-nous pas rangé par ordre, et tout de suite, les fondements de cette belle science? Et pourquoi nous obliger à reprendre si souvent ce que nous avons dit une fois pour toutes? Disons donc maintenant que les anciens philosophes d’Égypte et de Babylone n’avaient point ignoré la convenance naturelle qu’Aristote et Adamance rapportent, et qui est entre les hommes et les animaux, par la ressemblance de leur forme extérieure. Ils ont jeté l’un des principaux fondements de l’astrologie sur cette belle connaissance, après en avoir fait toutefois des longues observations et des expériences réitérées.

Ils ont donné la figure du Bélier au premier signe du zodiaque parce que les hommes qui l’ont en leur ascendant tiennent de la ressemblance de cet animal : la face ronde et relevée, le nez aquilin et les yeux ouverts, les cheveux crêpés, l’esprit aigu et le corps agile, la taille longue, la voix grêle et le courage libre.

Ils ont donné la figure du Taureau au second signe à cause que les hommes qui en reçoivent les influences ont la face longue, large et plate, les yeux grands, les cheveux roux et non frisés, la couleur blanche et tachetée, le corps paresseux, l’esprit pesant et la voix grosse.

Ils ont donné la figure des Gémeaux au troisième signe parce que ceux qui l'ont en la première maison de leur naissance sont de nature humaine, douce et raisonnable, d'esprit ingénieux et propre aux sciences, de complexion belle et bien composée, et de couleur blanche et blonde, comme il convient aux jeunes enfants, figurés par ce signe de forme humaine.

Ils ont donné la figure de l'Écrevisse au quatrième signe du même zodiaque pour deux raisons considérables, la première à cause que les personnes qui en ressentent les effets sont sujettes à se noyer, à tomber dans l'eau ou à faire naufrage, et la seconde parce que le soleil arrivant au commencement de l'Écrevisse commence à reculer de nous, comme s’il marchait en arrière. L’une de ces raisons leur a fait choisir une figure qui nage, comme dit Ptolémée, et l’autre, une figure qui nage et qui marche à reculons tout ensemble.

Ils ont donné la figure du Lion au cinquième signe parce que les hommes qui l’ont en leur ascendant ont le poil et les cheveux dorés, le nez plat et le front carré, les yeux animés et la poitrine large, et sont généreux, magnanimes et robustes, à la ressemblance de cet animal; comme disent Aristote, Polémon et Adamance.

Ils ont donné la figure de la Vierge au sixième signe à cause que les personnes qui en reçoivent les influences sont humaines, spirituelles et raisonnables, de taille assez longue, les cheveux cendrés, la face belle et délicate, dont la blancheur tire plutôt sur le pâle, comme sont les visages des vierges, suivant Hippocrate.

Ils ont donné la figure des Balances au septième signe parce que ceux qui l’ont en la première maison de leur naissance ont les vertus et les inclinations humaines et bien concertées, la taille et la forme du corps parfaitement bien composée, l’esprit et l’entendement disposés aux belles sciences, la complexion des humeurs dans une égale justesse, le visage beau et bien composé en toutes les parties, les cheveux blonds et frisés naturellement, avec mesure, et finalement le tout dans un parfait équilibre, comme il est représenté par les Balances.

Ils ont donné la figure du Scorpion au huitième signe à cause que ceux qui en reflètent les effets ont les dispositions aux calomnies, à l’envie et à la malice, l’esprit subtil, chicaneur et mutin, et la langue fort médisante, et dont les piqures sont mortelles, à l’exemple de cet animal de figure envenimée.

Ils ont donné la figure du Sagittaire au neuvième signe parce que ceux qui l’ont en leur ascendant ont la nature humaine et débonnaire, la face et la présence autant belle comme agréable, l’esprit accompagné de prudence et la moitié de la taille au-dessus de la ceinture, grosse, charnue et environ comme les dernières parties du centaure.

Ils ont donné la figure du Capricorne au dixième signe du même zodiaque à cause que ceux qui en reçoivent les influences ont de la ressemblance avec cet animal difforme. La face petite et crochue, la couleur jaune et défaite, les cheveux noirs et non frisés, la taille grêle et mal composée, l’esprit ingénieux et subtil, et de mauvaise odeur en toute la personne.

Ils ont donné la figure du Verseau au onzième signe parce que ceux qui l’ont en la première maison de leur naissance sont de nature humaine, courtoise et raisonnable, d’un esprit subtil, excellent et judicieux, de forme belle et bien composée, avec les cheveux blonds et la beauté du visage qui convient aux jeunes enfants qui servaient anciennement aux grands princes à leur verser à boire.

Ils ont enfin donné la figure des Poissons au douzième signe à cause que ceux qui en ressentent les effets sont de nature douce et paisible, d’esprit docile et peu éloquent, à l’exemple de ces animaux, qui n’ont point de voix et sujets aux dangers des eaux, ou de se noyer, comme dit Ptolémée par la signification de la figure qui nage.

Chapitre IX - De la nature et qualité des douze signes

Serons-nous encore obligés d'alléguer en cet endroit cette belle et véritable sentence que, dans les sciences physiques, l'expérience est toujours la maitresse? Saint Augustin n'a-t-il pas confessé qu’elle était souveraine quand il veut, en « l’explication des Livres Sacrés », que l'autorité des expériences surmonte le sens de la lettre, quoique contraire en apparence? Les raisons sont nécessaires dans la géométrie et il suffit seulement des inductions dans les sciences naturelles. Les causes ou les raisons du flux et reflux de la mer, de l’aimant qui attire le fer, de l'ambre qui enlève la paille et du Nil qui se déborde, sont toujours ignorées ; toutefois, la mer a toujours son flux et reflux, l’aimant attire toujours le fer, l’ambre enlève toujours la paille et toujours le Nil se déborde. Les anciens philosophes d’Égypte et de Babylone ont trouvé la nature et la qualité des signes du zodiaque par des longues observations et des expériences continuellement réitérées, et, parce que les raisons ou les calculs en sont ignorées, faut-il en renverser la doctrine? Que les envieux de l’astrologie ne triomphent point d’un faible avantage, qu’ils cèdent, comme les médecins et les philosophes, à l’autorité du raisonnement qui nous oblige à recevoir pour véritables des sciences même qui ne sont point démontrées.

Ce sera donc avec plus de confiance que nous passerons au sujet du zodiaque du premier mobile, qui est le vrai zodiaque des astrologues. Il est, comme nous avons dit ailleurs, de douze signes, et chaque signe de trente degrés, qui font ensemble les trois-cent-soixante. Leurs noms et leurs caractères sont de la sorte : faire un tableau avec les glyphes le Bélier, le Taureau, les Gémeaux, l’Écrevisse, le Lion, la Vierge, les Balances, le Scorpion, le Sagittaire, le Capricorne, le Verseau et les Poissons. Et parce qu’ils sont ordonnés successivement dans un cercle, la fin du signe des Poissons se joint au commencement du signe du Bélier, comme il se voit au globe céleste.

Le Bélier, le Taureau, et les Gémeaux sont les trois signes du printemps ;
L'Écrevisse, le Lion et la Vierge, les trois signes de l’été ;
Les Balances, le Scorpion et le Sagittaire, les trois signes de l’automne ;
Le Capricorne, le Verseau et les Poissons, les trois signes de l'hiver,
(au regard de nos régions boréales, le contraire étant pour les australes).

La seconde division du zodiaque, et qui se prend au respect de l'équateur, est en signes septentrionaux et en signes méridionaux parce que toujours l'une de ces moitiés est du côté du pôle arctique et l'autre du côté du pôle antarctique. Le Bélier, le Taureau, les Gémeaux, l'Écrevisse, le Lion et la Vierge sont les signes septentrionaux, et les signes méridionaux sont les Balances, le Scorpion, le Sagittaire, le Capricorne, le Verseau, et les Poissons. Les astrologues appellent les six premiers commandants et les six autres obéissants, comme il apparait dans leurs livres.

La troisième division est des signes mobiles, des signes fixes et des signes communs, ou à double figure. Le Bélier, l'Écrevisse, les Balances et le Capricorne sont les quatre signes mobiles, appelés de la sorte parce que le soleil commençant en ces quatre points des deux équinoxes et des deux solstices, les quatre saisons de l’année, les changements du temps en sont plus variables. Le Taureau, le Lion, le Scorpion et le Verseau sont les quatre signes fixes, ainsi nommés parce qu'étant au milieu de chaque saison de l’année, le soleil n'y fait pas de grands changements, comme il se voit par expérience. Et les Gémeaux, la Vierge, le Sagittaire et les Poissons sont les signes communs ou doubles, appelés de la sorte parce que la fin de chaque saison semble participer à la nature du commencement de la suivante.

Mais la quatrième division est, selon Ptolémée et tous les anciens, en signes masculins et féminins, à l'exemple des planètes, qui sont de la nature de l'un ou de l'autre sexe. Et toutefois, ils tiennent en cette distribution des signes l'ordre continuel et successif; disant que le mâle doit être toujours accompagné de la femelle, comme le jour est toujours suivi de la nuit. Ils commencèrent donc à les compter par le Bélier signe masculin, suivi du Taureau signe féminin et nous trouverons de la sorte que le Bélier, les Gémeaux, le Lion, les Balances, le Sagittaire, et le Verseau sont les signes masculins et que le Taureau, l'Écrevisse, la Vierge, le Scorpion, le Capricorne et les Poissons sont signes féminins, qu’ils appellent aussi nocturnes, comme les autres diurnes.

Ptolémée, dans son premier livre des « Jugements des astres », nous dit que la nature et les qualités des douze signes se doivent tirer de la nature et de la qualité des sept planètes. Nous ajouterons en second lieu de la nature ou ressemblance de chaque figure et nous appellerons, comme Aristote, au septième de la « Morale », les figures des signes humains de nature humaine, et les figures des signes animaux de nature férine, termes plus doux à notre langue. Nous dirons donc sans autre retardement que le signe du Bélier est de la nature de Mars, en second lieu du soleil, et de nature férine, que le signe du Taureau est de la nature de Vénus, ensuite de la lune, et de nature férine, que le signe des Gémeaux est de la nature de Mercure et de nature humaine, que le signe de l'Écrevisse est de la nature de la lune, en second lieu de Jupiter, et de nature moyenne, que le signe du Lion est de la nature du soleil, et de nature férine, que le signe de la Vierge est de la nature de Mercure et de nature humaine, que le signe des Balances est de la nature de Vénus, ensuite de Saturne, et de nature humaine, que le signe du Scorpion est de la nature de Mars, et de nature férine, que le signe du Sagittaire est de la nature de Jupiter, et de nature humaine, que le signe du Capricorne, est de la nature de Saturne, en second lieu de Mars, et de nature férine, que le signe du Verseau est de la nature de Saturne et de nature humaine, et que le signe des Poissons est de la nature de Jupiter, ensuite de Vénus, et de nature moyenne.

D'avantage, Ptolémée nous enseigne de joindre à ces considérations particulières des signes la nature ou les qualités générales des quatre saisons de l'année. Il dit, comme nous, que le printemps abonde plus en humidité à cause que par le nouveau retour du soleil et par la froideur de l'hiver éloignée, la chaleur commence à dilater ou à fondre les corps humides, que l’été surmonte en chaleur, tant à cause des vapeurs humides élevées de la terre durant le printemps, que parce que les rayons du soleil fomentés par la longueur des jours plus étendus, se font sentir avec plus d'efficace et de force, le même soleil étant vers le tropique de notre pôle, que l'automne abonde en sècheresse parce que la terre devenant plus aride et plus sèche par la continuelle chaleur du soleil durant l'été, il ne reste plus d'humidité dans les campagnes et que l’hiver surmonte en froideur, tant à cause du retour du soleil vers le tropique le plus éloigné de nous que parce que les nuits sont alors les plus Iongues en notre hémisphère.

Il faut toutefois penser le contraire des provinces qui sont du côté du pôle antarctique car, pendant que le printemps nous humecte, l’automne alors les dessèche, et pendant que l’été nous échauffe, l’hiver les refroidit, et au contraire des effets de notre automne parce qu’ils ont alors le printemps, et de notre hiver, qui est leur été, comme il apparait sur le globe. Mais il nous faut considérer autrement les saisons de ceux qui habitent la zone torride, ou du moins proche de la ligne équinoxiale, parce qu’ils n’ont jamais que deux saisons et chaque saison toujours deux fois l’année, à savoir la saison de l’été, en laquelle la chaleur surmonte, le soleil étant environ les deux points des équinoxes du Bélier et des Balances, et la saison du printemps, en laquelle l’humidité tempère la chaleur, le même soleil étant vers les tropiques de l’Écrevisse du Capricorne, d’où vient qu’ils ont aussi doubles moissons de leurs fécondes et fertiles campagnes.

Les mêmes auteurs ajoutent encore en cet endroit la considération des divers âges de l’homme comparés avec les quatre saisons de l’année afin que les jugements de l’astrologie sur la naissance de chaque personne soient heureusement composés, de la nature des planètes, de la condition des signes, de l’ordre des saisons et de la complexion des hommes. Trismégiste, Ptolémée et Proclus de Lycie en parlent d’une autre sorte que les médecins et les Arabes qui ont écrit après eux de l’astrologie. Et parce que le sentiment des premiers donne plus dans notre pensée, comme il se voit en tout cet ouvrage, nous dirons que l’enfance des hommes, ou des animaux, est le premier âge, répondant à la saison du printemps, que l’adolescence est le second âge, répondant à la saison de l’été, que la jeunesse est le troisième âge, répondant à la saison de l’automne, et que la vieillesse est le quatrième, ou le dernier âge, répondant à l’hiver, qui achève l’année du soleil, comme l’autre la vie de l’animal ou de l’homme.

Que la tendresse de l’enfance abonde plus en humidité qu’en chaleur, afin de satisfaire à l’accroissement et à la nourriture convenable à chaque partie, par la faculté de l’âme végétative, beaucoup plus forte en ce premier âge. Que l’adolescence partage également la chaleur et l’humidité, de la masse du sang qui remplit abondamment les veines afin de donner l’action et le mouvement convenable en cet âge second de la vie et de fortifier par l’abondance de la matière et de la chaleur les parties nobles, ou les parenchymes. Qu’en la jeunesse, la chaleur naturelle surmonte de beaucoup l’humide radical par le desséchement qu’elle a causé dans les humeurs pendant de si longues années afin de donner convenablement à cet âge troisième plus de force et de vigueur aux principes de l’action, du mouvement et de la vie, et qu’en la vieillesse, la froideur commence à se manifester en apparence par le continuel affaiblissement de la chaleur, laquelle venant à défaillir, ou plutôt à diminuer, en cet âge dernier, par la continuelle résolution de l’humide qui l’entretient et qu’elle va toujours consumant, jusqu’à la dernière goutte de l’un et à la dernière étincelle de l’autre pour arriver à la fin de la vie, comme le soleil arrive à la fin de l’année.

Chapitre X - De la nature des étoiles fixes

Ayant exposé, comme nous avons fait dans le premier livre, le nombre, les images et le mouvement des étoiles fixes, nous devons maintenant déclarer leurs naturelles qualités pour en donner en cet endroit la connaissance. La lumière et la couleur des sept planètes nous ont déjà fait apercevoir de leur nature et comme la lumière et la couleur des étoiles procèdent d’un même principe, il faut en raisonner de la même sorte. Il faut dire que les plus grandes sont les plus puissantes, que les plus claires ont le plus de chaleur, que les plus blanches sont les plus humides et que les plus pâles ont le plus de sècheresse. Finalement, il faut connaitre leur variable et diverse nature, comme a fait Ptolémée dans le premier des quatre livres, des astres par la ressemblance qu’elles ont avec les planètes, soit en grandeur, soit en couleur, soit en lumière.

Les plus considérables sont celles qui se trouvent placées dans le zodiaque et qui peuvent se joindre par corps avec les planètes, parce que leurs rayons trop faibles, étant seules, pour nous envoyer leurs actions se fortifient en se mêlant avec les rayons des autres. Mais les étoiles qui sont dans les images dû côté du septentrion ont plus d'efficace pour nous que celles qui sont dans la partie du ciel méridionale, à cause que les premières nous envoient leurs rayons plus droits, et les autres leurs rayons plus obliques. Si nous étions dans l'admiration de Cardan, sur la vertu des étoiles verticales, nous pourrions alléguer en cet ouvrage les merveilles qu’il en raconte dans le dixième chapitre de son « supplément » où il ose assurer qu’une étoile de la seconde grandeur, passant au zénith de la ville de Rome au temps de sa première fondation, lui a donné l'empire du monde. Il ne s’arrête pas à cet exemple et les auteurs qui ont écrit après lui de l’astrologie n’ont pas négligé ce qu’il en récite. Mais revenons à notre sujet, voyons comment Ptolémée a traité de la nature des étoiles fixes et suivons à plus prés l’ordre qu’il a voulu tenir, commençant par les signes du zodiaque de la huitième sphère. Les étoiles de la tête du Bélier sont de la nature de Mars et de Saturne, celles de la gueule tiennent de la nature de Mercure et un peu de Saturne, celles du pied de derrière sont de la nature de Mars et celles de la queue sont vénériennes.

Les Pléiades, qui sont dans le signe du Taureau, sont turbulentes et de la nature de Mars et de la lune. La plus lumineuse d’entre elles, que le commun appelle la Poussinière, est à présent à 25° 15' du même signe. Les Hyades, en la tête du Taureau, sont de la nature de Mars et celles qui sont en la section du même sont de nature vénérienne. Mais l’étoile fixe et royale de la première grandeur, que les Arabes appellent Aldébaran, est de la nature de Mars, et sa longitude est à présent 5°33’ Gémeaux.

La luisante au pied des Gémeaux est de la nature de Mercure et un peu de Vénus. Elle est maintenant à 3°22 Cancer. Les étoiles qui sont auprès de la cuisse sont saturniennes, la luisante de la tête, que l’on appelle Apollon et Castor, est de la nature de Mercure, et sa longitude 13°32 Cancer, et l’autre luisante de la tête, que son nomme Hercule et Pollux, est de la nature de Mars et ce trouve à présent à 18°34 Cancer.

Les étoiles dans les yeux de l’Écrevisse sont de la nature de Mercure et un peu de Mars. Celles du bras tiennent de Saturne et de Mercure,  la Crèche, qui est en la poitrine, est de la nature de Mars et de la lune et les deux ânons, austral et boréal, qui sont dans le même signe, sont de nature martiale et solaire.

Les deux étoiles de la tête du Lion sont de la nature de Saturne et un peu de Mars. Les trois qui sont sur le col tiennent de Saturne et un peu de Mercure, et l’étoile luisante et royale, de la première grandeur, qui est le cœur du Lion, ou le roitelet, est de la nature de Mars et de Jupiter ; elle est à présent à 25°8’ Lion. Celles qui sont dans le flanc sont de la nature de Saturne et de Vénus, et celles qui sont aux cuisses du même signe sont de la nature de Vénus et un peu de Mercure, comme l’étoile royale en la queue, de la première grandeur, qui est maintenant à 16°54’ Lion.

Les étoiles de la tête de la Vierge, et une de l’aile australe, sont de la nature de Mercure et un peu de Mars. Les autres de l’aile et les luisantes de la ceinture sont de la nature de Mercure, et un peu de Vénus, mais la luisante qui est en l’aile boréale, appelée la Vendangeuse, tient de Saturne et de Mercure. L’épi de la Vierge, étoile royale de la première grandeur, est de la nature de Vénus et un peu de Mars, les Arabes l’appellent Azimec, et se trouve à présent à 19°7’ Balance et les autres qui sont aux pieds et au bas de la robe de la même Vierge sont vénériennes et un peu martiales.

Les étoiles du signe des Balances, toujours comprises dans le zodiaque, sont de la nature de Jupiter et de Mercure mais celles du milieu sont de la nature de Saturne et encore de Mars, et la plus lumineuse de la Balance australe est à présent à 10°22 Vierge, elle est de la seconde grandeur et de la nature de Vénus, de Mercure et un peu de Mars.

Les étoiles luisantes au front du Scorpion sont de la nature de Mars et un peu de Saturne, et la boréale des trois est maintenant à 28° 27’ Vierge, mais celles qui sont au corps sont de la nature de Mars et un peu de Jupiter, dont la plus lumineuse, ou flamboyante, que nous appelons le cœur du Scorpion et les Arabes Antarès, est à présent à 5°4’ Sagittaire. C’est une des quinze étoiles royales de la première grandeur. Celles qui sont aux nœuds de la queue du même signe sont de la nature de Saturne et tant soit peu vénériennes. Les autres de la même queue tiennent de Mercure et de Mars et les nébuleuses entrelacées sont de la nature de Mars et de la lune.

Les étoiles de la pointe de la flèche du Sagittaire sont de la nature de Mars et de la lune, celles de l’arc et de la corde tiennent de Jupiter et de Mars, les entrelacées de la face sont de la nature du soleil et de Mars, celles de la bande et du dos sont de la nature de Jupiter et de Mercure, les autres du pied conviennent avec Jupiter et Saturne mais celles du carré, qui est en la queue, sont de la nature de Vénus et un peu de Saturne.

Les étoiles qui sont aux cornes du signe du Capricorne sont de la nature de Vénus et tant soit peu de Mars, les trois petites de la gueule tiennent de Saturne et de Vénus, celles du ventre et des pieds sont de la nature de Mars et de Mercure, et celles de là queue de la nature de Mars et de Jupiter.

Les Étoiles du signe du Verseau, qui sont aux épaules, en la main gauche et en la robe, sont de la nature de Saturne et de Mercure, celles qui sont auprès des cuisses tiennent de Mercure et moins de Saturne, et les autres en l’effusion de l’eau sont de la nature de Saturne et de Jupiter, où paraît Fomahan, étoile royale de la première grandeur, à 29° 2 Verseau mais à 21 degrés de latitude australe.

Les étoiles de la tête du Poisson austral sont de la nature de Saturne et un peu de Mercure, celles du corps tiennent de Jupiter et de Mercure, de la queue et du ruban austral de la nature de Saturne et un peu de Mercure. Les étoiles du corps et au dos du Poisson boréal conviennent à Mars et moins à Vénus, les autres du ruban boréal sont de la nature de Saturne et de Jupiter mais la luisante du lacet convient à Mars et puis à Mercure.

Mais les étoiles qui sont en la partie septentrionale suivront les secondes en ordre après celles du zodiaque. Nous commencerons par les luisantes de la Cynosure, ou Petite Ourse, qui sont de la nature de Saturne et un peu de Mercure, les étoiles de la grande Ourse sont de la nature de Mars, celles de la  Perruque de Bérénice tiennent de Vénus et de la lune et les plus luisantes du Dragon sont de la nature de Saturne, de Mars et de Jupiter.

Les étoiles de Céphée sont de la nature de Saturne et de Jupiter, celles de Bootes tiennent de Mercure et de Saturne, mais la luisante et flamboyante Arcturus, étoile royale de la première grandeur, est de la nature de Jupiter et de Mars, les Arabes l'appellent Alramec et sa longitude est à présent 19° 30’ Balances, celles de la couronne boréale tiennent de Vénus et de Mercure, et les étoiles d'Hercule à genoux sont de la nature de Mercure

La Lyre, étoile royale de la première grandeur, que les Arabes appellent Véga, est de la nature de Vénus et de Mercure, sa longitude est à présent 10° 34’ Capricorne. La poule est aussi de même nature : les étoiles de Cassiopée tiennent de Saturne et de Vénus, celles de Persée sont de la nature de Jupiter et de Saturne, entre lesquelles parait la tête funeste de Méduse, ou Caput Algol, de la seconde grandeur, à 21° 28’ Taureau et celles du lacet de son épée tiennent de Mars et de Mercure.

Les plus luisantes du Chartier sont de la nature de Mars et de Mercure, comme la Chevrette, étoile royale de la première grandeur que les Arabes appellent Alhajoth, et qui est à présent à 17° 7 Gémeaux. Mais les étoiles du Serpentaire sont de la nature de Saturne et de Vénus, celles du Serpent tiennent de Saturne et de Mars et celles de la flèche de Mars, et moins de Vénus.

La lumineuse de l’Aigle de la seconde grandeur, que les Arabes appellent a AItair, est de la nature de Mars et de Jupiter, et se trouve à présent à 27° 2 Capricorne. Les Étoiles du Dauphin tiennent de Saturne et de Mars, les plus luisantes de Pégase sont de la nature de Mars et de Mercure, celles d’Andromède de Vénus, et du triangle de Mercure.

Passons à notre partie du ciel méridionale. La luisante du Poisson austral est de la nature de Vénus et de Mercure, les étoiles de la Baleine tiennent de Saturne, celles d’Orion sont de la nature de Mars et de Mercure, et les autres plus luisantes du même tiennent de Jupiter et de Saturne, comme la royale du pied de la. première grandeur, appelée Rigel par les Arabes, à présent à 12° 8’ Gémeaux.

La luisante du Fleuve Éridan, étoile royale de la première grandeur, que les Arabes appellent Achernar, est de la nature de Jupiter, et maintenant à 22° 1’ Bélier, et les autres de ce fleuve tiennent de Saturne, les étoiles du Lièvre sont de la nature de Mercure mais le Grand Chien, appelle Sirius, ou la Canicule, étoile royale de la première grandeur; est de la nature de Jupiter et de Mars, et à présent à 9° 26 Cancer.

La claire ou luisante au cœur de l’Hydre, étoile royale de la première grandeur, est de la nature de Saturne et de Vénus, et maintenant à 22° 36 Lion. Q. Les étoiles du Gobelet tiennent de Vénus et un peu de Mercure, celles du Corbeau de Mars et de Saturne, mais la luisante et royale Canopus, de la première grandeur, sur le timon de la nef Argo, est de la nature de Saturne et de Jupiter, et à présent à 8°51’ Cancer.

Les étoiles de la figure humaine du Centaure sont de la nature de Vénus et de Mercure, comme celle du pied droit, étoile royale de la première grandeur, maintenant à 0° 11’ Vierge. Les plus luisantes de la figure du Cheval tiennent de Vénus et de Jupiter, les plus luisantes du Loup de Saturne et de Mars, les étoiles de l’Encensoir sont de la nature de Vénus et un peu de Saturne, et les plus luisantes de la Couronne australe tiennent de Saturne et de Mercure. Mais, pour abréger, nous dirons enfin que le Petit Chien, ou Procyon, étoile de la seconde grandeur, est à présent à 21° 9’ Cancer et de la nature de Mars et de Mercure.

Toutefois, que les amateurs de l’astrologie ne s’étonnent point d’un si grand nombre d’étoiles fixes, c’est plutôt pour satisfaire à la curiosité qu’a la nécessité de la science et comme il suffit seulement d’en connaitre les principales, et surtout de celles qui sont au zodiaque, ils auront plus de facilité d’en posséder l’intelligence. Ils en trouveront les longitudes et latitudes dans nos « tables astronomiques », les déclinaisons et ascensions droites, par les préceptes du même livre comme pareillement la médiation du ciel, le lever et le coucher de toutes ces étoiles afin de les appliquer, comme il sera dit, dans les figures célestes.

Troisième livre

Chapitre I - Du nombre et de la qualité des aspects

Nous devons encore une fois exposer que les quatre fondements de l’astrologie naturelle consistent dans la connaissance de la nature et qualité des planètes, ou des étoiles, des douze signes du zodiaque, des aspects, ou des regards des planètes, et des douze maisons de la figure céleste, comme il le voit dans le premier livre. Et parce que nous avons traité dans le second des planètes et des signes, nous commencerons ce troisième par le nombre et la qualité des aspects, suivant l’opinion des anciens comme des plus savants des modernes. Nous ajouterons que ce raisonnement dépend des rayons du soleil aux planètes et des rayons des planètes entre elles, lesquels sont en nombre infinis parce qu’ils se répandent de tous côtés dans le monde. Mais l'autorité des expériences a porté les anciens Égyptiens et Babyloniens d’avoir égard principalement aux radiations que les astres jettent dans le grand cercle de l'écliptique et, en cette admirable contemplation, de s’arrêter seulement aux rayons qui forment les côtés des figures régulières comme sont le carré, le triangle et l’hexagone. Ces grands personnages, qui avaient appris de Moïse que le monde avait été fait en poids, en nombre et en mesure, considéraient cette merveilleuse harmonie dans les proportions de géométrie et Kepler même, autant contraire à l’astrologie que favorable à l’astronomie, n’a-t-il pas confessé que la première était véritable si on la prenait de la puissance des aspects, ou radiations, des planètes? Il en veut toutefois augmenter le nombre, comme il se voit en ses éphémérides; mais il n’est pas assez bon astrologue pour autoriser une opinion si nouvelle. Il faut donc nous tenir au sentiment de Ptolémée, suivi de Cardan, et confirmé par tant de longues expériences. Il nous faut expliquer, conformément aux instructions de son premier livre des astres, le nombre et la qualité de tous ces aspects remarquables. Et sans nous arrêter à ces géométriques raisonnements, il nous les faut débiter de la sorte.

Disons donc que le premier et le plus puissant des aspects qui sont entre les planetes est la conjonction, que les anciens ont exprimé par cette marque voir les gliphes Elle se fait au zodiaque lorsque deux planètes sont dans un même signe et en même degré de l’écliptique en longitude, comme si par exemple le soleil et la lune étaient dans le 10e degré du Lion, nous dirions que le soleil et la lune seraient en conjonction, ou si Jupiter et Mars étaient l’un et l’autre dans le 20e degré du Bélier nous dirions que ces deux planètes seraient conjointes; ainsi que toutes les autres qui se trouveraient comme elles dans un même degré de l’écliptique. Or, la puissance et la force de cet aspect de conjonction procèdent du mélange et de l’assemblage de tous les rayons des planètes qui sont conjoints et dans un même degré du zodiaque, lesquels, venant à verser ainsi leurs influences dans l’air qui nous environne, nous impriment leurs qualités avec plus d’efficace.

Le second aspect en ordre et en puissance, est l’opposition, notée de la sorte. Elle ce fait par le diamètre du cercle et en des signes directement opposés l’un à l’autre, comme si le soleil était dans le 10e degré du signe. du Bélier, son opposition serait dans le 10e degré du signe des Balances, ou si Vénus était dans 12° des Gémeaux, son aspect d’opposition serait dans le 12e du Sagittaire ; le même étant de tous les autres degrés de l’écliptique dont les signes sont opposés de la sorte, le Bélier et les Balances; le Taureau et le Scorpion, les Gémeaux et le Sagittaire, l’Écrevisse et le Capricorne, le Lion et le Verseau; la Vierge et les Poissons. Or, la force de cette opposition des planètes consiste en la vertu des rayons qui sont droitement lancés contre les corps des planètes ou les parties du zodiaque qui la reçoivent parce que le coup en est plus vigoureux, et la réflexion plus puissante.

Le troisième aspect, moindre en force et en puissance que les deux premiers, est le trine expose par cette marque. Son rayon est le côté d’un triangle équilatéral décrit dans le grand cercle de l’écliptique, et fait un angle au centre de la terre toujours de 120 degrés en son ouverture, comme si le soleil était dans le 10e degré du Bélier, son aspect trine à la dextre serait au 10e degré du Lion et son aspect trine à la sénestre serait au 10e degré du Sagittaire, le premier en comptant cinq signes selon la droite succession des signes, et l’autre en comptant cinq signes contre la succession des mêmes, comme si Jupiter était dans le signe du Taureau, son trine dextre serait dans le signe de la Vierge et son trine sénestre dans le signe du Capricorne.

Le quatrième aspect des planètes, égal en force au troisième, est le carré, noté de la sorte. Son rayon est le côté d’une figure carrée inscrite dans l’écliptique, et fait un angle au centre de la terre toujours de 90 degrés, comme le soleil était dans le 20e degré du Bélier, son aspect carré à la dextre serait dans le 20e degré de l’Écrevisse et son aspect carré à la sénestre au 20e degré du Capricorne. Il faut toujours le mesurer de quatre en quatre signes, le dextre selon la droite succession des signes et le sénestre contre la succession des mêmes, comme si la lune était dans le 12e degré du Taureau, son carré dextre serait dans le 12e degré du Lion et son carré sénestre dans le 12e degré du Verseau, le même étant des autres lignes de l’écliptique.

Enfin, le cinquième aspect en ordre, et moindre en puissance que tous les précédents, est le sextil, exposé par cette marque. Son rayon est le côté d’un hexagone décrit dans le grand cercle de l’écliptique, et fait un angle au centre de la terre toujours de 60 degrés en son ouverture, comme si le soleil était dans le 10e degré du Bélier, son aspect sextil serait à la dextre au 10e degré des Gémeaux et son aspect sextil à la sénestre serait au 10e degré du Verseau. On le compte toujours de trois en trois signes, le dextre selon la droite succession des signes et le sénestre contre la succession des mêmes, comme si Vénus était dans le 20e degré des Balances, son sextil dextre serait au 20e degré du Sagittaire et son sextil sénestre dans le 20e degré du Lion. ainsi des autres.

Pontus, évêque de Chalons, et les auteurs qui fondent l’univers sur l’harmonie, disent que la conjonction des planètes est l'unisson dans la musique, que le sextil de trois signes en est la tierce, que le carré de quatre signes en est le diatessaron, ou la quarte; que le trine de cinq signes en est la diapente, ou la quinte, et que l’opposition en est le diapason, ou l’octave, formé du double du diatessaron, ou du carré géométrique.

Ptolémée, avec tous les modernes, ajoute l'antisce à tous ces aspects et le note de la sorte. C’est un rayon que la planète jette dans un degré de l'écliptique, autant éloigné du solstice que le degré qu’il occupe lui-même. Comme si le soleil était dans le 10e du Taureau, son antisce serait au 20e du Lion, ou s’il était dans le 20e des Balances son antisce serait dans le 10e des Poissons, avec cette remarque que toujours la planète et son antisce sont ou dans les signes septentrionaux ou dans les signes méridionaux du zodiaque, en cet ordre : les Gémeaux et l'Écrevisse, le Taureau et le Lion, le Bélier et la Vierge, les Poissons et les Balances, le Verseau et le Scorpion, le Capricorne et le Sagittaire. Car si Jupiter était par exemple à 22 degrés 40 minutes de la Vierge, il faudrait ôter les 22 degrés 40 minutes de trente degrés afin d’avoir 7 degrés 20 minutes pour l'antisce de Jupiter dans le Bélier, le même étant des autres. Que si nous ne parlons point des autres aspects, dodectil, quincunctil et contrantisce, c’est à cause, ou qu’ils ne sont point dans Ptolémée, ou qu’ils sont de trop légère conséquence, mon dessein n’étant pas de remplir de superfluités cet ouvrage de l’astrologie naturelle.

Quant à la nature ou qualité des aspects que nous venons d’exposer, nous dirons qu’elles sont composées de la nature des planètes et de la qualité des rayons, d’autant que la conjonction est toujours bonne avec les bonnes planètes, et toujours mauvaise avec les mauvaises, que l’opposition et le carré sont toujours mauvais mais plus avec les mauvaises planètes et moins avec les bonnes, et que le trine et le sextil sont toujours bons mais plus avec les bonnes planètes, et moins avec les mauvaises. Or, comme l'antisce est estimé de la force de l'opposition, il est aussi tenu de la qualité de la conjonction; c’est à dire bon avec les bonnes et mauvais avec les mauvaises planètes, les raisons naturelles en sont apparentes.

Car si les bonnes planètes joignent ensemble leurs rayons pour les envoyer à la terre, ces rayons seront plus puissants à nous donner leurs bonnes Influences. Et si des planètes mauvaises sont conjointes, leurs rayons seront aussi plus puissants à nous les donner mauvaises. Mais comme Aristote dit que les choses les plus éloignées sont les plus contraires, il s’ensuit que l’opposition est un aspect: d’inimitié entre les planètes parce que leurs rayons, venant à se rencontrer en droite ligne dans les éléments, excitent de la contention entre eux et de la contrariété, ou plus grande, ou plus petite, suivant la bonne ou la mauvaise qualité des astres qui se regardent. Le carré est encore tenu pour un aspect d’inimitié entre les planètes d’autant que leurs rayons, venant à se rencontrer en angles droits sur la terre, se poussent trop rudement et s'empêchent les uns les autres, comme il se voit par expérience dans les corps matériels qui se choquent de la sorte.

Au contraire du trine et du sextil qui sont estimés aspects de parfaite amitié entre les astres parce que leurs rayons, venant à se joindre dans les éléments qui nous environnent par des angles plus doux et plus obliques que le droit, il est apparent qu’ils s’unissent facilement ensemble. Toutefois, le trine est plus puissant que le sextil parce que sa réflexion se fait par un angle de moindre ouverture, comme savent les géomètres. Et quant aux antisces, que Ptolémée appelle aspects de même valeur, à cause de leurs égales distances au tropique; ils sont bons avec les bonnes planètes et mauvais avec les mauvais astres par la raison de leurs natures égales.

Chapitre II - De la condition des aspects

Après le nombre et la qualité suit la condition des aspects qui sont entre les planètes. Nous appelons une conjonction partile lorsque les deux planètes conjointes sont fort proches et nous appelons une conjonction platique lorsque les deux planètes conjointes sont éloignées l’une de l’autre. Nous employons les mêmes termes en l’opposition, au trine, au carré, au sextil et à l’antisce parce que plus la planète ou l’aspect est proche, plus il a de force suivant sa nature, et plus il est éloigné moins il a de puissance. Mais comme les sept planètes sont diverses en grandeur et en lumière, leurs mesures sont pareillement diverses en tous ces aspects, d’autant que la conjonction et l’opposition, tant du soleil que de la lune, soit entre elles ou avec les autres, sont partiles à 4 degrés de leur centre et platiques pour la lune à 10 et pour le soleil à 12. Comme si le soleil ou la lune étaient à 12 degrés du Sagittaire et Jupiter par exemple à 8 ou à 16 degrés du même signe, nous dirions que Jupiter serait en conjonction partile du soleil ou de la lune et s’il était au premier degré ou au 24 du même signe, nous dirions qu’il serait en conjonction platique du soleil; comme de la lune, s’il était à 10 degrés moins éloigné de son globe.

Quant aux antisces, trines et carrés de ces deux luminaires, ils sont appelés partils à 3 degrés, et aux sextils à 2 seulement, comme platics pour le soleil à 10 degrés et pour la lune à 8 au regard des trois premiers, le sextil étant de moindre étendue dans les proportions ordinaires. Mais dans les aspects des cinq planètes, la conjonction et l’opposition seront partiles à 3 degrés et platiques seulement à 8, et toutes les autres seront à 2 degrés partils et à 6 degrés platics, quoique généralement un peu moins à Mercure. Toutefois, nous pourrons appeler la conjonction et l’opposition tres-partiles en toutes les planètes lorsqu’elles se feront précisément dans un même degré de l’écliptique, le même étant du reste des aspects ou radiations de ces astres. Mais la conjonction des étoiles fixes de la première grandeur, soit avec les planètes ou avec les angles de la figure, soit partile ou platique, n’excède jamais les cinq degrés de longitude en l’écliptique. Nous avons dit seulement la conjonction des étoiles fixes parce qu’elles n’ont point d’autres regards, ni entre elles, ni avec les planètes.

Le second point, autant considérable que le premier en la condition des aspects des planètes, consiste dans les termes que les astrologues usurpent, de l'application ou de la défluxion. Ils disent qu’une planète applique à une autre planète lorsque, par son mouvement propre en longitude, elle approche de la planète à laquelle elle se conjoint, et après avoir passé la conjonction, toujours en se mouvant dans le zodiaque, qu’elle déflue de la planète à laquelle elle était conjointe parce qu’elle s’en sépare et s’en éloigne. Ptolémée, et tous les auteurs de la science, assurent que la conjonction est plus forte en l'application, et plus faible en la défluxion, conformément aux raisons apparentes. Nous dirons donc, Jupiter étant par exemple au 20e degré du Sagittaire et la lune au 6 ou au 8, que la lune applique à Jupiter en cet aspect favorable, mais que Jupiter étant au même degré et la lune au 22 ou 24, que la lune déflue alors de la conjonction de cette planète. Nous dirons aussi de Mars étant au 12e degré, par exemple, de la Vierge et Vénus au 8 ou au 10, que cette planète vient appliquer à la conjonction de Mars, et qu'étant au 14 ou au 16, qu’elle vient à défluer de cette conjonction de Mars. Le même étant de tous les autres aspects qui se font entre les planètes.

Or, comme cette astronomique démarche de s’approcher ou de se reculer, dépend de la légèreté ou de la pesanteur de chaque planète au regard de leur mouvement au zodiaque, nous devons observer cette générale maxime que toujours, en la considération des aspects, la planète la plus légère ou la plus vite en son mouvement applique au plus pesant ou qui a moins de vitesse. À quoi nous ajouterons, pour en faciliter l’intelligence, que les planètes les plus légères, et les plus vites en leur mouvement propre, sont en cet ordre la lune, Mercure, Vénus, le soleil, Mars, Jupiter et Saturne. D’où s’ensuit que toujours la lune applique à toutes les autres planètes et que jamais les autres planètes n’appliquent à la lune parce qu’elle est en son mouvement la plus légère au contraire de Saturne, que jamais il n’applique à toutes les autres planètes, et que toujours les autres planètes appliquent à Saturne, parce qu’il est le plus pesant en sa démarche. Toutefois, nous devons considérer en cette générale remarque que souvent Vénus et Mercure sont moins vites que le soleil, et Vénus souvent plus vite que Mercure, afin de procéder avec prudence en l’usurpation de ces termes d’application et défluxion, au regard des aspects des planètes.

Davantage, il arrive souvent que les cinq planètes, Saturne, Jupiter, Mars, Vénus et Mercure, sont rétrogrades, comme il se voit dans les éphémérides ou en la supputation des tables astronomiques, de sorte que nous pouvons encore dire, en faveur de la condition des aspects des planètes, que si le plus pesant est rétrograde et le plus léger direct en son mouvement, que ces deux planètes sont en mutuelle application parce qu’elles s’approchent l’un de l’autre, rendant ainsi leur aspect ou leur conjonction puissante. À quoi nous ajouterons enfin, deux planètes étant conjointes et toutes deux rétrogrades, que la plus vite de ces deux planètes, en ce mouvement de rétrogradation, applique à l’autre plus pesant en cette démarche, contre la succession des signes, le même étant de tous les aspects de ces astres.

Le troisième point qu’il nous faut observer en la condition des aspects qui sont entre les planètes ne consiste qu’en leur seule conjonction avec le soleil, et dans les termes de combustion et d’oppression, à cause de sa grande lumière et chaleur, qui brûle ou qui oppresse les autres planètes. Car nous dirons par exemple que Jupiter est brûlé quand il est dans les six degrés soit devant soit après le soleil en longitude et qu’il est oppressé des rayons quand il est dans les douze soit devant, soit après ce grand luminaire. Comme en conformité du même exemple, si le soleil était à 16 degrés de la Vierge, et Mars à 12i ou à 20, nous dirions que Mars serait brûlé, ou combuste, et si la même planète était à 6 degrés ou à 26 du même signe, que Mars serait oppressé des rayons, le même étant de tous les autres. Toutefois, il nous faut encore nous souvenir de la sentence des Arabes qui disent qu’une planète est en cazimi, c’est-à-dire au cœur du soleil, lorsqu’il est si partilement conjoint à cet astre lumineux, tant en longitude qu’en latitude, qu’il est comme enclos dans le cercle du globe solaire, c’est-à-dire à 15 minutes au plus de l’écliptique, soit devant ou après le soleil, soit en latitude boréale ou méridionale, comme si le soleil était par exemple à 10 degrés et 20 minutes du Bélier et Vénus à 10 degrés 30 minutes du même signe en longitude, et seulement à 10 minutes de latitude, nous dirons que Vénus est en cazimi, selon les Arabes.

Mais d’autant que les Arabes, et tous les auteurs qui les suivent (car c’est assez qu’une pensée soit une fois dans un livre pour être après dans tous les autres), ont fait un merveilleux état d’une planète dans le cœur du soleil en la manière que nous venons de le faire entendre, nous devons ajouter que toujours les trois planètes supérieures sont dans leurs occultations, lorsqu’ils sont dans le cœur du soleil, c’est-à-dire éclipsés et leurs rayons empêchés de venir au globe terrestre, le même étant des deux planètes inférieures lorsqu’elles sont directes en leur mouvement parce qu’elles sont alors en leur apogée. De sorte qu’en telle condition, c’est plutôt un désavantage à toutes ces planètes et seulement Vénus et Mercure en peuvent être favorisés si elles sont rétrogrades car elles sont alors au-dessous du soleil et en leur périgée.

Finalement, que pourrons-nous ajouter de l’obsession qui est toujours prise en mauvaise part et du côté des maléfiques ? Car nous disons la lune être obsédée quand elle est conjointe à Saturne et à Mars, en telle sorte que l’une de ces deux planètes soit devant et l’autre après, selon la succession des signes, comme si la lune était à 12 degrés du Sagittaire, Saturne à 18 et Mars à 7 ou environ, parce que ce luminaire serait alors entre ces deux planètes infortunes. Mais quoi, serons-nous obligés d’ajouter en cet endroit tous les raisonnements que les auteurs de la science ajoutent en cette matière? Ou s’il ne sera pas meilleur de déclarer une fois pour toutes que notre dessein a toujours été en cet ouvrage de l’astrologie naturelle de la dépouiller de toutes les superfluités qui la troublent, de suivre plutôt les vérités de la nature, ou de l’expérience, que la vanité des opinions et de soulager autant qu’il nous fera possible l’esprit des nouveaux astrologues en les conseillant de se ranger plutôt à la simplicité de nos préceptes que de s’engager dans les confus enseignements des auteurs imprimés, qui ne font que se copier les uns les autres.

Chapitre III - Des dignités des planètes

C’est encore un effet merveilleux de la providence d’avoir ordonné la distribution des douze signes sous la domination des sept planètes afin que les douze parties du zodiaque eussent part à la nature de leurs influences. Jamais les raisons naturelles ne pouvaient en donner la connaissance aux anciens philosophes d’Égypte, il fallait que ce fût la longue expérience qui des effets nous fait arriver à la cause, comme la science de la cause nous conduit aux effets, en toutes les opérations de la nature. Nous avons de la peine à consentir aux raisonnements de Ptolémée et de tous les auteurs qui le suivent parce que, disent-ils, le soleil nous cause plus de chaleur lorsqu’il est au Lion, nous lui avons donne le signe du Lion pour partage, et parce que la lune est plus proche de nous quand elle est dans l'Écrevisse, nous lui avons donné le signe de l'Écrevisse. Après avoir ainsi trouvé les deux maisons des luminaires à cause, poursuivent-ils, que les Gémeaux et la Vierge sont les deux signes plus proches des deux précédents, que les Gémeaux regardent d’un sextil le Lion et la Vierge d’un sextil l'Écrevisse, nous les avons données à Mercure, planète le plus voisine et amie du soleil et de la lune.

Ils continuent toujours sur ce fondement à distribuer les douze signes du zodiaque et parce que Vénus vient après Mercure, ils lui donnent pour ses deux maisons le Taureau et les Balances, à cause que le Taureau est au sextil de l'Écrevisse, signe de la lune, et que les Balances sont pareillement au sextil du Lion, signe de l’autre luminaire. Ils ajoutent, en suivant la même route, qu’ils ont pris pour les deux maisons de Mars les deux signes qui suivent les derniers, à savoir le Scorpion, qui est au carré de la maison du soleil, et le Bélier, qui est au carré de la maison de la lune, à cause que la nature de cette planète est ennemie de la nature des luminaires. Et, toutefois, le Bélier est au trine du Lion et le Scorpion au trine de l'Écrevisse, le même était des maisons de Vénus, qui sont pareillement au carré de celles des deux luminaires. Le Sagittaire et les Poissons ont été donnés de la même sorte à Jupiter parce que le premier de ces deux signes est au trine du Lion et le second au trine de l'Écrevisse, aspect de parfaite amitié et convenable à la nature de Jupiter, si favorable au soleil et à la lune. Enfin, le Capricorne et le Verseau ont été par eux concédés à Saturne pour ses deux maisons, tant à cause que ces deux signes sont les plus éloignés du Lion et de l'Écrevisse que parce que le Capricorne est opposé à la maison de la lune et le Verseau à la maison du soleil, à raison de la mauvaise nature de cette planète, fort ennemie des luminaires.

Or, c’est ainsi que Ptolémée, et tous les auteurs de l’astrologie, ont trouvé que la première dignité des planètes dans le zodiaque était ordonnée de la sorte. Pour les deux maisons de Saturne le Capricorne et le Verseau, pour les deux maisons de Jupiter le Sagittaire et les Poissons, pour les deux maisons de Mars le Bélier et le Scorpion, pour les deux maisons de Vénus, le Taureau et les Balances, pour les deux maisons de Mercure les Gémeaux et la Vierge, pour la maison du soleil le signe du Lion et pour la maison de la lune le signe de l’Écrevisse. Mais sans nous arrêter à des raisonnements si faibles, ne sera-t-il pas meilleur d’assurer sur l’expérience la vérité d’une si belle doctrine? Jamais la physique et la médecine n’eurent dans leurs sciences des causes si bien fondées. L’astrologie est autant ancienne que les planètes et le zodiaque. Le département des douze signes ne procède point de notre choix. Une continuelle observation des anciens philosophes d’Égypte et de Babylone en a découvert le secret admirable. Ils ont trouvé souvent des personnes martiales quoique Mars fut éloigné de l’ascendant, ils ont trouvé une infinité d’hommes solaires quoique le soleil fut séparé de l’angle d’orient, ils ont trouvé diverses personnes vénériennes sans la présence de Vénus en la première maison de la figure. Et par de semblables inductions convenables à leur philosophie, ils ont arrêté pour véritable que le signe du Bélier tout seul en l’ascendant faisait les personnes martiales que le signe du Lion, tout seul en l’angle d’orient rendait les personnes solaires et que le signe du Taureau, tout seul en la première maison, faisait les personnes vénériennes, ayant ainsi trouvé la nature des autres signes pour les approprier, comme ils ont fait, à chaque planète.

Après avoir donné la connaissance de la première dignité que les planètes ont dans les signes du zodiaque, nous devons passer à la seconde, non moins considérable. Ptolémée, comme tous les auteurs de l’astrologie, l’appellent l’exaltation des planètes. Il ne faut pas nous étonner si les causes sont si variables dans le ciel puisque les effets sont si variables entre les hommes. Nous avons déjà dit qu’il n’y avait point d’effet dans la nature qui n’eut aussi sa cause dans la nature. Et le père Campanelle n’assure-t-il pas, au premier de son « astrologie », que les changements ne seraient pas si fréquents dans le monde si les mouvements n’étaient si divers dans les orbes célestes. Nous avons déjà déclaré quelles sont les maisons des planètes ; ne nous arrêtons plus à tant de raisonnements, laissons reposer l’autorité des expériences et, sans nous troubler de tant de répétitions, prenons la suite de notre ouvrage. Disons que Saturne a son exaltation dans le signe des Balances, Jupiter dans le signe de l’Écrevisse, Mars dans le signe du Capricorne, le soleil dans le signe du Bélier, Vénus dans le signe des Poissons, Mercure dans le signe de la Vierge, et la lune dans le signe du Taureau, selon tous les astrologues.

Mais d’où procèdent tant de contrariétés dans l’univers? Ne viennent-elles pas de la figure orbiculaire du monde? Tous les points qui sont dans un cercle ont leurs points opposés dans le même et Aristote ne dit-il pas que les choses les plus contraires sont les choses les plus éloignées? D’où s’ensuit que Ptolémée, avec tous les anciens, ne nous ont pas donné sans fondement que comme les planètes avaient plus de puissance dans les signes de leurs dignités, qu’ils avaient moins de force dans les signes opposés à leur dignité essentielle. Ils appellent le détriment d’une planète le signe opposé à sa maison, et la chute de la même planète le signe opposé à son exaltation, comme il le voit en tous les livres. Disons donc que Saturne a son détriment dans les signes du Lion et de l'Écrevisse, Jupiter dans les signes des Gémeaux et de la Vierge, Mars dans les signes du Taureau et des Balances, le soleil dans le signe du Verseau, Vénus dans les signes du Bélier et du Scorpion, Mercure dans. les signes du Sagittaire et des Poissons, la lune dans le signe du Capricorne. Et tout de suite ajoutons que Saturne a sa chute dans le signe du Bélier, Jupiter dans le signe du Capricorne, Mars dans le signe de l’Écrevisse, le soleil dans le signe des Balances, Vénus dans le signe de la Vierge, Mercure dans le signe des Poissons et la lune dans le signe du Scorpion, comme il se voit par la raison des choses contraires

Finalement, la troisième dignité des planètes dans les signes du zodiaque, que nous appelons la dernière, n’estimant pas en devoir donner davantage, est la triplicité, fondée sur les trigones ou les triangles, comme il se voit dans Ptolémée au premier du « Quadripartite », mais plus dans tous les auteurs Arabes et modernes, lesquels font un prodige de cette doctrine plutôt par habitude, ou par imitation, que par aucun fondement raisonnable. Nous voulons en cet endroit modérer notre audace par la modestie : nous voulons combattre le sentiment que nous avons de tous ces trigones et, au lieu de les rejeter de notre science, les recevoir dans les conditions toutefois de Ptolémée, de Proclus et de Trismégiste, lesquels, suivant la doctrine des anciens philosophes d’Égypte et de Babylone, comme nous avons dit ailleurs, n’admettent point les éléments d’Aristote ou d’Hippocrate dans les triplicités des douze signes. Ils forment la première du Bélier, du Lion et du Sagittaire, la seconde du Taureau, de la Vierge et du Capricorne, la troisième des Gémeaux, des Balances et du Verseau, et la quatrième de l’Écrevisse, du Scorpion et des Poissons, à cause, dit Ptolémée, que les trois signes de chaque triplicité sont en trine, le meilleur de tous les aspects, et tous trois, ou de nature masculine, ou de nature féminine, sans leur donner autre convenance.

Davantage, comme il a donné des seigneurs à tous les signes du zodiaque par la dignité des maisons, il fait encore les planètes seigneurs des triplicités, que les modernes appellent trigonocrateurs en cette sorte. Il ordonne le soleil et Jupiter pour la première parce que le soleil a son exaltation dans le Bélier et Jupiter sa maison dans le Sagittaire. Il choisit la lune et Vénus pour la seconde à cause que Vénus a sa maison dans le Taureau et la lune son exaltation au même signe. Il donne Saturne et Mercure pour la troisième parce que Saturne a sa maison dans le Verseau et Mercure la sienne dans les Gémeaux, et pour la dernière, il ordonne Mars à cause qu’il a sa maison dans le Scorpion, en lui donnant toutefois pour compagnes Vénus et la lune parce que Vénus a son exaltation dans les Poissons et la lune sa maison dans l’Écrevisse. Peut-être que ces raisonnements ne sont point assez forts à nous persuader la vérité d’une si vague doctrine et moins encore l’autorité des expériences en des sujets si confus et si variables. Toutefois, comme ce n’est point un blâme d’errer avec tant de grands personnages, nous achèverons en disant encore une fois que la première dignité des planètes est la maison, que la seconde est l’exaltation et que la troisième est ta triplicité, que nous appelons aussi la dernière de toutes ces dignités essentielles. Parce que notre dessein en cet ouvrage de l’astrologie naturelle, comme nous avons dit ailleurs, est de la dépouiller de toutes les superfluités qui la troublent et la confondent.

Ces auteurs célèbres, et toujours considérables, nous enseignent encore la mutuelle réception des planètes en leurs dignités essentielles. Ils nous déclarent que si Jupiter est dans l'une des maisons de Saturne et Saturne dans l'une des maisons de Jupiter, que ces deux planètes transfèrent de l’une à l’autre la naturelle puissance qu’ils ont dans leurs propres signes qu’ils sont réputés de la sorte comme dedans leurs propres dignités, mais que leur mutuelle réception est plus parfaite s’ils se regardent d’un aspect trine ou du moins sextil, le carré et l’opposition n’étant pas en ce point si favorables. Or, ce changement réciproque de leurs dignités essentielles n’est pas seulement au regard des maisons, il est encore pour l'exaltation en toutes les planètes et non point au regard des triplicités, qui ne sont pas de si grande conséquence. Si donc le soleil se trouve dans les 10 ou 12 degrés du Bélier, et Mars dans les 10 ou 12 degrés du Lion, nous dirons que ces deux planètes sont en mutuelle réception de leurs maisons à cause du trine aspect dont ils se regardent. Mais la simple réception, de moindre poids, est lorsque deux planètes sont en aspect et que l’une tant seulement est dans la dignité de l'autre. Comme si Vénus est dans le Verseau, maison de Saturne, et Saturne dans les Gémeaux, où Vénus n’a point de dignité; nous dirons que Vénus est en réception de maison avec Saturne, le même étant des exaltations en toutes les planètes.

Chapitre IV - Du nombre des maisons célestes

Après avoir assez heureusement considéré tout ce qui regarde le mouvement des orbes célestes, d’occident par le midi en orient, il nous faut maintenant appliquer à l’intelligence de ce qui concerne le mouvement contraire du premier mobile, d’orient par le midi en occident, afin d’en examiner aussi toutes les circonstances. Le premier de ces deux notables mouvements nous marque la situation des planètes dans les signes du zodiaque et le second, non moins considérable, nous enseigne à trouver la position des mêmes dans le ciel, au respect des cercles de la sphère. Nous avons dit ailleurs que le méridien coupe le ciel en deux parties égales, dont la première, du côté d’orient, est toujours ascendante et la seconde, du côté d’occident, toujours descendante à cause de la révolution diurne, ou de vingt-quatre heures, qui porte les signes, les planètes et les étoiles, toujours en montant, depuis le fond du ciel, où est le méridien inférieur, jusqu’au méridien supérieur, qui est au milieu de chaque hémisphère, et toujours en descendant, du méridien supérieur à l’autre, qui est au-dessous de la terre. Ainsi nous disons qu’une planète est élevée sur les autres quand elle est la première à monter du côté de la partie du ciel ascendante, et la dernière à s’abaisser en l’autre partie descendante.
Nous avons aussi rapporté que l’horizon coupe encore le ciel en deux parties égales, l’une toujours supérieure, au-dessus de la terre, et l’autre toujours inférieure au-dessous de la même, que l’horizon du côté d’orient nous marque toujours le lever des signes, des étoiles ou des planètes, et l’horizon du côté d’occident toujours le coucher des mêmes. Et nous ajouterons maintenant que nous disons qu’une planète est sur la Terre lorsqu’elle est dans la partie du ciel qui est au-dessus de l’horizon et qu’elle est sous la terre quand elle est en l’autre partie du ciel, inférieure. De sorte que nous avons à considérer en cet endroit deux points remarquables, le premier, que les deux cercles de l’horizon et du méridien partagent le ciel en quatre parties égales, le second, suivant la doctrine de Ptolémée, que ces deux cercles sont les quatre angles du ciel, de si grand poids en la science des astres. Le premier est l’angle d’orient en l’horizon où les étoiles se lèvent, le second est l’angle du milieu du ciel où le soleil au méridien fait le midi en chaque hémisphère, le troisième est l’angle d’occident en l’horizon où les étoiles se couchent et le quatrième, ou dernier, est l’angle de la terre, où le soleil fait la minuit au méridien de la partie du ciel inférieure.

Or, comme les anciens philosophes d’Égypte et de Babylone avaient trouvé, par des longues expériences, que le grand cercle du zodiaque était naturellement distingué en douze signes, ils trouvèrent aussi que la grande circonférence du premier mobile, était partagée en douze maisons, par les mêmes ressorts de la nature. Ils employèrent premièrement à cet office les deux grands cercles de l'horizon et du méridien et en les faisant mouvoir sur les deux pivots qui sont en leurs communes sections, ils notèrent encore quatre grands cercles, que les astronomes appellent de position, afin de marquer avec les deux précédents, les douze maisons célestes. Mais ils furent assez longtemps en doute sur les intervalles de ce partage et, après avoir tenté diverses voies pour en avoir la connaissance, ils trouvèrent que, comme l’écliptique était la mesure du mouvement d’occident en orient et des parties égales des douze signes, que l’équateur étant la mesure du mouvement contraire d’orient en occident, qu’il serait aussi la mesure égale des douze maisons de la figure :

Par cet admirable principe de convenance, ils partagèrent le grand cercle de l’équateur en douze parties égales, chacune de trente degrés, et ayant arrêté sur les points de ces nouveaux intervalles découverts, les quatre grands cercles de position que nous venons d’alléguer, ils formèrent ainsi les douze maisons célestes. Ils appelèrent les pointes des maisons, les endroits de l’écliptique qui étaient coupés par ces nouveaux cercles en joignant à ce rang les quatre angles. Mais la fortune, jalouse d’une si belle invention, en déroba la connaissance après la mort de Ptolémée. Ce grand personnage n’en avait parlé qu’obscurément dans son « Livre des astres » et les Arabes qui n’en purent concevoir le secret merveilleux, en nous restituant l'astrologie après la conquête de l'Espagne, nous donnèrent les douze maisons par la division égale de l’écliptique. Il ne faut pas toutefois les accuser d’ignorance, c’était plutôt un effet de la malice du temps, ou du bonheur de la Germanie, qui voulait nous donner un esprit pour renouveler cette ancienne méthode. Mont-Royal, qui en est le restaurateur, l’a nommée « la voie rationnelle » et depuis la publication de ses tables du premier mobile, l’Europe l’a toujours et partout conservée. Disons donc que le ciel fut premièrement divisé en quatre égales parties et tout l'équateur en quatre portions de quatre-vingt-dix degrés chacune, que ces quatre-vingt-dix degrés de l’équateur furent ensuite partagés en trois égales parties, pour les intervalles des trois maisons contenues en chacune des quartes célestes, qu’en la première de ces quartes furent placées la première, la seconde et la troisième maison, entre l'horizon de l’angle d’orient et le méridien de l’angle de la terre, qu’en la seconde quarte furent posées la quatrième, la cinquième et la sixième maison, entre le méridien de l’angle de la terre et l’horizon de l’angle d’occident, qu’en la troisième quarte furent placées la septième, la huitième et la neuvième maison, entre l’horizon de l’angle d’occident et le méridien de l’angle du milieu du ciel, et qu’en la quatrième quarte furent posées la dixième, la onzième et la douzième maison, entre le méridien de l’angle du milieu du ciel et l’horizon de l’angle d’orient, suivant tous les auteurs de la science. Et ce fut ainsi que les douze maisons de la figure céleste furent ordonnées, à les compter de l’ascendant, qui est l’horizon du premier angle, en descendant au-dessous de la terre.

Or, ces grands personnages, toujours fondés sur les deux mouvements contraires des planètes dans le zodiaque et du premier mobile à l’entour de la terre, commencèrent à nommer les maisons qui suivent les angles selon la succession des signes les maisons succédentes et celles qui précédent les angles les maisons cadentes parce que, comme les planètes sont premièrement portées par leur mouvement propre dans les signes du zodiaque, des angles de la figure dans les maisons succédentes, elles sont tout au contraire emportées des angles dans les maisons cadentes par le mouvement violent du premier mobile, comme s’ils venaient à tomber de ces angles. Et c’est ainsi que nous avons les quatre angles d’une figure, les quatre maisons succédentes et les quatre maisons cadentes. La première, la quatrième, la septième et la dixième sont les quatre angles, la seconde, la cinquième, la huitième et la onzième sont les quatre maisons succédentes et la troisième, la sixième, la neuvième et la douzième sont les quatre maisons cadentes.

Davantage, nous avons toujours six maisons ascendantes et six maisons descendantes, à cause de la révolution diurne. La dixième, la onzième, la douzième, la première, la seconde et la troisième sont les six maisons ascendantes, à savoir du côté d’orient et la neuvième, la huitième, la septième, la sixième, la cinquième et la quatrième sont les six maisons descendantes, et du côté d’occident.

De plus, nous avons encore en la même figure toujours six maisons sur la terre et six maisons au-dessous. Les premières sont la douzième, la onzième, la dixième, la neuvième, la huitième, la septième et les autres, la première, la seconde, la troisième, la quatrième, la cinquième et la sixième et, toutefois, à cause de la singulière puissance ou vertu de la première maison, que les astrologues appellent encore l’ascendant de la naissance, elle est comptée au rang des maisons qui sont sur la terre, comme il se voit en tous les livres.

Or, la manière de trouver la pointe de chaque maison céleste, ou d’en dresser toute la figure, est par les tables qui servent à l’usage des éphémérides ou par les tables des ascensions droites et obliques, mais plus parfaitement par la résolution des triangles sphériques, comme il se voit dans les volumes du premier mobile de tant d’auteurs, et en celui de nos « Tables astronomiques » par des règles nouvelles et plus faciles. Toutefois, il ne faut pas que les envieux de l’astrologie, ou plutôt les ignorants d’une si belle science, prennent de l’avantage de ce que nous parlons si souvent du mouvement du soleil et du premier mobile comme des principales causes qui donnent les changements à tant de choses. Et il ne faut pas qu’ils nous opposent un argument de logique pour renverser une si belle connaissance en nous disant que si la terre se meut, suivant l’opinion de Copernic et du plus grand nombre des astronomes, que le soleil, comme le premier mobile, sont en repos et, partant, que leurs mouvements venant à cesser, tant de causes viennent pareillement à disparaitre. Ne savent-ils pas, aussi bien que nous, si toutefois ils en sont capables, que si le soleil est immobile au centre du monde, que ta terre est mobile dans l’écliptique au lieu du soleil et que si le premier mobile n’a point de mouvement, que la terre a ce mouvement du premier mobile à l’entour de son axe? Ils devraient encore ajouter que si la terre a le mouvement annuel dans l’écliptique, que si les planètes ne sont plus ni vites, ni rétrogrades et que c’est vanité dans l’astrologie, de changer les effets de leurs actions sur la terre par ces diverses passions de leur démarche. Mais comment pourrons-nous satisfaire à leurs difficultés en si peu de paroles? Faudrait-il en réserver la réponse un autre volume? Ou s’il ne sera pas meilleur de leur dire dés à présent que les astronomes, comme les philosophes, appellent les vrais mouvements au regard de la terre, ceux qui sont apparents à la même, comme il se voit dans les « Théories des Orbes célestes »?

Chapitre V - De la nature et qualité des douze maisons

Il n’y a rien de si fâcheux dans les auteurs d’une science que la répétition des même choses. Mais comment se pourrait-il faire de nous empêcher de dire encore une fois que le quatrième ou dernier fondement de l’astrologie naturelle consiste dans la connaissance de la nature et qualité des douze maisons de la figure? Nous avons commencé d’en traiter dans le chapitre précédent et c’est en cet endroit que nous devons achever d’en donner toute l’intelligence. Peut-être qu’il serait encore nécessaire de nous fortifier de l’autorité des expériences et de la force des raisonnements dans une matière de cette importance. Mais ne sait-on pas que les actions du soleil et des étoiles sont plus puissantes et ont plus de vertu dans les angles que dans les autres maisons de la figure céleste; c’est à dire lorsqu’ils commencent à paraitre en l’horizon pour s’élever ou a disparaitre pour se coucher sous le même? Ces vérités ne sont que trop connues dans le monde et les auteurs de la science en sont tellement remplis qu’il nous serait importun d’en raisonner davantage. Nous suivrons donc en ce regard leurs sentiments, conformes à ceux de Ptolémée, dans les conditions toutefois d’ajouter ou de retrancher à notre ordinaire ce que nous trouverons convenable de recevoir ou de rejeter, afin de rendre notre astrologie toujours plus pure et plus naturelle.

D’autant que nous ne pouvons consentir à donner des propriétés ou qualités générales aux trois maisons célestes qui sont comprises entre l’horizon et le méridien, et qui forment les quatre quartes de la figure. Ptolémée se contente de leur attribuer les simples qualités qu’il donne à chaque partie du jour naturel comme l’humidité à la première, qui va de l’orient au midi, la chaleur à la seconde, qui est du midi à l’occident, la sècheresse à la troisième, qui va de l’occident à la minuit, et la froideur à la quatrième ou dernière, qui finit où le soleil se lève. Mais les Arabes, fondés sur les éléments d’Aristote et d’Hippocrate, leur attribuent les quatre humeurs, du sang, de la colère, de la mélancolie et de la pituite, sans considérer, comme nous avons dit ailleurs, que les trois dernières ne sont que des excréments de la première. Comment peuvent-ils concevoir, les uns et les autres, que la seconde maison soit de qualité froide et humide, le soleil étant en la neuvième, qui nous fait sentir alors des qualités toutes contraires? Il fallait donc ajouter à leur opinion que toutes ces quartes n’avaient les humeurs qu’il leur attribue, que lorsque le soleil les rendrait telles à notre égard par sa présence, parce que la nature ou la complexion de ces quatre principales parties du jour, ou de la sphère céleste, ne sont seulement que pour ceux qui habitent sous le méridien supérieur de la même.

Si nous voulions employer notre loisir à débattre, il faudrait que ce fût dans un autre volume. Mais quel avantage peut-on espérer dans la dispute des sciences naturelles, où la victoire est souvent, et plutôt, concédée au nombre qu’au poids des paroles? Peut-être que notre pensée serait d’obliger les personnes à suivre nos sentiments sans les appuyer de preuves convenables : ce n’est point ainsi qu’il le faut entendre, nous donnons plutôt des conseils que des lois en cet ouvrage, nous savons, autant qu’il nous est possible de savoir, que nos préceptes sont les meilleurs et nous laissons à tous la liberté, ou de les rejeter ou de les admettre. Les sciences, comme les lois, deviennent, par la fuite du temps, des monstres: la vanité des auteurs, plutôt que l’amour de la vérité, est la cause de tant de superfluités qui les troublent et, pour les apprendre, il faut avoir plus de force de bras à remuer les volumes que de force d’esprit pour s’en rendre capable, comme il se voit en Virgile, Malvezzy. On compte, dit-il, les paroles au lieu de les peser; et c’est assez à un homme d’avoir fait un gros livre pour être estimé un grand personnage.

Mais revenons au sujet de première maison, par où nous devons commencer. Les astrologues l'appellent encore l’ascendant et les Grecs l'horoscope, c’est à dire marque de l'heure. Sa domination est sur la vie, le corps et la forme de la personne, sur la santé, la beauté et la longueur de la vie, sur les humeurs, le tempérament ou le mélange des qualités propres ou contraires sur les inclinations, les mœurs et les passions de l’âme naturelle, sur les dispositions et habitudes, des vices ou de la vertu, sur les facultés de l'esprit et de l'entendement, comme sur les inclinations aux belles sciences, sur la fortune et la réputation en général de la personne, sur l'industrie et la propre capacité dans sa conduite et finalement sur la propreté des ornements dont elle est revêtue. Les Arabes ajoutent sur les commencements des actions ou des entreprises, dans les figures des élections, suivant leur doctrine.

La seconde maison a son pouvoir sur les richesses, les facultés et les biens meubles de la personne, sur les ornements, les tapisseries et l'argenterie, sur l’or et l'argent monnayé, comme sur la recette et la dépense, sur les perles, les diamants et les pierreries, sur les ameublements, les peintures et les dorures, sur le jeu, le trafic et le commerce par où les richesses s’acquièrent facilement ou se perdent, et enfin sur tout ce qui contribue le plus à l'aise du corps ou à la douceur de la vie, puisqu’elle suit immédiatement la première.

La troisième a sa domination sur les frères et les parents en ligne collatérale, sur les avantages qui nous arrivent des alliances, sur les petits voyages et sur la bonne société que nous devons avoir avec nos proches, parce qu’elle est au sextil de l’ascendant, ou première maison de la figure.

La quatrième, qui est l’angle de la terre, a son pouvoir sur les parents en ligne droite et ascendante, sur les patrimoines, les héritages et les biens immeubles, sur les bâtiments, les châteaux, les possessions et les choses permanentes, sur l’agriculture, les jardins et le labourage, sur la solitude, les méditations et les profondes pensées de la personne, sur les métaux, les minières et les caves souterraines, sur la fausse monnaie et l’alchimie, et finalement sur les enterrements des hommes et la gloire après la mort puisque cette maison est en la partie du ciel la plus profonde,

La cinquième a sa domination sur le nombre, la vie et la qualité des enfants, en ligne droite et descendante, sur Ies dons et les présents des princes ou des grands seigneurs, des princesses ou des femmes, et sur tout ce qui peut délecter ou satisfaire la personne parce qu’elle est en trine aspect de la première maison de la figure.

La sixième a son pouvoir sur les domestiques, les serviteurs et la famille, sur les petits animaux, l’économie et le ménage, sur la solitude, la retraite ou l’abaissement de la personne et finalement sur les maladies, à cause que cette maison ne regarde point la première, ou l’ascendant de la naissance.

La septième, qui est l’angle d’occident, a sa domination sur la bonne ou la mauvaise condition des mariages, sur la nature, les qualités et la mort de la femme en la naissance du mari, et du mari en la naissance de la femme, sur les procès, les débats et les querelles, sur les ennemis ouverts et déclarés, sur les actions illustres et précipitées, sur les rebellions ou les révoltes contre le souverain, sur le bannissement, l’exil et les dangers de la personne et en partie sur le genre de la mort puisqu’elle est droitement opposée à la première, qui a son principal domaine sur la vie.

La huitième a son pouvoir sur la mort, ou violente, ou naturelle, ou publique, sur les crimes, ou d’État, ou des faussetés, ou des monnaies, ou des meurtres, ou des voleries, sur les supplices, les tortures et les ministres de telles cruautés, sur les princes ou les juges qui condamnent à mort et sur l’avantage ou les profits qui peuvent arriver de la mort ou du crime des autres, comme héritages, fondations ou réparations d’injures et de dommages.

La neuvième a sa domination sur les grands voyages, les longues navigations et les grands pèlerinages, sur les ambassades, légations et messages des rois et des princes, sur les honneurs, les charges et les dignités de la religion que l’on professe, sur les dispositions naturelles de l’enfant à la piété ou à la bonne vie, et sur la nature des visions ou des songes parce que cette maison est au trine de l’ascendant, ou de la première.

La dixième, qui est l’angle du milieu du ciel et la maison la plus élevée sur la terre, a son pouvoir sur l’empire, les lois et la souveraine puissance, sur les empereurs, les rois et les princes souverains; sur les offices de la couronne, les charges publiques et les magistratures, sur la vocation, le métier ou la profession, sur les honneurs, réputation et la gloire, sur les personnes illustres, les présidents et les juges et généralement sur tout ce qui donne de l’autorité sur la vie, la mort et la fortune des hommes.

La onzième a sa domination sur l’amitié des rois, des princes, des reines et des princesses, sur le nombre et la qualité des amis et des amies, sur les conversations, les sociétés et les compagnies et finalement sur tous les avantages qui nous peuvent arriver du côté des personnes qui nous protègent et nous avancent. Elle est si favorable quand elle est bien disposée que les Grecs l’ont appelée bon génie.

Enfin, la douzième a son pouvoir sur les prisons, les cachots, les crimes et la servitude, sur la retraite, l’obscurité et l’abaissement de la personne, sur les traverses, les empêchements et les obstacles, sur la décadence et la ruine des grandeurs et des fortunes, sur les ennemis cachés ou couverts, et qui sont portés à l’envie et à la calomnie, sur les détractions, les complots et les rebellions contre les princes ou les seigneurs, sur les calamités, les misères et le bannissement, et généralement sur tout ce qui regarde le nombre et la qualité des chevaux qui servent à la personne, comme des autres grands animaux qui sont employés dans le ménage de la campagne. Et cette maison est si malheureuse quand elle est infortunée que les Grecs l’ont appelée mauvais génie, au contraire de la onzième.

Chapitre VI -  De la dignité des maisons célestes

Ayant déclaré, comme nous avons fait, le nombre, la nature ou la qualité des douze maisons de la figure, il nous faut encore ajouter les remarques de leur avantage qui procèdent toujours de leur situation dans la sphère céleste. Car les trois maisons qui sont du côté d’orient ont leurs significations sur les commencements de la vie et les actions propres de la personne; comme sur les biens et sur les maux, qui ont accoutumé de l’accompagner ou de la suivre. Les trois maisons vers le milieu du ciel, et les plus élevées, ont leurs dominations sur l’honneur, l’empire et la gloire, comme sur les actions publiques ou extérieures de la personne. Les trois maisons du côté d’occident ont leurs significations sur la fin de la vie et sur les actions contraires, ou qui nuisent à la personne. Et les trois maisons qui sont au fond de la terre ou du ciel ont leurs dominations sur les parents qui nous laissent, ou que nous laissons après nous; comme sur les héritages que nous recevons des uns et que nous transférons aux autres.

Or, de ces trois maisons, l’angle est toujours la plus avantageuse; la succédente, toujours plus conforme à la nature de l’angle qui la précède, et la cadente toujours plus éloignée de la propre signification de l’angle, comme il se voit dans le précèdent chapitre. Les raisons en sont apparentes. La seconde maison, qui est succédente à la première par la droite et naturelle succession des signes, c’est-à-dire par le propre et naturel mouvement des planètes d’occident en orient, a sa domination sur les biens ou les commodités qui doivent accompagner la vie. Et la douzième, qui est la maison cadente de cet angle par le mouvement contraire et violent du premier mobile, a sa signification sur les maux ou les incommodités qui ne lui sont que trop fréquentes. Nous trouverons ailleurs la même convenance. La onzième maison, qui est succédente à la dixième, a sa domination sur les amis qui nous poussent et nous soutiennent dans les honneurs, les emplois et la gloire, et la neuvième qui est la maison cadente de cet angle a sa signification sur les occasions qui les affaiblissent ou qui nous en éloignent.

Nous trouverons le semblable en nous ressouvenant des propriétés de l’angle d’occident car la huitième maison, qui en est la succédente, a sa domination sur le genre de mort qui accompagne ordinairement les procès, les rebellions et les crimes. Et la sixième, qui en est la maison cadente, a sa signification sur les choses qui nous éloignent de tant de troubles et de traverses. Finalement, la cinquième maison, qui est la succédente de la quatrième, a sa domination sur les propres enfants de la personne, qui emportent son héritage par la droite et naturelle succession. Et la troisième, qui est la maison cadente de cet angle, a sa signification sur les frères ou les parents en ligne collatérale, pour être ses héritiers, outre sa volonté, au défaut des autres.

Nous pourrions ajouter, en faveur de ces raisonnements, les bons ou les mauvais aspects des maisons entre elles, sur quoi Ptolémée, mais plus encore les nouveaux auteurs, seraient apparemment fondés en la curieuse recherche de leurs convenances si les douze maisons de la figure avaient des rayons comme les sept planètes, lesquelles souvent de la neuvième regardent l’ascendant d’un carré et de la dixième d’un trine.

Mais comment nous serait-il possible de trouver les justes raisons dans la nature de tant d’expériences réitérées? L’astrologie n’est-elle pas au rang des sciences physiques et naturelles? A-t-elle d'autre avantage en ses fondements que les inductions et la conjecture? Et quel établissement peut-elle avoir d’une humaine faiblesse que la conformité des événements avec les causes recitées? Si le point et la ligne avaient de l’existence, les sciences mathématiques ne seraient point démonstratives et la connaissance de leurs conclusions précéderait en nous la connaissance de leurs principes. Il faut admirer en tout et partout les secrets de la providence : elle a formé dans les causes secondes la contrariété des mouvements afin que l'impression de leur variable démarche soit tous les changements que nous remarquons entre les hommes.

Or, c’est assez pour la nature et la qualité des douze maisons, et voyons la dignité que les auteurs leur ont donnée. Ils préfèrent les angles aux maisons succédentes et tiennent les maisons cadentes pour les dernières. Ils disent que l'ascendant est plus noble que le milieu-du-ciel et que la septième a plus de dignité que la quatrième. Ils ajoutent que la onzième et la neuvième sont préférables à la seconde et à. la cinquième, et que la troisième et la sixième ne sont pas si mauvaises que la huitième et la douzième. Mais nous trouverons encore mieux cet ordre de leur prérogative en les confirmant de la sorte : la première, ou ascendant, la dixième, ou milieu du ciel, la septième, ou angle d’occident, la onzième, succédente à l'angle du milieu du ciel, la neuvième, cadente du même, la quatrième, ou angle de la Terre, la seconde, succédente à l'angle d’orient, la cinquième, succédente à la quatrième, la troisième, cadente de la même, la sixième, cadente de l'angle d’occident, la huitième, succédente du même et la douzième, cadente de la première maison de la figure.

Or, ces dignités ne sont pas les seules à considérer dans les maisons célestes, elles reçoivent aussi de l’avantage par les signes du zodiaque qui les occupent si les bonnes planètes en sont les seigneurs et au contraire, conformément à la doctrine de Ptolémée et des anciens Chaldéens, comme il se voit dans le troisième livre de « L'histoire universelle » de Diodore, où l’on remarque assez clairement que ces philosophes babyloniens avaient accoutumé de constituer les planètes pour seigneurs des signes du zodiaque, des maisons de la figure, de l’ascendant des naissances et de la géniture des personnes. Les Latins et les Grecs les appellent encore dispositeurs, et les Arabes almuten, d’autant que si les signes de Jupiter, c’est-à-dire le Sagittaire et les Poissons, occupent la dixième maison de la figure, nous dirons que Jupiter est le seigneur ou le dispositeur du milieu du ciel, et si les signes de Vénus, c’est-à-dire le Taureau ou les Balances, sont en la pointe de la première, nous dirons que Vénus est dame de l’ascendant, le même étant des autres signes et des autres planètes.

Davantage, nous disons qu’une planète est seigneur ou dispositeur d’une autre planète lorsque cette autre planète est dans les signes ou les dignités du premier, comme si le soleil était dans le signe des Gémeaux, Mercure serait son seigneur ou son dispositeur, et si la lune était dans le signe du Lion, le soleil serait le seigneur ou le dispositeur de la lune. Cette considération est de grand poids dans la science des jugements des astres et, comme entre les planètes, la dignité des maisons est plus excellente que la dignité des exaltations, il est apparent que le premier seigneur d’un signe est la planète qui a sa maison dans le signe, et le second seigneur la planète qui a son exaltation dans le même, comme ci le Bélier est en l’ascendant, nous dirons que Mars en sera le seigneur, et le soleil le second seigneur en puissance, Mars à cause de la dignité de maison qu’il a dans le signe du Bélier et le soleil pour son exaltation dans le même signe, le même étant du reste, car la lune sera dame de la onzième maison et Jupiter le second dispositeur après elle si le signe de l'Écrevisse en occupe la pointe.

Mais si dans l’ascendant ou le milieu du ciel d’une naissance, comme dans toutes les autres maisons de la figure, il se trouve une planète par présence, nous dirons alors que cette planète sera le seigneur principal de cet angle ou de cette maison, quoi qu’il soit sans dignité dans le signe où il est par sa présence. Comme si Saturne était au Sagittaire et dans la première maison de la figure, il serait le premier, ou le plus puissant, seigneur de l’ascendant, et Jupiter le second dispositeur en puissance, tant du même ascendant que de Saturne. Toutefois, si deux ou trois planètes se trouvaient ensemble dans une maison, elles en seraient toutes les seigneurs mais en différents degrés de puissance car le plus proche de la pointe, ou le plus excellent en dignités, emporterait la prérogative. Comme si le soleil et la lune étaient au Lion et dans la dixième, le soleil serait le seigneur du milieu du ciel préférablement à la lune à cause de la dignité de maison qu’il a dans le signe. Mais si la lune était proche de l’angle et le soleil fort éloigné du même, et toujours dans le Lion, la lune partagerait avec le soleil la puissance de ce domaine.

Finalement, le seigneur d’une géniture, ou l'almuten, suivant les Arabes, est la planète la plus puissante de toute la figure céleste; soit qu’il se trouve constitué dans les angles ou dans les autres maisons, soit qu’il se trouve sur la terre ou dessous, comme il se voit dans les auteurs de l’astrologie qui tous font un merveilleux état du seigneur de la figure, c’est-à-dire de la planète qui a le plus de puissance ou de prérogative. Or, comme la difficulté consiste dans le choix de celui qui est accompagné de toutes les conditions qui conviennent à cette puissance, nous parlerons à l’autre chapitre de la comparaison et de la valeur de toutes les dignités des planètes.

Chapitre VII - De la force ou faiblesse des planètes

Après avoir achevé de donner une entière et parfaite connaissance des quatre éléments de l’astrologie naturelle, il nous faut maintenant comme en tirer la quintessence pour savoir comment, et par quelle raison, une planète est puissante ou débile dans les termes communs de la science. Les apparences en sont toutes formelles. Nous avons dit ailleurs que la lumière des astres donnait la couleur, que la chaleur donnait l’action et la vie, que la nature, bonne ou mauvaise, donnait des qualités bonnes ou mauvaises, et que le mouvement donnait le mouvement et l'efficace dans les actions, comme dit Aristote en la « physionomie ». Il est donc évident que plus la lumière d’une planète sera belle et grande, plus la couleur sera belle et bonne, que plus la chaleur sera forte et puissante, plus la vie et l’action seront fermes ou vigoureuses, que plus la nature sera parfaite, plus les qualités seront parfaites et louables, et que plus le mouvement sera droit et vite, plus la démarche sera grave, prompte et fortunée.

Toutefois, c’est toujours le même astre, c’est toujours un corps simple, et c’est toujours la même cause naturelle et de foi invariable.

Mais pourquoi répéter ci souvent une même chose? N'avons-nous pas rapporté dans le chapitre de la variété des effets, et ailleurs, la raison de la diversité des évènements qui se voient dans le monde? Venons donc à notre sujet et voyons pourquoi Ptolémée, et les astrologues, appelle une planète heureuse ou malheureuse; puissante ou débile, fortunée ou infortunée, et bien ou mal disposée dans la figure. Ils disent premièrement qu’une planète est heureuse et puissante lorsqu’elle est en ses dignités de maison ou d’exaltation dans les signes du zodiaque, lorsqu’elle est dans les angles, ou les bonnes maisons de la figure, lorsqu’elle est conjointe ou en bon aspect des bonnes planètes, lorsqu’elle est orientale au respect du soleil et augmentée en lumière, lorsqu’elle est directe ou vite en son mouvement, lorsqu’elle est conjointe par corps à une des étoiles fixes royales, et lorsqu’elle est libre de combustion et loin des rayons du globe solaire, suivant nos précédentes remarques. Mais pour mieux assurer le jugement en rémunération de tous ces avantages, nous les ordonnerons par degrés suivant l'opinion la plus convenable.

Une planète dans sa maison a cinq degrés de force, en son exaltation quatre, et en sa triplicité deux, en réception de maison quatre degrés de force, et en réception d’exaltation trois. Dans la première maison de la figure et la dixième, cinq degrés de force, dans la septième, la quatrième, la onzième et la neuvième quatre, dans la seconde et la cinquième trois, et dans la troisième deux. En conjonction partile de Jupiter et de Vénus cinq degrés de force, en conjonction platique quatre, en trine partil des mêmes quatre, en trine platic trois, en sextil partil trois et en sextil platic deux. Conjointe aux étoiles de la première grandeur qui sont dans le zodiaque, comme Aldébaran, le Roitelet, Azimec et Antarès, cinq degrés de force, directe en son mouvement quatre, et vite trois, loin des rayons et libre de combustion cinq degrés de force, les trois supérieures orientales du soleil trois, et les deux planètes inférieures en leur élongation trois. Mais la lune a de plus en son particulier, de la conjonction au premier quartier deux degrés de force, du premier quartier a l’opposition trois, de l’opposition au dernier quartier deux degrés de faiblesse et du dernier quartier à la conjonction trois.

Tout au contraire, nous appelons une planète malheureuse ou débile lorsqu’elle est en son détriment ou en sa chute dans les signes du zodiaque, lorsqu’elle est dans les maisons cadentes, ou abjectes de la figure, lorsqu’elle est conjointe ou en mauvais aspect des mauvaises planètes, lorsqu’elle est occidentale au respect du soleil et diminuée en lumière, lorsqu’elle est rétrograde ou tardive en son mouvement, lorsqu’elle est brûlée du soleil ou sous les rayons, et lorsqu’elle est pèlerine ou sans dignité propre. Car une planète en son détriment a cinq degrés de faiblesse, en la chute quatre, et pèlerine ou sans dignité deux. Dans la douzième maison de la figure, cinq degrés de faiblesse, dans la huitième quatre, et dans la sixième trois. En conjonction partile de Saturne ou de Mars cinq degrés de faiblesse, et en conjonction platique quatre. En opposition partile des mêmes quatre, en opposition platique trois, et en carré partil trois et platic deux, combuste ou brûlé cinq degrés de faiblesse, et oppressée des rayons quatre, rétrograde en son mouvement quatre degrés de faiblesse, et tardive trois. Et enfin les trois supérieures occidentales au respect du soleil et diminuées en lumière, trois degrés de faiblesse.

Or, c’est ainsi que le prudent astrologue trouvera si une planète est bien ou mal disposée dans la figure. Car posant d’un côté tous les degrés de force, et de l’autre tous les degrés de faiblesse qui en auront été dûment colligés, il verra de combien les uns surpasseront les autres. Il dira que la planète est heureuse, puissante et fortunée, si les degrés de force surpassent de beaucoup les degrés de faiblesse. Mais si les degrés de faiblesse surpassent de beaucoup les degrés de force, il dira qu’elle est infortunée, malheureuse et débile. Davantage, il connaitra laquelle de toutes les planètes sera la plus puissante et la plus heureuse, pour être almuten de la géniture suivant les Arabes, par la comparaison de tous leurs degrés de force parce que celui qui en aura le plus méritera cet avantage. C’est une considération de grand poids dans la science des astres. Ptolémée nous la recommande fort dans le second du « Quadripartite » et Cardan, comme tous les Arabes, l’estime un des principaux fondements de la science,

Mais quelle est cette voix que j’entends d’un philosophe importun et enflé d’une médiocre science? Il professe de ne vouloir rien croire que ce qu’il pourra toucher. Il ne peut élever son esprit dans le ciel, il veut que les astres s’abaissent pour lui rendre compte. Il n’estime pas plus les sept planètes que sept chandelles allumées, ayant de la peine à pardonner à Moïse de les avoir ainsi colloquées dans le saint Temple. Il voudrait, comme un second Esdras, que l’ange lui rendît raison des secrets de la providence. Il est adorateur des arguments de sa logique, il méprise l’expérience, que Galien même a confessé pour la maitresse de sa science, et il se fonde sur la négative, parce qu’il a plutôt fait de nier une connaissance que de l'apprendre. Il ne révère que son jugement, il dédaigne l’imagination des uns et il se moque de la mémoire des autres, sans considérer que le premier n’est qu’une opération qui résulte de la faculté des deux autres puisque du souvenir des choses passées et de la contemplation des choses présentes se forme le jugement des choses futures.

Il est toutefois raisonnable de faire un effort pour le satisfaire. Les auteurs qui nous ont précédés ont manqué de cette différence, ils ont développé seulement les doutes les plus ordinaires et, sans s’amuser à tant de raisonnements, ils se sont principalement fondés sur l’expérience. Comment se fait-il donc que Mars étant heureux et bien disposé donne le courage avec la hardiesse, et qu’étant malheureux et faible, il donne la timidité avec l’audace? Tous les hommes, comme les animaux, ont naturellement le désir de vivre et la crainte de mourir, ces deux passions accompagnent toujours le présent que la nature nous fait de la vie : la première nous rend très soigneux à la conserver et l’autre nous enseigne à fuir les dangers qui la menacent de ruine. Végèce dit que la nature fait peu d’hommes vaillants et c’est dans la chaleur propre du cœur où réside, en tout animal, la vie. S’il est fortifié par la présence de Mars, puissant et heureux dans l’ascendant, il doublera sa chaleur naturelle par le concours de la grande chaleur de Mars, et il aura plus de courage et de hardiesse. Mais si la même planète se trouve débile et faible, la chaleur médiocre, jointe à la chaleur naturelle du cœur, ne donnera qu’une faible hardiesse, que nous appelons audace. Platon appelle tel homme hardi de peur, comme il se voit dans Plutarque, en la « Vie de Pélopidas », et les Latins le nomment timide audacieux parce que, comme nous avons dit, la chaleur médiocre de Mars ne peut ajouter que l’audace à la timidité naturelle des hommes. Qu’ajouterons-nous de Saturne? Ne rend-il pas la face claire brune lorsqu’il est oriental et augmenté de lumière? Et quand il est occidental, ou infortuné, ne lui donne-t-il pas, comme il est alors, la couleur noire, ou plombée? Mais comment pourrons-nous comprendre que le même Saturne donne tantôt la persévérance louable et tantôt le désespoir lâche? Ces deux passions ne procèdent-elles pas de la confiance? Si elle est forte, elle engendre l’honnête persévérance, et si elle est faible, elle produit la nonchalance abandonnée. Le pesant mouvement de Saturne et sa nature sèche, comme nous avons dit ailleurs, rendent les choses fermes, dures et permanentes, S’il est heureux et bien disposé dans l’ascendant, il ajoute par sa plus grande chaleur, le courage à la confiance, pour la rendre invincible comme celle de Caton ? Et s’il est infortuné, et sa chaleur débile, il ne peut soutenir cette belle vertu par faute de courage. Enfin, le plus ou le moins de chaleur dans les planètes donne le plus ou le moins de chaleur dans le cœur de l’homme, le faisant d’une part courageux et vaillant, et de l’autre craintif et timide.

Mais pourquoi nous faut-il engager si avant dans la morale? Ne serait-il pas meilleur de nous en remettre aux livres du grand Aristote? Et puisque Galien a trouvé dans le mélange du tempérament des hommes toutes leurs qualités, leurs passions et leurs vices, ne sera-t-il pas loisible à l’astrologie, qui a ses causes dans la nature comme la médecine, de nous manifester les mêmes choses? Si nous étions autant ambitieux d’un grand ouvrage, que nous sommes accusés de ménager les paroles, nous aurions une belle occasion de nous étendre sur le particulier de toutes ces influences. Et toutefois, comme nous estimons que c’est assez pour les personnes intelligentes, nous suivrons plutôt les maximes que nous avons d’abréger, que la vanité d’un raisonnement qui tombe souvent en des longueurs importunes.

Chapitre VIII - Des régions de la terre

Comme les parties du globe terrestre reçoivent également la chaleur du soleil et les influences des astres, il ne faut pas nous étonner si tant de philosophes ont essayé à les distinguer en des régions qui eussent des qualités propres et différentes. Les politiques et les géographes ne se sont pas négligés en ce dessein et les auteurs de l’astrologie, de toutes nations, s'y sont encore plus efforcés que les autres. Dès qu’un homme est en réputation, dit Salluste en la « Guerre Jugurthine », tout ce qu’il fait est merveilleux, tout ce qu’il dit sont des oracles. Ce bonheur a suivi la gloire de Ptolémée, mais plutôt ce malheur, touchant la division de la terre, car n’ayant lui-même rien fait en cette distribution qui ne soit rempli d’erreur, il n’a pas laissé d’être imité de tout le monde. Toutefois, il est en quelque façon excusable, comme tous les auteurs Arabes qui ont écrit devant l’année 1500. Mais comment peut-on sauver l'honneur de Cardan et des autres professeurs de la science en cette rencontre, depuis la navigation des Espagnols dans les Indes orientales et occidentales?

N’ont-ils pas su par l’expérience de tant de voyages que la zone torride était habitée, contre l’opinion des anciens, et que la grande mer Atlantique n’était point la dernière borne de la nature? Ne pouvaient-ils pas reformer ce quadrant merveilleux de la terre habitable que Ptolémée a rempli de tant de triangles pour le soumettre aux influences des triplicités et des planètes comme il se voit dans le second livre du « Quadripartite » et dans tous les ouvrages des astrologues charmés d’un si bel artifice? Si Ptolémée donne de certaines qualités à la Perse pour être à l’orient de son Égypte, d’autres conditions à l’Espagne pour être à son occident, les Américains de la Floride n’auront-ils pas raison d’attribuer à la même Espagne les mêmes qualités que Ptolémée veut concéder à la Perse ? C’est un argument infaillible, une même région ne peut avoir à même temps deux qualités si contraires. Mais pourquoi nous arrêter à des raisonnements qui rempliraient un autre volume si nous étions dans le dessein d’autoriser les changements que nous apporterons dans la science?

Or, c’est assez pour les hommes intelligents : voyons la naturelle division du globe terrestre et laissons les termes d’orient et d’occident, qui ne servent qu’aux historiens et aux géographes. Disons que l’équateur est un grand cercle de 360 degrés, que nous appelons sur la terre la ligne équinoxiale, que le nombre de ces degrés est la mesure des longitudes, à les compter d’occident en orient, comme a fait Ptolémée, et que les commencements de ces longitudes terrestres sont divers, selon le choix des auteurs ou des nations qui les ont considérées. Le premier méridien des anciens, et de Ptolémée, est celui des Îles fortunées, ou de la Grande Canarie. Le premier méridien des Arabes mahométans, après la conquête de L’Espagne, est celui de Tolède. Le premier méridien des cartes universelles depuis la découverte du nouveau monde est celui de l’île Saint Michel entre les Açores. Le premier méridien des géographes, qui tiennent la régulière déclinaison de l’aiguille aimantée, est celui de l’île de Coruo, aux même Açores. Et le premier méridien des plus récents est celui de la Ténériffe, l’une des Îles fortunées, à cause que de la rocque de Sintra, au Portugal, que les anciens appelaient le promontoire de la lune, on peut apercevoir le pic ou la haute montagne de cette île. Toutefois, le premier méridien des Espagnols pour les longitudes de l’Amérique est celui, de Tolède, en les mesurant d’orient en occident, au contraire des autres.

Après l’établissement du cercle de l’équateur qui partage le globe de la terre en deux égales parties et qui est également éloigné des deux pôles arctique et antarctique, suivent les latitudes des régions ou des villes, qui arrivent à quatre-vingt-dix degrés, à les mesurer de l’équateur jusqu’au pôle. Les latitudes septentrionales sont celles qui sont du côté du pôle arctique et les latitudes méridionales sont celles qui sont du côté du pôle antarctique. Les anciens ont divisé tout l’intervalle de l’un à l’autre pôle en cinq zones de qualités différentes : la zone torride, les deux zones tempérées et les deux zones froides : la première comprise entre les deux cercles tropiques, qui bornent la course du soleil, les deux secondes, comprises entre les cercles tropiques, et les deux cercles polaires et les deux dernières, contenues dans les mêmes cercles polaires, qui ont pour centre les pôles. Ils tenaient que la zone torride était inhabitée à cause de la brûlante chaleur du soleil qui la rôtissait, que les deux zones tempérées étaient habitées et fécondes à cause de la chaleur modérée du même soleil, et que les deux zones froides étaient stériles et déshabitées, par l’horreur du froid et de la glace.

Mais combien l’expérience est toujours plus forte que le raisonnement des hommes? Ne le voyons-nous pas depuis tant de provinces découvertes? Christophe Colomb, de la côte de Gènes, trouva les îles Lucayes en l’année 1492, la grande Île espagnole en 1493, la côte de Paria ou de Caraque, en l’Amérique méridionale, en 1498 et la terre ferme du royaume de Mexique en 1503, et 1508 où mourut ce grand personnage. Vasco de Gama, portugais, fut le premier à doubler le cap de Bonne Espérance en 1497 et fut le premier vice-roi dans l'Inde orientale. Álvares de Cabral, de même nation et vice-roi des mêmes Indes, à son retour au Portugal, toucha la côte du Brésil en l’Amérique, à Porto Seguro, en 1499 et Amerigo Vespucci, florentin, avec Pinson, rangèrent en la même année toute la côte de cette Amérique, depuis le cap du Nord jusqu’à celui des Voiles, Diego de Velasquez, en 1507, conquit la grande île de Cuba, Hernan Cortés, en 1521, le grand empire de Mexique, et Francisco Pizarro, en 1533, pénétra le premier au Pérou et en assujettit après tout le royaume. Alphonse Albuquerque prit la fameuse ville de Goa en 1510 et ensuite la grande ville de Malacca, qui nous ouvrit la longue navigation de la Chine.

Mais pourquoi nous engager si avant dans l’histoire, revenons à l’astrologie. Comment ferons-nous pour ranger tant de grandes et de riches provinces sous la domination des signes et des planètes? Ptolémée, Cardan et tous les auteurs de la science ne les ont-ils pas occupés au gouvernement de l’ancien monde? Et sans faire tort à leur réputation, pouvons-nous changer leur doctrine en cette rencontre? C’est toutefois un mal sans remède : il nous faut renoncer à la connaissance de toutes ces causes générales, il nous faut attendre de l’expérience, et non point de la raison, le secret de ses influences universelles et, en attendant, les rapporter à la souveraine providence, qui régit et conduit toutes choses, ayant voulu donner à certaines régions des propriétés singulières, comme en Arabie de produire l'encens, la myrrhe et l'ébène, à la Perse le bézoard, à la Judée et à l’Égypte le baume précieux, à l’île de Bahreïn du sein Persique les perles de grosseur et de rondeur admirable, que les anciens appelaient uniones, à la côte de Malabar de l’inde orientale le poivre, qui ne se trouve point ailleurs, à l’île de Ceylan la cannelle en abondance, au cap de Commorin la multitude des perles qui se portent partout le monde, à la roche de Colconde, au royaume de Narsingue les diamants de grandeur et de prix inestimables, à l’île de Sumatra le gingembre, aux îles Banda le macis, ou la noix muscade, à la Chine le musc et la porcelaine, aux Moluques le clou de girofle, à l'île de Lemnos la terre sigillée, à l'île de Chyos le mastic, à la mer l'ambre et le corail, et à l’Amérique l'or et l'argent en abondance, comme les fleurs et les fruits tout le long de l’année.

Or, ces difficultés ne regardent pas seulement les provinces, elles ne sont pas moins considérables pour les villes. Il ne faut pas nous arrêter à ce que nous en trouvons dans les auteurs, c'est une expérience trop dangereuse, comme dit Hippocrate, de se fonder sur de légères opinions et il ne faut pas, en des choses de telle importance, se confier à des règles si mal établies. Il faut par de justes observations trouver le juste commencement d’une ville, pour en dresser la figure céleste et en juger comme d’une naissance. Ptolémée et Cardan se réduisent à cette sentence et nous voyons dans la vie de Romulus en Plutarque que Tarrutius, familier de Varron, le plus savant des romains, avait trouvé le temps de la première fondation de Rome, par les divers accidents de la fortune. Nous voyons aussi dans Garcée une infinité de figures dressées pour le commencement de plusieurs villes mais quel est ce prudent astrologue qui voudra se fier à de telles recherches? Et néanmoins, afin de ne paraitre pas si contraire aux communes opinions des auteurs de la science, nous ajouterons, comme eux, les signes du zodiaque qui président à chaque ville de la terre, distribuées de la sorte :

Pour le Bélier : Naples, Capoue, Ancône, Florence, Ferrare, Vérone, Padoue, Vicence, Syracuse, Bergame, Marseille, Lindau, Utrecht, Brunswick, Cracovie et Raguse.
Pour le Taureau : Bologne, Sienne, Mantoue, Tarente, Palerme, Pérouse, Parme, Brescia, Tergeste, Lucerne, Nancy, Metz, Herbipolis, Leipzig, Poznań, Gnesne et Karlstadt,
Pour les Gémeaux : Cordoue, Turin, Cesena, Viterbe, Rhêgion, Verceil, Louvain, Bruges, Londres, Mayence, Herford, Bamberg et  Nuremberg,
Pour l’Écrevisse : Constantinople, Tunis, Venise, Milan, Gènes, Pise, Lucques, Berne, Trèves, Lubeck, Magdebourg, Wittemberg, Görlitz et Saint-André en Écosse
Pour le Lion : Damas, Rome, Crémone, Ravenne, Ulm, Coblence, Prague et Linz
Pour la Vierge : Corinthe, Jérusalem, Cumes, Paris, Lyon, Toulouse, Heidelberg, Breslau, Bâle, Pavie, Novare, Arezzo et
Pour les Balances : Lisbonne, Arles, Anvers, Avignon, Stockholm, Francfort sur le Main, Spire, Strasbourg, Heilbronn, Hall en Souabe, Fribourg-en-Brisgau, Vienne en Autriche, Plaisance et Laon
Pour le Scorpion : Alger, Valence en Espagne, Trébizonde, Urbin, Pistoia, Trévise, Messine, Vienne en France, Eichstätt, Munich, Francfort sur l’Oder, Gand en Flandres.
Pour le Sagittaire : Tolède, Modène, Volterra, Narbonne, Carpentras, Cologne, Stuttgart, Rotenbourg, Buda et Cassouie.
Pour le Capricorne : Clèves, Juliers, Mons, Malines, Oxford, Vilne, Brandebourg, Augsbourg, Constance, Tortone et Faenza.
Pour le Verseau : Hambourg, Brême, Casale, Pesaro, Trente, Salzbourg et Ingolstadt.
Pour les Poissons : Alexandrie, Séville, Compostelle, Parence, Rouen, Worms et Ratisbonne.

Chapitre IX - Du nombre de la nature des vents

C’est encore une considération des plus importantes dans l’astrologie de connaitre les causes particulières ou générales des vents qui apportent tant de changement dans les saisons de l’année. Nous ne parlons point des causes physiques et naturelles, comme a fait Cardan en son commentaire du second livre du "Quadripartite" et tous les auteurs qui ont écrit après lui de cette science. Ils traitent cette matière comme philosophes ou médecins; ils prennent dans les « Météores » d’Aristote et dans les « Aphorismes » d’Hippocrate tout ce qu’ils nous en rapportent et au lieu de s’arrêter dans les bornes de l’astrologie, comme a fait Ptolémée, ils s’écartent un peu trop en cet endroit de la science. Ils feraient mieux de nous enseigner que la vapeur humide et subtile de la mer est aussi bien la cause matérielle des vents que l’exhalaison fort chaude et sèche qui sort de la terre. Ne voyons-nous pas que ceux qui viennent du côté de la mer amollissent et que ceux qui viennent du coté de la terre dessèchent? Ils poursuivent avec raison que la lumière des astres élève toutes ces vapeurs ou exhalaisons et que la froideur de la suprême région de l’air les repousse contre les autres qui les suivent et ils ajoutent avec assez de fondement que du combat de cette rencontre s’engendre le mouvement circulaire de cet air agité à l’entour du globe terrestre.

Toutefois, comment voulons-nous alléguer Ptolémée puisque notre dessein n’est point encore le suivre en cette matière? N’a-t-il pas donné des causes générales, et toujours semblables, pour les vents, comme il a fait en la distribution des provinces de la terre ? Il emploie toujours les influences des trigones ou des triplicités, et n’ayant pu prévenir la connaissance de tant de variétés qui se trouvent dans les vents des régions nouvellement découvertes, il nous a renfermés comme ailleurs la puissance des signes et des planètes dans les bornes de l’ancien monde. Il nous faut confesser en cet endroit notre faiblesse, il faut que la vérité des expériences confonde la vanité de notre raisonnement et il nous faut persuader plus de louange d’une science modeste que d’une orientation mal fondée. C’est assez, comme nous avons déjà dit, qu’une pensée soit une fois dans un livre pour être après dans tous les autres. Nous en voyons l’expérience dans tous les ouvrages des astrologues, ce que Ptolémée ou Cardan ont une fois écrit, vous le trouverez toujours dans les auteurs Arabes ou modernes, et néanmoins ces derniers sont moins excusables que les autres, à cause de la nouvelle découverte des Indes orientales et occidentales. Comment trouveront-ils dans la doctrine des triplicités les causes naturelles de tant d’expériences contraires? Les golfes occidentaux de l’Afrique depuis la Guinée jusqu’au cap de Bonne Esperance sont dans un calme perpétuel et si profond que les matelots s’en éloignent par la crainte d’être arrêtés dans la bonace de cette mer Éthiopique. Au contraire du cap de Bonne Espérance, de la terre de Natal, du Banc de la Juive et de la côte de Malindi, ou les tempêtes sont si furieuses, les orages si violents et les naufrages si ordinaires qu’une infinité de galions et de navires très riches y ont misérablement péris avec toutes leurs charges. Depuis le mois de septembre jusqu’au mois de mars, le vent souffle continuellement et sans cesse, de l’archipelague Saint Laurent et de la côte de Malacca jusqu’au rivage oriental de l’Afrique. Et depuis le mois de mars jusqu’au mois de septembre de la même année, un vent contraire règne incessamment de l’une de ces côtes à l’autre, les Indiens appellent ces deux vents contraires les moussons parce qu’ils sont dans les mêmes Indes les deux saisons de l’année, l’une toujours pluvieuse comme l’hiver et l’autre toujours sereine et fort chaude. Toute la mer des Indes est ordinairement sans orage, mais le Golfe d’Aynan proche de la Chine, est tellement diffamé par les naufrages que les matelots en appréhendent seulement la vue.

Des îles Canaries et du Cap Vert jusqu’aux îles Lucayes et Antilles, comme du Cap du nord jusqu’à celui des Voiles, au long du golfe de l’Amérique méridionale, souffle toujours et continuellement un vent oriental et sans orage. Mais les vents sont fréquents et si soudains en passant du Cap Vert au Cap de Saint Augustin que les navires en soufrent de grands dommages, s’ils ne sont submergés par la tempête. Toute la mer du Nord ou Atlantique est assez douce et navigable mais le Golfe du Mexique est toujours rempli de tempêtes horribles et de naufrages inopinés à cause des vents qui viennent des îles espagnoles et de Cuba. Que dirons-nous des ouragans qui surviennent de trois en trois ans aux îles Caraïbes ou Antilles? C’est un vent le plus sérieux et le plus horrible de tous; il ne dure que 24 heures et fait le tour entier de chacune de ces îles, ruinant et détruisant toutes choses. Enfin, depuis la côte occidentale de l'Amérique jusqu’au Japon et aux îles Philippines règne toujours et sans cesse un vent oriental, fort doux et fort agréable pour les navigations du Mexique à la Chine, en telle sorte que, pour retourner de la Chine au Mexique, il faut gagner la côte septentrionale de l’Amérique pour y trouver des vents plus favorables.

Or, ces diversités ne sont pas seulement en la mer, elles ne sont pas moins fréquentes sur la terre. L’Égypte ne ressent jamais autres vents que les étésiens, qui soufflent du côté du nord non plus de quarante jours, et au temps que le soleil est environ le tropique de l’Écrevisse. Les grandes et fertiles campagnes de l’Amérique méridionale sont dans un calme perpétuel et n’ont autre vent que celui qui monte presque tous les jours contre la grande rivière des amazones. Depuis l’équinoxe du printemps jusqu’à celui de l'automne, un vent occidental et continuel empêche la navigation et arrose de pluies les royaumes de Goa, de Calicut et de Bijapur, et pendant les autres six mois de l’année, ces provinces jouissent d’un calme fort chaud, et d’un commerce fort libre. Le contraire étant des royaumes de Coromandel et de Narsingue, séparés des autres par la seule montagne des Gates. Enfin, pour abréger, ne voyons-nous pas la France toujours sujette à deux vents contraires, le sud-ouest qui arrose les campagnes de pluie en abondance, ou le nord-est qui les dessèche et les couvre en hiver de glace ?

Il faut donc que le prudent astrologue considère en les jugements universels la nature des vents de chaque province de la terre et au lieu de former ses conjectures sur le fondement des auteurs, sans épargner même Ptolémée, attribuer la cause des vents salutaires et féconds à Jupiter et à Vénus; la cause des vents dommageables et pernicieux à Saturne et à Mars, et la cause des vents soudains et variables à la lune et à Mercure. Car, comme les chaudes campagnes de l’Égypte reçoivent un grand avantage des vents septentrionaux qui les rafraichissent et les humectent, et que la France en reçoit de grands dommages par les horreurs du froid excessif et de la neige trop abondante, nous dirons, au regard de l’Égypte, que Jupiter engendre les vents du nord et Saturne, au regard de la France. Or, les vents, comme en toutes les autres nations de l’Europe, sont terminés au nombre de trente-deux, quoi que les anciens n’en formassent que vingt-quatre, comme il se voit dans tous les auteurs de l’astrologie, de la sphère et de la géographie, avec plus de curiosité que d’utilité pour la science des astres.

Les quatre vents principaux, et qui procèdent des quatre angles du monde, sont le nord, ou le septentrional, l’est, ou l’oriental; le sud, ou le méridional, et l’ouest, ou l’occidental, que les matelots de la mer Méditerranée appellent en leurs cartes marines la Tramontane, le Levant, le midi et le Ponant, du nom et de la nature de ces quatre premiers, nous en formons quatre autres en égale distance. Le nord-est, entre le nord et l’est, le sud-est, entre l’est et le sud, le sud-ouest, entre le sud et l’ouest et le nord-ouest, entre l’ouest et le nord, que les autres nomment le Grec, le Syroc, le Labèche et le mistral, pour en faire ensemble le nombre de huit pour les vents principaux, accompagnés de huit latéraux, et de seize collatéraux de moindre conséquence, comme il se voit dans les compas marins et dans les boussoles. Mais quelle est la nature des quatre vents principaux, au regard de l’Europe? Le nord apporte la froideur, le sud nous donne la chaleur, l’est nous apporte la sécheresse, et l’ouest nous donne l’humidité, parce que le premier nous vient du côté de la zone glacée, le second des campagnes brûlantes de l’Afrique, le troisième des grandes terres de l’Asie, et le dernier de la vaste mer Atlantique.

Tellement que nous pouvons dire en faveur de l’Europe, et des provinces de l’Asie de la même zone tempérée, que les vents septentrionaux appartiennent à Saturne, les méridionaux à Mars, les orientaux à Jupiter et les occidentaux à Vénus. Que tous ces vents sont plus forts, ou plus violents, plus salutaires, ou plus bénins et plus doux, ou plus agréables, selon que la planète qui en est le significateur se trouve accompagnée des bons ou des mauvais astres comme pareillement des étoiles fixes de la première et de la seconde grandeur entre autres, dont la nature et les qualités sont déjà notées en cet ouvrage.

Mais c’est assez pour la générale considération des vents, il ne faut plus en confier les causes, soit universelles ou particulières, à la nature des trigones ou des triplicités, ni aux planètes qui les dominent, suivant la commune doctrine. Les raisons que nous venons d’alléguer, quoique abrégées, ne sont que trop apparentes. Il nous serait inutile de grossir ce volume pour les étendre et laissant à chacun la liberté de les recevoir, ou de les rejeter, nous ne pouvons être blâmés d’enseigner ce que nous professons de tenir ou de croire.

Chapitre X - De la diverse condition des hommes

Nous avons dit ailleurs comment la variété des effets que les astres produisent sur la terre procédait de la variable disposition des sujets qui en reçoivent les influences. C’est une sentence commune, dans la philosophie, que le soleil et l'homme engendrent l’homme, et que la différence des climats engendra la différence qui est entre les hommes. Ceci toujours le même soleil, c’est toujours la même lumière, mais l’obliquité des rayons, et l’obliquité de la sphère, en sont les causes formelles. Ptolémée comme tous les anciens, en ont eu la connaissance. Ils nous enseignent que les peuples qui habitaient sous le soleil étaient de couleur brûlée, de nature adulte, d’esprit cauteleux et trop adonnés à l’amour et à la vengeance. Que les peuples fort éloignés du soleil étaient au contraire de couleur blanche, de nature chaude, d’esprit pesant et trop adonnés à la cruauté et à la gourmandise. Et que les peuples qui étaient en la zone tempérée étaient mélangés de ces deux conditions suivant qu’ils sont, ou plus proches des uns, ou plus voisins des autres. Car ceux qui habitent depuis le tropique jusqu’au quarante-sixième degré de latitude sont plus ingénieux, plus humains et plus dociles que ceux qui naissent outre ce parallèle notable.

C’est une considération nouvelle et remarquable, le père Campanelle, au second livre de son « Astrologie » ne la touche que trop légèrement. Il dit seulement que dans les provinces qui sont au-delà du quarante sixième degré de latitude, les pères n’aiment point leurs enfants. Il s'arrête à cet aphorisme, et sans appuyer cette opinion d’aucun raisonnement, il ne fait aucune impression dans l'âme de ceux qui le lisent. Nous avions passé par-dessus comme les autres, mais ayant découvert de nous-mêmes ce changement pour très véritable, nous ne voulons pas en retenir la connaissance. Nous avons trouvé depuis que la nouvelle borne de cet auteur était la borne de l'Italie et de l’Allemagne, du côté de l’Istrie et du Frioul, qui la terminent à quarante six degrés de latitude, et dans les commentaires de César que les nations méridionales des gaules étaient plus civiles et plus raisonnables que les septentrionales. On doit employer le même argument dans les autres régions qui sont coupées par ce parallèle, comme la France, et qui passe environ les villes de Genève, de Limoges et de la Rochelle;

Or, toutes ces différences procèdent plutôt des causes naturelles que des causes astrologiques, ce sont plutôt des effets de la chaleur du soleil que des effets de l'influence des astres, ce sont des variétés trop générales et qui souffrent de grands changements, sans changer de climats. Les hommes qui habitent les villes sont plus ingénieux et plus polis, ceux qui vivent à la campagne sont plus robustes et plus vaillants, ceux qui demeurent dans les montagnes sont plus cruels et plus farouches, et ceux qui passent leur vie dans les forêts sont plus rudes et plus grossiers que les autres. Davantage, les nations qui habitent les plaines grandes et fertiles sont meilleures dans la cavalerie à cause de l’abondance des chevaux de leur contrée, et celles qui vivent en des régions plus sèches et plus montueuses sont meilleures pour l'infanterie comme il se voit des Thessaliens et des Athéniens, des Turcs et des Grecs, des Allemands et des Italiens, des Français septentrionaux et des français méridionaux, comme des Arabes et des Espagnols, sans parler des Perses, des Scythes et des Polonais, qui sont tous nés pour la cavalerie, ou des Chinois et des Indiens qui sont plus propres à l'infanterie, de même que les Américains, qui n’ont point de chevaux en leur contrée.

Ptolémée, Cardan et Campanelle ajoutent à toutes ces remarques que les nations qui habitent les îles ou les côtes de la mer sont meilleures pour la navigation, les armées navales et la marchandise, que les peuples qui demeurent dans les plaines fécondes sont meilleurs pour l’agriculture et l'économie, et que les hommes qui sont enfermés dans les villes sont les plus excellents pour les arts, les sciences et la politique.

Aristote est encore plus profond que tous les autres : il déclare en la « Morale » que la noblesse est plus propre aux vertus héroïques ou magnanimes et que les marchands ne doivent point être reçus dans les charges de la république à cause, dit ce grand philosophe, qu’ils sont accoutumés de tromper et de mentir dès la jeunesse. Le roi Philippe second, dit le Sage par les Espagnols, n'a-t-il pas recommandé à ses successeurs de ne mettre point dans l'administration des finances les personnes de basse condition, parce qu’ils, disait ce bon prince, savent mieux les moyens de dérober et de s'enrichir, que les nobles. Enfin Tite Live ne trouve-t-il pas de la différence entre les maisons dans une même ville? Il dit que la famille des Claudien était toujours contraire aux délibérations du peuple romain, et que la famille des Valérien lui était toujours favorable.

Il faut que le prudent et bon astrologue considère en ses jugements, soit généraux ou particuliers, les variétés de toutes ces circonstances. Il faut qu’il regarde que les mœurs des Allemands sont autres que les mœurs des Italiens, les mœurs des Français autres que les mœurs des Espagnols; et les mœurs des Anglais autres que les mœurs des Flamands, le même étant des autres nations de la terre. Il doit aussi considérer ces différences dans une même province. Que les mœurs des Écossais sont autres que les mœurs des Anglais, les mœurs des Normands autres que les mœurs des Provençaux et, pour le faire court, les mœurs des Piémontais, autres que les mœurs des peuples de Calabre. Mais pourquoi ne disons-nous pas les qualités de toutes ces nations, comme ont fait tous les auteurs de la science? C’est par la crainte de nous rendre suspect aux unes, ou trop ennemi des autres, si je découvrais la vérité de la connaissance que nous en avons, puisqu'il nous sera plus modeste en cette rencontre d'observer le silence.

Mais que ferons-nous en cet endroit des triplicités et des trigones si merveilleux de Ptolémée, de Cardan et de tous les professeurs de l’astrologie? Nous serait-il loisible d’en raisonner encore, comme nous avons fait dans le chapitre des régions de la terre? Ou s’il ne serait pas meilleur, selon mon sentiment, de ne reprendre pas si souvent tant de dignes et de savants personnages. Ils ont osé renfermer la nature humaine dans les bornes d’un quadrant sphérique du globe terrestre. Ils ont enclos la puissance des signes et de toutes les planètes dans la huitième partie de la terre. Ils ont donné les colonnes d'Hercule pour limites à tout le monde habité. Et sans avoir égard à la toute-puissance du créateur de l’univers, ils sont tombés dans l'erreur de Saint Augustin et de Boniface, évêque de Mayence ; le premier commandait à ses disciples de ne point croire les antipodes et le second chargeait d’anathèmes Salvius, évêque de Salzbourg en Bavière, qui en femait l’opinion dans le monde. Mais pourquoi. La coutume a telle plus de force que l'expérience? Cardan, et tous les imitateurs, ont suivi la doctrine des anciens touchant ces triplicités, depuis la navigation des Indes occidentales.

Peut-être que ce raisonnement ne plaira pas à tout le monde, la négative n’a point de force à persuader. Il faut des affirmations pour établir une science, il faut déclarer les causes célestes qui ont agité les nations de la terre, comme les fléaux de la mer, à ravager de tous côtés les provinces. Il faut marquer les signes et les planètes qui ont porté les Assyriens à former le grand empire de l’Asie, qui parait encore à présent sous le titre du royaume de Perse, qui ont armé les Romains pour assujettir tout le monde et remplir l'Europe de leurs lois, qui demeurent encore en vigueur, qui ont suscité les Arabes à semer l’impiété de Mahomet, les armes à la main, depuis les Indes jusqu’aux monts Pyrénées et qui ont enfin rendu aux Espagnols victorieux leurs régions et donné la conquête ensuite du nouveau monde. Ces influences sont à la vérité merveilleuses, il ne faut pas s’étonner si on les demande avec tant de curiosité, et vous en trouverez la réponse dans les auteurs Arabes, comme dans les modernes. Mais ni l’autorité de Ptolémée, ni la réputation de Cardan, sans parler des autres moins renommés, ne peuvent nous obliger à recevoir pour véritables les connaissances qu’ils nous en donnent.

Comment peuvent-ils savoir le commencement de chaque nation et le principe de chaque royaume pour en dresser les figures célestes? Ni la nature des nations, ni les accidents de leur fortune, ni les changements de leur empire ne peuvent nous conduire à cette connaissance. C’est un faible raisonnement de dire que Saturne préside sur les Juifs parce qu’ils célèbrent le jour du sabbat ou de cette planète que la Vierge domine sur les Chrétiens parce que dieu, auteur de leur nom, a été né d’une Vierge et que la lune dispose des mahométans, parce qu’ils ont le croissant pour enseigne.

Mais c’est trop abuser de la patience de ceux qui manient ce volume, c’est trop se jouer des auteurs qui ont écrit tant de sornettes; et c’est trop employer de paroles pour déclarer sur ce sujet nos pensées. Elles sont toutefois innocentes, elles ne forcent personne à les suivre, elles laissent la liberté d’admettre, ou de rejeter; et se tenant dans la modestie, elles aspirent à la vérité, plutôt qu’à la vanité des approbations ordinaires.

Chapitre XI - Des causes générales et particulières

Les évènements généraux et particuliers qui se voient dans le monde ont aussi leurs causes générales et particulières dans les orbes célestes. Les premières agissent sur les natures universelles et les secondes sur les natures singulières des choses. Le grand Ptolémée commence de nous en parler en la préface du second livre « des Jugements des astres » et la doctrine qu’il nous en donne ensuite est toujours imitée et souvent augmentée par les auteurs de la science. Il nous dit que les natures les plus faibles sont toujours sujettes aux natures les plus puissantes, et que les causes particulières sont toujours soumises aux causes universelles et partant qu’il nous est nécessaire d'entrer premièrement en la considération des universelles si nous voulons dignement arriver à la connaissance des particulières. Les raisons en sont apparentes et naturelles. Les singuliers événements de chaque personne dépendent en partie de la fortune générale des royaumes, des provinces ou des villes qu’elles habitent comme des universelles constitutions de l’année, des saisons et des nouvelles lunes,

S’il nous était possible de trouver les commencements des nations, des royaumes ou des villes, nous pourrions connaitre les causes générales qui les agitent, qui les élèvent ou qui les abaissent. Ptolémée, plus modeste que ses imitateurs, se rend à ces notables difficultés et, sans employer tant de paroles ni tant de raisonnements, il se contente de nous conseiller de prendre le milieu du ciel de la naissance des rois pour juger de la fortune des royaumes et le milieu du ciel de la naissance des gouverneurs pour prévoir la destinée des villes. Ce sont néanmoins des faibles remèdes ; l’astrologie qui a les principes dans la nature et dans le ciel, ne s’accommode pas avec des causes si légères. Il vaut mieux en cet endroit confesser notre ignorance, et ne pouvant trouver les véritables raisons dans les orbes célestes, de tant de changements, les rapporter à la toute-puissance du créateur de l’univers, qui transfère à sa volonté les nations de la terre, comme le roi Philippe transférait les peuples de la Grèce de l’une des villes à l’autre.

Cet ancien et fameux auteur serait plus raisonnable si au lieu du milieu du ciel, il prenait toutes la naissance des rois et des princes, des plus grands ministres de leurs conseils, des généraux qui commandent les armées et des hommes privés qui s’élèvent en puissance, en dignité et en richesses parce que du mélange de tant d’influences diverses et vigoureuses, procèdent dans les royaumes ou dans les provinces, l’abondance ou la disette, l’ordre ou les désordres, et le bonheur ou le malheur en général de tout le monde, d’autant que si le prince est heureux en richesses, ses peuples seront dans l’abondance, s’il est sujet à la pauvreté ils seront dans la disette, s’il est dissipateur ou prodigue, ils seront vexés ou mangés de la milice, et s’il est menacé de procès ou de débats, ils seront troublés et ruinés par les guerres ou les armées; Le même étant, ou plus ou moins, de la naissance des autres personnes que nous venons d’alléguer. C’est notre sentiment, c’est l’opinion que nous avons des causes particulières touchant les évènements généraux, revenons aux causes universelles et générales.

Nous avons déjà banni de notre science les triplicités ou les trigones célestes touchant les régions ou les peuples de la terre et il nous faut maintenant renoncer aux éclipses de Ptolémée aux grandes conjonctions de Cardan, et à tant de nouveautés introduites en la commune astrologie touchant la considération des causes universelles. Mais de quelle autorité voulons-nous apporter tant de reforme? Avons-nous assez de confiance pour renverser les opinions de tant de célèbres auteurs? Et pouvons-nous, sans nous précipiter dans le blâme, rejeter tant de pensées et de sentences? Serons-nous obligés de faire un volume pour nous défendre ou de garder maintenant le silence? Nous y penserons dans un autre loisir, il nous faut achever cet ouvrage, il nous faut satisfaire aux souhaits de tant de personnes illustres et de savants personnages qui nous en ont sollicité avec ardeur, notamment depuis la publication de ma « Théorie des planètes » et de nos « Tables astronomiques ». Et comment pourrions-nous refuser à l’astrologie ce que nous avons fait en faveur de l’astronomie?

Les envieux, ou plutôt les ennemis d’une si belle science, ne manquent pas d’apporter les arguments des causes générales, pour détruire la connaissance des particuliers évènements de chaque personne. Quelle assurance avons-nous, disent-ils, de notre santé, ou de la longueur de notre vie, par la confédération des singulières naissances puisque les évènements généraux, soit de guerre, de peste, de famine, ou de naufrage, ne laissent pas de nous arracher de la vie, ou de nous plonger dans les calamités et les misères? Tous ceux qui meurent dans une bataille, ou qui périssent dans un même naufrage, sont-ils chacun menacés par la violence de leurs génitures? Et tous ceux qui sont transférés d’une province dans une autre ont-ils en leur naissance particulière des marques d’un si grand voyage? Que dirons-nous pour répondre à ces notables difficultés ? Ptolémée n’a t il pas dit que les natures les plus faibles sont sujettes aux natures les plus puissantes, et que les causes générales surmontent les causes particulières? S’il nous faut abandonner l’astrologie pour n’en connaitre pas toutes les causes universelles, il nous faut encore renoncer à la médecine, qui nous promet à chacun la santé, sans prévoir les dangers des maladies contagieuses.

L’astrologie et la médecine sont au rang des sciences physiques et naturelles, elles sont fondées sur la conjecture et sur l’expérience, elles sont mélangées d’une infinité de causes qui agissent, qui pâtissent et qui concourent, et leurs effets sont variables et si divers que c’est trop à l’esprit humain d’en connaitre seulement une partie. Les matelots ne savent point la vraie déclinaison de l'aimant, ils ne laissent pas d’employer la calamite ou l’aiguille aimantée, les géomètres ne connaissent point la vraie mesure de la circonférence, ils ne laissent pas d’en supputer le cercle et le solide, et les médecins ne savent pas toujours la vraie cause des maladies, ils ne laissent pas d’en ordonner les remèdes. Tout ce qui tombe en notre puissance est sujet à cette imperfection. La nature nous a donné de la force pour réparer notre faiblesse et comme la gloire est toujours compagne des actions difficiles, il faut exciter notre entendement par la pointe d’un cœur vigoureux, et dire, comme Phaéton en Ovide, par les choses dont vous pensez m’épouvanter, vous me donnez plus de courage.

Mais de quel sentiment sommes-nous, touchant les causes universelles et générales? Nous avons déjà déclaré celles qui ne sont point de notre connaissance et nous exposerons maintenant celles qui peuvent servir à notre usage, comme la figure de l’année, les aspects des luminaires et la rencontre des planètes avec la lune. La première est accompagnée de la nature des saisons, la seconde comprend l’état des conjonctions, oppositions et quadratures de la lune, et la dernière considère le passage des planètes, soit entre elles ou avec les deux luminaires, comme pareillement avec les étoiles fixes les plus considérables. Mais il nous suffit en toutes ces opérations de dresser seulement une figure céleste pour le commencement de chaque année, ou le temps du retour du soleil, toujours en même point de l’écliptique. Ptolémée consent à notre opinion en cette rencontre et dans le neuvième chapitre du second livre du « Quadripartite », il choisit avec assez de circonstance l’équinoxe du printemps pour le vrai point des révolutions du soleil et pour le vrai commencement de nos années.

Or, comme il est assez difficile de trouver par les supputations astronomiques la juste ou véritable entrée du soleil dans le premier point du signe du Bélier, qui est l’équinoxe du printemps, comme nous avons dit ailleurs, nous sommes encore obligés de répéter en cet endroit l’admirable justesse de la table perpétuelle des révolutions du soleil que nous avions autrefois dressée, que le sieur Morin, professeur du Roi aux sciences mathématiques, a voulu mettre par préférence, et de notre consentement, en ses ouvrages et que nous avons pareillement insérée dans nos tables astronomiques afin que le prudent astrologue soit assuré du vrai temps du commencement de son année, en usant toutefois de la différence des méridiens et de la vraie équation du temps, du même volume. Car, autrement, il ne pourrait éviter de tomber dans l’erreur où tombent ordinairement les professeurs de la science à cause de la contrariété des auteurs qui ne s’accordent que rarement en ce point, comme il se voit par les supputations ordinaires, en l’usage des éphémérides, des tables subsidiaires de Kepler, de la table des révolutions de Tycho et de la nôtre, perpétuelle.

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Extrait du privilège du Roi

Par grâce et privilège du Roi donné à paris le 20 décembre 1659. Signé par le Roi en son conseil Le Poupet, il est permis à Antoine de Sommaville, marchand libraire à Paris, de faire imprimer un livre intitulé « l’Astrologie naturelle du Comte de Pagan » par tel imprimeur ou libraire qu’il voudra choisir, et défenses sont faites à tous autres libraires ou imprimeurs d’en vendre d’autre impression que de celle qu’aura fait faire ledit de Sommaville, ou autre ayant droit de lui, sous les peines mentionnées édites lettres qui sont, en vertu du présent extrait, tenues pour bien et dûment signifiées.
Les exemplaires ont été fournis.