DE LA FRATRIE À LA CONSTRUCTION RELATIONNELLE, par Irène ANDRIEU

Il existe une relation implicite entre la maison III et la maison VII. Le vécu de l’enfance avec les protagonistes traditionnels de la maison III, les frères et sœurs, en particulier, influence fortement les relations affectives et sociales avec les futurs partenaires de vie. Or, il apparaît dans la pratique astrologique que le comportement relationnel de l’enfance n’évolue pas nécessairement dans cette direction, et ne le fait le plus souvent que par des cheminements dérivés. Pour bien comprendre l’importance de la maison III, dans la formation intellectuelle et relationnelle du jeune enfant, nous évoquerons en premier lieu les fonctions mentales identifiées à celles des Gémeaux et de la Balance dans le zodiaque, donc, par extension, à celles de Mercure et de Vénus.


Je suis partie de l’idée qu’il existe une relation implicite entre la maison III et la maison VII. Le vécu de l’enfance avec les protagonistes traditionnels de la maison III, les frères et sœurs, en particulier, influence fortement les relations affectives et sociales avec les futurs partenaires de vie extérieurs au milieu familial.

Or, il apparaît dans la pratique astrologique que le comportement relationnel de l’enfance n’évolue pas nécessairement dans cette direction, et ne le fait le plus souvent que par des cheminements dérivés. Je vais donc vous demander de prêter un peu d’attention au raisonnement par lequel on arrive à cette conclusion.
Pour bien comprendre l’importance de la maison III, dans la formation intellectuelle et relationnelle du jeune enfant, il faut procéder en trois étapes. Nous évoquerons donc en premier lieu les fonctions mentales identifiées à celles des Gémeaux et de la Balance dans le zodiaque, donc par extension à celles de Mercure et de Vénus.

"Droit dans les yeux de l'enfance" par Etolane, sur Flickr
D'abord garder à l’esprit les fonctions physiques et psychiques universelles telles qu’elles s’élaborent dans la représentation du zodiaque, et en particulier ce qui caractérise l’être humain : sa propension à fonctionner sur le mode de la dualité

La première des dualités, celle qui divise la Roue de la Vie en deux parties est la partition entre les instruments de la Conscience et la psyché.
Ainsi la première partie du zodiaque, du Bélier à la Vierge relève des fonctions sensorielles (dans l’ordre vue, audition, odorat, goût, le contact kinesthésique, dont la synthèse est gérée par la conscience sensorielle dans le Lion.

L’alchimie des perceptions est également prise en charge par l’intelligence dans la Vierge pour engendrer l’activité mentale.
Dans la seconde partie du zodiaque, gérée par la Lune, s’élaborent les liens que le mental établit entre l’univers sensoriel, les connaissances et croyances accumulées dans nos tendances latentes (Taureau/Lion), et le monde extérieur. C’est ainsi que s’élabore la fonction de relation (toujours mentale), qui permet de devenir conscient de l’ensemble des contacts (Vierge) et des liens (Balance) que nous établissons avec nous-mêmes et avec le monde. Dans la Balance, le ressenti se colore également des sentiments, par le biais de la maîtrise de Vénus.


"Castor et Pollux" par Wallygsur FlickR
Dans les Gémeaux, la dualité fondamentale est symbolisée par la représentation des Dioscures, Castor et Pollux, fils jumeaux de Zeus et de Léda, reine de Sparte. L’un est fils du Ciel (donc par nature immortel), l’autre est humain, donc mortel et destiné à finir dans l’Hadès, les Enfers grecs.
Il est intéressant de constater l’impasse que les astrologues actuels ont entretenue sur le sujet. Dans la mythologie grecque, Léda, transformée en cygne (La Pureté initiale) par la volonté du dieu  couve en réalité des quadruplés, deux garçons et deux filles : Hélène (celle de la guerre de Troie) et Clytemnestre. L’une représente l’attirance engendrant la dispersion sensuelle, l’autre la légitimité, à l’image du rôle de Junon sur l’Olympe.
 
Il existe donc un couple féminin/masculin non légitime (dans le sens de non unitaire – mental/intellect – et un couple féminin/masculin légitime manifesté par la fonction de pensée et de l’intelligence, dans leur nature non identifiée. Pour distinguer la fonction unitaire, universelle de la fonction dualiste, colorée par les identifications, on écrit la première avec une majuscule.

Dans la Roue de la Vie, l’union de la Pensée et de l’Intelligence dans sa forme « pure » est représentée par la relation qui s’engendre entre l’énergie de la Balance et celle du Sagittaire sous la régence de Jupiter qui y gouverne le Dharma, symbolisée par la roue de la Loi à huit rayons : la Loi divine bien entendu. Cette même roue figure à l’envie dans tous les temples de Siva, au Tamil Nadu en Indes.
Quand on évoque le concept de relation, la plupart des personnes l’identifie spontanément aux manifestations des sentiments. La réalité est plus complexe. La relation peut être unitaire quand elle relève des fonctions de l’Esprit (sensation/traduction par l’intelligence), elle devient dualiste quand elle s’appuie sur le sentiment, les tendances latentes, le désir. A ce stade seulement s’élaborent la multiplicité de nos relations (au pluriel) au quotidien.

On s’interrogera ensuite sur la cohérence analogique existant ou non entre les signes du zodiaque et la succession des maisons

S’il existait une analogie stricte, cela voudrait dire qu’on doit assimiler les ressorts de la maison IV à ceux du Cancer, et les élaborations psychiques fortement réactionnelles de la maison VIII au monde du rêve et du désir du Scorpion. C’est ce que la plupart des astrologues font sans même y penser.
Or, si les signes, les maisons et les aspects fonctionnent tous sur la base commune des forces élémentaires, l’analogie n’est pas aussi évidente qu’on pourrait le croire.
Même si les maisons se succèdent en apparence en se superposant sur la structure zodiacale, les fondements de leurs attributs ne relèvent pas nécessairement de la même logique, mais de la façon dont le mental (ou l’ego) aborde la réalité extérieure.

En fait, le mental dispose d’une logique interne, basées sur l’enchaînement trinaire des éléments pour élaborer ses concepts sur la réalité du monde et manifester ses enchaînements réactionnels. Le mode personnel n’interviendra que dans un second temps pour colorer d’interprétation ce qui a été perçu, en fonction du contenu de la planète et de l’identification de ce contenu aux situations manifestées par le secteur de vie où se trouve cette dernière.

LA ROUE DU TEMPS

N’importe quel phénomène du vivant est accordé sur les trois qualités fondamentales de la matière : création, stabilité, transformation. C’est sur cette trilogie que repose l’enchaînement des quatre éléments constituant le substrat du monde visible : Feu, Terre, Air, Eau.
Les tibétains, dans la structure de la Roue du Temps la façon dont notre esprit conçoit le monde, comme dépendante de l’enchaînement des blocs de qualités élémentaires. C’est donc sur l’enchaînement successif de trois Feux (Esprit), trois Terre (mental), trois Air (intellect) et trois Eaux (émotion- réactions) qu’ils ont établi l’ordre de représentation des maisons.
Voyons comment cela se passe dans la structure zodiacale.

FEU


"Jouer avec le feu" par Astazou, sur Flickr
L’Esprit animé par le désir de s’incarner dans la manifestation (Bélier), est alourdi par tous les résidus mémoriels des expériences antérieures (Lion) en phase 2. Le Sagittaire en phase 3, représente l’expansion de l’esprit en quête de nouvelles expériences et la création d’un concept d’espace extérieur dans lequel réaliser ses projets.

TERRE

"Baked earth" par Brian, sur Flickr
Le mental s’empare ce qui a été perçu dans la séquence de Feu pour élaborer de nouvelles formes mentales (phase 4 de Capricorne). L’ancrage de ces formes dans la Terre fixe du Taureau vient enrichir sans cesse le réservoir mémoriel dans lequel l’ego puise ses repères pour se construire et entretenir son illusion de continuité.
A ce stade 5 de l’enchaînement élémentaire, les images ainsi engrangées entrent non seulement pour une bonne part dans la formation de notre image du monde, mais également des images de nous-mêmes.
La caractéristique de ces formes-mentales (ou formes-pensées) est d’être d’une grande fixité, tout comme le sont les croyances en général. L’analogie avec le Lion existe donc dès à présent : deux formes de conscience sensorielle et mentale s’activent l’une l’autre, l’inversion en carré entretenant une projection quasi automatique de ce qui est déjà connu sur ce qui est perçu. Notre capacité à vivre dans la réalité telle qu’elle est, est donc déjà fortement compromise.

Ce processus enrichit le contenu sur lequel repose l’activité mentale dans la Vierge (phase 6) en perpétuelle quête de nourriture à absorber, mais également à analyser, comprendre, transformer tout ce qui passe à notre portée en opinions et moyens d’expression. Tout se passe en fait comme si n’importe quel « événement » qui éveille la curiosité du mental devait être immédiatement utilisé et passé au crible de l’activité intellectuelle.
Nous sommes ici en présence de la seconde analogie directe signe/maison, la première étant avec évidence celle du Bélier et de la maison I.  

AIR

"Nuages" par  Olivier, sur Flickr
En septième position, également analogique avec la Balance, l’intellect en mouvement intervient dans l’univers des sensations pour qualifier les choses. Il s’établit alors, dans l’esprit de la personne, des liens qui assemblent, à partir de n’importe quel phénomène extérieur les perceptions (Vierge), les sensations (Balance) et les informations ancrée dans le contenu mémoriel du Taureau.
Ce qui permet d’engendrer une relation subjective existant entre les connaissances existantes et l’objet perçu.
C’est à cette relation que l’esprit va s’attacher pour définir ensuite n’importe quel mode de relation, sur la base de la mémorisation, des connaissances acquises, puis des sentiments et des liens affectifs qui en découlent.

Sur cette base s’élabore (fonction créative du signe d’Air) un concept des relations que nous sommes susceptibles d’entretenir avec le monde. (Maison VII).
L’ego fixe alors ses repères, ses attentes, ses projets (Verseau, onzième signe mais huitième maison).

Les Gémeaux (troisième signe, neuvième maison), comme un petit singe qui n’arrête pas de gambader, se nourrit de ce processus de reconnaissance pour accumuler sans cesse d’autres connaissances en captant tout ce qui passe à sa portée dans l’espace (axe Gémeaux/Sagittaire).

Rien n’interdit non plus à ce stade – sinon un éventuel excès de fixité mentale – de remettre en cause les anciennes croyances pour faire évoluer nos modes de relations.

EAU

"Fifty shades of grey" par Florent Lannoy, sur Flickr
Ce processus ne cesse de nourrir les identifications qui s’accumulent pour qualifier les formes mentales engendrées dans le Capricorne sur l’axe.
Le mental compare : est-ce semblable, est-ce différent de ce qui figure déjà dans notre bol de connaissances ? Si c’est différent, l’émotion dont le siège est dans le Cancer jaillit sous forme de réaction pour éviter toute perturbation dans notre petit monde intérieur (quatrième signe, dixième maison).
A ce stade, les piliers de l’ego (sécurité, pouvoir, image de soi) sont encore fragiles. L’édifice se construit et se perpétue sans cesse dans la peur de la différence entre notre vision du monde et sa réalité. C’est pourquoi les réactions participent à sa fixité dans le Scorpion (huitième signe, onzième maison inversée en carré par rapport à la continuité du zodiaque) en tentant de conjurer les effets de l’impermanence.
Rien n’empêche cependant le courant de nous précipiter dans les Eaux des Poissons où tout devrait mourir si nous n’étions pas dominés par un tel désir de renaître. Ainsi, c’est sur la base des réactions (le R figurant au centre du mot KaRma), que le désir de vivre perpétue cette fantasmagorie de fraction en fraction de seconde dans le Bélier. 

LES JEUX DES PROJECTIONS

"Tibet Mandala" par Max Yuyshin, sur FlickR
Deux axes présentent donc des relations inversées entre signes et maisons. La maison III est marquée par l’activité de Feu en transformation du Sagittaire et la maison IX par la quête de connaissances des Gémeaux.
La création des formes mentales dans le Capricorne nourrit les mécanismes du Cancer, dont le processus continu d’identifications est en analogie avec la maison X. On aurait pu le comprendre directement en constatant que dans le Bouddhisme tibétain, la fonction de base du Cancer est Nama-Rupa : « Ce qui nomme la forme », cette dernière préexistant donc aux manifestations du signe en prenant naissance, dans notre esprit, en Capricorne.Quand aux autres maisons, elles inscrivent deux à deux leurs fonctions en carré dans les signes fixes. Ce carré représente la propension du mental à figer ses acquisitions, constructions, certitudes et croyances diverses, pour assurer à l’ego son sentiment de continuité.Les quatre phases stables de la structure élémentaire, très inertielles, sont donc utilisées pour « bétonner » notre sentiment d’existence et prolonger indéfiniment les manifestations de l’ego.

Même s’il n’existe guère d’écrit dans ce domaine, je pense que les Anciens connaissaient cette articulation entre le zodiaque et l’enchaînement élémentaire. Dans le cas contraire, il serait difficile de comprendre pourquoi les traditions astrologiques du Moyen-âge qui nous sont parvenues (arabes, hébraïques), attribuaient le jaune, couleur de Terre, à la maison IV et le vert, couleur d’Eau à la maison X. Pour sa part, le violet représentant la maison VII est significative de la relation qui se construit entre Balance et Sagittaire, l’expansion du sentiment dans l’espace, gouvernée par Jupiter.
Tout ces projections et transferts d’énergie, représentées au centre du zodiaque par le Tibétains, engendre nécessairement une forme d’irréalité, dans notre esprit. C’est comme si nous regardions le monde avec le mauvais bout de la lorgnette pour en tirer des conclusions et des modes d’emploi reposant sur un ensemble de perspectives faussées à la base 

L’UNIVERS DE LA MAISON III

Nous pouvons envisager maintenant les perspectives de la maison III, sous un angle élargi.

"Learning" par Wally Gobetz, sur FlickR
Statue de A. Cascieri et A. DiBiccari

Parkman Plaza, Boston 
L’insatiable curiosité intellectuelle prêtée aux natifs du signe est dès à présent plus compréhensible. En fait, c’est bien le rapport avec le monde extérieur (maison III/Sagittaire) qui donne naissance à l’activité mentale qui va, à son tour, par le biais de la maison IX (Gémeaux), se mettre en quête de toutes sortes de nourritures intellectuelles. Cela nous permet ensuite d’établir des relations à l’environnement sur la base de la reconnaissance des formes identifiées.
L’interaction est constante, les impressions, décodages et constructions intellectuelles se renvoyant sans cesse des informations sur l’axe, au point qu’elles se confondent dans nos mécanismes relationnels.
Cette gymnastique intellectuelle, même si elle peut être un peu déroutante au départ, permet également de resituer les différentes phases d’apprentissages des enfants dans leur véritable hiérarchie : un enfant s’empare des objets pour le connaître (Sagittaire) bien avant la mise en place de la structure du langage (Gémeaux).

On pouvait par ailleurs se demander, en s’appuyant sur une analogie totale signes/maisons, pourquoi la communication et les échanges attribués aux Gémeaux se situeraient en amont de l’activité mentale en Vierge qui lui donne naissance. La situation est clairement rétablie dans la Roue du Temps où la Vierge en sixième position précède les Gémeaux situés pour leur part à la neuvième étape.

De même, nous savons instinctivement ce que confirme les théoriciens de la psychologie : l’image de soi, attribuée à la maison V se nourrit des expériences et conclusions personnelles de l’enfance. Il est donc nettement plus logique que le Lion vienne en deuxième position et le Taureau en cinquième.
L’important est de ne pas être simplistes dans nos raisonnements, et de considérer que tous ces processus sont interdépendants. Mémoire sensorielle dans le Lion et mémoire des tendances latentes dans le Taureau ne cessent de se renvoyer des informations en carré. Dans un cas, la perception éveille la connaissance de l’objet perçu, dans l’autre cas le fait de penser à un objet particulier en suscite immédiatement l’image dans notre esprit

Apprentissages relationnels de l’enfant

Chez un enfant disposant de l’ensemble de ses facultés mentales et psychiques, tous les instruments d’élaboration de liens mentaux, donc de relation et tous les fondements de la structure intellectuelle existent dès la naissance.
C’est pourquoi, on considère le plus souvent en psychologie que l’enfance n’est qu’un long apprentissage du mode de relation que l’adulte sera susceptible d’établir ultérieurement avec les autres.
Revenons à notre propos. Dans la Roue du Temps, la maison III est donc analogique au Sagittaire (troisième signe de la succession élémentaire) et non pas aux Gémeaux qui vient en neuvième position dans la succession Feu/Terre/Air.
Mercure en maison III, représente l’intelligence, mais est également identifié à l’enfant, dans sa nature innée, puis dans son processus intellectuel de croissance.
Mercure dans cette maison représentera donc la façon dont l’enfant a perçu son environnement extérieur, et à établi une relation entre les objets perçus et lui-même, donc l’a retraduit comme des objets lui appartenant. Si la dualité en jeu dans cette traduction relève bien des Gémeaux (Roue de la Vie), ses manifestations dans l’esprit de l’enfant (Roue du Temps), relèvent pour leur part du Sagittaire : sa façon de s’inscrire dans l’espace extérieur, d’y prendre sa place, de se situer par rapport à…pour établir la différence entre lui-même et les autres.
La capacité d’utiliser consciemment toutes ses ressources personnelles ne s’élabore qu’au fil des années, au gré des apprentissages nécessaires à son éveil sensoriel, mental et psychique. Apprentissages qui, quelque soit le milieu natal, suivent le même itinéraire durant la première année.
De mois en mois, l’enfant semble s’éveiller et développer son approche du monde extérieur, sur le même mode, et sensiblement le même rythme, pour tous les enfants. Bien entendu, le contexte systémique (le milieu natal), peut favoriser ces facteurs d’éveil, mais je mets un parent au défi d’accélérer le processus de manifestations intellectuelles chez un enfant qui gobe les impressions extérieures par le biais d’un Neptune en maison III. Et ils n’auront pas davantage de mérite à voir leur petit génie se précipiter pour prononcer ses premiers mots à 9 mois, et beaucoup d’autres à la suite, si Pluton et Mercure figurent en conjonction dans la maison III aussi bien que dans la maison IX ou en opposition sur l’axe.

"Learning to play the king's game"
par Mike, sur 
FlickR
Durant cette première année, tandis que les fonctions sensorielles, motrices et mentales du bébé se structurent en parallèle, son esprit collecte une multitude d’informations qui viennent s’inscrire dans sa mémoire : formes, sons associés, distance, exploration par le toucher, etc. C’est sur cette base que se construit la conscience des connaissances qui préluderont au développement du langage durant la seconde année de vie. On peut se demander si ce n’est pas à ce stade, non conscient intellectuellement, que les tendances innées inscrites dans le thème natal et qui s’éveillent dans le parcours du Soleil, disposent du maximum de force pour modeler la future structure de la personnalité.

Car à l’évidence, les réactions primaires d’un bébé, sa façon de regarder, d’exprimer ses besoins, de réagir aux sollicitations de son environnement ne ressemblent jamais à celle d’un autre.
Cependant, durant cette période, l’enfant n’établit pas encore consciemment de différence entre lui et les autres. Son environnement lui appartient et il n’a pas assez de mains et de jambes pour explorer son territoire. Pas de surprise, c’est bien de territoire (d’espace) qu’il s’agit dès le départ, et dans cet espace dont il prend conscience, tout lui appartient. Les frères et sœurs autour de lui sont des objets susceptibles de se plier à ses désirs ou de s’y refuser, mais il ne les différencie pas encore en tant que personnes, parce qu’il n’a pas encore atteint la phase de conscience de sa propre différenciation.  

C’est donc à partir de la troisième année (comptez la première année de vie pour 1) que l’enfant entre en phase Gémeaux et que ses processus relationnels vont commencer à s’élaborer et se mettre en place sur l’axe I/VII (moi/l’autre) et III/IX (ma position dans l’espace/ mon expression).
Sur le plan de la maison I/VII, la relation se développera encore pendant de longues années sur la base de la construction de l’image de soi telle qu’elle nous est renvoyée par les autres.
En revanche, la maison III semble nettement plus caractéristique de la relation spécifique séparation/réunion (Gémeaux) et de tous les conflits et jeux de rôles qui vont naître chez l’enfant par sa confrontation avec les réponses de son environnement immédiat.
Le véritable dialogue, celui qui confronte à soi-même, oblige à se définir dans un groupe plus ou moins cohérent ne peut pas cependant pas s’établir avec les parents durant cette phase de croissance. L’enfant en est trop dépendant, aussi bien physiquement qu’affectivement.
C’est pourquoi la recherche de différenciation (je suis moi, rien que moi…) né du besoin de rompre l’état de fusion initial qui perdure durant les deux premières années, va d’abord se jouer sur le mode de l’opposition avec le « différent proche ».
Dans le même temps qu’il s’exerce au « Non » avec ses parents tout en tremblant d’en être rejeté, il entre véritablement en contact avec les enfants de sa génération et teste avec eux les règles de base qui régissent son mini-espace social.

Donc les premiers véritables apprentissages relationnels et les premiers véritables échanges et conflits s’élaborent avec les collatéraux : frères et sœurs, cousins, cousines, et à défaut les enfants de la maternelle ou du voisinage. La seule différence est que la concurrence pour la conquête du territoire (Sagittaire) et de la reconnaissance (Verseau), est nettement plus importante au sein de la famille.
C’est donc dans ce contexte que l’enfant va soit se différencier et s’affirmer en tant que lui, bien lui, et rien que lui, soit se couler dans le moule d’un plus fort que lui, (plus autoritaire, plus beau, plus aimé) dans la fratrie.
Observez un enfant de deux à trois ans, donc en phase de croissance universelle Gémeaux. Le plus clair est qu’il ne partage volontairement ni sa place dans les bras de ses parents ni ses jouets. On ne peut pas les lui prendre sans déclencher un drame, mais il les prêtera ou les donnera de lui-même s’il le désire. La générosité, le désir de partage n’est pas Gémeaux, ce sont des qualités du Sagittaire.
C’est sans doute la raison pour laquelle la plainte la plus fréquente dans les rapports avec la fratrie est le sentiment de ne pas y avoir pas trouvé sa place ou que cette dernière vous a été volée par un petit trublion surgi de nulle part. Et c’est encore pire quand ce voleur, par le jeu de plus en plus fréquent des familles recomposées est un demi-frère ou une demi-sœur à qui une place revient de droit dans le contexte de la maison III. Si on ne veut pas le reconnaître, on peut l’intercepter, mais cela ne l’empêchera pas de jouer un rôle important dans la vie du sujet, dès lors que sa place y est désignée d’avance par les inscriptions natales.
On constatera tout cela avec assez d’évidence dès lors que l’on interroge la projection que l’enfant a pu établir entre sa position dans la fratrie et la définition que le monde extérieur est supposé lui réserver. Et cela, quelle que soit la position de la maison III en signe, même si l’énergie de ce dernier colore de façon plus personnalisée les conclusions que l’enfant a pu en tirer.

Avant toute autre analyse relationnelle dans le thème natal, il est donc important de situer comment l’enfant pouvait se situer dans sa propre maison III. A-t-il éprouvé le sentiment d’être spolié d’un espace qui aurait du lui revenir à part entière (Jupiter R, en particulier), était-il le « vilain petit canard », très fréquemment évoqué avec Uranus R, enfant unique ou qui aurait aimé l’être (Uranus direct associé ou non à Mercure, Vénus ou Mars en aspect), fille « unique », même au milieu d’une flopée de garçons (Uranus-Vénus), remplaçant ou supposé tel (le disparu figure en interception).

Toutes ces définitions a priori du rôle qui nous est imparti (et le rôle est nécessairement jupitérien), n’est pas sans conséquence sur la façon d’élaborer ensuite la relation aux « autres », ceux du dehors, et en particulier ceux qui figurent dans les maisons reliées par aspect à la maison III : trigone implicite avec la maison VII et la maison XI, opposition avec la maison IX, en particulier.

LES AUTRES PARTENAIRES ASSOCIES

Considérons d’abord les premiers partenaires avec lesquels on aurait tendance à associer ceux de la maison III.
Que les aspects formés sont séparatifs (planète lente en maison III) ou appliquants (planète rapide), il semblerait que la maison VII soit toute désignée pour y projeter les conclusions d’enfance sur les futurs relations de couple. Soit par la quête du partage de la même joie de vivre et d’union avec un partenaire élu ou de futurs associés, soit en cas de conflits graves et de mal-être initial sur le mode de la répétition (divorce et séparation) ou de la compensation avec des personnes extérieures au foyer natal (refus absolu de séparation, souffrance devant l’affirmation de la différence de l’autre)  
Or, il semble que sur la base de l’expérience astrologique cette réflexion ne tienne pas la route.

"Ducks Up Close at BBBS Event"
par Terren In Virginia, sur
 FlickR
C’est Sylvie qui a attiré mon attention sur le sujet, en affirmant que dans les faits aussi bien que dans la logique de la Roue du Temps, les projetions implicites entre maison XI et maison III ou III et IX, apparaissaient avec plus d’évidence.

En proposant cette conclusion à d’autres anciens élèves de l’école, notamment Michel Grigis, il s’est dégagé une quasi unanimité sur le sujet.


La recherche de « frères de substitution » avec lesquels continuer les débats enfantins et les confrontations intellectuelles entre pairs de même génération semble effectivement s’orienter de préférence vers les lieux où l’idéal religieux et l’idéal collectif trouvent matière à se développer.
Le couple pour sa part devrait plutôt avoir à souffrir d’une projection trop importante des problèmes issus de la fratrie, ou de la quête d’une compensation affective qui ne corrigera en rien ce qui a pris racine dans le domaine de l’initiation à la différenciation. Le risque est que cette quête de différenciation, entre adulte manquant de maturité, ne conduise au contraire à un pugilat au nom d’une indépendance mal assumée ou d’un refus de subordination, existant souvent dans la fratrie, mais qui ne devrait pas intervenir dans la construction affective d’un couple qui tienne la route dans le temps.

EXERCICE PRATIQUE

Pour sortir de la réflexion théorique, j’ai donc décidé d’ouvrir mes fichiers de clientèle, pour élargir ma vision des choses. Voici ce qu’il en ressort.  

DANS LA RELATION DE COUPLE

Sur un fichier de consultations s’étendant sur 3 années complètes, la relation natale en aspects entre maison III et maison VII, est remarquable par sa faible fréquence.
Même s’il existe une relation de trigone symbolique entre les deux maisons, les aspects dissonants (de carrés à sesquicarrés), induisant une projection négative de III vers VII dominent dans le dossier (il en va de même chez les deux des anciens élèves qui m’ont apporté des informations sur le sujet).
Nombre de personnes présentant une dominante astrale en maison III ne semblent guère intéressées par l’investissement d’un projet en maison VII. Cette dernière est très fréquemment vide, ou marquée par une très forte dominante uranienne. Ce qui laisse supposer que si la relation angulaire III/VII est bien destinée à éprouver sa différenciation et à trouver son autonomie dans la relation à l’autre, l’accession à cette différence est souvent mal comprise. Même lorsque la personne a réussi dans ce contexte à former un couple, les échecs relationnels dominent dans la grande majorité des cas.
En outre, et c’est une chose intéressante à constater, car totalement inattendue, la majorité de ces couples n’a pas eu d’enfant.
Faut-il en conclure que les contentieux non réglés entre frères et sœurs et la prolongation non gérée des conflits fraternels, ou le choix exclusif d’un partenaire extérieur pour essayer de les compenser, n’incitent guère à se reproduire ?
La présence de planètes rapides, Mercure, Vénus ou Mars en maison III incite à renouveler des comportements similaires dans la relation de couple. Au détriment le plus souvent de l’épanouissement de la sexualité. Le sentiment d’inceste existe plus ou moins consciemment. Lorsque la personne recherche, l’âme-sœur, la relation de couple demeure le plus souvent figée dans le registre de la communication verbale et l’union ne tient généralement pas la route dans le temps.
Dès lors où la représentation d’une figure parentale existe en maison III, la personne parle spontanément d’une obligation qui lui a été faite de remplacer le père (Saturne) ou la mère (Lune) auprès de ses frères ou sœurs. Il s’agit d’une confusion des rôles que l’on constate très fréquemment en psychogénéalogie, inscrite ici comme une tendance préexistant à la naissance.

Dans ce cas, la réaction quasi automatique est de prendre en charge le partenaire, y compris parfois matériellement, ou de rejeter tout engagement qui représente dans l’esprit du natif une contrainte implicite qu’il n’a pas envie de renouveler.
On peut avancer une explication sur ces constats répétitifs. Dans le thème, la maison III gouverne par aspects aussi bien séparatifs qu’appliquants les informations astrales de la maison VII. Les conclusions d’enfance ont donc tendance à se projeter massivement sur les futurs partenaires de vie, pour le meilleur et pour le pire. Aussi longtemps que la personne ne se sera pas interrogée sérieusement sur les racines enfantines de ses comportements, elle est en risque de répéter indéfiniment les mêmes scénarios relationnels de refus ou de demande de réparation. Et l’enfant en elle continuera à gouverner ses réactions vis-à-vis de n’importe quel partenaire qui n’appartiendrait au cercle familial.

AVEC LES AUTRES MAISONS COHÉRENTES

Devant la difficulté manifeste d’élargir la relation de la maison III à la maison VII, l’intérêt s’oriente d’emblée sur les deux maisons cohérentes IX et XI.
Maison IX pour l’interaction manifeste sur l’axe.
Dès lors que les deux maisons sont habitées, la personne entre d’emblée dans le jeu, en favorisant en priorité le contexte intellectuel, philosophique ou religieux au détriment de l’attachement affectif. Après tout, il existe des « frères en religion » avec lesquels on ne se prend pas la tête à essayer de résoudre les problèmes émotionnels et les conflits affectifs.
La relation avec la maison XI s’établit pour sa part dans la succession de la Roue du Temps de Verseau à Gémeaux. L’esprit épouse naturellement cette direction en projetant les impressions de maison XI vers la maison III. Dans ce cas, et quelle que soit la relation angulaire, harmonique ou dissonante (trigone ou sesqui-carré), c’est le désir d’appartenance et de reconnaissance qui dominera les choix relationnels. La personne cherchera donc à se différencier par ses qualités intellectuelles, ses modes d’expression, ses œuvres éventuelles.


Il semble donc plus intéressant, dans ce contexte, d’obtenir la reconnaissance associée aux maisons analogiques aux signes d’Air, dans des groupes d’appartenances ou d’auditeurs attentifs, que de la rechercher sur un mode un peu trop intellectuel auprès d’un partenaire de vie qui finira par s’en lasser. Le couple Sartre-Beauvoir est peut-être exemplaire, mais sûrement pas sur le plan de l’amour et ne semble guère reproductible sur la gestion courante d’un couple au quotidien.