D'UN HOROSCOPE SANS HEURE DE NAISSANCE, par Thaï de CHAMPASSAK

Pendant les neuf mois de la vie fœtale, tandis que le Soleil parcourt neuf signes du Zodiaque, la Lune entoure l'embryon d'un serpent magnétique dont la tête et la queue ne bougent que de 15 degrés en moyenne. C'est ainsi qu'elle nous marque mieux que tout astre, selon l'étroit fragment zodiacal qu'ont occupé les Nœuds lunaires pendant notre gestation. Leur position à la naissance indique, non seulement les aspects cosmiques de cet instant, mais ceux qui ont présidé à notre formation, depuis notre conception. L'horoscope des Nœuds lunaires semble serrer de plus près notre sort individuel.  
  

Article paru dans "L'astrologue" n° 30, Éditions traditionnelles 
  
"Dragon Tattoo", par Ddmatt31 sur Flickr
Déployons cette idée que la Lune figure notre condition intime.
Pendant les neuf mois de la vie fœtale, tandis que le Soleil parcourt neuf signes du Zodiaque et ne vivifie qu'un jeu changeant d'images autour de l'embryon, la Lune entoure celui-ci d'un serpent magnétique, dont la tête et la queue ne bougent que de 15 degrés en moyenne.

C'est ainsi qu'elle nous marque mieux que tout astre, selon l'étroit fragment zodiacal qu'ont occupé les Nœuds lunaires pendant notre gestation. Leur position à la naissance indique, non seulement les aspects cosmiques de cet instant, mais ceux qui ont présidé à notre formation, depuis notre conception. Ne signent-ils pas, comme une griffe, notre tempérament, généralement dévolu à la Maison I ? L'horoscope des Nœuds lunaires semble serrer de plus près notre sort individuel...

Considérons ce Soleil qui oriente les horoscopes. Dans sa révolution apparente autour de notre globe, il symbolise en raccourci une destinée humaine. Or n'est-il pas un autre astre qui jouerait aussi bien le même rôle, la Lune? D'autant que, liée à la gestation, à la vie instinctive et à l'inconscient, elle représente un côté de notre existence, et non le moindre !
Plutôt qu'un caractère, ce serait une âme, dont elle résume la vie dans le tour qu'elle accomplit autour de la Terre.

La signature du Dragon

La Lune, notre satellite, dessine une orbite qui perce en deux points l'aire que forme dans l'espace la course du Soleil, autrement dit le plan de l'écliptique. Le point d'où il monte au nord se nomme Nœud ascendant ou Tête de Dragon. Celui d'où il s'enfonce au sud, Nœud descendant ou Queue de Dragon. Ces Nœuds, sont diamétralement opposés sur la roue du Zodiaque.

Que signifient-ils? L'astrologie n'en sait au juste rien. Elle ne précise que ceci : la Tête de Dragon affecte un thème à la façon de Jupiter. La Queue le fait comme Saturne. Là-dessus l'ésotérisme a quelquefois spéculé, sans vraiment mettre en pratique ces données principielles.

Risquons-nous-y et reprenons cette idée que la Lune figure notre condition intime. Pendant les neuf mois de la vie fœtale, tandis que le Soleil parcourt neuf signes du Zodiaque, ne vivifiant qu'un jeu changeant d'images autour de l'embryon, la Lune entoure celui-ci d'un serpent magnétique, dont la tête et la queue ne bougent que d'environ 15 degrés en moyenne. Ainsi nous marque-t-elle mieux que tout astre, selon l'étroit fragment zodiacal qu'ont occupé ses Nœuds. Leur position à la naissance indiquerait alors, non seulement les aspects cosmiques de cet instant, mais ceux qui ont présidé à la formation du natif, depuis qu'il a été conçu. Qui ne voit là que les Nœuds lunaires signent, comme une griffe, le tempérament, dévolu à la Maison I ?

Des deux, lequel choisir comme départ d'une domification ? Sans nous laisser prendre à la formule de «Nœud ascendant", étudions celui-ci : ressortissant à Jupiter, il exprime l'expansion dans l'espace et en société. Le "Nœud descendant" s'apparente à Saturne et traduit la descente dans le moule de la matière, l'inscription dans le temps.

Dans le temps! N'est-ce là ce moment initial qu'un ascendant doit marquer? Il serait ainsi fonctionnel de situer la Queue de Dragon en Maison I. Et Tête en celle qui concerne les rapports avec autrui, la VIIe.

Comme nous manquons de date horaire, force nous est d'adopter la domification égale, où nous poserons, selon un usage de l'Antiquité qui a fait ses preuves, les Nœuds au centre de leurs domiciles. Cette entorse au système de Placidus ne doit pas nous chagriner : elle a de nombreux partisans, surtout en Amérique et en Angleterre.

Il ne restera plus qu'à déployer, dans le sens dextrogyre habituel, les autres cases du Zodiaque. Si notre théorie, avant même de donner des résultats, éclaircissait une des énigmes de l'horoscope, n'en sortirait-elle pas avérée ?

Les Maisons démystifiées

Ne vous êtes-vous jamais étonné de ces Maisons hétéroclites? Sans doute doivent-elles leur bigarrure aux signes zodiacaux dont elles dérivent, mais comment expliquer leurs valeurs en tant que sérielles? Si l'on comprend que le moi relève de la Maison l, pourquoi aussitôt après passe-t-on à ce qu'il possède, en II ; à ses frères et à ses écrits, en III et ainsi de suite? Le plus curieux est que la quatrième partie de la vie se lise au premier quart du thème, en IV ; et que la mort frappe surtout la VIII, au lieu de se trouver en fin de course. Mais passons...

Or les Nœuds m'ont soudain élucidé cette apparence d'arbitraire. Sur le patron de la domification idéale, plaçons dans la Maison l en Bélier la Queue de Dragon qui personnifie le nouveau-né, plein d'ardeur et coléreux comme le bouc.

En VII, la Tête de Dragon signalera ses échanges avec l'entourage, réglés par la Balance.

Tel est le début de la dialectique existentielle entre notre nature et notre personnage, notre atavisme et notre expérience, notre moi et notre surmoi... A partir de là nous aurons à traverser cinq phases d'existence auxquelles correspondent, comme on va le voir, la suite des Maisons. S'il fallait en préciser les dates, pourquoi ne pas choisir pour commun dénominateur le 7, chiffre du rythme physiologique?

Ainsi se compteraient, d'un point de vue vital plutôt que légal :
  • l'enfance, de la naissance à 14 ans
  • l'adolescence, de 14 ans à 28
  • l'âge adulte, de 28 il 42
  • la maturité, de 42 à 56
  • la vieillesse, de 56 à 70 et au-delà...
L'Homme traversera donc ces étapes et le fera, puisque les Nœuds lunaires le représentent, selon leur progression sur le Zodiaque : à l'envers de la giration astrale, dans le sens des aiguilles d'une montre.

Le Nœud descendant, introverti, évolue des Poissons au Scorpion, signes affectés aux saisons les plus ombreuses. Par contre le Nœud ascendant, extraverti, remonte comme il se doit les mois ensoleillés, de la Vierge au Taureau.

ENFANCE : Nouvellement incarné, l'être affronte la vie comme une épreuve et se sent, au regard des limbes dont il sort, en exil, si ce n'est en prison (Maison XII). L'inconscient prédomine et les contacts avec l'en-deçà ne sont pas encore rompus, favorables à la connaissance irrationnelle. A cet état d'âme souffrant et obscur, l'astrologie rattache les variantes connues : maladies, hôpitaux, ennemis secrets...
Mais ce moi désarmé doit faire l'apprentissage humain (Maison VI). Dans les sociétés à l'ancienne, le gamin travaille déjà, il rend des services. De nos jours, il subit le labeur scolaire. C'est aussi l'époque d'une faiblesse organique, propice à des maux aigus; et celle où les animaux sont des confidents privilégiés.

ADOLESCENCE : Le jeune ne vit plus dans l'instant et, tourné vers l'avenir, il fait des projets (Maison XI). Il découvre le charme des amitiés qu'il goûte plus ardemment que par la suite. 11 s'initie à la vie sociale : d'où l'importance des groupes auxquels il s'affilie.
Quittant la neutralité sexuelle, il connaît l'ivresse des premières amours (Maison V). Déjà il s'essaie à procréer, que ce soient œuvres de chair ou d'esprit. Le monde s'offre à lui sous l'apparence des loisirs, du sport, des jeux. Et de là aux jeux de la Bourse... Dans une domification qui ne se veut pas explicative comme la nôtre, l'herméneutique ne manque pas d'extrapoler : elle associe aux enfants les dons pédagogiques.

ÂGE ADULTE : Avec ceux de sa génération, le sujet acquiert à présent un statut (Maison X). Il assume un métier ou une carrière et, dans la mesure de ses moyens, recherche les honneurs. Il agit selon un idéal de soi.
En même temps il fonde un foyer (Maison IV). Il se préoccupe de sa famille, des biens immobiliers, du patrimoine. Devenu père, il s'intéresse à ses pères et en général au passé.

MATURITÉ : Doté d'une large expérience, l'esprit s'interroge sur le sens de la vie. Il en dégage une philosophie personnelle (Maison IX) et l'appuie, le cas échéant, sur des études d'ordre élevé, dont celle du problème religieux. Il peut consacrer ses loisirs plus fréquents à de grands voyages, entrepris afin de connaître l'étranger.
Il est à même de rayonner parmi ses proches et ses frères (Maison III). Ses contacts humains se déploient, réclamant une aide accrue des transports et des écrits. La plénitude qu'il atteint avantage l'exercice de la plume.

VIEILLESSE : Voici le déclin, les maladies graves, la mort (Maison VIII). En faveur de celui qui perdure, la disparition des siens donne la chance d'hériter. Lui-même aux abords de la tombe scrute les arcanes de l'au-delà et parfois cherche à en tirer parti.
Jouissant des possessions qu'un long passé accumule (Maison II), il en assure au mieux la gestion, ne serait-ce que par besoin de sécurité. Dans une économie normale, la fortune appartient aux gens d'un certain âge.
Ces deux Maisons seraient donc terminales. Il est remarquable que l'horoscopie antique les dénomme, la première "Porta superna", la seconde "Porta inferna", en y voyant des seuils à franchir.

À celui que l'occultisme ne rebute point, nous suggérons que le Serpent, après la mort, se mord la queue. Sa tête, passé les tribulations d'ici-bas, parvient à la Maison l, signe d'un nouvel essor digne du Bélier. Sa queue atteint la Maison VII, vue alors comme l'Autre monde où l'on accède après la pesée des âmes sur la Balance du Jugement. Ceux qui croient aux vies antérieures inclineront à penser que l'entité astrale maintient en soi ces deux pôles acquis et qu'elle les réincarne, quand elle retourne au manifesté.

Les deux cosmos

Certes, les Nœuds lunaires explicitent assez bien le rébus des Maisons pour que nous souhaitions d'en généraliser la pratique. Pourquoi ne pas recouper l'horoscope traditionnel par le nôtre, afin d'obtenir une analyse plus fouillée?

En effet, les deux sortes de thème ne font pas double emploi. Il semble que l'un, lié à la Lune et à la fécondité, concerne davantage l'acquis génétique et son devenir, et que l'autre, dépendant du Soleil, exprime des rapports avec l'univers, des mises en situation. Le premier s'applique au microcosme, le second au macrocosme.

Entre ces deux cosmos s'établissent d'incessants échanges, mais lesquels ? Certains astrologues insistent sur les radiations sidérales dont le spectre électromagnétique nous révèle l'effet possible sur notre atmosphère, et sur les cycles naturels qui gouvernent les créatures sous le nom d' "horloges biologiques".
D'autres s'en tiennent au parallélisme entre péripéties astrales et humaines. Ce semblait là un acte de foi jusqu'à ce que C. Jung sût établir sa théorie de la "synchronicité" selon laquelle il existe, à côté de phénomènes causés, des "coïncidences significatives", non dues au hasard mais à l'émergence d'une structure, dont les aspects apparaissent en même temps, sans lien de causalité. S'il ne l'explique pas, il le constate. Ainsi donne-t-il la caution d'un homme de science à la Tradition, pour laquelle l'homme et le ciel sont reliés par une symbolique efficiente.

Quoi qu'il en soit, ne pourrait-on départager les deux classes d'astrologues et préciser, en somme, que le thème lunaire décrit les influences du milieu ambiant tandis que le solaire en reflète les conjonctures.

Le premier devrait alors s'interpréter dans le sens des tendances innées, lignes de force qui donnent à l'individu son armature, encore que susceptibles d'évolution. Il est proprement généthliaque. Comme les Nœuds lunaires s'acheminent à pas lent sur le Zodiaque, ils créent des types par ensembles, mais n'est-ce là une loi de la Nature? D'ailleurs la mouvance des planètes y apporte quelque diversité.

Le second devrait s'attacher au cadre et aux événements qui se proposent au sujet. A l'occasion, il est prévisionnel. Si l'on peut ici déduire d'une allégorie céleste des traits psychiques, c'est par une lecture au second degré, qui n'est pas sans aléas. En contrepartie, puisque le Soleil se déplace assez vite, le thème sera plus personnel. Il gagne en spécificité ce qu'il perd en profondeur.

Le terme de Maison n'a pas le même sens dans les deux thèmes. Dans le solaire, c'est un domaine de la Nature, qui reflète une nature et son comportement. Dans le lunaire, un champ subjectif où s'orientent les dispositions de l'être. La Maison s'apparente ici, toute mystique mise il part, à une "demeure de l'âme".

Si l'horoscope traditionnel, en définitive, donne les meilleurs résultats en astrologie mondiale, celui des Nœuds lunaires semble serrer de plus près le sort individuel. Il n'attend plus que de s'enrichir par l'expérience ou par une découverte!
Désormais ne devrait-on superposer les deux thèmes en question, de manière que coïncident leurs zodiaques, pour une lecture exhaustive? Ce serait ajuster la diachronie de la créature à la synchronie de l'univers. Mieux voir, par le jumelage des Maisons, comment le génétique répond au structurel. Et s'aligner sur les recherches de la philosophie moderne, qui s'interroge sur le paradoxe de cette équation réalisée par toute Forme : le croisement de qualités incompatibles en essence, le Temps et l'Espace.


Marcel PROUST
10 Juillet I871, 23 h 30, Paris
Prenons l'horoscope de Marcel Proust. Cet écrivain se prête opportunément à une analyse par les Nœuds lunaires, c'est-à-dire spectrale, car il fallait un génie comme le sien pour mettre au jour son tréfonds dans une œuvre qui transcende le vécu. Un thème à notre manière devrait déceler ses motivations et sa démarche spirituelle, tandis que le normal en signalerait les circonstances. Voici donc les deux études, à confronter rapidement et sous le seul angle des Maisons. Laquelle parlera mieux?

MAISONS I : Proust a subordonné toute sa vie à un dessein littéraire : décrire son époque sous la forme d'une somme romanesque, "À la recherche du temps perdu".
Dans le thème classique, sans doute Neptune, La Lune et Pluton dépeignent-ils certains aspects de son moi, étrange, imaginatif, parfois démoniaque... Mais ils ne disent rien de ce qui lui importait le plus, sa vocation.
C'est ce que révèle au premier coup d'œil le Nœud descendant avec Saturne dans son orbe : implacable rigueur au service d'un idéal, si exclusif qu'une fois atteint il ne laissait plus qu'un souhait de s'anéantir.
L'Ascendant en Bélier explique les colères du "petit Marcel". Mais comment ce vigoureux signe du Zodiaque s'accorde-t-il avec sa complexion délicate et plutôt langoureuse ?
Maison IV ou maison VIII? Jupiter, Mercure, le Soleil et Uranus soulignent l'importance du foyer pour l'écrivain, encore qu'il n'en ait fondé aucun.
Or, cet amas planétaire devient révélateur quand nous le découvrons en VIII. Car la Mort préside à toute la "Recherche" sous l'aspect du Temps perdu. Mais, en Cancer, signe de la mémoire et du passé, elle sera vaincue par les souvenirs, dont la permanence dans l'inconscient implique un absolu de l'être : "Notre vraie nature", écrit Proust, "est en dehors du temps, faite pour goûter l'éternel." Son roman s'achève sur la consolation du Temps retrouvé.


Domification par l'Ascendant
MAISONS V : L'auteur s'est attaqué, dans son œuvre comme dans sa vie, aux côtés inavouables de l'amour. Rien de tel ne se voit dans une analyse habituelle : aucune planète n'y valorise le Lion, lequel traduirait, d'ailleurs, un épanouissement sexuel au grand jour.
Selon notre procédé, la Lune en Taureau indique le rôle de l'imaginaire dans le plaisir charnel, donc l'érotisme. Neptune en Bélier y ajoute le mystère où se complaît un instinct agressif.

MAISONS VI : On sait que la maladie et le travail obligèrent Proust encore jeune à se cloîtrer. Dans le thème solaire, Vénus ne montre guère l'ascétisme auquel il s'est astreint, ni Mars en Balance l'asthme terrible qui le terrassait.
Par contre, le thème lunaire les remplace par Pluton, qui signale de quelles profondeurs de l'être jaillissait sa création, de même que ses crises, vraies éruptions d'origine névrotique.

MAISONS IX : La "Recherche" sous-entend une sorte de métaphysique, mais elle l'exprime à travers la beauté sensorielle du monde et le chatoiement de la vie sentimentale. C'est moins un ouvrage de philosophe que d'esthète.
Quel astre le dirait mieux, de Saturne comme le veut la méthode courante, ou de Vénus, selon la nôtre?
Domification par les Nœuds lunaires

MAISONS X : Proust a mis tous ses efforts à conquérir les salons de Paris et à s'imposer dans les Lettres. Quand il obtint le prix Goncourt, il connut aussitôt un succès d'envergure. Aussi devrait-on relever quelque accent dans le secteur de la position sociale.
La technique usuelle y assigne un Capricorne sans aucune planète. Et la nôtre une Balance où Mars déploie son énergie en vue de la réussite mondaine et mondiale.

NŒUD ASCENDANT : Le destin de Proust se résume dans le témoignage de la «Recherche», sa raison essentielle de vivre. C'est dire l'importance de la Maison III (ses écrits) et de la V (sa création).
Or les deux restent vides en domification classique. C'est à vous laisser songeur...
Dans la nôtre, il en va autrement : Neptune et la Lune en V définissent les traits d'un enfant émergé d'une mer intérieure et nimbé par la lumière du rêve.'