LE MOMENT D'ASTROLOGIE : RÉTABLIR L'ATTITUDE DIVINATOIRE, par Geoffrey CORNELIUS

Le but de cet essai est de passer en revue une question fondamentale sur l’astrologie, et à travers cette question d’ouvrir une voie de discussion de la nature essentielle de l’astrologie. La question à revoir semble si évidente, si simple à répondre à partir d’une foule de positions connues depuis longtemps, qu’elle est communément négligée. La question, posée provisoirement et en première formulation, est : à quel moment l’effet astrologique se produit-il ? Ce n’est pas du tout évident.



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La perspective divinatoire en Astrologie selon Geoffrey Cornelius, par Kirk Little

L’article d’Oslo  : astrologie et divination, par Geoffrey Cornelius

Le moment d'astrologie :

    Partie 1 : Rétablir l’attitude divinatoire

    Partie 2 : La question soulevée par l’Astrologie Horaire

    Partie 3 : Katarche

    Partie 4 : Le coup d’état métaphysique de l'astrologie natale
  
    Partie 5 : La divination et la fracture sujet/objet

    Partie 6 : L’homme qui a l’œil ouvert

L’astrologie est une divination ? Quelle importance… par Geoffrey Cornelius
 
Les phrases ordinaires qu’on adopte pour discuter de l’astrologie reposent sur des hypothèses implicites non dévoilées. Sauf si elles sont reconnues, ces notions a priori piègent la pensée exactement comme elles déterminent la prochaine étape de la logique. Elles dictent aussi la forme de l’expérience astrologique, fixant des limites à ce qui est imaginé comme possible. Avec de tels pièges, la question est horripilante. Laissons de côté pour le présent le mot "moment", et faisons en sorte qu’il y ait plutôt une expérience authentique que nous nommons astrologie - et qui est en aucun cas aussi facilement démontrable que nous aimerions souvent le croire. On devrait toujours marquer une pause à l’idée d’un "effet", dans la mesure où cela implique une "cause". Même au niveau de cette première étape, la discussion pourrait tomber en proie au mode positiviste qui cherche des chaînes logiques de cause à effet démontrables afin d’expliquer, ou même d’accepter, des phénomènes. Quels que soient les mérites de ce mode dans d’autres domaines de l’activité humaine, il y a peu de preuves qu’il est fructueux en astrologie. Beaucoup d’astrologues ont l’intuition qu’il rate la cible. Comme diverses sciences humaines se sont retrouvées en position défensive face à une réduction positiviste de l’ensemble de l’expérience humaine, il est bon de se méfier avant d’accueillir ses principes dans l’astrologie. Pour cette raison, je proposerai une étape sur la logique de la cause et de l’effet, avant "l’explication" et la théorie. La question devient alors une demande de description adéquate : quel est le moment d'astrologie ?
Notre principale préoccupation est la tradition occidentale de l’horoscopie : le jugement et la prédiction astrologiques, centrés sur le tracé et l’interprétation des horoscopes. Cette tradition s’est développée à partir d’une systématisation grecque d’origine chaldéenne principalement, et a été transmise par la culture romaine, puis islamique dans l’Europe médiévale. Il s’agit d’un lignage ininterrompu de pratique et de théorie jusqu’au renouveau moderne au tournant du XXe siècle.
La première étape est d’établir comment le moment d'astrologie a été défini et décrit par les astrologues. La description est habituellement composée et justifiée par des théories explicatives : je vais séparer ces théories de la description de base. La description commune de l’astrologie s’est développée sur un cadre conceptuel établi à la fin de la période hellénistique, avec l’interpénétration des cultures grecques et du Moyen-Orient dans les premiers siècles avant le Christ. La version définitive de ce cadre est le "Tétrabible" de Ptolémée, écrit au deuxième siècle de notre ère ; c’est pourquoi tous les développements ultérieurs de cette structure conceptuelle peuvent être appelés "la tradition ptolémaïque". Du point de vue de notre question fondamentale, nous verrons que la plus grande partie de l’astrologie horoscopique, même dans ses formes modernes les plus sophistiquées, est ultimement fondée sur ce que Ptolémée a affirmé sur la question.
Bien que cette affirmation soit efficace, elle ne suffit pas à couvrir tous les phénomènes impliqués. L’astrologie horaire sera présentée comme preuve d’une tradition majeure qui est à la fois incompatible avec, et obscurcie par, l’attitude ptolémaïque. En remontant aux origines de l’astrologie horaire, le tout premier substrat de l’astrologie sera démontré, antérieur à la superposition rationnelle grecque. Dans ce substrat, une position très différente apparait dans le "katarche", le précurseur de l’astrologie horaire. L’astrologie katarchique révèle l’origine de l’horoscopie dans la lecture des auspices, et porte en soi une notion implicite tout à fait différente du moment d'astrologie.
La question de la phénoménologie de l’astrologie, la forme de l’expérience de sa pratique, est en corrélation avec cet examen historique. Ceci est abordé en décrivant le moment d'astrologie selon les voies de la divination, telle qu’elle est comprise dans les temps modernes. Cependant, l’identification, que l’on fait parfois, de l’astrologie et de la divination, est vague et approximative : il nous manque une phénoménologie adéquate de la divination elle-même. Il y aura donc d’abord une tentative de description provisoire du moment de l’augure, ou de la divination par des symboles. Ce n’est qu’alors que le moment d'astrologie sera pleinement identifié comme un moment d’acte de divination.
L’étude se terminera par un aperçu de diverses implications de cette identification. Un manteau protecteur a depuis longtemps déguisé l’astrologie : ce manteau s'ouvre pour révéler l’horizon de la divination. Une telle révélation renvoie à une foule de questions difficiles, philosophiques, religieuses et éthiques. Celles-ci exigent notre implication pour que l’astrologie soit maintenue parmi les Arts de l’humanité. C’est le moment pour de telles questions sur l’astrologie.

Le moment d'astrologie dans la tradition ptolémaïque


Ptolémée a eu le don de formuler les lignes fondamentales qui ont permis le développement de la plus grande partie de notre astrologie. Un retour sur sa formulation révélera le point cardinal de référence pour les traitements ultérieurs du "moment d'astrologie".
Pour Ptolémée, et pour la tradition qui en a été l’héritière, la description du moment d'astrologie est complétée par l’explication de la façon dont les effets astrologiques viennent à se produire. Afin de discerner sa réponse à notre question, "quel est le moment d'astrologie ?", nous devons suivre l’explication qu’il offre sur le fonctionnement de l'astrologie. Ptolémée postule un "milieu ambiant", ou éther, imprégné par les cieux et la nature. Les changements dans l’environnement affectent les éléments, le feu et l’air d’abord, puis la terre et l’eau. L’influence du Soleil prévaut dans la production de la qualité générale de l’environnement, à travers les deux cycles, saisonnier et diurne.
L’influence solaire est modifiée par des influences séparées de la Lune, des autres planètes et des étoiles fixes. Par le milieu ambiant intermédiaire, toutes les choses sous le ciel sont affectées par les corps célestes.
Deux ordres d’effet sur le monde sont soigneusement différencies. L’ordre le plus puissant est l’universel, ou général, agissant sur "des régions entières ou des cités" et "des évènements particulièrement graves et récurrents, comme les guerres, les famines, les épidémies de peste, les tremblements de terre ou les inondations". Une autre subdivision de cet effet universel concerne les conditions occasionnelles telles que les "variations de l’intensité des orages, de la canicule, ou encore l’abondance ou la maigreur des récoltes, et autres changements de cette sorte" - Tétrabible II.1, p. 81-82. (1)
Quel est le moment d'astrologie pour cet ordre d’influence universelle ?

"L’analyse des évènements mondiaux adopte de nombreux points de départ, puisque nous n’en avons pas un qui soit unique pour l’ensemble…" - III. 1, p. 128. (2)

Il est clair que par le terme traduit par "point de départ", Ptolémée entend également le sens de "l’origine causale". Ces points de départ de l’effet astrologique sont les diverses configurations célestes, mais surtout "les éclipses les plus complètes et les passages significatifs des planètes".
La connaissance du fonctionnement de cet ordre universel d’influence astrologique permet la possibilité de prédictions à grande échelle, mais ne conduit pas à la prédiction au niveau individuel. Différents individus subiront des circonstances très différentes, quel que soit le sort qui pourrait arriver à l’espèce entière ou à la communauté dont ils font partie. Le prédiction spécifique au niveau des individus est cependant toujours possible à partir de la connaissance du deuxième ordre de l'effet astrologique, le particulier. Les cieux, tout en affectant continuellement et universellement les choses, ont un pouvoir particulier pour marquer leur empreinte sur la formation critique et initiale des plantes, des animaux ou de l'homme. Ptolémée déclare :

"… l'évident corollaire est que non seulement tous les êtres déjà existants sont nécessairement affectés, peu ou prou, par le mouvement des corps célestes, mais que la fécondation et la maturation des semences, elles-aussi, sont nécessairement tributaires à un moment donné, pour le modèle et pour la forme, de la qualité propre du ciel qui tout englobe." - I.2, p. 32.

De cette façon, la configuration céleste a un effet puissant à l’unique moment impressionnable de la graine, l'instant de la fertilisation. Cet effet existe par l'aspect local du ciel, c'est-à-dire par l'endroit à la surface de la terre. La configuration céleste modèle et conforme la graine, et détermine ainsi les caractéristiques individuelles particulières de l'entité dans laquelle la graine poussera, dans les limites des possibilités génétiques et environnementales de cette entité.
L'instant de la fécondation est considéré comme l'origine, causale et temporelle, de l'entité. Ce moment est si décisif dans la formation du caractère astrologique que tous les autres changements de l'environnement qui suivent l'instant d'origine ne peuvent avoir qu'une influence indirecte sur les caractéristiques individuelles, en travaillant sur l'empreinte astrologique établie à la fécondation. Par conséquent, au niveau individuel de l'effet astrologique, tout autre moment est induit par le moment d'origine, et tout autre horoscope est induit par l'horoscope d'origine.
Ptolémée, et la tradition de l'astrologie horoscopique qui le suit, donne la primauté absolue au début temporel, le moment d'origine :

"C’est effectivement une fois pour toutes que la semence reçoit telle ou telle qualité par un don du ciel que tout englobe. Et même si elle se transforme au fur et à mesure de la gestation du fœtus, en n’assimilant au cours de sa croissance que la matière qui lui est naturellement appropriée, elle ressemble davantage encore au caractère même de sa qualité initiale." - III.1, p. 129.

Le modèle donné à la graine est considéré comme le type vers lequel l'individu croît, et vers lequel tous les changements ultérieurs tendent : une idée qui, appliquée à l’horoscope natal, se retrouve dans l'astrologie humaniste la plus moderne.
À travers son deuxième ordre d'influence astrologique, Ptolémée a établi cet instant d'origine comme un "moment d'astrologie". De cette façon, il peut justifier l'interprétation d'un horoscope de conception comme donnant des prédictions significatives concernant le sort de l'entité.
Pour l'homme, comme pour les autres créatures vivantes, l'origine principale est l'instant de la fertilisation de la graine, à la conception : "Quand, soit par hasard, soit à la suite d’une observation, le moment de la conception est connu, on aura intérêt à s’y référer pour déterminer les caractéristiques du corps et de l'âme". - III.1, p. 129.
Cependant, la grande préoccupation de Ptolémée, l’objet complet des troisième et quatrième livres du Tétrabible, c’est l'horoscope de naissance, et non l'horoscope de la conception. Il en est ainsi même si, lorsque la naissance est comparée à la conception, "ce point de départ apparaît secondaire d’un point de vue chronologique" - III.1, p. 129, et il n'est "pas… causatif au sens complet" – III-1, p. 227 dans la traduction anglaise.
Sa justification de l'horoscope natal repose sur les fondements déjà établis pour l'horoscope de la conception. Il fait cette justification en combinant deux arguments logiquement distincts. Dans son premier argument, Ptolémée suggère que la naissance est "encore plus parfaite en potentialités" que la conception :

"
Germinating seed - Common wikimedia

Le nouveau-né, en effet, acquiert alors de nombreuses qualités qu’il n’avait pas dans le ventre de sa mère, et celles-ci appartiennent exclusivement la nature humaine, comme la verticale.
" - III.1, p. 130.

Cette affirmation pivot, dont tant de choses sont dépendantes, n'est pas illustrée ou amplifiée. On en déduit que la naissance est l'origine de l'existence véritablement humaine, par opposition à l'existence purement biologique du fœtus. En outre, c'est l'instant même de la naissance qui est mentionné, et Ptolémée continue ensuite de démontrer la lecture de l'horoscope de cet instant, le natus. L'affirmation de la naissance comme une "origine" de la nature humaine est juxtaposée avec la discussion précédente de l'impact des cieux à l'instant de la fertilisation d'une graine. Ce faisant, Ptolémée induit son lecteur à faire une analogie entre l'instant de fécondation et l'instant de la naissance. La naissance est alors la "graine"de l'existence humaine indépendante. Mais cette analogie est très problématique. Il peut sembler facile d'envisager le deuxième ordre "particulier" de Ptolémée d’une influence astrologique physiquement marquée sur une petite graine. Mais un bébé à la naissance est une créature complexe "déjà composée", et il est difficile d'imaginer une véritable graine de "nature humaine seule", sauf comme une métaphore poétique. L'analogie porte sur un énoncé physique et littéral sur les semences, approprié à l'agriculture et à l'élevage, au commencement d'un ordre tout à fait différent. Cela implique un bond logique considérable.
De nombreux astrologues reconnaissent la métaphore poétique comme la substance même de leur art. Ils ne seront pas décontenancés par un tel bond imaginatif, ils l'accueilleront même très bien. Mais le scientifique en Ptolémée, le démonstrateur de la cause et de l’effet, est gêné par ce hiatus logique. Avant qu'il ne permette que cette première ligne de raisonnement se développe, il la soutient immédiatement avec un argument différent. La deuxième justification de l'horoscope natal est que, quel que soit son statut distinct en tant que moment d'origine, dans tous les cas, le moment de la naissance montrera une correspondance astrologique avec le moment de la conception,

"Une fois la formation du fœtus achevée dans toutes ses parties, la nature provoque la sortie du ventre de la mère dans des conditions d’un type analogue à celles qui modelèrent l’enfant dans le détail au moment initial." - III.2 p. 130.

Bien que Ptolémée ne dise rien de plus pour illustrer cette deuxième affirmation, il a peut-être à l'esprit la "Trutine d'Hermès". Cette doctrine, attribuée aux Égyptiens, postule un échange des positions lunaires et ascendantes entre les horoscopes de la conception et de la naissance. Le fait qu'une telle connexion soit cruciale pour une partie de la justification ptolémaïque de l'astrologie natale a donné du poids à cette doctrine au cours des siècles.
Après avoir suivi jusqu'au bout les arguments soigneusement tissés de Ptolémée, il sera possible de séparer son explication de la façon dont les effets astrologiques sont marqués au niveau individuel de sa description du moment d'astrologie. Il postule l'instant de la fertilisation de la graine comme un moment d'astrologie. Par conséquent, à partir du champ d'application de cet instant, des inférences astrologiques peuvent être tirées pour la destinée de l'entité dans laquelle la graine va croître. La primauté est donnée à la conception et à la naissance en tant que commencements ou moments d'origine causale.
La position de Ptolémée peut être définie comme la "doctrine d'origine". C'est l'hypothèse de l'instant d'origine d'une entité comme un moment d'astrologie, pour lequel un horoscope peut être valablement tracé par rapport à cette entité.
Ptolémée cherche également à expliquer comment l'effet astrologique fonctionne au moment d'origine. Pour ce faire, il établit une explication causale conforme à la physique aristotélicienne de l'époque. En partie littéralement, en partie métaphoriquement, il nous présente l'idée des graines et leur réceptivité postulée aux influences célestes. Nous nommerons cette explication, le "comment" de l'effet astrologique, "l’hypothèse des graines". Ptolémée utilise cette hypothèse pour justifier l'acceptation de la doctrine d’origine.
L'hypothèse des graines, soutenue dans le cas de nativités par un argument secondaire de similitudes entre la conception et la naissance, est à son tour inséparable d'une structure totale de causation astrologique au niveau universel. L'influence astrologique est nécessairement comprise comme marquant toutes les graines sans exception, par la puissance continue et universelle des cieux.
Je crois que la discrimination prudente des parties du modèle ptolémaïque, et en particulier la distinction entre la "doctrine d'origine" et l'hypothèse, ou métaphore, des graines, est essentielle à une étude adéquate du développement ultérieur de l'horoscopie. Notre tradition est ancrée dans l'attitude ptolémaïque.
Comment cette structure théorique se rapporte-t-elle aux règles de l'interprétation de l'horoscope et à le profond langage du symbole qui semble avoir une telle vie par lui-même ? C'est aussi ce que nous connaissons en tant qu'astrologie. Ce vaste sujet ne peut pas être abordé ici. Il suffit pour le présent de remarquer que les modèles explicatifs théoriques fréquemment adoptés modifient l'interprétation et le symbolisme. On recommande au lecteur intéressé d’aller plus loin au sujet de Ptolémée de se référer à la discussion sur la "Ptolemaic Astrology" (L'astrologie ptolémaïque) dans "Encyclopedia of astrology"(Encyclopédie de l’astrologie) de Nicholas de Vore (3).
Malgré l'influence du modèle explicatif sur les détails du symbolisme, les canons d'interprétation pour la vie et le destin d'un individu ne dépendent pas nécessairement de l'explication de la façon dont l'effet astrologique se produit à la conception ou à la naissance. Les règles d'interprétation peuvent exister et existent sans aucune explication rationnelle pour les soutenir ; c'est aussi vrai pour le Tétrabible que pour tout autre manuel astrologique. Prenons la "doctrine des nativités" telle qu’elle est traditionnellement comprise. C'est essentiellement la "doctrine d'origine" définie ci-dessus, appliquée à la naissance, ainsi que toutes les règles d'interprétation particulières et en constante évolution qui permettent des inférences significatives en ce qui concerne la vie du natif. Ces règles sont des articulations ou des expressions de la doctrine d'origine - elles ne l'expliquent pas. Un astrologue peut suivre la méthode, qu'il puisse ou non donner une justification rationnelle pour son fonctionnement, et qu'il accepte ou non une approximation métaphorique de "l’hypothèse des graines" de Ptolémée.
Nous devrions prendre garde à ne pas surestimer la valeur des modèles explicatifs en astrologie. Je doute que Ptolémée ait commencé par des spéculations sur les influences et les graines, pour ensuite travailler à formuler une pratique de l'horoscopie, tout comme je doute qu'il se soit d'abord satisfait de la validité de l'horoscope de conception, puis qu'il soit passé aux nativités. Il est plus probable, mais bien sur non démontrable, que, comme la plupart des astrologues, il a rencontré pour la première fois le symbolisme astrologique et en est venu à "croire" à l’horoscopie natale. Alors seulement aurait pu commencer le processus intellectuel de rationalisation et de justification en termes des principes d’analyse métaphysique qui ont pris l’ascendant à son époque. Son guide en cela est le génie d’Aristote. Même si Ptolémée n’a pas personnellement procédé de cette façon, cela a été l’effet et la contribution de son oeuvre : pour soutenir et justifier une croyance existante. Jusqu’à très récemment, les astrologues ont été presque universellement satisfaits de permettre à sa rationalisation de rester plus ou moins intacte, car elle a sécurisé la position de l’astrologie horoscopique au sein des sciences médiévales.

Il n’est pas surprenant que le Tétrabible a été souvent appelé la Bible de l’astrologie. Quelles que soient les difficultés pouvant exister dans son schéma, les vues de son auteur sur la doctrine d’origine et sur la nature de la causation astrologique ont été acceptées comme des principes de base. Le thème général de son argument est devenu si profondément enraciné qu’il est difficile d’imaginer une description ou une explication radicalement différente du moment d’astrologie. Peu d’astrologues ont retravaillé sa fondation avec un quelconque degré de rigueur ; ses vues sont généralement intégrées à un niveau non pensé, implicite et non déclaré, le supposé fonds de commerce de l’astrologie antique.
Dans la vaste étendue de la pratique ultérieure, il a surgi des opinions contradictoires qui chercheraient à modifier telle ou telle partie de la structure ptolémaïque. Il y a eu des changements substantiels dans les méthodes d’interprétation détaillées, bien qu’il reste une cohérence dans les symboles les plus élémentaires. L’astrologie psychologique moderne a eu tendance à restreindre l’étendue des détails auxquels les significations astrologiques peuvent valablement se référer, en limitant les interprétations à un domaine subjectif et en supprimant ainsi leur revendication directe sur les événements "extérieurs" de la vie.
En outre, sous la pression de différentes philosophies, des révisions ont été apportées à la partie explicative de la structure, l'"hypothèse des semences". De tels changements, associés à des modifications de la méthode détaillée, ont servi à redécorer l’édifice traditionnel pour lui permettre d’exprimer des signes de positions philosophiques bien différentes de celles d’Aristote ou de Ptolémée. Cependant, vus dans le contexte de la question originale concernant "le moment d’astrologie", la plupart des amendements sont tout à fait non essentiels. Ils sont non essentiels parce qu’ils acceptent sans conteste l’injonction de la doctrine d’origine, qui est de traiter le moment d’origine comme le moment d’astrologie. Cette grande doctrine, protégée tout au long de la tradition ultérieure par l’hypothèse explicative des graines, ou une métaphore connexe évoquant cette hypothèse, a permis une puissante continuation de l’astrologie. Le jugement sur le moment d’origine a été un courant continu, le courant central de la pratique horoscopique.

Avec la renaissance de l’astrologie occidentale au cours du siècle dernier, est venu le développement de formes qui semblent aller au-delà de la vision ptolémaïque. Cette apparence est largement illusoire. Le traitement de la question du moment d’astrologie sera revu en trois reformulations significatives. Il s’agit de l’astrologie humaniste, et plus brièvement, des Harmoniques, et de la "néo-astrologie" - cette dernière étant le récent programme de recherche scientifique basé sur une méthode statistique mis au point et lancée par Michel Gauquelin. La tâche ici se limite à illustrer la durabilité des éléments essentiels de la tradition ptolémaïque. Ceci exclura nécessairement de la discussion les contributions interprétatives significatives offertes par ces développements.
Le mouvement majeur que l’on appelle généralement humaniste s’appuie sur plusieurs sources. Il se base sur les travaux antérieurs d’Alan Leo par le déplacement de l’astrologie natale vers une description plus riche du caractère, en ligne avec l’intérêt de ce siècle pour la psychologie. Grâce à l’éminent contributeur de l’astrologie humaniste, Dane Rudhyar, il tire parti d’une philosophie occulte dérivée de l’Hermétisme de la Renaissance et de la Théosophie moderne. En cela aussi il développe une attitude générale déjà trouvée chez Alan Leo. En s’appuyant sur un mouvement parallèle en psychologie, il cherche à élever l’étude de l’homme au-delà des limites du réductionnisme matérialiste. Les astrologues dans cette veine se détournent d’une tradition qu’ils voient comme limitant la considération du destin à des preuves tangibles des événements. Ils cherchent plutôt un symbole céleste de la vie intérieure, psychique. L’horoscope natal devient une matrice inépuisable de potentiels attendant l’éveil de la créativité humaine qui peut les réaliser pleinement. Le grand but de l’astrologie natale est d’aider l’individu cheminant vers cet éveil. Dans cette école, l’astrologie exprime certaines de ses plus nobles possibilités.

Le premier livre de Rudhyar, "L’astrologie de la personnalité", expose le plan de l’astrologie Humaniste. Il rejette l’idée que nous pouvons développer une astrologie significative en utilisant une méthodologie scientifique pour rechercher des "rayons" ou des "ondes" d’influence céleste. Il voit l’astrologie comme un système formel ou symbolique, une "algèbre de la vie" :

"Les révolutions des corps célestes constituent un symbole vaste et complexe qui, par lui-même, se compose uniquement de modèles relationnels cycliques."
Astrologie de la personnalité, ch. 1, p. 52. (4)

Tout comme une barre de mesure n'influence pas ce qu'elle mesure, de même le symbole est sans substance, mais il servira à corréler, à ordonner et à éclairer toute expérience vivante sur laquelle il est cartographié. L'entité mesurée par l'horoscope natal n'est rien de moins que le potentiel total du sens de la vie individuel. Notre mesure commence par "le premier point d'existence indépendante ; le premier souffle dans le cas d’une destinée humaine" - Ibid., ch.1, p. 53. L'idée de l'horoscope en tant que plan directeur de possibilités, proposé au moment de la naissance, est restée centrale dans la pensée de Rudhyar. En 1975, il déclare :

"(L'être humain) est né à un moment particulier et à un endroit particulier car l'harmonie englobante de l'univers dictait qu'une telle solution archétypale à un besoin particulier dans le monde tridimensionnel de l'existence physique devait prendre forme en tant qu'organisme humain. Cette solution archétypale est "codée" dans le langage du ciel comme thème de naissance d'une personne en particulier." (5)

Bien que le langage de Rudhyar soit abstrait et métaphysique, il y a une cohérence essentielle avec la formulation de Ptolémée. Là où Ptolémée voit un ordre universel de l'effet astrologique fonctionnant en continu, Rudhyar voit une "harmonie de l'univers qui englobe tout", également perpétuelle et absolue. Ptolémée ramène l'influence astrologique à l'ordre des effets particuliers spécifiques à l'individu à travers la marque des cieux moulée sur la graine à l'instant de la conception, et secondairement à la naissance. Rudhyar traduit l'harmonie universelle au niveau de l'individu en lui permettant de "dicter" une "solution archétypale", montrée dans le code astrologique à l'instant de la naissance. Dans les deux formulations, le processus est une question de loi cosmique inévitable, travaillant sans exception à l'origine de tous les organismes individuels. Rudhyar adhère donc étroitement à la tradition ptolémaïque dans ses principes les plus fondamentaux : la définition de base de la doctrine d'origine et la relation des origines avec le royaume de l'universel.
Bien que la fondation ptolémaïque ait été laissée intacte, l'astrologie humaniste a repris l'initiative de Rudhyar à transformer toute la superstructure de l'astrologie, en particulier la partie interprétative de la doctrine des nativités. La nouvelle "astrologie centrée sur la personne" a réaligné l'interprétation sur le subjectif, l'expérientiel et le spirituel, en l'éloignant de la prédiction d'événements "externes". Grâce à cela, l'astrologie humaniste se situe au-delà des vénérables problèmes du destin et du libre arbitre, car le plan directeur à la naissance montre un potentiel d'expérience, mais ne délimite pas la manifestation de cette expérience.
Cependant, le fil du traitement ptolémaïque du moment d'astrologie est indéniable, puisque l'individu est encore "destiné" par un modèle particulier de ces potentiels à l'instant de la naissance.
La psychologie de Jung a profondément influencé Rudhyar et, à travers lui, elle a fourni à la récente "astrologie psychologique" une structure d'interprétation prête à l'emploi. Le concept de synchronicité de Jung, un principe de connexion acausale, est entré dans le langage commun des astrologues et est devenu l'une des manœuvres explicatives standard par lesquelles la validité de l'horoscope natal est justifiée. Dans "The astrology of Personality" (Astrologie de la personnalité), Rudhyar cite largement la présentation originale (1930) de la synchronicité. La phrase suivante est devenue une formulation maîtresse, répétée dans d'innombrables conférences et enrichissant même le plus grand nombre de manuels scolaires :

"Nous sommes nés à un moment donné, en un lieu donné, et nous avons, comme les crus célèbres, les qualités de l'an et de la saison qui nous ont vus naître." (6)

La qualité occulte du moment-temps est comprise comme étant exprimée à la fois dans la nature d'un individu né à ce moment-là, et dans l'apparence des cieux au même instant. De cette façon, les cieux n'initient plus "d’effets" astrologiques, ce qui à première vue est une rupture complète avec l'explication ptolémaïque.
Le concept de synchronicité a matériellement aidé l'astrologie humaniste et psychologique à jeter par dessus bord la causation, tout en conservant intacte la doctrine traditionnelle de l'origine. L'interprétation du concept en astrologie est cependant restée superficielle, en partie à cause des propres difficultés non résolues de Jung avec la synchronicité, et de son hésitation sur la question de la nature de l'astrologie. Peu d'astrologues qui répètent la phrase citée ci-dessus semblent conscients que, prise hors du contexte et appliquée à la structure traditionnelle, elle dénature la synchronicité et la remplace par un "synchronisme" prévisible et apparemment objectif des cycles célestes et de l'expérience humaine. Cela ne fait aucune différence pour la mauvaise représentation de savoir si l'expérience humaine est interprétée pour le domaine "intérieur" de la psyché ou le domaine "extérieur" des événements. Laissé sous cette forme, il y a peu de distinction utile entre le "temps qualitatif" et le milieu ambiant de Ptolémée. Jung a lutté sur ce point, et n'est en aucun cas consistant mais il a plus tard rejeté cette expression particulière comme inadéquate (7).
Correctement développé, le concept de synchronicité impliquerait une redescription radicale de toute la structure de l'astrologie, y compris le "moment d'astrologie". Il est capable d'éclairer une voie d'enquête similaire à celle tentée dans cette étude. De même, j'espère que la discussion de l'astrologie entreprise ici pourrait en fin de compte aider à une telle réinterprétation de la synchronicité astrologique. C’est cependant au-delà de la portée de l’actuel essai que de rendre justice au concept, requérant comme il se doit le contexte de la pensée jungienne. Je ne m'inquiète ici que de ce que les astrologues modernes ont fait de la synchronicité, ce qui, dans l'ensemble, est vraiment peu de choses.

Étant donné que l'astrologie humaniste n'est pas sous pression pour fournir une explication littérale de l'effet astrologique, elle est libre de choisir diverses métaphores. Elle n'a pas à nous convaincre de l'impressionnabilité des petites graines, ce qui est une étape nécessaire pour Ptolémée. Cependant, l'omniprésente "hypothèse des graines" perdure parmi les métaphores préférées, remplissant tranquillement son rôle d'octroi à la doctrine d'origine. En tant qu'illustration brève mais caractéristique, il convient de noter son association avec la philosophie du temps cyclique, développée dans "The Astrology of Personality" (Astrologie de la personnalité). Une vie particulière, du premier jusqu’au dernier souffle, est l'un de ces cycles temporels. Rudhyar décrit les points de début des cycles comme des "Moments de semence" (ch. III, p. 107). Il poursuit en décrivant les divisions du cycle et décrit le "début" dans les termes suivants :

"Tout cycle commence par une Unité : une monade... ; c'est la graine en germe, la graine donnant naissance à la racine et à la tige…" (ch. III, p. 107).

Des développements plus récents ont favorisé la discussion sur la façon dont l'astrologie pourrait fonctionner, sans révéler comme une question distincte le moment de ce qui est censé fonctionner. L'approche de John Addey, exprimée à travers le véhicule des "Harmonics" (Harmoniques), s'inspire profondément de certaines des sources philosophiques qui ont nourri l'astrologie humaniste. Ce travail s'est déplacé dans le sens d'une unification du symbolisme et de la technique astrologiques en termes de rythmes, ou harmoniques, des cycles cosmiques. Le projet a l'espoir de former un pont vers la science moderne, car la description de l'astrologie peut être transformée en une forme quantifiable et mathématiquement plus agréable que le mélange arbitraire et inexplicable des planètes, signes, aspects et maisons. John Addey a tenté de démontrer certaines des capacités de sa méthode en réinterprétant les données objectives des Gauquelin en termes d'harmoniques. Un objectif plus lointain nous invite : le point d'union de toutes les voies de connaissance dans l'harmonie numérique de l'Univers. Les Harmoniques permettent à John Addey de proposer la suggestion qui suit quant à la façon dont l'effet astrologique se produit à la naissance :

"Les principaux modèles harmoniques, se formant de façon relativement lente, déterminent l'heure approximative de naissance ; les Harmoniques de plus haute fréquence indiquent d'éventuels moments de naissance appropriés de durée plus courte, mais qui se produisent plus souvent... Ainsi, l'une après l'autre, les serrures à combinaison complexe peuvent s’ouvrir, pour ainsi dire, afin de fournir un moment de naissance qui correspond symboliquement au modèle de la vie à naître." (8)

L'image des graines a ici disparu au profit de la métaphore inhabituelle du verrouillage ou du déverrouillage. De plus, il n'y a maintenant plus de discontinuité entre l'universel et les ordres particuliers de l'effet astrologique, au lieu de cela, il y a un spectre continu de modèles harmoniques à basse ou haute fréquence. Cependant, comme pour l'école humaniste, une harmonie universelle englobant tout est invoquée, l'ancienne conception du Cosmos. En vertu de cela, les cieux ci-dessus et l'homme ci-dessous se déplacent en concordance au moment de la naissance, répondant à certaines nécessités non matérielles et absolues. Comme pour l'école humaniste et de nombreuses autres expressions modernes de l'astrologie, la validité invariable du moment de la naissance a été traitée comme évidente et sans problème, ce qui laisse intact le noyau de la tradition ptolémaïque.
Le succès de l'œuvre de Michel et Françoise Gauquelin a ravivé le faible esprit de positivisme dans le corps de l'astrologie. La possibilité d'une astrologie strictement scientifique basée sur une méthode statistique a été établie de façon probante. Jusqu'à présent, le travail, dans sa totalité, a traité des moments de naissance. En effet, l'ancienne tradition de l'astrologie natale a été reprise, et un certain nombre de revendications ont été soumises au hachoir statistique. Bien que presque tout ce que nous connaissions sur l'astrologie ait disparu dans le processus, l’obtention de résultats significatifs a mené les Gauquelin à la conclusion qu'il existe un noyau empirique dans l'astrologie natale. Déguisée sous les déchets de siècles d'erreur et de superstition réside une perception pré-scientifique d'une corrélation entre les cieux à la naissance et les caractéristiques ultérieures du natif.
Dans les conditions limitées de leur méthode, ils ont établi un effet astrologique au moment de la naissance. Une préoccupation majeure devient nécessairement celle d’offrir à leurs collègues scientifiques une hypothèse sur la façon dont ces corrélations pourraient se produire. L'explication que les Gauquelin ont préféré est une inversion de l'hypothèse de ptolémaïque. Ils suggèrent que l'enfant à naître puisse "sélectionner" l'heure de naissance appropriée :

"L’enfant réagirait à un "indicatif cosmique" auquel son son type héréditaire le porterait à se montrer plus sensible qu’à tout autre." (9)

La constitution biologique peut être héréditaire, d'où l'importance que Michel Gauquelin attache à la démonstration de l'hérédité planétaire, la correspondance entre les positions planifiées dans les horoscopes des parents et des enfants. Gauquelin se réfère à son hypothèse comme la "théorie des planètes accoucheuses" (10). Le mécanisme exact de cette activation de l’accouchement est appelé "effet déclencheur", car une position planétaire dans le cercle diurne pourrait contribuer de manière significative aux conditions qui déclenchent la naissance du fœtus. L'effet semble s’effacer du fait des méthodes d'induction artificielle de la naissance.
Il est raisonnable de s'attendre à ce que cette école d'astrologie finisse par faire face à la question des corrélations planétaires au moment de la conception, bien que les problèmes méthodologiques soient considérables. Si et quand cette étape sera franchie, la forme actuelle de l'astrologie scientifique se révélera inextricablement attachée à la doctrine ptolémaïque d'origine.
En l’occurrence, la tradition que les Gauquelin ont testée a tenu la doctrine d'origine pour acquise. Comme les Gauquelin ont démontré des corrélations cohérentes avec cette doctrine, ils n'ont aucune raison de la remettre en question ; le problème du mécanisme de l'effet devient l'objectif critique de la théorie et de la spéculation. Il semble donc très peu probable que les programmes de recherche qui se développent maintenant dans ce sens aient des raisons de révéler l'identité distincte de la question du moment d'astrologie.
Quel est l'effet probable de ce développement subsidiaire de "l'astrologie scientifique" sur le corps principal de la pratique astrologique ? Il peut y avoir une corrosion de l'interprétation horoscopique, car il y a peu d'espoir de pouvoir utiliser cette recherche pour justifier et rationaliser plus d'un fragment des méthodes traditionnelles. Il est significatif que Gauquelin attaque spécifiquement l'horoscopie (11). Cependant, l'attitude générale de la plus grande part des astrologues, même ceux qui rejettent normalement la méthode scientifique comme non pertinente pour l'astrologie, va très certainement être renforcée dans son acceptation complète de la doctrine d'origine, car les résultats des Gauquelin sont aisément interprétés comme une démonstration scientifique de sa validité. Ils cimentent la vieille doctrine plus solidement fermement encore.

Plusieurs formes représentatives actuelles de la tradition occidentale viennent d’être passées en revue pour déterminer leur attitude face au moment d'astrologie. De là, il est clair que la doctrine d'origine ne se réfère qu'à l'ordre particulier ou individuel de l'effet astrologique. Cette revue n'a pas entièrement couvert le traitement du "moment d'astrologie" dans la tradition ptolémaïque. Par souci d'exhaustivité, l'ordre universel de l'effet nécessite encore un bref examen.
Revenant à Ptolémée, on voit qu'il conçoit un processus continu d'influence céleste, jouant à tout moment sur les affaires terrestres. L'influence est particulièrement efficace à un moment d'origine, ce qui fournit la base des effets individuels manifestés par la doctrine d'origine. Plus tard, l'astrologie n'a jamais oublié son fondement dans l'idée d'une relation universelle et continue de macrocosme et de microcosme - les cieux en haut, la terre et l'homme en bas. Plusieurs applications de l’astrologie fonctionnent directement à partir d'une "correspondance continue", sans la médiation d'un moment d'origine, et suivent ainsi l'approche de Ptolémée telle qu’elle est discutée dans le deuxième livre du Tétrabible.
La correspondance continue implique un "moment continu d'astrologie". Une illustration pure de ceci peut être trouvée en astro-météorologie, qui interprète le changement courant de l'environnement directement pour les conditions météorologiques courantes. L'astrologie mondiale incarne également un "moment continu" avec une interprétation potentiellement continue ; les effets culturels généraux des cycles planétaires et des ères précessionnelles en sont des exemples. De telles interprétations ne nécessitent pas l'horoscope d'origine comme point d'appui à la méthode, bien que le travail en astrologie mondiale s'étende également à l'étude des horoscopes des nations et des dirigeants ; Ptolémée nous dit de prendre en considération l'horoscope fondateur d'une ville (II.5, p. l00).
Il devrait être clair, à partir de tout ce qui a été dit, que l'idée de la correspondance continue n'est pas une base explicative suffisante pour les "transits". Bien que cette méthode permette la possibilité théorique d'une interprétation continue de l'état réel des cieux à tout moment, cette interprétation est renvoyée à un horoscope particulier - généralement un horoscope d'origine. Les transits habituellement utilisés sont ainsi une expression de la doctrine d'origine.

Il faut un effort de pensée et d'imagination avant que la pleine puissance de la structure conceptuelle de Ptolémée ne soit reconnue. Les deux doctrines, d'origine et de moment continu, ainsi que l'hypothèse explicative, forment un modèle magnifiquement intégré puisque le moment d'origine est un instant spécial tiré d'une série continue de moments potentiellement significatifs. L'intégrité de cette structure peut être discernée dans la durabilité de ses principaux composants et dans le fait que les astrologues de tous bords philosophiques l'utilisent naturellement et facilement pour justifier l'astrologie natale. Cette structure a été à son tour intégrée à la perfection de Ptolémée d'une cosmologie dérivée d'Eudoxe et d'Aristote, qui a vêtu les cieux pendant quatorze siècles. Grâce à cela, l'astrologie a été indivisible de ce que nous connaissons maintenant comme astronomie, et a été assuré d’une demeure dans le schéma de la connaissance rationnelle.
La formulation rationnelle de l'horoscopie accomplie par les astrologues grecs a atteint son apogée à travers Ptolémée. Elle a fourni la forme profonde de notre expérience de l'astrologie natale. Elle va si profondément qu’elle est acquise par chaque génération suivante comme une habitude, et ne vaut guère un moment de réflexion. Les écoles modernes qui s'imaginent si loin des anciens astrologues sont perchées sur les larges épaules de Ptolémée.
À travers la gamme complète de l'horoscopie ultérieure, le développement s'est limité à la re-expression du symbolisme et aux modes changeants d'interprétation. Le peu d'enquête philosophique qu'il y a eu a bricolé avec la moins grande part de la "structure ptolémaïque", l'hypothèse explicative. La description fondamentale n'a pas encore été révélée, le "quoi" des phénomènes que cette hypothèse cherche à expliquer. Nous allons maintenant poser la question de l'adéquation de la colonne centrale de la structure ptolémaïque : sa description du moment d'astrologie.

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Notes

  1. Ptolémée, "Tetrabiblos", traduction en anglais F. E. Robbins, dans la Loeb Classical Library N° 435 (Harvard University Press, & Heinemann, 1980). La traduction de Robbins a été suivie tout au long de l’écriture. Les citations en français sont tirées de "Le livre unique de l’astrologie", traduction et commentaires de Pascal Charvet, NiL éditions, Paris, 2000.
  2. Ashmand traduit ce passage comme suit : "En ce qui concerne les événements généraux, les dates d'origine et de commencement sont nombreuses et diverses ; car tous les événements généraux ne peuvent pas être attribués qu’à une seule origine.", p. 71 de la traduction de J. Ashmand, nouvelle édition publiée par W. Foulsham, 1917.
  3.  Nicholas de Vore, "Encyclopedia of Astrology", (Encyclopédie de l'astrologie), publiée pour la première fois par la Philosophical Library, New York, 1947.
  4. Dane Rudhyar, "Astrologie of Personality" (Astrologie de la personnalité). Première édition, Lucis Publishing Co., New York, 1936. Les citations en français sont tirées de "Astrologie de la personnalité", traduction de Gérard Sabian, Librairie de Médicis, 1993.
  5.  Dane Rudhyar, "From Humanistic to a Transpersonal Astrology" (D’une astrologie humaniste à une astrologie transpersonnelle), The Seed Center, Palo Alto, Ca., 1975.
  6.  Carl Jung, "In Memory of Richard Wilhelm" (En mémoire de Richard Wilhelm), discours commémoratif, 10 mai 1930, Munich. Donné comme annexe de "The Secret of the Golden Flower (Le mystère de la fleur d’or), traduction de Richard Wilhelm, Routledge & Paul Kegan, 1962, p. 142. La référence est également dans "Jung collected works" (recueil des œuvres de Jung), Vol. 15. Le matériel est largement cité dans le chapitre II de "Astrologie de la personnalité" de Rudhyar.
  7.  Carl Jung, "Lettre à André Barbault", 26 mai 1954. Voir "Letters" (Lettres), Vol 2, 1951-1961, publ. Routledge & Kegan Paul, Londres, 1976. L’astrologue français avait envoyé à Jung une liste de questions sur l'astrologie, dans laquelle il mentionne "temps qualifié". Cette lettre a été notamment publiée dans le numéro 8 de la revue "L’astrologue" en 1968 et sur De Sphæris.
  8.  John Addey, "Harmonics in Astrology" (Les harmoniques en astrologie), L. N. Fowler & Co., 1976. Voir p. 234.
  9.  Michel Gauquelin, "La cosmo-psychologie", Denoël, 1974, p. 56.
  10.  Michel Gauquelin, "La vérité sur l’astrologie ", Éditions du Rocher, 1985. Voir ch. 7, p. 266.
  11.  Gauquelin ibid., en particulier le chapitre VI "Où l’horoscope déçoit ", p. 232-258.

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